| TAILLER, verb. trans. I. − Couper, trancher. A. − [Le compl. désigne un inanimé concr.] Tailler des tartines, des mouillettes de pain; tailler le foin. Le lieutenant tailla dans le gigot de l'intendance une tranche épaisse et la coupa en larges morceaux (Vercel, Cap. Conan, 1934, p. 40).Il taillait ce chêne en lanières avec prestesse, y engageant le fer, et le manœuvrant d'un mouvement continu de son poignet cerclé de cuir (Van der Meersch, Empreinte dieu, 1936, p. 32). ♦ Vieilli. Tailler (le pain de) la soupe*. ♦ APIC. Tailler les ruches. ,,Prélever une partie du miel dans les ruches à l'aide de couteaux recourbés`` (Fén. 1970). − Empl. pronom. réfl. indir. Tout en causant, elle se taillait de larges tranches de pain (Queneau, Pierrot, 1942, p. 93). − Empl. intrans. Honoré taillait dans la miche de pain rassis (Aymé, Jument, 1933, p. 43).Les outils de métal coupent ou taillent mieux que les couteaux ou les herminettes de pierre (Lowie, Anthropol. cult., trad. par E. Métraux, 1936, p. 18). 1. Locutions a) Pop., fam. Tailler la/une/des bavette(s). V. bavette. b) Vieilli. Tailler les morceaux (à qqn). ,,Lui couper le pain, la viande en morceaux, de manière à ce qu'il n'ait plus qu'à manger`` (DG). Au fig. Tailler les morceaux (à qqn). ,,Limiter ce qu'il doit manger ou dépenser; lui prescrire ce qu'il doit faire`` (Ac. 1878). On nous a taillé nos morceaux bien courts (Ac.1878). c) Tailler des croupières (à qqn). V. croupière. d) Empl. pronom. réfl. indir., au fig. Se tailler la part du lion. S'attribuer la plus grosse part d'un partage, au détriment des autres. Un jour même, il avait forcé Lydie à voler sa mère, il s'était fait apporter par elle deux douzaines de sucres d'orge (...). Le pis était qu'il se taillait la part du lion. Bébert, également, devait lui remettre le butin (Zola, Germinal, 1885, p. 1365). 2. P. anal., MAR. [Le suj. désigne un navire] Tailler la lame et, en empl. intrans., tailler de l'avant, tailler de la route. Fendre l'eau à grande vitesse. J'étais fort désireux de voir un grand voilier tailler de la route dans une forte houle (A. Gerbault, O.Z.Y.U. Dernier journalds Gruss1978). − P. anal., pop. [Le suj. désigne une pers.] Tailler la route. Prendre la route, partir pour aller au loin. Ceux qui avaient tâté d'une liberté même provisoire, même tôt interrompue, en conservaient la nostalgie. Ceux-là ne rêvaient plus que de « tailler la route » (Ambrière, Gdes vac., 1946, p. 220). ♦ Empl. abs. [Souvent à la forme impér.] Taille! Va-t-en! Sauve-toi! Allez, taille... dit Tounsi, maintenant y en a marre (R. Curel, Brancula, 1969, pp. 136-137 ds Cellard-Rey 1980). ♦ Empl. pronom. Quitter un lieu rapidement, s'enfuir. Synon. pop. décamper, se barrer, se casser, se tirer.Se tailler à toute vitesse. Je me suis taillé par la fenêtre de la cuisine (Simonin, Touchez pas au grisbi, 1953, p. 61). B. − [Le compl. désigne une pers.] 1. Vx. [Dans un cont. guerrier] Trancher, frapper avec une arme coupante, massacrer. Ces bruits furieux débouchèrent sur la place comme un ouragan: France! France! Taillez les manants! (Hugo, N.-D. Paris, 1832, p. 519). ♦ Loc. Tailler en pièces (l'ennemi, une troupe). Déchiqueter, massacrer. Le duc René II tailla en pièces l'armée du terrible duc de Bourgogne (Barrès, Cahiers, t. 3, 1902, p. 41). − Empl. intrans. Frapper de taille (p. oppos. à pointer). Les soldats entourés d'agression taillaient dans le tumulte (Hamp, Champagne, 1909, p. 167).Le dragon taillait, pointait, sa latte volait partout (Pourrat, Gaspard, 1925, p. 274). 2. CHIRURGIE a) Vx. Pratiquer l'opération de la taille. Il fut attaqué de la pierre; il fallut le tailler, et l'opération faite en apparence avec succès lui laissa cependant pour le reste de sa vie une très-grande incommodité (Sainte-Beuve, Portr. littér., t. 1, 1829, p. 7). b) Empl. intrans. Couper, inciser. Le matin, il va voir à l'Hôtel-Dieu tailler et amputer (Flaub., Corresp., 1846, p. 415).Les chirurgiens regardaient les plaies et ils taillaient à même la chair pour retrancher tout ce qui était douteux (Duhamel, Passion J. Pasquier, 1945, p. 153). − Loc. Tailler dans le vif. Tailler dans la chair vivante; au fig., s'attaquer à l'essentiel à l'aide de moyens énergiques et rapides. Il arrivera encore, que des crises violentes forceront les dictatures, qu'elles soient populaires ou monarchiques, à tailler dans le vif et à exiger de la part des classes riches des sacrifices considérables (Sand, Hist. vie, t. 4, 1855, p. 168). 3. Empl. pronom. réfl. [Le suj. désigne un cheval] ,,Se faire des entailles ouvertes au membre voisin, par l'un des pieds`` (St-Riquier-Delp. 1975). II. − Couper, enlever certaines parties (d'un objet, d'une matière) avec un instrument tranchant, afin de lui donner une forme déterminée. A. − 1. [Le compl. désigne un objet] Tailler un crayon, un pieu; tailler qqc. en angle, en biseau, en dents de scie, en pointe. Scapin taillait de son couteau une baguette qu'il dépouillait d'écorce et qui devait servir de broche (Gautier, Fracasse, 1863, p. 159).Lors de la coupe [des cannes à sucre], on a eu soin de tailler en sifflet l'extrémité de la tige, facilitant ainsi l'introduction dans les cylindres de broyage (Rouberty, Sucr., 1922, p. 77). − Vx. Tailler sa plume. Couper le tube d'une plume d'oie en forme de bec afin de pouvoir l'utiliser pour l'écriture. Julien avait taillé une vingtaine de plumes (Stendhal, Rouge et Noir, 1830, p. 373). − Vieilli. Synon. de couper.Tailler sa moustache, sa barbe (en carré, en collier); tailler ses cheveux (court, en brosse); tailler ses ongles (à ras, en pointe). Ses favoris poivre et sel qu'il avait soigneusement taillés en triangles (G. Leroux, Parfum, 1908, p. 63).Le coiffeur venait de tailler ses cheveux comme un buisson autour d'une plaque funéraire (Jouhandeau, M. Godeau, 1926, p. 162). ♦ Empl. pronom. réfl. indir. Les musulmans assemblés devant leurs mosquées, se lavaient les mains, les pieds, se taillaient les ongles, se peignaient la barbe (Volney, Ruines, 1797, p. 81). ♦ Constr. factitive. Il négligeait de se faire tailler les cheveux (A. France, Vie littér., 1892, p. 252).Tristan, qui vient de se faire tailler la barbe, a les oreilles pleines de poils coupés (Renard, Journal, 1902, p. 766). − Tailler la pierre, les pierres. Donner à la pierre, aux pierres après sciage une forme qui les rendra utilisables, par la suite, dans la construction. [Ce peuple] coupait et taillait parfaitement les pierres; elles étaient placées et jointes suivant toutes les règles de l'art (Voy. La Pérouse, t. 2, 1797, p. 91): ... quand il s'agit de donner des calepins propres à permettre de tailler la pierre loin du chantier, il faut simplifier les coupes (...), éviter (...) les évidements (...). Les Grecs taillaient leurs pierres à la carrière, épannelées très-près et n'exigeant plus qu'un ragrément.
Viollet-Le-Duc, Archit., 1872, p. 107. 2. Tailler qqc. dans une matière. Découper, confectionner. Une courroie de transmission de machine valait une petite fortune parce qu'on y taillait des semelles (Van der Meersch, Invas. 14, 1935, p. 197).Fabienne, qui est tout juste bonne à tailler des torchons dans les vieux draps (Montherl., Port-Royal, 1954, p. 990). a) En partic. − Façonner, sculpter. Toutes les races, mêmes les plus primitives, possèdent la faculté d'orner des pots, de tailler des figurines dans le bois (Faure, Hist. art, 1912, p. 227).Un artiste ébauche une maquette avant de tailler dans le marbre la statue (Bordeaux, Fort de Vaux, 1916, p. 181). ♦ Loc. Tailler qqn en marbre. Lui faire sa statue, son buste. Je crois que le cher favori est jaloux des statues qui ornent les tombeaux de Quélus et de Maugiron? Eh bien (...) nous le ferons tailler en marbre à son tour (Dumas père, Henri III, 1829, i, 7, p. 140). − Tailler une route, un chemin. Ouvrir une voie à travers la roche, etc. Il fallut tailler un chemin dans le roc vif, en employant le fer et le feu (Michelet, Hist. romaine, t. 2, 1831, p. 12).N'as-tu point entendu de cette route que les paysans taillaient tout au travers de la forêt? (Claudel, Annonce, 1948, iii, 2, p. 196). ♦ Empl. pronom. [Le suj. désigne une masse d'eau] Se créer un passage (par phénomène d'érosion). Se tailler une voie. Il a été facile aux eaux de se tailler de larges passages à travers les sables et les argiles (Vidal de La Bl., Tabl. géogr. Fr., 1908, p. 103). b) [Le suj. désigne un écrivain, un rédacteur de revue] Effectuer des coupures, supprimer des passages dans un article, un ouvrage, pour le réduire à l'essentiel ou pour le censurer. Deslauriers touchait à son vieux rêve: une rédaction en chef, c'est-à-dire au bonheur inexprimable de diriger les autres, de tailler en plein dans leurs articles, d'en commander, d'en refuser (Flaub., Éduc. sent., t. 1, 1869, p. 227).Mon livre presque achevé, j'ai été pris d'une sorte de folie de coupures. Vingt-trois pages ont sauté d'un coup (...). Et le lendemain, je me suis remis à tailler dans ce gros roman dont chaque phrase m'a donné tant de mal (Green, Journal, 1931, p. 75). B. − [Le compl. désigne une matière] Façonner, sculpter. Tailler la pierre. Comme cet homme [Michel-Ange] taillait le marbre! (Delécluze, Journal, 1825, p. 232).Mais le nègre, ne taillant que le bois et l'ivoire, peut-il œuvrer pareillement une matière dure telle que la pierre? (Arts et litt., 1935, p. 22-1). − Tailler une pierre précieuse (diamant, rubis, etc.). Une fort belle parure prendrait place à côté de la précédente: composée de saphirs taillés en tablettes et entourés de brillants (Mallarmé, Dern. mode, 1874, p. 713).On le taille [le spinelle] en table, en brillant ou en cabochon avec le même bon résultat (Metta, Pierres préc., 1960, p. 84). ♦ Empl. pronom. à sens passif. Au milieu de ces tanières s'élève un haut bâtiment de bonne mine, à larges fenêtres, où j'entends ronfler le bruit d'une machine à vapeur. C'est l'établissement où se taillent les diamants (Du Camp, Hollande, 1859, p. 122).Quand elle n'est pas présentée en cabochon, l'émeraude se taille très simplement en table et en terrasse, en carré ou rectangle aux coins abattus (Metta, Pierres préc., 1960, p. 81). C. − Spécialement 1. ALPIN. Tailler des marches, des escaliers. Creuser et façonner des marches, des escaliers dans la glace à l'aide d'un piolet ou d'une hachette. [Tartarin] ne prit pas au sérieux les difficultés de la route, si l'on peut appeler route la terrible arête de glace sur laquelle ils avançaient (...) tellement glissante que le piolet de Christian devait y tailler des marches (A. Daudet, Tartarin Alpes, 1885, p. 189). 2. ARBORIC. Couper une partie des rameaux ou des branches d'un végétal (arbuste, arbre fruitier ou d'ornement) afin d'améliorer sa végétation, sa fructification ou son aspect. Synon. ébrancher, élaguer, émonder.Tailler un rosier, un hortensia, un lilas, un cerisier, un buis, un if; tailler une haie; tailler les vieux sarments de la vigne; tailler un conifère en cône, en boule, en pyramide; tailler des arbres en voûte; tailler court, long. Les habitants taillent partout le tilleul en arcade [dans le Loiret] (Michelet, Journal, 1835, p. 216).Au printemps, on taille les arbres fruitiers et la vigne (Debatisse, Révol. silenc., 1963, p. 23). − Absol. Il faut avoir soin, lorsqu'on taille, de placer le crochet [du sécateur] au-dessus du bois à tailler (Brunet, Matér. vitic., 1909, p. 132). 3. COUT. Découper dans une étoffe les différentes parties d'un vêtement dans le but de les assembler et de les coudre. Synon. couper.Tailler un manteau; tailler un habit sur mesure; porter un vêtement bien, mal taillé. Elle revit soudain sa mère occupée à lui tailler la robe, un soir d'hiver, l'étoffe étalée sur la table de la salle (Roy, Bonheur occas., 1945, p. 166).Cette merveilleuse étoffe indienne, qu'en as-tu fait? (...) On pourrait tailler une blouse extraordinaire là dedans! (Beauvoir, Mandarins, 1954, p. 504). − Absol. [Maman], si vive, réfléchissait longuement avant de tailler à même l'étoffe (Duhamel, Notaire Havre, 1933, p. 61).Si elles [les nobles dames] ne tissent pas (la besogne passe pour inférieure), elles taillent, elles cousent, elles ornent (Faral, Vie temps st Louis, 1942, p. 140). ♦ Tailler en plein drap*, en pleine étoffe*. Empl. pronom. réfl. indir. On se taillait des vêtements dans les couvertures (Van der Meersch, Invas. 14, 1935, p. 334).Elle se taillerait une robe de matin (Guèvremont, Survenant, 1945, p. 156). − P. métaph. V. étoffe C 1 ex. de Thibaudet. − Loc. fig. ♦ Tailler de la besogne (à qqn). Prévoir, procurer du travail à quelqu'un. Tout le livre retomba sur elle; quand il [son père] lui avait taillé sa besogne (...) il partait se promener (Goncourt, G. Lacerteux, 1864, p. 21).Empl. adj. Je crois que Sa Grâce a pour le moment de la besogne toute taillée qui l'empêchera d'entrer dans vos vues politiques (Dumas père, C. Howard, 1834, i, tabl. 1, 2, p. 211). ♦ Être taillé sur le même patron. Ressembler à quelqu'un. Dieu merci! tous les gentilshommes n'étaient pas taillés sur le même patron que Gaspard (Sandeau, Sacs, 1851, p. 31).Séverac, Pascal, Carvajan sont taillés sur ce patron. C'est l'idéal du héros bourgeois, c'est-à-dire l'ancien héros romantique pourvu de diplômes (Lemaitre, Contemp., 1885, p. 345). ♦ Après avoir taillé, il faut coudre. Il faut aller jusqu'au bout de ce que l'on a entrepris. (Dict. xixeet xxes.). 4. MÉCAN. Tailler des engrenages. Réaliser à l'aide d'une machine la denture d'une roue d'engrenage, d'un outil. Ceux qui construisent beaucoup d'engrenages ont intérêt à les tailler avec des machines spéciales (Gorgeu, Machines-outils, 1928, p. 25). D. − Au fig. 1. Vieilli. Tailler et rogner. Disposer de tout selon sa propre fantaisie. Notre digne patron (...) est sur nos épaules, taillant, rognant à tort et à travers, nous imposant ses lubies, ses aberrations, ses caprices (Sand, Corresp., t. 1, 1831, p. 167). 2. Empl. pronom. a) Se tailler un empire, un royaume, un marché, une fortune, une place. Se créer, se procurer quelque chose au prix d'efforts obstinés. En dix ans, il s'était taillé une jolie fortune (Van der Meersch, Invas. 14, 1935, p. 151).Un serment, qu'était-ce, pourvu qu'à ce prix, comme vassal théorique du basileus, il pût se tailler quelque vaste principauté en Asie (...)? (Grousset, Croisades, 1939, p. 21). b) Se tailler un succès. Se faire brillamment remarquer, obtenir du succès grâce à des qualités d'endurance et d'obstination. Il était étonnamment endurant, ce petit bonhomme pâle et têtu, habitué au dur travail de la mine. Il se tailla un succès, gagna de l'argent, fut admiré des femmes (Van der Meersch, Invas. 14, 1935, p. 169). III. − Vieilli. Partager, répartir. A. − MONNAIE. ,,Diviser un marc d'or ou d'argent en une certaine quantité de pièces de monnaie, suivant ce qui est ordonné par les règlements`` (Ac. 1835, 1878). B. − HIST. Tailler l'impôt. ,,Le répartir`` (DG). P. méton. Tailler le peuple. Le soumettre à la taille (v. ce mot II B). Tailler (à corvée et) à merci (v. ce mot I B). La noblesse et le clergé taillaient à corvée et à merci les serfs de la province (Champfl., Bourgeois Molinch., 1855, p. 203).Jean de Meung se montre sévère à ces seigneurs qui (...) taillent à merci la pauvre gent (Faral, Vie temps st Louis, 1942, p. 248). C. − JEUX(cartes). Diviser un jeu de cartes en parties égales. [Comme le croupier] ne peut tenir tout ce paquet de jeux à la main, il le taille ensuite avec de petits cartons en parties à peu près égales, prenant successivement, ensuite, dans le cours du jeu, les paquets partiels séparés par ces petits cartons (Les Joueuses, 1868ds Rigaud, Dict. arg. mod., 1881, p. 358). − [Le suj. désigne le joueur nommé banquier] Tailler une banque. ,,Distribuer les cartes et jouer seul contre tous les autres joueurs`` (Ac. 1935). Les deux joueurs s'assirent face à face, et l'Espagnol disposa devant lui, de l'or et des billets, pour vingt mille francs environ. (...) la plupart des assistants se pressaient autour de la table, curieux de voir l'Espagnol tailler une banque (Bourges, Crépusc. dieux, 1884, p. 292).Empl. abs. Lenoir qui taillait au Passage-Club regarda avec reproche le croupier. Par deux fois, celui-ci avait oublié de ratisser les cartes, il avait fallu lui faire signe (Aragon, Beaux quart., 1936, p. 438). ♦ Tailler un baccarat, un lansquenet, un pharaon, etc. ,,Tenir la main et distribuer les cartes, jusqu'à ce que la main passe`` (DG). Après son dîner, votre seigneur et maître A son club est allé tailler le baccarat (Murger, Nuits hiver, 1861, p. 121).On faisait le whist et on taillait un lansquenet dans un autre salon (Kock, Ficheclaque, 1867, p. 94).Dans le grand salon jaune (...), Jeanne Vaubernier (...) avait taillé le pharaon de la main gauche (Arène, J. des Figues, 1870, p. 48).Empl. intrans. Le directeur des théâtres à Naples était un (...) garçon de café qui, à force de jouer, et surtout de tailler au pharaon, et de donner à jouer, s'est fait une fortune de plusieurs millions (Stendhal, Rossini, t. 1, 1823, p. 197). Prononc. et Orth.: [tɑje], [ta-], (il) taille [tɑ:j], [taj]. Lar. Lang. fr. [taje]. Martinet-Walter 1973 [-tɑ-, -ta-] (8, 9). Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) α) 2emoit. du xes. talier « couper en plusieurs morceaux » (S. Léger, éd. J. Linskill, 157); ca 1100 absol. « trancher » (Roland, éd. J. Bédier, 1339: Durendal, ki ben trenchet et taillet);
β) fin xiiies. [ms.] « battre, défaire des hommes, des adversaires » (Continuations de Perceval [ms. Montpellier, Bibl. de l'Ec. de Méd., H 249], éd. W. Roach, t. 2, 18075); 1579 tailler (qqn) en pièces (Larivey, Laquais, II, 2 ds Anc. théâtre fr., éd. Viollet le Duc, t. 5, p. 39); b) α) ca 1165 absol. « faire une incision, une entaille dans les chairs » (Benoît de Ste-Maure, Troie, 14609 ds T.-L.);
β) 1562 arboric. (Du Pinet, Hist. du Monde de C. Pline Second, Lyon, C. Senneton, t. 1, p. 474: tailler les arbres); c) 1928 intrans. « s'en aller, partir » (Lacassagne, Arg. « milieu », p. 192); 1945 pronom. « id. » (Sartre, Sursis, p. 178); d) 1946 tailler la route (Ambrière, Gdes vac., p. 220); 2. a) ca 1140 « couper, travailler une matière, un objet avec un instrument tranchant de manière à lui donner une forme déterminée » (Voyage de Charlemagne, 381 ds T.-L.); b) 1283 tailler les vignes (Philippe de Beaumanoir, Coutumes de Beauvaisis, éd. Am. Salmon,1558); 3. a) α) ca 1160 absol. « couper dans une étoffe ce qu'il faut pour confectionner un vêtement » (Enéas, éd. J.-J. Salverda de Grave2, 7086);
β) 1165-70 chauces ... bien tailliees (Chrétien de Troyes , Erec et Enide, éd. M. Roques, 100); b) 1881 se tailler un succès (Zola, Doc. littér., Moral. ds litt., p. 289); 4. 1200 « soumettre à la taille » (Jean Bodel, Jeu de S. Nicolas, A. Henry, 844); 5. 1690 intrans. terme de jeu (Fur.). D'un lat. tardif taliare (vies., v. FEW t. 13/1, p. 53a), prob. dér. du lat. class. talea « bouture, scion »; cf. les dér. intertaliare « tailler les arbres » (ives., ibid., t. 13/1, p. 54b, note 57) et taliatura « taille des arbres » (FEW, loc. cit.). Fréq. abs. littér.: 708. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 722, b) 1 278; xxes.: a) 1 074, b) 1 063. DÉR. 1. Taillage, subst. masc.a) Carr. Ensemble des opérations de façonnage de la pierre à partir du bloc brut. (Dict. xixeet xxes.). b) Céram. Ensemble des opérations qui ont pour but de préparer les terres dans la fabrication des briques, en les brisant ou en les découpant en tous sens soit à la pelle, soit à la machine (tailleuse) (d'apr. Chabat 1881). c) Mécan. Opération d'usinage ayant pour but d'enlever de la matière à l'aide d'un outil coupant. Pratiquement, pour que l'outil [d'une machine à tailler les engrenages coniques] ne s'use pas pendant le taillage d'une dent, il faut qu'il ait peu de matière à enlever (Gorgeu, Machines-outils, 1928, p. 129).− [tɑja:ʒ], [ta-]. − 1resattest. a) ca 1170 « action de percevoir la taille » (Rois, éd. E. R. Curtius, p. 206), b) α) 1255 « action de tailler, coupe » (doc. Arch. Tournai ds Gdf.: tallage),
β) 1881 céram. (Chabat),
γ) 1902 alpin. (R. alpine, no11, nov., p. 371 ds Quem. DDL t. 27); de tailler, suff. -age*. 2. Taillerie, subst. fém.a) Joaill. Atelier où s'effectue la taille des pierres précieuses ou pierres fines. La célèbre taillerie Assher et Co à Amsterdam le divisa [le Cullinan, le plus gros diamant trouvé jusqu'à présent] en neuf gros brillants et quatre-vingt-quinze petits (Metta, Pierres préc., 1960, p. 67).P. méton. Art de tailler les pierres précieuses ou pierres fines. (Dict. xixeet xxes.). b) Carr. Usine où l'on débite et façonne la pierre à partir du bloc brut. Dans la masse de pierre, cependant, se trouvent parfois des cassures naturelles. Les pierres extraites dans ces conditions n'ont pas les dimensions requises pour les grands morceaux. Elles sont alors distribuées par les grues dans une taillerie annexe où des tronçonneuses à chaîne les découpent en morceaux spéciaux (Lambertie, Industr. pierre et marbre, 1962, p. 73).− [tɑjʀi], [taj-]. − 1resattest. a) α) 1293 « métier de tailleur d'habits » (Ordonnance ds Étienne Boileau, Métiers, éd. G.-B. Depping, 414),
β) 1304 « boutique de tailleur » (doc. ds Gdf.), b) 1867 taillerie de diamants (Moniteur universel, 26 mai, p. 631, 1recol. ds Littré); de tailler, suff. -erie*. 3. Tailleuse, subst. fém.a) Arboric. Tailleuse de haie. ,,Appareil portable, à main, fonctionnant dans toutes les positions et destiné à tailler les haies dont les tiges ou les branches mesurent jusqu'à 4 cm d'épaisseur`` (Lar. agric. 1981). b) Céram. Machine munie d'un plateau garni de lames ou de couteaux d'acier, auquel on imprime un mouvement de rotation permettant de briser et de découper les terres dans la fabrication des briques (d'apr. Chabat 1881). c) Mécan. Machine-outil utilisée pour tailler les engrenages. (Dict. xxes.). − [tɑjø:z], [ta-]. Littré, Lar. Lang. fr. [ta-]. − 1reattest. 1881 techn. (Chabat, s.v. taillage); fém. de tailleur*. BBG. − Archit. 1972, p. 45. − Quem. DDL t. 27 (et s.v. taillage). − Sculpt. 1978, p. 579. |