| TENIR, verbe 1reSection. Empl. trans. et intrans. I. − Empl. trans. Disposer de quelqu'un, être en possession de quelque chose, être en état de garder cette chose. A. − Avoir (entre les mains, à sa disposition). 1. Qqn (ou un animal, un organe de préhension) tient qqn (ou un animal)/qqc.Garder (dans un/des organe(s) de préhension) de manière à ne pas laisser s'échapper, en vue de prendre appui, etc. Anton. lâcher1.Il reste là, indifférent, voûté, tenant son verre qu'il porte de temps à autre à ses lèvres (Dabit, Hôtel Nord, 1929, p. 77). SYNT. Tenir le(s) bras de qqn, son chapeau, la/les clef(s), un objet, un enfant, un livre, la/les main(s) de qqn (dans la/les sienne(s)); tenir qqn, qqc. dans ses bras, entre ses mains; tenir qqn par la main; tenir qqc. à la main, dans sa/ses mains(s), d'une main, à pleine(s) main(s). − Loc. Tenir qqc. à bout* de bras. Tenir (bien) en main(s)* qqc. ou qqn. − [Avec compl. désignant une partie du corps] ♦ Fam. Je te tiens par la barbichette (paroles d'une chanson enfantine accompagnant un jeu traditionnel). ♦ Empl. pronom. réfl. indir. et réciproque. Se tenir les côtes, les coudes, le ventre. Il se tenait la bouille à deux mains (Céline, Mort à crédit, 1936, p. 466).V. estomac C 1 ex. de France. − Empl. abs. On s'est mis à deux pour la grande volée: un qui tient, un qui cogne. C'est plus vite fait que d'écrire à l'inspecteur de l'Assistance (Hamp, Champagne, 1909, p. 88). − Empl. pronom. réfl. Paulina, qui se tenait elle-même à la gorge avec tant de violence, se sentit dégagée un peu, et respira (Jouve, Paulina, 1925, p. 144). − Empl. pronom. réciproque. Avec l'exubérance de chiens qui se flairent, ils ont échangé des bourrades, se tenant par les épaules et s'appelant « président » (Mauriac, Journal 2, 1937, p. 184). ♦ Se tenir de près. [En parlant de deux ou plusieurs concurrents, dans une épreuve sportive] Être très proches l'un de l'autre, les uns des autres (d'apr. Lar. Lang. fr.). − Tenir un enfant sur les fonts*. [Avec effacement du compl. de lieu] MmeDelelée ne demanderait pas mieux que de tenir [comme marraine] l'enfant d'un compagnon d'armes de son mari (MmeV. Hugo, Hugo, 1863, p. 15). − [Le compl. désigne un outil, un instrument, etc.] Avoir un outil, un instrument à la main pour s'en servir comme il convient. Tenir les rênes. Sa grosse distraction était, chaque fois que le train se garait pour en laisser passer un autre, d'aller retrouver en tête Bébert qui tenait les guides (Zola, Germinal, 1885, p. 1294).Tenir la plume*. Tenir le volant. V. volant2. ♦ Au fig. Tenir les commandes (d'un pays, d'une entreprise). V. commande II C 2 ex. de Thibaudet. − SPORTS. [Basket] Ballon tenu. Ballon ,,nettement immobilisé par deux joueurs qui se le disputent`` (Petiot 1982); ballon tenu pendant plus de cinq secondes sans être joué par un joueur marqué par un adversaire (d'apr. Petiot 1982). [Volley] Le ballon doit être nettement frappé. S'il est accompagné, soulevé, poussé, porté, il sera considéré comme balle tenue (Féd. Franç. Volley-ball, Règles, 1951ds Petiot 1982). − Empl. pronom. à sens passif. Des ressorts de montre, de petites pendules, de vieilles lancettes, servent communément de lames à l'ouvrier. La pointe se tient à peu près comme une plume à écrire (Nosban, Manuel menuisier, t. 2, 1857, p. 153). − Proverbe, vx. Cet homme tient bien ce qu'il tient. ,,Il n'est pas aisé de lui faire quitter prise; ou bien: Il est avare`` (Ac. 1835). − P. métaph. ou au fig. Les savants et les techniciens étaient en train de fabriquer des bombes, des anti-bombes, des super-bombes, c'étaient eux qui tenaient l'avenir dans leurs mains. Un joyeux avenir! (Beauvoir, Mandarins, 1954, p. 229). ♦ Empl. pronom. réciproque. Se tenir par la main; se tenir entre soi. Faire preuve de solidarité. « Il va falloir beaucoup l'entourer », répétait ta mère. « Heureusement que nous sommes une famille où l'on se tient les uns les autres. Il ne faut pas laisser seule cette petite » (Mauriac, Nœud vip., 1932, p. 121). − Loc. verb. fig. ♦ [Le compl. d'obj. dir. désigne une pers.] Tenir qqn au cul et aux chausses. V. chausse.Tenir qqn au filet. V. filet1.Tenir qqn à quatre*. Tenir qqn dans sa manche. V. manche2I A.Tenir qqn de court. V. court1.Tenir qqn en lisière(s)*. ♦ Se tenir de près. [En parlant de deux ou plusieurs concurrents, dans une compétition autre que sportive] Obtenir des résultats à peu près équivalents. Deux candidats qui se tiennent de près, difficiles à départager (GDEL). ♦ [Le compl. d'obj. dir. désigne un animal] Tenir un cheval par la bride*. Tenir le loup* par les oreilles. ♦ [Le compl. d'obj. dir. désigne un inanimé] Tenir le bon bout*. Tenir les cartes. V. carte II A 1 c.Tenir le chandelier, la chandelle*. Tenir la corde*. Tenir les cordons de la bourse. V. bourse1.Tenir le crachoir*. Tenir le(s) dé(s)*. Tenir à qqn l'épée* dans les/aux reins. Tenir l'épée* à la gorge de qqn. Tenir l'étrier* à qqn. Tenir ferme qqc. V. ferme1II A.Tenir les fils (d'une affaire). V. fil.Tenir la haute main sur/dans qqc. V. haut1.Tenir la main* à (un cheval). Tenir la rampe*. Tenir la queue de la poêle. V. poêle3A 2 a. 2. À l'impér. [Fait fonction d'interj. pour exprimer les types d'action d'un locuteur par rapport à une situation donnée] a) [Sous les formes tiens ou tenez] − [Le locuteur interpelle qqn à qui il présente qqc.] Vous ne voulez pas sortir avec nous? Tenez, voici un livre que j'ai reçu, je pense qu'il vous intéressera (Proust, Sodome, 1922, p. 1045). − [Le locuteur active une situation] Bougrelas, le frappant: Tiens, lâche, gueux, sacripant (...)! Père Ubu, ripostant: Tiens! polognard, soûlard, bâtard (...)! (Jarry, Ubu, 1895, v, 2, p. 89). − [Le locuteur entre en contact] Ça va bien, dit-il, jetant trente sous sur le comptoir. Tenez, donnez-moi un paquet de cigarettes anglaises (Dorgelès, Croix de bois, 1919, p. 314). − [Le locuteur justifie par un exemple ou par une preuve] Patience, Vial, bientôt je viendrai ici au printemps... et à l'automne... et aussi pendant les mois qui servent à bourrer les intervalles entre deux saisons... février, tiens, ou bien la deuxième quinzaine de novembre (Colette, Naiss. jour, 1928, p. 40). − [Le locuteur défend une opinion] − Honoré! voyons, Honoré... − Et crois-tu que c'est frais? un museau rigoleur... Tiens, pendant qu'on était à causer, je lui ai vu la jambe jusqu'au mollet! Ah! Jésus Fils! Comme c'était! (Aymé, Jument, 1933, p. 193). b) [Uniquement sous la forme tiens] − [Le locuteur exprime sa désapprobation franche, sa rancune] Le prince hindou de l'autre bout de la salle fit un grand geste hautain pour appeler l'infirmier. − Tiens, dit celui-ci au gardien-chef, tu vas voir ce salaud-là! Il a encore recommencé, j'en suis sûr. Oh mais cette fois... (Druon, Gdes fam., t. 2, 1948, p. 250). − [Le locuteur exprime sa surprise dans le discours dir. et dans le discours latent] Je pousse un gémissement; alors il s'arrête, soulève son lorgnon et, par-dessus son journal: − Tiens! Qu'est-ce que tu fais là? Je me crispe (...) et, dans une espèce de sanglot que je voudrais irrésistible: − Je souffre, dis-je (Gide, Si le grain, 1924, p. 426). − [L'empl. de la forme tiens répétée ou suivie de donc signifie que le locuteur retient sa surprise, insinue, ironise] − (...) Voilà le train qui part, vous prendrez le suivant. − Le suivant!... Le suivant!... − Tiens donc! Vous croyez peut-être comme ça q'la compagnie est à vot' disposition? Fallait pas arriver en retard; tant pis pour vous (Courteline, Train 8 h. 47, 1888, p. 194).Tiens, tiens, tiens... Est-ce qu'il finirait par s'assagir et comprendre que son bonheur est auprès de sa femme? (Bourdet, Sexe faible, 1931, iii, p. 460). 3. Qqn tient qqn a) [Avec ou sans compl. de temps] Immobiliser quelqu'un plus ou moins complètement, le faire rester près de soi plus ou moins longtemps. Synon. retenir.Le roi faisait souvent inviter à dîner M. Leuwen et après dîner le tenait une demi-heure ou trois quarts d'heure dans l'embrasure d'une fenêtre(Stendhal, L. Leuwen, t. 3, 1835, p. 273).Avec son patronage, ses enfants de Marie et le reste, le curé les tient une heure chaque dimanche (Bernanos, Soleil Satan, 1926, p. 69). − Région. (Belgique). Garder. Il ne sait pas tenir un ouvrier (Baet.1971, p. 422). − Tenir la jambe* à qqn. b) Avoir quelqu'un en son pouvoir, se rendre maître de la liberté de quelqu'un, disposer des moyens propres à limiter son indépendance. Tenir sa classe. Depuis deux ans vous êtes possédée du diable. Il ne vous tient pas toujours; mais, quand il vous tient, il vous tient bien (Curel, Nouv. idole, 1899, ii, 1, p. 191).Demain, j'aurai une journée fatigante; les enfants sont durs à tenir le lundi (Frapié, Maternelle, 1904, p. 68). − Empl. abs. Je voudrais tenir et punir, − et il faut rester sur sa chaise, attendre cinq heures puis attendre sept heures (Valéry, Corresp.[avec Gide], 1898, p. 316). − SPORTS. Restreindre la liberté de mouvements d'un adversaire par un contact personnel. [Un boxeur] qui tient son adversaire d'un bras n'a pas le droit de frapper avec l'autre (Nilsson, 1931ds Petiot 1982). ♦ Au fig. Faire jeu égal avec un adversaire, être capable de le battre. Depuis que je m'entraîne avec lui, je me suis rendu compte que je le tenais à l'entraînement (L'Équipe, 3 août 1970ds Petiot 1982). 4. Qqn tient qqc. (ou un animal) a) Avoir en sa possession, à son usage. Synon. détenir, posséder.Tenir la grande forme: 1. [La Terreur] est prétentieuse et déçue (...). Elle a ces défauts-là, et bien d'autres. Mais elle tient une vertu, qui passe de loin ses défauts: dans un domaine, trop souvent livré à la manie comme à la complaisance, elle refuse profondément le hasard, l'ombre, la confusion.
Paulhan, Fleurs Tarbes, 1941, p. 59. − Proverbes. Mieux vaut tenir que courir. ,,La possession d'un avantage modique vaut mieux que la poursuite d'un bien plus considérable`` (Ac. 1935). Déjà la Terre Promise me fatiguait et je me sentais de ceux qui ont pour plus agréable de courir que de tenir (Arnoux, Juif Errant, 1931, p. 19).Un tiens vaut mieux que deux tu l'auras. ,,La possession d'un bien présent, quelque modique qu'il soit, vaut mieux que l'espérance d'un plus grand bien à venir, qui est incertain`` (Ac. 1835). Il prépare obstinément ses fils à l'imiter, en vue de la retraite, aussi certaine que misérable, au moyen de laquelle lui et eux termineront leur carrière. Un bon tiens vaut mieux que deux tu l'auras (Gobineau, Pléiades, 1874, p. 88). − Absol. Comment posséderait-il [le Turc] légitimement une terre qu'il ne sait pas cultiver? La violence tient, elle ne possède jamais (J. de Maistre, Corresp., 1807, p. 285). − Région. (Belgique). Collectionner. Tenir les timbres (Dopp. Région. 1978). − Faire tenir qqc. à qqn.Faire en sorte qu'une chose lui soit remise, communiquée. Le chanoine lut la dénonciation avec la comtesse, et il fut convenu que, dans la journée, il lui en ferait tenir une copie par une personne sûre (Stendhal, Chartreuse, 1839, p. 85): 2. Lettre du général de Gaulle à Sir Alexander Cadogan, Sous-secrétaire d'État permanent au Foreign Office. Londres, le 21 janvier 1941. Mon cher sous-secrétaire d'État, Vous avez bien voulu me faire tenir un mémorandum exprimant le point de vue du Gouvernement britannique au sujet de la situation en Indochine.
De Gaulle, Mém. guerre, 1954, p. 338. − Loc. Tenir le mot de l'énigme, le sens d'un passage, la solution d'un problème. En avoir saisi le sens, en détenir la solution (d'apr. Littré). Tenir la banque. V. banque1.Tenir (un bien) à bail/à loyer. En tenir une couche* (de bêtise). Tenir le (bon) filon*. Tenir une (bonne) muffée*. b) [Le compl. désigne une activité, un emploi, une fonction] En assumer la responsabilité d'une manière suivie, remplir les obligations qui s'y attachent. Synon. exercer, occuper, remplir, jouer (un rôle).Tenir une maison, un rôle, une session. Mais pour tenir cet office, encore faut-il qu'il existe [le groupe professionnel] et qu'il ait même pris assez de consistance et de maturité pour être à la hauteur du rôle nouveau et complexe qui lui incomberait (Durkheim, Divis. trav., 1902, p. xxxvi).Tenir compagnie* (à qqn). Tenir le beau rôle*. ♦ JEUX. Tenir jeu à une personne. ,,Jouer contre elle autant et aussi longtemps qu'elle le désire``(Lar. 19e-20e). − Assurer la gestion de quelque chose; élever des animaux. Tenir une librairie, une pension. Rappelez-vous que le gâteur d'arbres contre lequel un garde me serait utile est mon fermier lui-même, qui laisse ses métayers tenir des chèvres, les mener dehors et permet d'ébrancher autrement qu'il n'est convenu (Sand, Corresp., t. 5, 1864, p. 43).Ma mère et mon frère cadet tenaient la boulangerie et s'y tuaient de fatigue pour assurer mon entretien au grand séminaire (Billy, Introïbo, 1939, p. 91). ♦ Loc. Tenir boutique*. Tenir école*. Tenir galère*. Tenir garnison*. Tenir maison*. Tenir manufacture*. − Proposer habituellement à la vente. La maison A. Popinot tient également des huiles de la droguerie, comme néroli (...), huile de café, de ricin et autres (Balzac, C. Birotteau, 1837, p. 182). ♦ P. métaph. M. Ohnet est au premier rang de ceux qui tiennent cet article-là [des « histoires » qui donnent l'impression que « c'est de la littérature »]; il est incomparable dans sa partie; il sait ce qui plaît au client, il le lui sert, il le lui garantit (Lemaitre, Contemp., 1885, p. 355). − Jouer de certains instruments de musique (harmonium, orgue), d'un ensemble précis d'instruments (batterie), en assumer la responsabilité en tant que titulaire dans un orchestre, une église. Son père (...) répétait: − Oui ou non, peux-tu tenir l'harmonium? − Je ne sais pas, je n'ai jamais essayé, répondit Lucienne (...). MmeHaudouin vint au secours de sa fille. − Ce n'est pas du jour au lendemain qu'elle peut se mettre à l'harmonium. Il faut une certaine habitude (Aymé, Jument, 1933, p. 124). ♦ Loc. Tenir sa partie*. − [Équivaut, dans les loc. ci-après, à un enregistrement d'informations par écrit] Tenir un carnet, une comptabilité, un compte, le(s) compte(s) de qqc.; tenir un journal. Tenir compte d'une somme à qqn. ,,Lui passer cette somme en compte`` (Ac. 1798, 1835). Le débiteur doit tenir compte au créancier des dépenses utiles et nécessaires que celui-ci a faites pour la conservation du gage (Code civil, 1804, art. 2080, p. 373).Tenir registre*. ♦ Au passif. Il sera tenu un état exact, en forme de procès-verbal, de tout ce qui se fera et se remarquera dans les expériences (Voy. La Pérouse, t. 1, 1797, p. 204). ♦ Loc. fig. Je vous tiendrai compte de cela. ,,Je chercherai les occasions de reconnaître les obligations que je vous ai`` (Ac. 1798-1935). (Ne) tenir (aucun) compte* de qqn, de qqc.; ne tenir ni compte ni mesure; sans tenir compte de; compte* (non) tenu de. Tenir une assemblée (ou un terme équivalent). La réunir en séance pour la présider, y participer en tant que membre. Une tente fut dressée pour tenir les conférences (Barante, Hist. ducs Bourg., t. 4, 1821-24, p. 213). ♦ Loc. Tenir conseil*. Tenir cour plénière (v. cour2).Tenir les plaids. V. plaid1A 1 b et B 2.Tenir sa/ses séance(s)*. − [Sur le plan de l'information et de la communication] Tenir un/des discours, un langage*. Je me tins avec lui le raisonnement que les diacres avaient pu se tenir avec moi: « Il faut être accueillant... » (Billy, Introïbo, 1939, p. 74). ♦ Empl. pronom. à sens passif. Il entendait en lui-même les propos qui se tenaient sur la place du village: « Elle a volé dans un couvent » (Jouve, Paulina, 1925, p. 257). − En tenir. ,,Se dit d'un homme à qui il arrive quelque chose de fâcheux, de désagréable, d'embarrassant, de honteux`` (Ac. 1835). Il a perdu son procès, il en tient (Ac. 1835).Fam. Il a bu plus que de raison, il en tient (Ac. 1835). ,,Il est ivre`` (Ac. 1835). ♦ Fam., pop. En tenir une couche*. ♦ Arg. Tenir des cornes. ,,Être trompé par sa femme`` (Rigaud, Dict. jargon paris., 1878, p. 323). ♦ En tenir pour. Être épris de, avoir de l'inclination pour. Les gens d'ici sont trop bêtes, les jeunes ferment le bec, les vieux font semblant de ne rien voir. Ils en tiennent pour les boniments de l'instituteur (Bernanos, M. Ouine, 1943, p. 1412). c) [Sur un plan moral] Exécuter ce à quoi on s'est engagé, accepter de mettre en jeu une certaine somme, relever un défi. Synon. observer, remplir, respecter.Tenir les délais; tenir (sa) parole. − Je mets trois mille francs, dit Romero. Les tenez-vous? − Parbleu! dit Villalba. − Huit, dit Romero. − J'ai perdu, dit Villalba; doublons la mise (Bourges, Crépusc. dieux, 1884, p. 294).Lui aussi avait vécu comme un enfant, il avait tenu la gageure avec elle, soutenu ce défi jusqu'à ce (...) [qu'] il se fût enfoncé dans la mort (Bernanos, Joie, 1929, p. 680).V. gageure A ex. de France. − Empl. abs. Promettez pour demain: ne tenez que dans la quinzaine (Boylesve, Leçon d'amour, 1902, p. 178): 3. Fernand tira un louis de sa poche. − Je tiens, dit-il, pour que chacun de ces messieurs fasse usage de ses pistolets. − Et moi pour l'inverse, dit le baron. Fernand jeta le louis en l'air. − Face, dit le baron. Le louis retomba et montra son revers écussonné. Fernand avait gagné.
Ponson du Terr., Rocambole, t. 3, 1859, p. 402. ♦ Proverbe. Promettre* et tenir sont deux. − Empl. pronom. ♦ Empl. pronom. réciproque indir. Je pense aux années qui passent... À ce qu'on s'était promis, et à ce qu'on s'est tenu (Aragon, Beaux quart., 1936, p. 284). ♦ Empl. pronom. à sens passif. Sous l'influence d'une idéalisation de la femme, il [le choix sexuel] en fait « la promesse qui ne se peut tenir » (Claudel) et dont l'épuisement désaxera l'existence (Mounier, Traité caract., 1946, p. 153). − Loc. Tenir des engagements. V. engagement B 2 b ex. de Gide.Tenir le/son pari*. Tenir sa/ses promesse(s)*. d) Tenir (une indisposition). (En) être victime. Synon. avoir1.Qu'est-ce que je tiens comme mal au crâne (Sartre, Mains sales, 1948, 5etabl., 1, p. 180). − P. ext. Supporter, résister à (une difficulté, une épreuve). Tenir le choc, le coup. Frédie, par de minuscules coups d'ongle sur la table, vient de m'annoncer que j'ai battu le record, que j'ai tenu plus de huit minutes la pistolétade. Huit minutes, Folcoche! Et je continue (H. Bazin, Vipère, 1948, p. 81). ♦ Loc. Tenir sa langue*. Tenir tête*. ♦ Tenir une boisson alcoolisée. (Pouvoir) en boire abondamment sans sombrer dans l'ivresse. Habitués dans leur pays à boire le vin de palme et l'eau-de-vie de mil, ils [les Sérères] tenaient merveilleusement l'alcool (Tharaud, Randonnée Samba Diouf, 1922, p. 168). 5. Qqn tient qqc. de qqn/de qqc.Avoir reçu de quelqu'un/de quelque chose un bien, une qualité, un caractère par le biais de l'hérédité ou non; en avoir reçu une information. D'après ces principes d'inégalité naturelle, et d'après leur culte qui leur montrait le soleil dominant sur toute la nature, supérieur aux autres astres qui tiennent tout de lui, ces sauvages nommaient leur chef général grand soleil (Baudry des Loz., Voy. Louisiane, 1802, p. 32).Ma mère tenait de l'abbé Moinier, son confesseur, que c'est un gros péché que de désespérer (A. France, Pt Pierre, 1918, p. 201). − Loc. Tenir une chose de race, de naissance. L'avoir reçue de ses ancêtres en naissant. Ils sont tous braves dans cette maison-là. Ils tiennent (cela) de race (Ac.1798-1935). − Empl. pronom. réfl., rare. J'ai toujours mieux aimé m'accuser que l'univers; non par bonhomie: pour ne me tenir que de moi (Sartre, Mots, 1964, p. 195). − HIST. Tenir une terre à foi et hommage de quelqu'un. ,,Posséder une terre qui relève de quelqu'un`` (Ac. 1835). Les rois d'Angleterre ont tenu autrefois la Normandie et la Guienne à foi et hommage de la France (Ac. 1835).Absol. Tenir de quelqu'un à cause de quelque terre. (Ds Ac. 1835). Tel prince tenait de l'Empire (Ds Ac. 1835). 6. Qqc. tient qqc./qqn (ou un animal) − [Le compl. désigne un objet, une réalité phys.] Mettre dans l'impossibilité de se déplacer, de tomber. Synon. fixer.Je leur relève la jupe, je couds en dedans... Je leur plante une épingle dans la tête pour tenir le bonnet... Et c'est fait, on les vend treize sous. Elle expliquait ses poupées à Mes-Bottes (Zola, Assommoir,1877, p. 454). − Empl. pronom. réciproque. Adhérer l'un à l'autre. La princesse aurait les doigts de pied qui se tiennent (Audiberti, Mal court, 1947, ii, p. 162). − [Le compl. désigne un liquide] Ne pas laisser s'échapper. Synon. garder.Ce vase tient bien l'eau (DG). − Dans le domaine abstr.Dans ses mille alvéoles, l'espace tient du temps comprimé (Bachelard, Poét. espace, 1957, p. 27). ♦ Empl. pronom. réciproque. Être en étroit rapport. La substitution de la terrasse ou de la coupole surbaissée au toit et l'emploi exclusif de la terre sont deux faits caractéristiques qui se tiennent (Vidal de La Bl., Princ. géogr. hum., 1921, p. 151). B. − Avoir et faire en sorte de ne pas perdre ou que ne se perde pas, que reste dans une position, dans un état donné(s) une personne, une chose. 1. Qqn (ou un animal) tient qqn (ou un animal)/qqc. + adj./part./adv./ syntagme prép.Immobiliser quelqu'un/quelque chose dans l'espace, le maintenir plus ou moins longtemps dans une certaine situation, une certaine position, dans un certain état physique ou moral. Synon. conserver, garder.La grande affaire était de resserrer les Vendéens sur la place, et de les tenir là jusqu'à l'arrivée de Kléber (Erckm.-Chatr., Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 254).V. légumier II B ex. de Escoffier et lexicographe ex. de Valéry. SYNT. Tenir qqn au courant, à l'écart (v. écart1), éloigné, enfermé, éveillé; tenir qqn en haleine, de près*; être tenu informé; tenir un animal/une personne en laisse (v. laisse1) ; tenir qqc. prêt, serré; tenir les yeux baissés, fermés, fixés sur; tenir qqc. à jour, en équilibre*, en réserve*, en suspens*; tenir qqn/qqc. embrassé, à distance*, en échec (v. échec2); personne, animal, habitation bien/mal tenu(e). − [Avec ell. du compl. d'obj.] Tenir en réserve. Alors il crut voir (...) quels « écrits fabriqués » ses ennemis tenaient en réserve (Guéhenno, Jean-Jacques, 1952, p. 322). ♦ Tenir en échec. Les XIXeet 1rearmées allemandes (...) seraient en mesure de tenir longtemps en échec les Français et les Américains sur les contreforts des Alpes (De Gaulle, Mém. guerre, 1959, p. 24). − [Avec ell. du compl. d'obj.] − Comme elle est grosse déjà! reprit la Pierronne, en faisant des risettes à Estelle. − Ah! le mal que ça donne, ne m'en parle pas! dit la Maheude. Tu es heureuse de n'en pas avoir. Au moins, tu peux tenir propre (Zola, Germinal, 1885, p. 1218). − [Avec ell. de l'attribut] La mienne [ma femme] c'est pas qu'elle est jolie... Mais elle est propre. L'gosse il est tenu, vieux, on croirait un gosse d'exposition (Benjamin, Gaspard, 1915, p. 14). − MUS. Tenir un son, une note. Lui donner toute la durée qu'il/elle doit avoir dans une mesure. Tous ceux qui travaillent l'orgue savent (...) que cet instrument tenant le son, mais ne pouvant l'attaquer, l'observance des valeurs doit être rigoureuse (Dupré, Improv. orgue, 1925, p. 6). − [Plus partic. sur le plan du comportement] Faire sienne une attitude que l'on décide de ne pas abandonner. Tenir une conduite. Tenir une contenance. V. contenance2ex. de Balzac, Splend. et mis., 1844, p. 113.Loc. Tenir la pose (v. pose1). Tenir rancune*. Tenir rigueur*. Tenir son sérieux*. − Empl. pronom. réciproque. Le filleul et le parrain se tenaient étroitement embrassés (About, Roi mont., 1857, p. 199). − Empl. pronom. La danseuse est en station d'équilibre sur une seule jambe, alors que l'autre est élevée et pliée en arrière à la hauteur des reins, le buste reste bien droit, les bras aux contours arrondis se tiennent élevés (Bourgat, Techn. danse, 1959, p. 87). ♦ MAR. Se tenir au vent d'un navire ou d'un point quelconque. ,,Gouverner et manœuvrer de manière à se maintenir dans la position du vent, relativement à ce navire ou à ce point`` (Bonn.-Paris 1859). − Loc. [Le compl. d'obj. dir. désigne une pers.] Tenir qqn en chambre. Tenir qqn en garde. V. garde1.Tenir qqn en joue*. Tenir qqn à l'œil*. [Le compl. d'obj. dir. désigne un animal] Tenir un animal à l'attache*. Tenir un cheval en bride*. Tenir le gibier en arrêt*. [Le compl. d'obj. dir. désigne indifféremment une pers. ou un inanimé] Tenir qqn/qqc. en (grande, etc.) estime. Tenir qqn/qqc. en éveil*. Tenir qqn/qqc. en mépris. Tenir qqn/qqc. en respect. Tenir qqn/qqc. sur le tapis. [Le compl. d'obj. dir. désigne un inanimé] Tenir la balance* égale. Tenir la bride* haute/les guides hautes à qqn (v. haut1I A 6); tenir en bride qqc. Tenir chaud/tenir les pieds chauds à qqn. Tenir qqc. au chaud. Tenir qqc. en état*. Tenir la dragée haute. V. dragée A 2.Des livres bien tenus. V. livre1.Tenir la main* haute à (un cheval, une pers.). Tenir maison* ouverte. Tenir un navire à/en vue*. Tenir pied (à qqn). Tenir pied à boule*. Tenir qqc. debout*. Tenir qqc. (très) secret. V. secret1B 2.Tenir table ouverte. V. ouvert II A 2 a δ. 2. Qqc. tient qqn/qqc. + adj./part./adv./syntagme prép.Faire demeurer quelqu'un/quelque chose dans un certain état. Synon. garder, maintenir.Vêtement qui tient chaud. En attendant que ma dissertation résolve enfin le problème géographique qui tient tout l'Europe savante en suspens, je veux vous raconter une petite histoire (Mérimée, Carmen, 1845, p. 3).Il l'avait vu de loin tomber, taché de rouge, dans une de ces poses qui tiennent les badauds à distance (Cocteau, Enfants, 1929, p. 23). − Loc. verb. Qqc. tient qqn debout*. 3. MAR. Qqn/qqc. tient la cape. V. cape3.Qqn/qqc. se tient (comme) en panne. V. panne3.Qqn/qqc. (se) tient en travers. Quelqu'un/quelque chose navigue en présentant le côté à la lame et au vent (d'apr. Jal1). Le navire tient la panne courante. V. panne3I A. 4. Qqc. tient qqn.[Le suj. désigne une activité manuelle ou intellectuelle, un état pathol., affectif ou intellectuel] Occuper quelqu'un totalement et de manière continue pendant un certain temps; l'affecter; occuper totalement ses facultés, sa pensée. Synon. absorber, accaparer, prendre.Quand ça tient un homme si longtemps, après des années, il est fichu. Lorsque Silvine entra, elle ne fut pas surprise de trouver Goliath (Zola, Débâcle, 1892, p. 525).Foulques (...) était peu enclin au soupçon, nullement porté à s'échauffer le sang; mais, lorsqu'une démangeaison le tenait, il avait la stabilité d'un roc de Bretagne (Boylesve, Leçon d'amour, 1902, p. 219). − Vieilli. [Suivi de de + inf.] Empêcher, retenir. Je ne sais ce qui me tient de vous faire harceler par les deux maîtres dogues qui couchent dans ce pailler (Nodier, Fée Miettes, 1831, p. 187). II. − Empl. trans. Qqn/qqc. tient qqn/qqc. (pour) + adj./subst. attribut du compl. d'obj.Établir une relation entre une personne et une personne, une qualité, une chose, entre une chose et une qualité, une personne, une chose. Synon. considérer, regarder comme.J'écoute peu les déclamations contre la jeunesse d'à présent, et tiens fort suspectes les plaintes qu'en font certaines gens (Courier, Pamphlets pol., Pétition pour vill., 1822, p. 143).V. immérité A ex. de Clemenceau et prêt2A 1 a ex. de Barrès. − Vieilli. Tenir qqc. à + subst.Je tiens ce mariage à singulier bonheur (Augier, Diane, 1852, p. 103). − Se le tenir pour dit. V. le2rem. 2. − Empl. pronom. réfl. Synon. de s'estimer.Se tenir pour battu. Les gens du commerce qui se tiennent tous pour des petits et grands astucieux de profession s'avèrent le plus souvent dans la pratique comme d'insurpassables gaffeurs (Céline, Voyage, 1932, p. 217). − Empl. pronom. réciproque. Le Papon et Chandelier ne se parlaient que dans les circonstances officielles, se tenant mutuellement pour un « paysan » et pour un « larbin » (Montherl., Célibataires, 1934, p. 910). − Loc. Tenir à gloire*/à honneur*, etc. de + inf. Tenir qqn quitte*. Se tenir quitte. V. quitte B ex. de France. III. − Être attaché à. A. − [Au plan phys. ou au plan moral] 1. Empl. intrans. a) Qqc./qqn tient (à/dans/sur qqc.) − Être fixé à. La môme, je croyais qu'elle allait se détacher en morceaux. Les membres lui tenaient plus au corps (...). Elle devait barboter depuis huit jours entre les écluses, comme un sous-marin (Dabit, Hôtel Nord, 1929, p. 93). − Ne pas tenir en place*. − [Sans syntagme prép.] On tâche d'apitoyer Francis Y. sur les souffrances du Christ en croix et d'exciter son indignation contre les vilains hommes qui l'y ont cloué. Il regarde le crucifix accroché au mur, et: « Fallait bien qu'on le cloue, pour qu'il tienne » (Gide, Journal, 1904, p. 141). − Proverbe. Cela tient comme la/une teigne*. − Fam. [Le suj. désigne un aliment] Tenir à l'estomac, au corps. Être consistant. Les frites, c'est bon, me dit mon compagnon. Mais les petits poissons, ça tient mieux au corps (Duhamel, Confess. min., 1920, p. 143). − Loc. Ne tenir ni à clou* ni à fer. Son épée* ne tient pas au fourreau. L'argent ne lui tient pas dans les mains. V. main 1reSection I D 1 b α. − Au fig. Tenir au cœur* (de qqn). Ne tenir qu'à un cheveu*/qu'à un fil*/qu'à un souffle*. (Ne) tenir (qu')à la lame* d'un couteau. b) Qqc. tient (+ syntagme prép. de lieu).Résister à une cause de destruction. Synon. se maintenir.Tenir bon. Point d'arbres, cependant (...). Aucune racine d'arbre n'eût tenu contre le vent, l'île n'était fleurie que par ses goémons, fermement collés à la pierre (Quéffelec, Recteur, 1944, p. 160). c) Qqc. tient
α) [Choses concr.] Demeurer dans son état initial, présenter une aptitude à la cohésion. Synon. durer, se maintenir.Elle faisait tenir ses frisons noirs avec de l'eau sucrée (Ramuz, Gde peur mont., 1926, p. 139).Ne pas s'effacer. Les peintures sur plâtre tiennent beaucoup mieux à l'intérieur qu'à l'extérieur (Coffignier, Coul. et peint., 1924, p. 599).Ne pas varier. Il faut tout finir aujourd'hui [des semailles], crièrent-ils [les contremaîtres]. Le temps est trop dur. Il ne tiendra pas (Giono, Que ma joie demeure, 1935, p. 287).
β) [Choses abstr.] − Être maintenu sans changement, être toujours en usage, en vigueur; avoir lieu. Synon. durer, subsister.Ça tient toujours notre visite à Le Merquier (A. Daudet, Nabab, 1877, p. 139).Oui, oui, de la belle ouvrage, murmura Lorilleux (...). Ça se bâcle en cinq minutes [un mariage] et ça tient toute la vie (Zola, Assommoir, 1877, p. 437). − Supporter la comparaison, la critique, l'examen. [Chauffeur:] À l'arrivée, coupure. Em' dit qu'elle a plus d'oseille (...) Ça tenait pas, sapée comme elle était, crèchant boulevard Murat (Simonin, J. Bazin, Voilà taxi!1935, p. 142).Excuse, raisonnement qui (ne) tient (pas) debout*.
γ) [Choses concr. ou abstr.] Il n'y a pas de... qui tienne. Il n'y a point de ridicule qui tienne contre un devoir d'amitié (Farrère, Homme qui assass., 1907, p. 266). d) Qqn (ou un animal) tient (+ syntagme prép.)
α) Se maintenir, le plus souvent en faisant effort, dans une position donnée. Ce revolver t'a fait tellement peur que tu ne tiens plus sur tes jambes! (Pagnol, Fanny, 1932, ii, 7, p. 152). − Tenir amont*. − Ne pas/ne plus tenir debout*. Ne plus (pouvoir se) tenir sur ses jambes. V. jambe A 1 b.P. métaph. Cette fois, le budget tient sur ses jambes, et je crois que nous n'avons rien oublié (A. Daudet, Pt Chose, 1868, p. 187). − Au fig., dans le domaine relig.Il ne tient plus à la terre. C'est un homme ,,détaché des choses du monde``(Ac. 1835).
β) Ne pas céder à une action armée, à une exigence, opposer une vive résistance. Il a fallu tenir dix jours sur ce morne chantier, se faire hacher par bataillons pour ajouter un bout de champ à notre victoire (Dorgelès, Croix de bois, 1919, p. 214). − MAR. Tenir bon. ,,Expression employée pour ordonner d'arrêter ce qui se fait. Par exemple quand on vire sur une chaîne d'ancre, on dira: Tiens bon! pour faire cesser de virer`` (Gruss 1952). Tiens bon hisser. ,,Ne hisse plus`` (Merrien 1958).
γ) CHASSE. [Le suj. désigne un gibier] Demeurer sur place et, éventuellement, faire front contre les chiens. Les arrêts commandés par le chef des traqueurs, doivent être également fréquents; les lapins tiennent longtemps au gîte et il faut donner aux batteurs le temps de les déloger (Vidron, Chasse, 1945, p. 48).
δ) Supporter une situation difficile, ne pas céder à un mouvement d'irritation, etc. En sachant répartir nos fonds, nous pouvons tenir quelques jours encore (Miomandre, Écrit sur eau, 1908, p. 252).V. bon1ex. 60. − Fam. C'est à n'y pas/plus tenir. C'est difficilement supportable. Il recommença dans l'eau sa pantomime désordonnée. C'était véritablement à n'y plus tenir. Jamais, je crois, MlleMarguerite n'avait été à pareille fête (Feuillet, Rom. j. homme pauvre, 1858, p. 203).
ε) Tenir pour qqn/qqc. Être du parti de quelqu'un, être partisan de quelque chose. Un ébéniste, qui tenait encore pour le capitaine en fonctions, ne résista pas à un cancan agréablement dessiné (Reybaud, J. Paturot, 1842, p. 164).Jaurès tient pour la méthode douce et conciliante, pourvu qu'on trouve moyen de l'accorder, tant bien que mal, avec les principes et qu'elle ait pour elle quelques autorités respectables (Sorel, Réflex. violence, 1908, p. 106). 2. Empl. trans. indir. Qqc. tient à qqn/à qqc. a) Être attenant à. Chaque façade cachait un « jardin-de-derrière » profond, tenant aux autres jardins-de-derrière par des murs mitoyens (Colette, Sido, 1929, p. 20). b) Présenter quelque rapport avec. J'ai vu un jeune homme de vingt et un ans (...) qui est au courant de tous nos écrits français (...) de tout ce qui tient au droit, aux philosophies (Taine, Voy. Ital., t. 1, 1866, p. 73). B. − [Au plan moral] Empl. trans. indir. Qqn tient à qqn/qqc. 1. Posséder des liens de parenté, d'intérêt, des liens affectifs avec une personne, un groupe de personnes, une chose. Malgré tous ces titres, Bois-Doré n'est pas de la haute noblesse du pays, et nous ne lui tenons que par alliance (Sand, Beaux MM. Bois-Doré, t. 1, 1857, p. 11): 4. On peut imaginer combien cette « sortie » de Mllede Guermantes sur Tolstoï, si elle indignait les Courvoisier, émerveillait les Germantes, et, par delà, tout ce qui leur tenait non seulement de près, mais de loin.
Proust, Guermantes 2, 1921, p. 447. 2. Témoigner de l'intérêt à quelqu'un, attacher du prix à quelque chose. Synon. affectionner, aimer, chérir.Tenir beaucoup à une chose; tenir à l'argent. Kolb alla voir David et s'amouracha de la grosse Marion en découvrant chez elle toutes les qualités qu'un homme de sa classe demande à une femme: cette santé vigoureuse (...), cette probité religieuse à laquelle tiennent les Alsaciens (Balzac, Illus. perdues, 1843, p. 555).Si la nuit je m'agitais, tu te levais et m'aidais à boire. « Elle tient à moi, me disais-je, qui l'aurait cru...? À cause de ce que je gagne peut-être? » (Mauriac, Nœud vip., 1932, p. 145). − Loc. Tenir à une chose comme à la prunelle des/de ses yeux. V.
œil III A et prunelle B 1 a ex. de De Gaulle. 3. Qqn tient à ce que + subj./à + inf.Regarder comme très important de faire une chose, comme très souhaitable qu'une chose se produise. Synon. désirer, souhaiter, vouloir.Tenir à dire une chose. Quant à moi, je ne tiens pas le moins du monde à garder une place dans leurs rangs, n'ayant pas la moindre considération pour le génie ordinaire politique (Chateaubr., Mém., t. 3, 1848, p. 216).Loin de ramener au type moyen de la race, le mariage d'amour tient à exagérer les divergences (Maurois, Sil. Bramble, 1918, p. 130). − Rare. Tenir de + inf./que + subj.Chez nous, on se marie pour faire l'amour, vous savez? Alors, si vous ne tenez pas beaucoup de le faire avec moi, c'est mieux de ne pas m'épouser, Jimmy! (Bourdet, Sexe faible, 1931, iii, p. 426).Je me suis servie de toi. Je t'ai fait jouer un rôle. Mais j'ai tenu que la réalité vienne, au plus vite, alimenter la comédie, l'alimenter, la démentir (Audiberti, Mal court, 1947, iii, p. 181). IV. − Empl. trans. et intrans. Trouver place dans un contenant, recevoir un contenu. A. − Empl. trans. 1. Qqn tient qqc.Occuper un certain espace, suivre une direction en s'y maintenant. Tenir sa droite. Le boulevard s'emplit: c'étaient les ouvriers de banlieue, la masse des quartiers denses de l'est et du nord de la ville; ils tenaient la chaussée d'un bord à l'autre bord, le fleuve finalement s'était mis à couler (Nizan, Conspir., 1938, p. 42). − Tenir la chambre, le lit. Ne pas les quitter. Il tient la chambre parce qu'il est un peu incommodé (Ac.1835). − Dans le domaine milit.Occuper un lieu en faisant usage de ses armes, si besoin est, pour le défendre. Ce même jour, la 75edivision qui tenait les Hauts-de-Meuse dans la région d'Hattonchatel, fut violemment canonnée (Joffre, Mém., t. 2, 1931, p. 432).V. compte II C 4 b ex. de Foch. ♦ Tenir la campagne*. ♦ P. métaph. Plus d'une fois je l'ai entendu citer comme un excellent ministre. Il faut croire alors que la position n'est pas difficile à tenir et qu'on y suffit avec peu d'étoffe (Reybaud, J. Paturot, 1842, p. 374). − AÉRON., MAR. Tenir un/son cap. C. cap2ex. 3. − MAR. Tenir le vent, tenir le plus près. ,,Gouverner et manœuvrer de manière à se maintenir aussi près que possible du lit du vent`` (Gruss 1978). − Loc. Tenir le haut/le bas bout*. Tenir chapelle*. Tenir un/le chemin* (de). Tenir son coin (v. coin2). Bien tenir sa place à table*. 2. Qqc. tient qqc./qqn.Occuper un certain espace, avoir une certaine capacité. Synon. contenir.Tenir une grande, une large place, la première place, le premier rang (dans le domaine abstr.). Ces embarcations tiennent six hommes, reprit-il. Ils s'y jetèrent et emportèrent Laure avec eux (Vigny, Serv. et grand. milit., 1835, p. 55).Le trafic embarrassé se résumait dans un encombrement qui tenait le centre de la place et s'en allait cornant vers la rue Royale (Aragon, Beaux quart., 1936, p. 260). ♦ Tenir la route*. − [Dans l'ordre temporel] Remplir une certaine durée, occuper telle partie de la chronologie. Pour l'architecte [des temples grecs], il s'agissait d'un problème vital: ne pas couler à pic, tenir les siècles comme la mer, arriver coûte que coûte, démâté, dévoilé, environné d'épaves (...) mais avec, intacte, la cargaison (Cocteau, Crit. indir., 1932, p. 250). − Au fig. La science tient fermement son territoire. Mais elle ne tient que cela. Dans la zone inoccupée, ou provisoirement inoccupée, la liberté subsiste de chercher « autre chose » (David, Cybern., 1965, p. 21). − [Dans des loc. où le verbe est trans. et où le suj. est indifféremment un animé ou un inanimé] Tenir l'affiche. [Des personnes] qu'on déclare agréables, amusantes, et qui dans le monde ne tiendraient pas l'affiche deux soirs (Proust, J. filles en fleurs, 1918, p. 771).Tenir le haut du pavé*. Tenir lieu de (v. lieu1). Tenir le (juste) milieu*. Tenir sa place*. Tenir la tête*. Tenir la vedette*. − MAR. Tenir le large. ,,Naviguer sans se rapprocher de la côte`` (Bonn.-Paris 1859). Tenir la mer*. Rem. L'examen de plusieurs types de cont., et notamment de plusieurs loc., fait ressortir nettement que tenir, d'une part, s'oppose en tant que résultatif à prendre (qui exprime une action momentanée et sert qqf. aussi d'inchoatif à avoir: prendre/tenir le large, prendre/tenir la plume, la fièvre les prend/les tient, etc.), d'autre part fonctionne souvent comme équivalent de avoir et de garder: avoir/tenir le (bon) filon*, le (beau) rôle*, avoir/garder/tenir la forme*. B. − Empl. intrans. 1. Qqc./qqn tient (+ syntagme prép. locatif ou temp.).Trouver place, être contenu dans. Colmar tient tout entière en Martin Schongauer (Faure, Hist. art, 1914, p. 506).Noël ne rendait pas les coups; accroupi, il essayait de tenir tout entier dans sa chemise, comme si cette toile mince eût été une protection efficace (Aymé, Jument, 1933, p. 298).V. corps ex. 16. − [Avec effacement du compl.] La baronne de Bonmont offrit aux Gromance de les reconduire chez eux dans sa voiture (...) − Montez! nous tiendrons bien tous les trois (A. France, Bergeret, 1901, p. 144). − Empl. impers. Laissez-moi seul, allez; j'y veux sentir aussi [au jardin des Olives] Ce qu'il tient de douleur dans une heure infinie: Homme de désespoir, mon culte est l'agonie (Lamart., Voy. Orient, t. 2, 1835, p. 137). − Proverbe, pop., vx. Je n'en ai non plus qu'il en pourrait tenir dans l'œil/dans mon œil. ,,Je n'en ai point du tout`` (Littré). 2. Qqc. (d'abstr.) tient + syntagme prép. locatif ou temporel.Être compris dans certaines limites. Synon. consister (dans), se résumer, être constitué par.Il est très vrai, et il est très faux de dire que l'information tient tout entière dans la production de faits exacts (Salleron, Comment informer, 1965, p. 13). V. − Empl. trans. indir. Se trouver dans un état de dépendance par rapport à une personne, à un animal, à une chose. A. − Être dans un état de dépendance par causation; être le résultat de quelque chose. 1. Qqc. (d'abstr.) tient à qqc. (d'abstr.) /à qqn.Synon. découler, émaner, provenir.Une chose tient à une/des cause(s), au fait que, à la nature d'une personne ou d'une chose; une différence tient à une chose. Notre théâtre purement verbal et qui ignore tout ce qui fait le théâtre, c'est-à-dire ce (...) qui se mesure et se cerne d'air (...), pourrait, eu égard à ce qui ne se mesure pas et qui tient au pouvoir de suggestion de l'esprit, demander au théâtre balinais une leçon de spiritualité (Artaud, Théâtre et son double, 1938, p. 68). − [Le compl. est une sub.] Nous cherchons à comprendre, à capter le plaisir: il nous échappe. La difficulté (...) tient principalement à ce qu'en voulant saisir, il ne nous reste en main que l'objet nu, sans l'impression qui l'accompagnait (G. Bataille, Exp. int., 1943, p. 215).V. immérité A ex. de Proust. 2. Empl. impers. a) Il tient à... (que + subj.).Il dépend de... (que). À quoi a-t-il tenu que je n'aie pas sombré, comme lui? Sans doute, à ma volonté. Mais aussi aux hasards de la vie (Rolland, J.-Chr., Nouv. journée, 1912, p. 1482).Si tu as faim, pour autant qu'il tient à moi, tu continueras à avoir faim, cela te dressera (Aragon, Beaux quart., 1936, p. 371). b) Il ne tient qu'à... que + subj./de + inf.Télégramme du général de Gaulle à Roger Garreau (...) à Moscou. Londres, 10 avril 1942. Nous avons pris toutes mesures utiles pour l'envoi du groupe d'aviation. Il ne tient plus qu'au Haut-Commandement soviétique de donner maintenant son accord (De Gaulle, Mém. guerre, 1954, p. 666).Moyennant un appui sans défaut, il ne tenait qu'à eux que leurs usines parfaitement équipées et leurs chercheurs (...) leur fissent cadeau d'un monopole mondial pour toutes ces fabrications (P. Rousseau, Hist. techn. et invent., 1967, p. 322). c) S'il ne tenait qu'à moi/à toi/à lui, etc. Comme j'exprimais mes regrets de voir Olivier avec Passavant, j'ai compris que, s'il n'eût tenu qu'à elle, le voyage en Corse n'aurait pas eu lieu (Gide, Faux-monn., 1925, p. 1154). d) Qu'à cela ne tienne. Que telle chose ne constitue pas un empêchement. Domaine de la rue, collectif par destination, dira-t-on. Qu'à cela ne tienne! Franchissons le mur de la vie privée, de la vie la plus privée, celui du cabinet de toilette (Huyghe, Dialog. avec visible, 1955, p. 42). B. − Être dans un état de dépendance par analogie de nature. 1. Qqn tient de qqn (ou d'un animal)/de qqc.Avoir quelque chose en commun avec. Synon. rappeler, ressembler à.Si William devait tenir de ce pieux Henry James senior, Henry junior aurait sans doute étonné le brave homme par son attachement à la (...) superficielle humanité des salons (Blanche, Modèles, 1928, p. 144).V. léonin1ex. 1. − Avoir de qui tenir. V. avoir1ex. 52. − Vx, dans le domaine jur. Être dans un état de dépendance par suite d'un engagement. Lorsque le cheptel est donné au fermier d'autrui, il doit être notifié au propriétaire de qui ce fermier tient; sans quoi il peut le saisir et le faire vendre pour ce que son fermier lui doit (Code civil, 1804, art. 1813, p. 328). 2. Qqc. (ou un animal) tient de qqc. (ou d'un animal) (et de qqc. (ou d'un animal)).Participer de la nature de. Synon. procéder, relever de, ressortir à.Le lutteur (...) croisait les bras dans une attitude qui tenait ensemble d'une pose napoléonienne et de la bravoure du jeune taureau prêt à foncer sur le premier obstacle (Guevremont, Survenant, 1945, p. 222).V. libelle B ex. de Bremond, conserver ex. 17. − Loc. Cela tient du miracle*. Cela tient du prodige*. 2eSection. Empl. pronom. (n'ayant pas d'empl. trans. corresp.). I. − Rester sans changement. A. − Qqn (ou un animal) se tient à qqc.Prendre appui sur quelque chose pour garder sa position. Synon. s'accrocher, s'agripper, se cramponner.Cette fois, annonça Conan, rien à faire. Faut descendre dans le fossé! Il se laissa glisser le premier, en se tenant aux racines (Vercel, Cap. Conan, 1934, p. 203).V. ferme1ex. de Châteaubriant. − [Avec effacement du compl.] Il se précipita vers l'aval au grand trot, poussa son cheval en travers du courant, repêcha l'homme à bout de bras, lui donna un de ses étriers pour se tenir (Mille, Barnavaux, 1908, p. 174). − P. métaph. Mais elle (...), qui se tenait à mille petites choses par mille petits liens matériels et vivaces, comment, sans la briser, sans la tuer, rompre d'un seul coup toutes ces attaches?... Cela n'était pas possible! (Châteaubriant, Lourdines, 1911, p. 129). B. − Qqn/qqc. (d'abstr.) se/s'en tient à qqc. (d'abstr.).Persévérer dans, ne pas aller au delà d'une certaine limite. Synon. se contenter de.Il faut s'en tenir à causer avec les personnes à côté de qui le hasard ou votre adresse vous a placé (Jouy, Hermite, t. 4, 1813, p. 319).Ces brèves indications [à la fin de chaque chapitre] s'en tiennent autant que possible aux meilleurs ouvrages français (Béguin, Âme romant., 1939, p. V). − S'en tenir là. S'en tenir à une situation donnée. V. là ex. de Duhamel. − Dans le domaine des jeux (cartes, pions).S'y tenir. ,,Ne rien envisager d'autre que le coup qu'on a joué; se trouver satisfait des cartes qu'on a dans la main, ne pas vouloir les échanger`` (Lar. 19e). Madame d'Ermel: (Elle est assise en face de Jacobus; la table les sépare; ils rangent les pions sur le damier et commencent à jouer...) C'est joué? (...) Vous vous y tenez? Jacobus: Attendez donc... (Il médite). Oui, je m'y tiens (Feuillet, Scènes et prov., 1851, p. 257). − Savoir à quoi s'en tenir. V. savoir1I A. C. − Qqn se tient.Dominer ses impulsions, rester maître de soi. Synon. se contrôler, se dominer.Ce qui excite le plus F., c'est qu'elle [sa « femme du monde »] a de très beaux dessous. Quand hier, en arrivant au pantalon, il a senti qu'il y avait des dentelles, alors, il n'a plus pu se tenir; il est devenu lyrique tout à fait (Gide, Journal, 1902, p. 122).Se (re)tenir à quatre. V. quatre 1reSection I A 1. − Ne pouvoir se tenir de + inf.; ne pas se tenir de + subst.Ne pas pouvoir s'empêcher de, être incapable de retenir la manifestation d'un sentiment. Si les femmes ne peuvent pas se tenir de pleurer, est-ce que les hommes sont maîtres de cet instinct qui les pousse vers la chasse (...)? (Genevoix, Raboliot, 1925, p. 26).V. croisement ex. 3. II. − Être localisé. A. − Qqn (ou un animal) se tient + syntagme prép. locatif ou adv. locatif.Se trouver dans tel lieu, en tel endroit, dans telle partie de l'espace par rapport à un repère fixe ou mobile. Synon. être1.MmeGuillaume se tenait le plus souvent près de la fenêtre, un livre en mains (Arland, Ordre, 1929, p. 180).Quant à savoir où se tenaient les Américains, nous nous avisions un peu tard peut-être que rien ne permettait de le déterminer très exactement (Ambrière, Gdes vac., 1946, p. 368). − P. métaph. ou au fig. Ferdinand Haudouin s'arrangeait toujours pour militer d'accord avec sa conscience; il trouvait que le rôle d'un homme sage et éclairé, tel que lui, était de se tenir dans l'actualité (Aymé, Jument, 1933, p. 30). − Proverbes. Quand on est bien, il faut s'y tenir. ,,Il ne faut pas changer légèrement, pour peu qu'on se trouve bien dans son état`` (Ac. 1835). Quand on est bien, on ne s'y peut tenir. ,,Le seul désir du changement fait qu'on s'ennuie de tout`` (Ac. 1835). B. − Qqc. se tient + syntagme prép. locatif ou temporel.Se trouver, avoir lieu, être réuni. Synon. siéger.Dans le palais à colonnades (...) se tient le Comité de Concentration: il est composé des ministres (...), des représentants des banquiers et des hauts fonctionnaires et de tout ce qui est établi sur terre (Jouve, Scène capit., 1935, p. 67). III. − Être, rester d'une certaine manière. A. − Qqn (ou un animal) se tient + adj./part./adv./syntagme prép.Maintenir son corps, son esprit dans une position, un état, des dispositions donnés. Célestin s'était levé, il se tenait un peu courbé, la main au niveau du cœur (Triolet, Prem. accroc, 1945, p. 63). − [Avec effacement de l'adj., du part., de l'adv. ou du syntagme prép.] Lasies pendant le discours de Buisson: « Je reste là parce qu'il dit souvent des bêtises. Je suis, dit Lasies, comme le gars d'écurie qui se tient pour ramasser le crottin. » Lasies est debout au pied de la tribune (Barrès, Cahiers, t. 5, 1907, p. 182). SYNT. Se tenir assis, caché, coi, debout, droit, immobile, peinard*, penché, prêt, tranquille; se tenir à carreau*, au courant de qqc., sur la défensive, en équilibre, en forme, en garde contre qqn/qqc., sur ses gardes (v. garde1I A 1 b); se tenir sur ses jambes; se tenir là; se tenir à sa place*; se tenir très près* de qqc.; se tenir sur la réserve. B. − Qqn se tient + adv. appréciatif bien/mal.Adopter une attitude corporelle correcte ou non; adopter un comportement conforme ou non à ce qui est prescrit par les convenances dans un lieu, dans des circonstances données. Synon. se conduire.Mon Dieu, pitié, cachez-moi, je me tiens trop mal! (Rimbaud, Saison enfer, 1873, p. 222).V. droitement ex. 1. − Bien se tenir à table*. − [Avec effacement de l'adv.] Anton. se laisser aller (v. laisser I B 1).Je me le rappelle [un officier] au Concours Hippique l'année où il a eu la coupe... Il se tenait alors... à cause de sa carrière... C'est depuis son malheur qu'il s'est laissé aller (Mauriac, Mal Aimés, 1945, i, 3, p. 170). − Familier ♦ [Pour exprimer une menace ou une invitation à prendre garde] N'avoir (plus) qu'à/tâcher de bien se tenir. Les tués [à la guerre] pour elle c'était rien que des accidents, comme aux courses, y n'ont qu'à bien se tenir, on ne tombait pas (Céline, Voyage, 1932, p. 120). ♦ [Pour préparer qqn à recevoir une nouvelle étonnante] Tenez-vous bien, tiens-toi bien. (Ds Lar. Lang. fr., GDEL, Rob. 1985). C. − Qqc. se tient 1. [Le suj. désigne un obj. concr., au plan phys., p. anal. avec A et B ci-dessus] Un titre doit se bien tenir; toutefois, cette condition nécessaire de stabilité n'exclut ni la légèreté ni l'élégance (É. Leclerc, Nouv. manuel typogr., 1897, p. 261).Le blanc d'antimoine broyé livré à la consommation contient (...) de l'oxyde de zinc (...). Cette adjonction est faite ici dans le but d'obtenir une pâte se tenant mieux (Coffignier, Coul. et peint., 1924, p. 557). 2. [Le suj. désigne un produit de l'esprit, une production ou un ensemble de productions artistique(s)] Présenter dans sa totalité une cohérence, une similitude, une harmonie existant aussi entre chacun de ses éléments et entre chaque élément et la totalité. Du jeune homme qui vient de faire son « chef-d'œuvre » de maîtrise, au maître en pleine possession de son expérience, aucune divergence de vues ni de sentiments. La belle unité d'une pensée qui se tient (L. Febvre, J. Sion, A. Demangeon, [1941] ds Combats, 1953, p. 378). − Fam. Ça se tient. C'est plausible, logique. − PEINT. Une toile qui se tient = bien équilibrée quant aux volumes, aux lignes et à la coloration (Hugues, Expr. atelier, s.d.). − Empl. pronom. réciproque. Si elles [les trois espèces de cuisine] diffèrent par le but, elles se tiennent par l'application du feu, par l'usage des fourneaux et par l'emploi des mêmes vases (Brillat-Sav., Physiol. goût, 1825, p. 256). REM. 1. Tenant-fief, subst. masc.,hapax. [Corresp. à supra 1reSection I A 4] Celui qui possède la jouissance d'un fief. L'arrière-ban fut convoqué; bien peu de chevaliers, d'écuyers et de tenant-fief comparurent pour obéir au mandement du roi (Barante, Hist. ducs Bourg., t. 4, 1821-24, p. 202). 2. Tenuto, adv.[Corresp. à supra 1reSection I B 1] En tenant le son pendant la valeur prescrite. Synon. sostenuto.Les deux mesures sont répétées tenuto (Prod'homme, Symph. Beethoven, 1921, p. 302). 3. Tiens-toi bien, subst. masc.,hapax., pop. [Corresp. à supra 2eSection III B] Boisson alcoolisée permettant de se tenir bien droit. Un gros caporal essaye vainement de fléchir MlleLucie (...). − Deux petits verres seulement, mamzelle, on boira vite. N'importe quoi pourvu que ça soit du solide, du tiens-toi bien. − Fichez-moi la paix, on ne vend que du vin ici (Dorgelès, Croix de bois, 1919, p. 111). Prononc. et Orth.: [təni:ʀ], (il) tient [tjε
̃]. Att. ds Ac. dep. 1694. Conjug.: ind. prés. je tiens, tu tiens, il tient, nous tenons, vous tenez, ils tiennent; imp. je tenais, nous tenions; passé simple je tins, nous tînmes; fut. je tiendrai, nous tiendrons; passé comp. j'ai tenu, nous avons tenu; p.-q.-parf. j'avais tenu, nous avions tenu; passé ant. j'eus tenu, nous eûmes tenu; fut ant. j'aurai tenu, nous aurons tenu; cond. prés. je tiendrais, nous tiendrions; cond. passé 1reforme j'aurais tenu, nous aurions tenu; cond. passé 2eforme j'eusse tenu, nous eussions tenu; subj. prés. que je tienne, que nous tenions; subj. imp. que je tinsse, que nous tinssions; subj. passé que j'aie tenu, que nous ayons tenu; subj. p.-q.-parf. que j'eusse tenu, que nous eussions tenu; part. prés. tenant; part. passé tenu, -ue. Étymol. et Hist. A. « Avoir (à sa disposition, proche de soi...) » 1. a) 2emoit. Xes. en parlant de personnes « garder chez soi » (St Léger, éd. J. Linskill, 28: cio fud lonx tiemps ob se lo.s ting); b) ca 1050 à propos d'un objet (Alexis, éd. Chr. Storey, 348: En sum puing tint le cartre le Deu serf); c) ca 1100 (Roland, éd. J. Bédier, 2557: en dous chaienes si teneit un brohun); 2. a) ca 1100 impér., accompagnant le geste de donner (ibid., 654); b) ca 1170 domaine moral (Chrétien de Troyes, Erec, éd. M. Roques, 1048: Tenez ma foi, jel vos fianz que...); c) 1200 tenés « prenez la main que je vous tends » (Jean Bodel, Jeu St Nicolas, éd. A. Henry, 639); d) 1200 tien interj. (Id., ibid., 831); 3. ca 1125-50 en parlant de biens « posséder » (Grand mal fit Adam, I, 54 ds T.-L.: Li avoir dunt li vint? Uns altre le tint Ainz que il fust nez), en a. et m. fr. surtout avec la mention du mode juridique de possession, v. F 1; 4. ca 1185 expr. proverbiale (Hue de Rotelande, Ipomedon, éd. A. J. Holden, 1092: Meuz vaut un tien qe deus avraz); 5. 1624 faire tenir qqc. à qqn « envoyer » (L. Guez de Balzac, Lettres, éd. H. Bibas et K. T. Butler, t. 1, p. 14). B. « Occuper une charge, une fonction; dominer, régner sur... » 1. a) 2emoit. Xes. (St Léger, 93: Meu' evesquet neˑ m lez tener); b) 1160-74 (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, III, 1980: maistre Bernard [...] en maint lieu ont tenu escole); c) 1174-76 (Guernes de Pont-Sainte-Maxence, St Thomas, éd. E. Walberg, 4803: se nul ad tenu seculars poestez); d) ca 1190 tenir la marreglerie « occuper l'emploi de sacristain » (Renart, éd. M. Roques, XI, 12619); e) 1260 (Étienne Boileau, Métiers, éd. G. B. Depping, p. 76: Quiconques voudra tenir ledit mestier comme mestre...); f) ca 1340 (Livre des métiers de Bruges, éd. J. Gessler, p. 38: Natalie, la belle dame, tient boine estuve); g) 1372 tenir l'office de (D. Foulechat, Policraticus, éd. Ch. Brucker, p. 81); h) 1573 tenir un rang (R. Garnier, Hippolyte, Epître dédicatoire, éd. W. Foerster, t. 2, p. 1); 2. ca 1100 « être à la tête de, régner sur » (Roland, 470: Carles, ki France tient). C. « Avoir et faire en sorte de ne pas perdre, de conserver (dans un certain état), empêcher (quelque chose ou quelqu'un de faire quelque chose); continuer; retenir » 1. a) ca 1050 « garder (tel quel) » (Alexis, 596: Desur[e] terre nel pourent mais tenir [le corps de Saint Alexis]); b) 1155 tenir en servage (Wace, Brut, éd. I. Arnold, 156); c) ca 1185 tenir en pes (un pays) (Hue de Rotelande, op. cit., 52); 2. a) ca 1100 « poursuivre, continuer (quelque chose) » (Roland, 2446: tenet l'enchalz; 2857: Segnurs, le pas tenez); b) ca 1150 tenir son chemin a « se diriger vers... » (Wace, St Nicolas, éd. E. Ronsjö, 123); c) ca 1220 (Gautier de Coinci, Mir., éd. V.-F. Koenig, I Mir 21, 1: Tenez sillence, bele gens!); d) xiiies. vénerie tenir la trace (Isopet de Lyon, 48, 18, éd. J. Bastin, t. 2, p. 166); e) fin xiiies. tenir sa tençon « ne pas cesser sa querelle » (Jakemes, Chastelain de Couci, éd. M. Delbouille, 4811); 3. a) ca 1100 « retenir (quelqu'un, pour l'empêcher de tomber) » (Roland, 2893: Par les mains le [Charles] tienent .IIII. de ses barons); b) ca 1165 « retenir (une partie de vêtement, pour l'empêcher de glisser) » (Guillaume d'Angleterre, éd. A.-J. Holden, 2520); 4. a) ca 1140 suj. inanimé (Geffrei Gaimar, Estoire des Engleis, éd. A. Bell, 4210: un mal le prist et tant le tint Qu'il finit et sin fud mort); b) fin xiies. (Béroul, Tristan, 70b ds T.-L.: la flor [farine] la forme des pas tient); c) fin xiies. (Brut de Munich, 2476, ibid.: Trois ans et sis mois est tenüe Pluie qui n'est de ciel chaüe); d) ca 1200 (Continuation de Perceval, I, 1996, éd. Roach et Ivy, t. 2, p. 61: le soëf tans [...] Qui si nez et si cler se tint); e) ca 1200 (Moralités sur Job, 336, 26 ds T.-L.: paürs moi tinuet [pavor tenuit me]); f) 1563 (en parlant de vêtements) tenir la chaleur (B. Palissy, Recepte, éd. K. Cameron, p. 179); g) 1580 (Id., Discours admirable, éd. A. France, p. 256: la peinture n'eust pas tenu sur le verre); 5. a) ca 1170 (Chrétien de Troyes, Erec, 1440: de plorer ne se sont tenu); b) 1176-81 (Id., Chevalier Lion, 2704: À grant poinne tenoit ses lermes); 6. 1remoit. xives. (Recettes méd., 7 ds T.-L.: tenir sa vïende; 28: ne pueent tenir leur orine); 7. a) ca 1393 (Ménagier de Paris, éd. G. E. Brereton et J. M. Ferrier, p. 192: tenir au salouer; p. 224: mettez en un mot au feu pour tenir chault); b) ca 1393 (ibid., p. 100: aucune autre femme qui [...] pense [...] de leur tenir nectement [les enfants]; p. 148: en leur tresgrant jennesse l'en les doit tenir tresnectement [les éperviers]); c) 1746 jardin bien tenu (La Morlière, Angola, p. 164); 8. fin xives. mus. tenir « chanter (la partie du dessus) » (E. Deschamps, Art de dictier, éd. G. Raynaud, t. 7, p. 270); 9. 1667 se tenir bien à propos de l'attitude, du maintien (Molière, Le Sicilien, XII); 10. 1867 tenir l'affiche (Hugo, Corresp., p. 22). D. « Avoir en esprit, penser, considérer, croire; considérer comme, reconnaître pour; estimer que » 1. a) ca 1050 avec prép. + adj. attribut (Alexis, 266: tenir pur briçun); b) ca 1050 + subst. « reconnaître pour » (ibid., 66: tenir ad espus); 2. a) ca 1135 tenir chier (qqn) « aimer et respecter » (Couronnement Louis, 1944 ds T.-L.); b) ca 1170 soi tenir chier (Marie de France, Lais, éd. J. Rychner, Laustic, 15); 3. a) 1155 loc. tenir en enur (qqn) « respecter » (Wace, Brut, éd. I. Arnold, 645); b) 1155 tenir (qqn) a petit « faire peu de cas » (Id., ibid., 8617); 4. a) 1349 (Guillaume de Machaut, Roy Navarre, éd. E. Hoepffner, 664: tenez ce point pour seür que...); b) 1349 (Id., Remede Fortune, 2450: lequel tu tiens Estre milleur de ces deus biens); c) 1349 (Id., Dit Alerion, 1647: aucun tiennent le contraire); d) 1361 tenir si grand compte de (Id., Fontaine amoureuse, 2101); 5. a) 1421-30 suj. inanimé tenir lieu « être considéré comme » (Clement de Fauquembergue, Journal, éd. Tuetey, t. 2, p. 195: ladicte somme du dit remboursement tenra lieu audit maistre Laurens en deduction d'icelle amende); b) 1583 (R. Garnier, Les Juives, Epître dédicatoire, éd. R. Lebègue, p. 10: asseuré que l'affection de l'Autheur tiendra lieu de recommandation de son oeuvre); 6. a) 1489-91 tenir (qqc.) de qqn « savoir quelque chose par quelqu'un, avoir appris quelque chose par quelqu'un » (Philippe de Commynes, Mém., éd. J. Calmette, t. 1, p. 251); b) 1872 tenir le mot de l'énigme (Littré). E. « Rester fermement attaché à (domaine moral: idée, sentiment, décision...), respecter, observer » 1. a) ca 1100 (Roland, 222: la lei que nus tenum); b) ca 1100 (ibid., 229: Laissun les fols. As sages nus tenuns; 569: Lessez la folie, tenez vos al saveir); c) 1130-40 (Wace, Ste Marguerite, éd. E. A. Francis, 169: Bien li tenrai ceste promesse); 2. 1130-40 sei tenir (à qqn) « être du parti de quelqu'un » (Id., ibid., 168); 3. a) ca 1165 « se contenter de, se limiter à » (Guillaume d'Angleterre, 2195); b) 1290 se tenir a pol « se contenter de peu » (Jean Priorat, Ordre de chevalerie, éd. U. Robert, 9060); 4. 1174-77 savoir a coi soi tenir (Renart, IIIa, 4471); 5. a) 1216 (Guillaume Le Clerc, Fergus, éd. W. Frescoln, 748: Dans Kes, qui ne se pot tenir, li dist...); b) 1435 « persister à faire quelque chose + notion de durée » (Mir. ds Mir. N. D., éd. U. Robert et G. Paris, t. 1, p. 331); 6. 1remoit. xvies. (Mellin de Sainct Gellais,
Œuvres, éd. P. Blanchemain, t. 1, p. 65: je tiens et parie que...); 7. 1580 (Montaigne, Essais, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, t. 1, p. 90: je ne tiens plus si fort aux commoditez de la vie); 8. 1670 tenir à + inf. (Racine, Britannicus, I, 2). F. « Avoir un lien, être en relation (dépendance, obligation, proximité, ressemblance, analogie) » 1. cont. de la féodalité, rapport de vassal à seigneur a) ca 1100 (Roland, 190: de mei tendrat ses marches; 697: De vos tendrat Espaigne le regnet); b) ca 1130 (Gormont et Isembart, éd. A. Bayot, 375: Jeo tenc de vus quite mun fiev); c) ca 1200 (1ère Continuation de Perceval, 3662, éd. Roach, t. 1, p. 99: Li rois avoit a Carlion sa cort et semonse et banie [...] Si qu'a Pentecoste venissent Tot cil et celes qui tenissent De lui et li doivent homage); 2. a) ca 1140 en un tenant « à la suite » (Geffrei Gaimar, op. cit., 74); b) ca 1160 d'un tenant « id. » (Eneas, 6579); 3. a) ca 1160 impers. « il importe à quelqu'un, il est important pour quelqu'un de... » (ibid., 8913: Onkes ne li tint de mangier); b) ca 1280 (Adenet Le Roi, Cleomades, éd. A. Henry, 11978: ne tient fors k'a vous de l'aler); 4. a) ca 1170 d'une pers. « dépendre (de quelqu'un) » (Marie de France, Lais, Fresne, 362); b) ca 1280 être tenu a « être obligé (de faire quelque chose) » (Adenet Le Roi, op. cit., 14448); c) 1392 (Jean d'Arras, Melusine, éd. L. Stouff, p. 348: je suis tenus de faire à mon cousin honneur; p. 136: se la besoigne ne tenoit que a eux); 5. a) fin xiies. impers. « avoir en commun » (Sermons St Bernard, éd. K. Vollmöller, 111, 15: femme dist-il ke tient il a ti de mi?); b) ca 1280 tenu de char (à qqn) « apparenté à » (Gérard d'Amiens, Escanor, 10685 ds T.-L.); c) 1306 (Joinville, St Louis, éd. N. L. Corbett, 326: il me demanda si je tenroie riens de lignage a l'empereur Ferri d'Alemaingne); d) 1489-91 tenir (qqc.) de qqn « ressembler à quelqu'un (par un trait de caractère) » (Philippe de Commynes, Mém., éd. J. Calmette, t. 1, p. 5); 6. a) 1379 suj. inanimé (J. Labarte, Invent. du mobilier de Charles V, p. 79: un gros ruby [...] qui tient de couleur violette); b) 1400-03 (Christine de Pisan, Mutacion de Fortune, éd. A. Solente, 7246: choses[...] lesquelles sont appartenans A Philosophie et tenans); c) 1511 d'une pers. tenir de la lune « être bizarre (lunatique) » (Gringore, Jeu du Prince des Sotz, éd. Ch. d'Héricault et A. de Montaiglon, t. 1, p. 212); d) 1561 tenir (qqc.) de race (J. Grévin, Esbahis ds Théâtre, éd. L. Pinvert, p. 132); e) 1623 d'un ouvrage d'esprit tenant du grave et du relevé (J. Chapelain, Lettre ou Discours (...) portant sur le poëme d'Adonis, p. IV, 2); 7. a) 1508 tenants et aboutissants « confins, limites (de propriétés) », v. aboutissant; b) 1625 p. ext. sçavoir touts les tenants et aboutissants (Peiresc, Lettres, éd. Ph. Tamizey de Larroque, t. 6, p. 149); 8. 1684 (F. Bernier, Abr. de la philos. de Gassendi, p. 73: Car l'on peut concevoir un composé être immobile [...] en ce que ces principes [dont il est formé] se tenant joints, accrochez et embarassez entre eux, le tout se trouve dans une consistance...). G. « Être, se comporter (d'une certaine manière), avoir telle attitude, tel comportement » 1. a) ca 1100 (Roland, 2391: Desur sun braz teneit le chef enclin); b) ca 1100 (ibid., 647: Marsilies tint Guenelun par l'espalle); c) ca 1140 se tenir « rester dans une position stable » (Pélérinage de Charlemagne, éd. G. Favati, 388); d) 1160-74 sei tenir « se placer » (Wace, Rou, III, 4280: Lez un tertre se sunt tenu); e) 1176-81 tenir compagnie (Chrétien de Troyes, Chevalier Lion, 5728); 2. a) ca 1160 (Eneas, éd. J. J. Salverda de Grave, 8468: Plaint et sospir [...] pres del cuer tienent); b) 1268 (Claris et Laris, 19230 ds T.-L.: El chief li est un max tenuz, si n'a cure de compaignie); c) ca 1276 (Adam de La Halle, Jeu d'Adam, 375, ibid.: malade dou mal qui li tient au chervel); d) 1377 (Guillaume de Machaut, Loange des dames, éd. Chichmaref, XXXIV, 7: li souvenirs qui en mon cuer se tient); 3. ca 1170 mal tenir « nuire (à quelqu'un) » bien tenir « être secourable (à quelqu'un) » (Marie de France, Lais, Fresne, 367, Lanval, 20); 4. ca 1170 (Id., ibid., Fresne, 373: Les noces tindrent richement); 5. a) 1160-74 avec adj. (Wace, Rou, III, 5437: Mult se tint orgueillos e fier); b) 1176-81 tenir bien son leu « tenir bien sa place (dans un combat) » (Chrétien de Troyes, Chevalier Lion, 3718); c) ca 1220 (Gautier de Coinci, Mir., éd. V. F. Koenig, I Mir 36, 298: Tenons nous net, tenons nous sobre); d) ca 1250 (Joufroi de Poitiers, éd. P. B. Fay et J. L. Grisby, 477: se tindrent quoi et mu); 6. ca 1165 (Benoît de Ste-Maure, Troie, éd. L. Constans, 10382: Solonc l'usage qu'il teneit); 7. 1361 se tenir (à un endroit) « vivre » (Froissart, Paradis d'Amour, éd. F. Dembowski, p. 59: se tient, demeure, sejourne); 8. a) 1456 se tenir sur sa garde (A. de La Sale, Jehan de Saintré, éd. J. Misrahi et C. A. Knudson, p. 184); b) mil. xvies. se tenir sur ses gardes (Marguerite de Navarre, Lett., CIX ds Littré). H. « Faire que quelque chose ait lieu (à un endroit déterminé, à une date précise...) » 1. a) ca 1100 (Roland, 3761: Ore en tendrum conseil); b) ca 1100 (ibid., 53: Carles [...] À Saint Michel tendra mult halte feste); c) 1216 tenir cel siege (Guillaume Le Clerc, Fergus, éd. W. Frescoln, 4912); d) ca 1400 (Froissart, Chron., éd. G. T. Diller, p. 746: place ordonnee pour tenir marquiet le merquedi et le samedi); d'où p. ext. pronom. passif ca 1400 (Id., ibid., p. 464: li jours asignés que la feste se tenroit); 2. a) ca 1100 « avoir un entretien avec quelqu'un » (Roland, 2836: Ne pois a vos tenir long parlement); b) 1erquart xiies. tenir nule parole de « ne pas faire mention de » (Lancelot, éd. A. Micha, t. 8, p. 114); 3. fin xives. (Froissart, Chron., p. 666: le siège tenant [en incise]), cf. séance* tenante. I. « Résister (à quelqu'un), défendre (quelque chose contre quelqu'un), soutenir (un assaut contre quelqu'un), soutenir la comparaison avec (quelqu'un, quelque chose) » 1. a) ca 1100 tenir contre (qqn) « résister à » (Roland, 3183); b) ca 1100 (ibid., 3355: N'escut ne bronie ne pout sun colp tenir); c) ca 1100 (ibid., 1238: ceste bataille ben la puum tenir); 2. a) ca 1155 tenir place « résister » (Wace, Brut, 11918); b) 1160-74 sei tenir « id. » (Id., Rou, III, 858: Tenir ne s'osent ne defendre); c) 1174-76 « interdire (un accès à quelqu'un) » (Guernes de Pont-Sainte-Maxence, St Thomas, 5752: Ne li furent les portes ne nuls des uis tenuz); d) ca 1460 tenir bon (Myst. du siege d'Orléans, p. 721 ds Littré); e) 1548 tenir coup « résister » (Noël Du Fail, Propos rustiques, éd. Assézat, t. 1, p. 93); 3. a) ca 1165 sei tenir a au subj. « pouvoir soutenir la comparaison avec » (Benoît de Ste-Maure, op. cit., 2468: Un sors baucenz ert de Castele, Ne s'i tenist pas arondele); b) xiies. (Fragment d'un petit poème dévot ds Jahrbuch für romanische und Englische Literatur, t. 6, p. 366: Vers lui ne pued tenir nulle clartez, Tant par est belsz), seulement en a. et m. fr., v. soutenir; 4. a) 1174-76 « être du parti de quelqu'un » (Guernes de Pont-Sainte-Maxence, St Thomas, 848: tienge sei fermement, Od lui tendront par tut, si l'en funt serement); b) ca 1208 (Villehardouin, Constantinople, p. 172: et Henris ses freres, et li cuens [...] et cil qui a els se tenoient alerent a l'asaut); c) 1369 tenir l'opinion (de qqn) « soutenir le point de vue de » (Guillaume de Machaut, Prise d'Alexandrie, 2701); 5. a) 1200 tenir court « serrer de près, limiter la liberté de quelqu'un » (J. Bodel, Jeu St Nicolas, 1117); b) 1176-81 (Chrétien de Troyes, Chevalier Lion, 2606: prison ne tient [...] nuz amanz verais et leax): 6. a) 1610 tenant subst. « celui qui, dans un tournoi, entreprenait de tenir contre tout assaillant » (Deimier, Acad. de l'art poetique, p. 584: les tenans de ce combat); b) 1615 tenant ici empl. p. métaph. pour désigner l'amoureux dans le vocab. précieux (V. d'Audiguier, Hist. tragi-com. de nostre temps, Lysandre et Caliste, p. 16). J. « Occuper un certain espace, nécessiter un certain espace » 1. ca 1160 « contenir + mesure de capacité » (Enéas, 6741: un sestier tint [le vase]); 2. a) ca 1215 « trouver place (dans) » (Eles, 305 ds T.-L.: La tierce fenne qui tenir Doit en l'ele, c'est que...); b) 1306 tenir grant espace (Joinville, Vie de Saint Louis, 95); c) ca 1395 (Le Saint voyage de Jherusalem du Seigneur d'Anglure, éd. Bonnardot et Longnon, p. 22: une petite tournelette ou il ne peut tenir que deux personnes a une fois); 3. 1369 (Guillaume de Machaut, Prise d'Alexandrie, 2006: Alexandrie est une ville qui tient de tour plus de...). K. « Être (d'inanimés), se trouver, fixé, placé, à un endroit, pour soutenir...» 1. a) ca 1200 (Dialogue Gregoire, 73, 19 ds T.-L.: alsi com ele par racines tenist en terre); b) ca 1210 (Robert de Clary, Constantinople, 82, ibid.: chinq cens mansïons, qui toutes tenoient l'une a l'autre); 2. a) 1306 (Joinville, Vie St Louis, 304: Le roy commanda (...) que il copassent les cordes qui tenoient les ponts entre nous et les Sarrazins); b) 1460-83 (Jean de Roye, Chron. scandaleuse, éd. B. de Mandrot, p. 357: elle [le cordon de l'Ordre du Roi] tenoit par derriere [sur un col] a une espingle); c) 1636 tenant subst. hérald. (Monet). Du lat. pop. tenire (att. en 514, v. Hollyman, p. 56), class. tenere « avoir (avec soi), tenir dans une certaine position, se trouver (dans telle attitude); contenir, inclure; occuper (un espace, une position); avoir le contrôle sur; posséder; occuper (une charge, une fonction); continuer à, persister, observer (des règles, le silence...); retenir, empêcher; garder en mémoire, avoir dans l'esprit d'où comprendre, estimer que..., savoir » et au passif « être lié à, obligé de, dépendant de ». En a. fr. tenir a été empl. dans de nombreuses loc., avec une valeur de quasi-auxiliaire (v. J. Bédier, Lexique de Roland, Keller, T.-L.); le développement sém. de tenir est lié à celui des comp. abstenir, contenir, détenir, entretenir, maintenir, retenir, soutenir. Sur le sens de tenere et de tenir à l'époque féodale, impliquant une concession moyennant services, v. Hollyman, pp. 55-60. Fréq. abs. littér.: 46 708. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 54 348, b) 71 946; xxes.: a) 71 090, b) 70 966. Bbg. Arnould (G.). Tenir compte... In: Autour d'un dictionnaire: le Trésor de la langue française. [S., l.], Inalf, 1990, pp. 53-67. − Bogacki (K.). Les Prédicats locatifs stat. en français... Warszawa, 1977, pp. 21-22, 70. − Clédat (L.). Le Verbe tenir... R. Lang. rom. 1916-17, t. 59, pp. 5-15. - D.C.F.G. 1976, t. 2, p. 1221. − Dejay (D.). Les Rel. actancielles appréhendées à travers un corpus de verbes fr. Thèse Univ. Nancy II. 1986, p. 25, 51, 57, passim. − François (J.). Le Lex. verbal fr. et les dégroupements homon. Z. fr. Spr. Lit. 1980, t. 90, no1, pp. 20-23. − Hérique (E.). Ét. de l'interj. tiens... Thèse Univ. Nancy II. 1986, pp. 43-71. − Lanly (A.). Morphol. hist. des verbes fr. Paris, 1977, pp. 316-318. − Muller (Ch.). Les Verbes les plus fréquents du fr. Fr. Monde. 1974, no103, pp. 14-17. − Quem. DDL t. 6, 10, 18, 19, 27, 32. − Sur le verbe, sous la dir. de S. Rémi-Giraud, M. Le Guern. Lyon, 1986, pp. 133-136, passim. |