| * Dans l'article "SUISSE,, adj. et subst." SUISSE, adj. et subst. I. − Adj. et subst. De Suisse. A. − (Celui, celle) qui est originaire de Suisse, qui y habite. Synon. helvète (vieilli), helvétique.Citoyen suisse. On ne conçoit pas comment les femmes suisses, souvent douées de tant de charmes, s'avisent d'apprendre la musique, avant d'avoir épuré les sons discordants de leur langage (Bonstetten, Homme Midi, 1824, p. 95).Le plus original des écrivains suisses d'aujourd'hui, Ramuz, fait difficilement accepter aux Français d'outre-Jura sa langue pleine de substance vaudoise (Arts et litt., 1936, p. 38-4). − En empl. coll., subst. masc. sing. C'est une belle chose pour le Suisse de pouvoir, d'un regard, contempler son canton, embrasser du haut de son Alpe le pays bien-aimé, d'en emporter l'image (Michelet, Peuple, 1846, p. 352). B. − [En parlant d'un animal, d'une plante] Qui provient de Suisse, qui y vit ou y pousse. Végétation suisse. Les vaches de race hollandaise et flamande sont plus sensibles que les vaches suisses aux effets de l'inoculation (Nocard, Leclainche, Mal. microb. animaux, 1896, p. 270). C. − [En parlant d'une chose] Qui est propre à la Suisse, à ses habitants. 1. [En parlant d'un inanimé concr.] Banque, franc suisse; Alpes, montagnes suisses. Que ne pouvait-elle s'accouder sur le balcon des chalets suisses ou enfermer sa tristesse dans un cottage écossais (...)! (Flaub., MmeBovary, t. 1, 1857, p. 45).On a découvert dans les lacs suisses d'assez nombreux vestiges des cités lacustres (R. Lalanne, Alim. hum., 1942, p. 20). − En partic. [En parlant d'un produit originaire de Suisse ou fabriqué en Suisse] Chocolat, fromage, montre suisse. Je dors deux heures à Brieg, bois pour la première fois du lait suisse (Michelet, Journal, 1830, p. 74).V. couteau A 1 c ex. de Maurois. ♦ Domaine des instit. pol.Canton suisse. V. canton A. ♦ Domaine ling.Quant au roi de Portugal (...) Il parle le français avec un léger accent suisse (Mérimée, Lettres ctessede Montijo, t. 2, 1855, p. 40).La collection de Frédéric Staub, de Zurich, particulièrement riche en ouvrages écrits dans le dialecte suisse allemand, a été acquise en 1898 (Civilis. écr., 1939, p. 48-4). 2. [Avec une valeur caractérisante] Qui présente certaines caractéristiques propres à la Suisse, à ses habitants. Neutralité suisse. Le moralisme et l'idéalisme suisses ont répugné absolument au roman naturaliste (Arts et litt., 1936, p. 38-4). 3. Loc. adj. À la suisse. À la manière des Suisses (évoquant le sérieux, la solidité, l'efficacité, le confort). Clubhôtel vous offre des stations de grande classe, la certitude d'un confort « à la suisse » (Le Point, 13 juin 1977, p. 141, col. 3). Rem. Pour l'empl. des synon. helvète et helvétique, v. rem. sous ces mots. D. − 1. HIST. DE FRANCE − Garde suisse, subst. fém. Corps de troupe formé de soldats suisses, organisé en régiment par Louis XIII et faisant partie de la Maison du roi jusqu'à la fin du règne de Louis XVI. Garde suisse ou, absol., suisse, subst. masc. Soldat de cette garde. La Révolution de Juillet avait laissé sur le pavé de Paris une foule de Suisses, de gardes du corps (...) qui mouraient de faim et que de bonnes têtes monarchiques, folles et jeunes sous leurs cheveux gris, imaginèrent d'enrôler pour un coup de main (Chateaubr., Mém., t. 4, 1848, p. 46).Son chapeau a la forme de celui des gardes suisses de Louis XVI (Villard, Hist. cost., 1956, p. 87). − Cent-Suisses, subst. masc. plur. Compagnie de soldats suisses créée par Charles VIII, qui fut intégrée aux gardes suisses à la Révolution et trouva une mort héroïque aux Tuileries en défendant la famille royale le 10 août 1792; p. méton., au sing. ou au plur., soldat appartenant à ce corps. On ne résiste pas toujours si longtemps à la soif; et en 1787, on vit mourir un des cent-suisses de la garde de Louis XVI, pour être resté seulement vingt-quatre heures sans boire (Brillat-Sav., Physiol. goût, 1825, p. 129). − Loc. proverbiale. Point d'argent, point de Suisse. V. argent II B. 2. Garde suisse, subst. fém. Corps de troupe formé de soldats suisses défendant jadis les États pontificaux et affecté aujourd'hui à la garde du Vatican; p. méton., groupe de soldats de ce corps. Le général monte aux appartements; arrivé dans la salle des sanctifications, il y trouve la garde suisse, forte de quarante hommes; elle ne fit aucune résistance, ayant reçu l'ordre de s'abstenir; le pape ne voulait avoir devant lui que Dieu (Chateaubr., Mém., t. 2, 1848, p. 395).Garde suisse ou, absol., suisse, subst. masc. Soldat de cette garde. Les Suisses ont conservé leur uniforme historique qu'ils arborent ici dans toute sa splendeur (J. Neuvecelle, Vatican, portes ouvertes, 1980, p. 40). II. − Subst. masc. A. − 1. [Du xviieau xixes.] Concierge, portier d'un hôtel particulier, d'une grande maison, au costume chamarré rappelant celui des gardes suisses. Un suisse rouge et doré fit grogner sur ses gonds la porte de l'hôtel (Balzac, Goriot, 1835, p. 78). 2. Laïc chargé dans une église du bon ordre des processions, des cérémonies, vêtu d'un uniforme chamarré avec baudrier, bicorne, canne et hallebarde. La grille du chœur (...) devant laquelle se tient debout un magnifique personnage splendidement harnaché; c'est le suisse (Hugo, Rhin, 1842, p. 103).V. hallebarde ex. de Musset et de Hugo. 3. Loc. verb. a) Vx. Boire comme un Suisse. Boire beaucoup. Les trois jeunes gens mangeaient comme des lions, buvaient comme des Suisses (Balzac, C. Birotteau, 1837, p. 183). b) Fam. Faire suisse (vieilli); boire, manger en/comme un suisse. Boire ou manger seul, sans inviter personne, en cachette. Je profitai de l'ombre et du repos des deux nuits passées dans ces fers et sur cette paille pour manger (...) le bienheureux pâté de perdreaux, en cachette, en suisse (Verlaine,
Œuvres compl., t. 4, Prisons, 1893, p. 376): vanderague: Hé! là-bas, la coterie! V'là un client qui fait suisse. joberlin: Où ça donc? vanderague (montrant Ledru): C'est çui-là! joberlin: C'est pourtant vrai! Y boit tout seul. tout le monde : Y fait suisse! Y fait suisse!
Courteline, Gaîtés esc., 1905, 6etabl., p. 78. 4. Région. (Canada), ZOOL. Petit rongeur de la famille des Écureuils, au pelage rayé sur toute la longueur, vivant en Amérique du Nord. Mes débuts cynégétiques à moi, consistèrent à chasser à coup de bâton (...) les suisses que leur mauvais sort amenait sur les arbres de notre parterre (Ringuet, Confidences, 1965, p. 133 ds Richesses Québec 1982, p. 2219). B. − COMM. Fromage frais, de lait de vache, à pâte molle et non salée, de forme cylindrique, pesant environ 60 grammes et comportant 60 % de matières grasses. À Gournay (...) on fabrique journellement des milliers de fromages double crème, dits suisses (Pouriau, Laiterie, 1895, p. 108).Le langage commercial actuel distingue le petit suisse, fromage frais d'environ 25 g, du suisse qui est deux fois plus volumineux (Dupré1972). − En compos. Petit-suisse*. REM. Suissesse, subst. fém.Femme suisse. Les filles n'y portent plus [dans l'Ain] le corset lacé par devant, le tablier de soie et le cotillon court qui les faisaient ressembler à des Suissesses (A. France, Vie littér., 1891, p. 156).Le féminin de Suisse est Suissesse, lorsque le mot est nom propre: un Suisse, une Suissesse (...) ce féminin tend à être remplacé par une Suisse (Dupré1972). Prononc. et Orth.: [sɥis]. Att. ds Ac. dep. 1762. Fém. parfois Suissesse [-sεs]. A. Majuscule ou minuscule. 1. Un Suisse (nom) mais un produit suisse (adj.). 2. Dans des loc., avec majuscule ou minuscule selon les dict.: Point d'argent, point de suisse ds Ac. 1935, mais point d'argent, point de Suisse ds Littré, Lar. Lang. fr., Rob. 1985; boire en suisse, faire suisse ds Lar. Lang. fr., mais boire en Suisse, faire Suisse ds Rob. 1985. 3. Dans les sens dér. (domestique, garde d'église, soldat pontifical, fromage, écureuil) gén. avec minuscule. Seul Ac. dep. 1762 écrit avec majuscule: Suisses du Vatican. B. Trait d'union et plur. Les cent-suisses ds Rob. 1985; Littré consacre une entrée à cent-suisses où il donne aussi le sing.: un cent-suisse, mais s.v. suisse il écrit cent suisses sans trait d'union. Prop. Catach-Golf. Orth. Lexicogr. Mots comp. 1981, pp. 321-322: cent-suisse ou centsuisse, plur. des cent-suisses ou centsuisses. Petit suisse ds Lar. Lang. fr., mais petit-suisse ds Rob. 1985, plur. des petits-suisses. Étymol. et Hist. 1. a) 1461-66 subst. « habitant de la Suisse » (Jean de Bueil, Le Jouvencel, éd. L. Lecestre, t. 2, p. 228); 1627 adj. « de Suisse » (Sorel, Le Berger extravagant, p. 19); b) 1782 « employé d'église en uniforme chargé de l'ordonnance des cérémonies » (Mercier, Tableau de Paris, t. 2, p. 88); c) 1935 « soldat de la garde suisse, au Vatican » (Ac.); 2. a) 1619 « concierge, portier d'une grande maison » (Cl. d'Esternod, L'Espadon satyrique, éd. F. Fleuret et L. Perceau, p. 113); b) 1828-29 (boire) avec son suisse (Vidocq, Mém., t. 3, p. 179: la petite chopine de vin qu'elle [la cabaretière] avale souvent avec son suisse); 1841 faire Suisse « boire seul » (d'apr. Esn.); 1893 manger, boire en Suisse « manger, boire seul » (Verlaine, loc. cit.); 3. a) 1632 au Canada « écureuil à pelage rayé dans le sens de la longueur » (Sagard, Le Grand voyage du pays des Hurons, pp. 305-306 ds Dict. du fr. québécois, vol. de présentation, 1985); b) 1872 « fromage blanc » (Littré); 1902 petit-suisse, v. ce mot. Nom des habitants de la Suisse. Au sens 1 a, cf. en 1455 Suissois (Archives du Nord, B 3537, no125789 ds IGLF). 3 a est prob. issu de l'anal. entre le pelage rayé de l'animal et l'uniforme des mercenaires suisses qui servaient en France, v. Dict. du fr. québécois, loc. cit. Fréq. abs. littér.: 928. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 1 764, b) 1 952; xxes.: a) 749, b) 944. Bbg. Arveiller (R.). R. Ling. rom. 1983, t. 47, p. 203. − Gall. 1955, p. 106. − Quem. DDL t. 9, 21, 38. |