| TRICOTER1, verbe I. − Empl. trans. A. − Qqn tricote qqc. 1. [L'obj. désigne un ouvrage, un vêtement] Exécuter (quelque chose) à la main ou à la machine, en constituant un tissu formé de mailles. Séverine aimait beaucoup son père. Elle et sa fille ne laissaient à personne le soin de faire son linge; elles lui tricotaient des bas pour l'hiver (Balzac, Député d'Arcis, 1847, p. 246).Il allait le jeudi à l'hôpital du couvent Sainte-Madeleine voir les blessés fabriquer du macramé et tricoter des cache-nez (Nizan, Conspir., 1938, p. 27). − Empl. pronom. à sens passif. Le pull se tricote en jersey endroit et le motif central est en jacquard (100 idées, sept. 1984, p. 60). 2. [L'obj. désigne une matière, une fibre textile] Transformer (quelque chose) en tissu formé de mailles. Mélanie, au coin de la cheminée, dans un haut fauteuil de bois blanc grossièrement paillé, tricotait de la laine bleue (A. France, Pt Pierre, 1918, p. 239). ♦ P. métaph. Je mènerais le genre humain rondement, je tricoterais les faits maille à maille sans casser le fil (Hugo, Misér., t. 2, 1862, p. 320).Le soleil tricote des nuages roses avec ses rayons (Renard, Journal, 1909, p. 1259). − Part. passé en empl. adj. Les cottes de mailles (...) ne sont pas de vraies cottes de mailles (...). Alyette Samazeuilh a imaginé de les fabriquer en lacet tricoté (Serrière, T.N.P., 1959, p. 120). B. − Qqn tricote.Exécuter, à la main ou à la machine, un ouvrage tissé en mailles. Tricoter lâche, serré; apprendre à, savoir tricoter. Il commença de sommeiller, tandis que la marquise, MlleLargeyx et la religieuse tricotaient sans rien laisser deviner de leur pensée (Bourget, Disciple, 1889, p. 144).Il faut attendre que l'hiver passe et puis ce qu'il y a de froid dans le printemps. Alors on lit on tricote on cause on court dans le jardin (Queneau, Loin Rueil, 1944, p. 221). ♦ [Avec un compl. d'obj. interne] Sur l'endroit du travail, tricotez toutes les mailles à l'endroit (100 idées, avr. 1982, p. 98).V. point1VII C 4 ex. du Gd Livre du tricot. − Aiguille à tricoter. Aiguille sur laquelle on forme avec le fil textile, les mailles qui constituent le tricot. Il lui a donné un écheveau de grosse laine et des aiguilles à tricoter pour se faire des bas (A. France, Lys rouge, 1894, p. 33).Laine, fil, coton à tricoter. Laine, fil, coton utilisés pour réaliser un tricot. Ces modèles sont réalisés en fil à tricoter la Droguerie (100 idées, janv. 1986, p. 88).Machine à tricoter. Machine qui permet de réaliser rapidement un tricot tout à fait semblable à celui réalisé à la main. La machine à tricoter « Évolutive » est très simple: une rangée d'aiguilles, un chariot, quelques accessoires. Elle vous permet de réaliser, tout de suite les tricots dont vous rêvez: jersey, points-fantaisie, jacquards, effets de tissage (Elle, 13 sept. 1976, p. 103).Métier à tricoter. Métier qui permet la réalisation rapide et sur de grandes dimensions d'un tissu formé de mailles. La comtesse de Clérambard, sa mère Mmede Léré, son fils Octave sont assis chacun devant un métier à tricoter et travaillent (Aymé, Cléramb., 1950, I, 1, p. 11). II. − Empl. intrans. A. − Familier 1. Marcher, courir, danser, en remuant beaucoup les jambes. Je tricotais péniblement pour le suivre, mon ombre courte avait peine à garder le contact avec ses talons (Arnoux, Calendr. Fl., 1946, p. 155).Nous n'avons plus de chevaux. Il nous faudra tricoter dur (...). Aller à pied n'est pas du tout la même chose qu'aller à cheval (Giono, Hussard, 1951, p. 1321). − [Avec un compl. d'obj. interne] Tricoter des jambes. Leurs cavaliers [des danseuses] bondissaient, tricotaient des pieds, s'agitaient, les bras remués et soulevés comme des moignons d'ailes sans plumes (Maupass., Contes et nouv., t. 2, Masque, 1889, p. 1160).V. pincette A 2 ex. de Méténier.Tricoter des gambettes. V. gambette1. ♦ [P. méton.] Dès deux heures, étaient survenus les gendarmes de Lerrains, tricotant des bottes sur leurs hautes bicyclettes noires (H. Bazin, Tête contre murs, 1949, p. 257). ♦ P. anal. Jamais aucun artiste n'avait mieux tricoté des poignets (Cladel, Ompdrailles, 1879, p. 66). 2. [Le suj. désigne un préposé des P.T.T.] Passer d'un trottoir à un autre pour porter le courrier. (Ds Lar. Lang. fr., Rob. 1985). B. − CYCL. Pédaler rapidement sur un petit développement. [Il] est parti avec un trop petit développement, et il tricote éperdument pour suivre le train sévère que, par moments, lui infligent ses adversaires (La Pédale, 5 oct. 1927, p. 15, col. 2). C. − [En parlant d'un cheval] Croiser les pieds en marche ou les poser successivement l'un devant l'autre (d'apr. St-Riquier-Delp. 1975). Le cheval peinait aux montées, trébuchait aux descentes et tricotait affreusement en terrain plat (Gide, Isabelle, 1911, p. 605). REM. Tricotement, subst. masc.,hapax. Le pauvre cheval a le tricotement sec et les os durs (Vallès, J. Vingtras, Enf., 1879, p. 24). Prononc. et Orth.: [tʀikɔte], (il) tricote [-kɔt]. Homon. tricoter2. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. Mil. xves. « courir, sauter » (Banquet du boys, Poésies fr. des XVeet XVIes., X, 219 ds Gdf.); 2. 1677 (d'un cheval) « faire des mouvements de jambes très rapides, mais sans ampleur » (Solleysel, Nouv. méthode pour dresser les chevaux, p. 231); 3. a) av. 1741 « remuer vivement les jambes ou les pattes pour courir, danser, etc. » (J.-B. Rousseau, Allég., I, 2 ds Littré); b) 1819 tricoter des jambes (L. Balzac, let. in Balzac, Corresp., I, p. 56 ds Quem. DDL t. 34); c) 1891 « pédaler vivement à bicyclette » (Le Cycliste, avr. ds Petiot); d) 1950 (en parlant d'un facteur) « aller d'un trottoir à l'autre pour desservir une rue » (d'apr. Esn.). B. 1. Fin du xvies. « exécuter un ouvrage en mailles entrelacées, avec des aiguilles spéciales » (Christophe de Bordeaux, Chambrière à louer ds Rec. de poésies fr. des XVeet XVIes., éd. A. de Montaiglon, t. 1, p. 101); 2. 1611 intrans. (Cotgr.). Dér. de tricot2*; dés. -er. Les jambes, puis les aiguilles à tricoter, ont été comparées à des bâtons que l'on agite (A, B). Au sens B, tricoter a remplacé l'anc. verbe brocher. Fréq. abs. littér.: 379. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 172, b) 578; xxes.: a) 627, b) 773. DÉR. Tricotage, subst. masc.a) [Corresp. à supra I] Action, manière de tricoter; résultat de cette action. Tricotage serré, régulier. Le matériel de tricotage où le poil est amené soit sous forme de fil (métiers circulaires à bouclettes dans lesquels la bouclette est coupée sur le métier par un dispositif spécial. La touffe de poils est liée solidement au fond par le tricotage), soit sous forme de ruban de carde (Thiébaut, Fabric. tissus, 1961, p. 111).P. métaph. Telle main, vue de près, n'est plus qu'un tricotage de coups de pinceaux (Huyghe, Dialog. avec visible, 1955, p. 203).b) Synon. rare de tricot1(v. ce mot B).Le tout-petit qui suçait son pouce avec conviction. Tout enveloppé de tricotages, vous savez de cette espèce qui forme des chevrons séparés par des jours (Aragon, Beaux quart., 1936, p. 244).c) [Corresp. à supra II A] Action de tricoter. D'autres [soldats], à toutes jambes surgissent, mécaniques, le fusil horizontal, dans un tricotage de pantalons rouges (La Varende, Man' d'Arc, 1939, p. 308).− [tʀikɔta:ʒ]. Att. ds Ac. dep. 1694. − 1resattest. a) av. 1573 « commerce amoureux (?); balivernes (?) » (Jodelle, L'Eugène, I, 1 ds
Œuvres, éd. Ch. Marty-Laveaux, t. 1, p. 20), b) α) 1677 (d'un cheval) « mouvements de jambes très rapides, mais sans ampleur » (Solleysel, op. cit., p. 231),
β) 1876 « action de remuer vivement les jambes » (Lar. 19e), c) 1680 « action de tricoter » (Rich.); de tricoter1, suff. -age*. BBG. − Gary-Prieur (M.-N.). Contribution à l'ét. de qq. règles sém.: les verbes dér. de n. Thèse, Paris VIII, 1979, t. 2, p. 630. − Posner (R.). Lexical gaps... Mél. Ullmann (S.). Leeds, 1981, p. 131. − Quem. DDL t. 5, 28. |