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TROTTOIR, subst. masc.
A. −
1. Passage surélevé établi pour la circulation des piétons d'un (ou des deux) côté(s) d'une rue, d'un pont, d'un quai, comprenant une bordure et une banquette dallée, bitumée ou asphaltée, et dont la hauteur et la largeur sont habituellement réglementées. Par les rues bitumées et sur les dalles des trottoirs, coulait incessamment le fleuve des hommes sous la lumière blanche des appareils électriques (Bloy, Journal, 1899, p. 307).En 1787, Paris n'avait pas de trottoir pavé pour les piétons, si bien qu'à la moindre averse toute marche dans la rue devenait infiniment désagréable aux hommes et impossible pour une femme élégante (Lowie, Anthropol. cult., trad. par E. Métraux, 1936, p. 124).
SYNT. Étroit, grand, large, petit trottoir; trottoir boueux, dallé, désert, humide, luisant, ombragé, pavé; trottoir opposé; au coin, au ras, le long du trottoir; contre le trottoir; d'un trottoir à l'autre; trottoir de gauche, de droite, d'en face; trottoir d'une avenue, d'une place, d'un pont, d'un quai, d'une rue; trottoirs de Paris; trottoir d'asphalte, de brique, de pierre, de planches; angle, bord, bordure du trottoir; route, rue bordée de trottoirs, sans trottoirs; attendre, marcher, monter, rester sur le trottoir; arpenter, balayer, encombrer, suivre le trottoir; changer de trottoir.
Locutions
Battre le trottoir. Arpenter le trottoir dans l'attente de quelque chose ou de quelqu'un. À l'instant même, elle arrivait peut-être dans la rue. Il s'y jeta. Personne! Et il se remit à battre le trottoir (Flaub., Éduc. sent., t. 2, 1869, p. 98).
Marchand du trottoir. Synon. de camelot.On entendait des cris d'enfants (...) et la voix de quelque petit marchand du trottoir traînant sa charrette à moitié vide (A. Daudet, Fromont jeune, 1874, p. 171).
Trottoir roulant. Synon. vieilli de tapis* roulant.De huit heures du matin à onze heures du soir (...) le trottoir - le trottoir roulant! - se mit à charrier devant mes fenêtres des flots de multitude entassée: hommes, femmes, bonnes d'enfants et soldats (Courteline, Article 330, 1900, p. 271).P. métaph. Il n'est pas possible à quiconque est un jour monté sur ce grand Trottoir roulant que sont les pages de Flaubert, au défilement continu, monotone, morne, indéfini, de méconnaître qu'elles sont sans précédent dans la littérature (Proust, Chron., 1922, p. 194).
2. P. anal.
a) Bord d'un objet évoquant l'aspect d'un trottoir. Ses forts souliers dont la semelle débordait et formait trottoir (Arène, Veine argile, 1896, p. 190).Les enfants mordaient dans leurs tartines à trottoirs: sans beurre sur les bords (Hamp, Champagne, 1909, p. 85).
b) GÉOL. Banquette d'érosion faisant saillie au pied d'une falaise. (Ds Géomorphol. 1979, George 1984). Devant vous, formant avec lui un angle parfait de 90 degrés, un large trottoir d'un mètre, en beau granit compact, monte tout droit (La Montagne, janv.-févr. 1951, p. 18 ds Quem. DDL t. 27).
B. − [Le trottoir considéré comme symb.]
1. [Symb. de pauvreté, de misère, de déchéance sociale ou morale, fonctionne comme un substitut de rue ou de pavé] Elle, enfant des trottoirs de Paris (...), hardie (...) comme ces filles du peuple qui montent aux barricades par simple crânerie (Maupass., Contes et nouv., t. 2, Champ d'oliv., 1890, p. 77).Ils virent (...) ce Paris féminin et pervers, où le trottoir est aux filles et aux rois sans royaume, où toutes les déchéances coudoient toutes les fortunes (Estaunié, Empreinte, 1896, p. 130).
Loc. Jeter au trottoir. Jeter à la rue. Et maintenant voilà qu'il la jetait au trottoir, qu'il ne voulait même pas lui donner la clef (Zola, Travail, t. 1, 1901, p. 39).
2. [Symb. de trivialités, d'usages vulg.] Toutes deux commencèrent à s'injurier en dévotes espagnoles, mêlant le démon et l'enfer à des invectives de trottoir (A. Daudet, Sapho, 1884, p. 171):
Tel poète obscur, tel peintre qui veut réussir à Bucarest ou à Séville, doit nécessairement, dans l'état actuel du Vieux Continent, avoir fait un peu de service militaire à la Rotonde ou à la Coupole, deux académies de trottoir où s'enseigne la vie de Bohème, le mépris du bourgeois, l'humour et la soulographie. Fargue, Piéton Paris, 1939, p. 149.
En partic. [Symb. des affaires louches, des magouilles] C'était l'amour triomphant, ce Saccard, ce bandit du trottoir financier (Zola, Argent, 1891, p. 245).Derrière lui [Malandrin] comme son ombre, son rusé compère Falempin l'homme de main prêt à tout, un matamore du trottoir, parlant un argot savoureux, et spécialisé dans les plus louches besognes (Martin du G., Souv. autobriogr., 1955, p. lxxviii).
Arg. de théâtre. [Fonctionne dans certains cas comme substitut de boulevard]
Grand trottoir. Répertoire classique. J'ai rempli quarante ans, sans qu'on y trouvât à dire, tous les rôles du grand trottoir, à Périgueux, Cahors, Briançon, Quimper, Vire (La Correctionnelle, [18]40 ds Larchey, Dict. hist. arg., 2eSuppl., 1883, p. 158).
Petit trottoir. Répertoire courant, comédies et vaudevilles. (Ds Delvau 1867, France 1907).
3. [Symb. de la prostitution] Elle regrettait cette vie galante et bohème du trottoir parisien, faite de privations et de caresses payées (Maupass., Contes et nouv., t. 1, Ça ira, 1885, p. 1290).Nous devons à Ibsen deux formules (...): « vivre sa vie » et « en beauté ». La première menait les femmes faibles au trottoir ou chez la proxénète. La seconde légitimait toutes les loufoqueries (L. Daudet, Entre-deux-guerres, 1915, p. 191).
Loc. et expr.
Fille, femme du trottoir. Racoleuse, prostituée. Il venait justement de me raconter ses dégoûts à propos d'une fille du trottoir, chez laquelle il était monté et qui avait ôté une moitié de ses cheveux et de ses dents (Goncourt, Journal, 1889, p. 1014).Des femmes du trottoir, boudinées et les cheveux beurrés, l'œil peint (Aragon, Beaux quart., 1936, p. 353).
Racolage, raccrochage de trottoir. Prostitution. Guys n'a vraiment qu'une valeur, c'est d'être le peintre de la basse putain dans le raccrochage du trottoir (Goncourt, Journal, 1895, p. 778).
Faire le trottoir. Racoler sur la voie publique. Synon. faire le tapin *, faire (de) la retape*.Une fille qui fait le trottoir est une pauvre femme, mais n'oublions pas que c'est aussi une grue (Renard, Journal, 1901, p. 702).C'était une brave petite prostituée, et elle n'a jamais essayé de monter en grade. Elle a vécu trente ans en carte, à faire le trottoir entre la Madeleine et la rue Drouot (Martin du G., Thib., Pénitenc., 1922, p. 839).Var. Être sur le trottoir. Eh bien, monsieur, dit Hulot (...) cette femme, c'est le libertinage en coupes réglées, je suis certain maintenant qu'elle a trois amants!(...) Ah! elles ne sont pas toutes sur le trottoir (Balzac, Cous. Bette, 1846, p. 268).
Jeter, mettre au trottoir. Obliger quelqu'un à se prostituer. L'année prochaine, un nègre de la place Pigalle l'enlèvera à sa cousine pour la jeter au trottoir (Aymé, Passe-mur., 1943, p. 118).On dirait qu'ils ont un mec, qui les met sur le trottoir, et les surveille, sans rien faire (Giraudoux, Folle, 1944, i, p. 83).
Prononc. et Orth.: [tʀ ɔtwa:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) 1577 au fig. être sur le trottouer « être en vue, être sur le devant de la scène » (Vigenère, trad. de N. Chalcondyle, Hist. de la decadence de l'empire grec d'apr. Le Grand dict. fr.-lat., Genève, J. Stoer, 1625); b) av. 1592 se jeter sur le trottoir « se mettre en évidence » (Montaigne, Essais, II, 6, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, p. 378); c) 1660 « piste où les maquignons font trotter les chevaux » (Duez, Dict. ital. et fr., s.v. trottiera d'apr. Rob.); d) 1694 en parlant d'une fille être sur le trottoir « être en âge, en situation de se marier » (Ac.); e) arg. du théâtre 1840 le grand trottoir « le répertoire classique » (La Correctionnelle, loc. cit.); 1866 le petit trottoir « les drames et les vaudevilles » (d'apr. Esn.); 2. a) 1782 « espace surélevé réservé à la circulation des piétons, sur les côtés d'une rue » (Mercier, Tabl. Paris, t. 1, p. 118); 1900 trottoir roulant (L'Illustration, 16 juin, p. 388b ds Quem. DDL t. 10); b) 1852 faire le trottoir (H. Meding, Paris médical, p. 127, ibid., t. 14); 1867 le trottoir « le monde de la prostitution » (Delvau, p. 398). Dér. de trotter*; suff. -oir*. Au sens 2 a, les premiers ex. sûrs se trouvent chez Mercier, loc. cit. Fréq. abs. littér.: 1 984. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 274, b) 3 905; xxes.: a) 4 021, b) 3 692. Bbg. Quem. DDL t. 14, 27.