| STYLISTIQUE, subst. fém. et adj. A. − LINGUISTIQUE 1. Subst. fém. a) Vieilli. ,,Connaissance pratique des particularités caractéristiques d'une langue donnée et notamment des figures et idiotismes`` (Mar. Lex. 1951, p. 213); Le mot de stylistique est apparu vers le milieu du XIXesiècle en Allemagne. Il désigne alors des méthodes destinées à compléter l'étude grammaticale d'une langue par l'étude des locutions particulières (...). Un ouvrage toujours utilisé de nos jours, la Stylistique latine, de l'Allemand Berger, utilise le mot de stylistique dans le sens ainsi défini, auquel on pourrait substituer le mot de phraséologie (F. Deloffre, Styl. et poét. fr., 1970, pp. 10-11). p. méton., rare, ouvrage traitant de ces particularités. b) Discipline qui a pour objet le style, qui étudie les procédés littéraires, les modes de composition utilisés par tel auteur dans ses œuvres ou les traits expressifs propres à une langue (v. style1II A). La tâche de la stylistique interne est (...), tout en se confinant dans la langue commune, de mettre à nu les germes du style (...): dans quelles conditions un type expressif employé par tout le monde peut-il se transformer en un procédé littéraire, reconnaissable à ces deux caractères: intention esthétique et marque individuelle? (Bally, Lang. et vie, 1952, p. 61): ... de la rhétorique nous héritons une double définition de la stylistique: d'une part, une description des moyens stylistiques que la langue met à la disposition de l'écrivain (c'est la théorie des « figures »); d'autre part, des règles d'utilisation et de choix de ces figures en fonction de la situation linguistique (c'est la théorie des genres). (...) les modernes en ajoutent une troisième avec la notion de langue propre à l'écrivain. On a finalement trois stylistiques: descriptive, fonctionnelle, génétique.
Guiraud, Essais de styl., 1969, p. 27. ♦ Stylistique comparée. Étude comparée des moyens d'expression propres à deux ou plusieurs langues. Quand on aura dégagé les lois qui régissent l'expression de la pensée française, il sera possible d'étudier les analogies ou les différences qui la rapprochent ou la séparent de celle de langues sœurs ou d'une autre famille. Ce sera la stylistique comparée (Cressot1969, p. 6). 2. Adjectif a) De style (v. style1II A); qui concerne la façon de s'exprimer propre à telle personne et, en particulier, la manière idéale d'écrire. Lu le Bal du Comte d'Orgel (...). Extraordinaire sûreté de ce livre (...). La réussite est à peu près parfaite (en dépit d'incompréhensibles défaillances stylistiques (...)) (Gide, Journal, 1933, p. 1149).Cette « Tentation » [de saint Antoine] (...) lui était [à Flaubert] comme un antidote intime opposé à l'ennui (...) d'écrire ses romans de mœurs modernes et d'élever des monuments stylistiques à la platitude provinciale et bourgeoise (Valéry, Variété V, 1944, p. 202). − En partic. Qui appartient au contenu affectif, subjectif d'une expression, d'un texte. Effet stylistique; emploi stylistique d'un mot. Bachelard (...) montre que la valeur de mots tels que « mou », « gluant », « visqueux » transcende constamment leur signification (...). Il est ainsi de nombreux emplois métaphoriques, de nombreuses valeurs stylistiques derrière lesquels on doit chercher moins une image formelle objective qu'une expérience intime et intuitive (Guiraudds Langage, 1968, p. 444). − LEXICOGR. Indicateur/marque stylistique. Indication permettant de noter un certain niveau de langue. Les niveaux de langue ou marques stylistiques, par le nom même, indiquent qu'il existe une hiérarchie sociale, diagnostiquée par les comportements verbaux (J. et Cl. Dubois, Introd. à la lexicogr.,Paris, Larousse, 1971, p. 37).Quand plusieurs indicateurs stylistiques sont nécessaires pour introduire un mot ou un sens, l'indicateur mélioratif ou péjoratif précède dans les articles du TLF l'indicateur de niveau de langue, lequel précède l'indicateur relatif à l'usage (G. Gorcyds Wörterbücher, t. 1, Berlin-New York, W. de Gruyter, 1989, p. 913, col. 1). b) Relatif à la stylistique (supra A 1 b). Pour refuser à la stylistique littéraire le droit à l'existence, M. Croce allègue que toute création artistique procède d'une intuition synthétique; que cette intuition échappe à l'analyse stylistique (Bally,ds Wörterbücher, t. 1, Berlin-New York, W. de Gruyter, 1989, p. 913, col. 1).Un premier type d'études stylistiques groupera les analyses des systèmes d'expression: 1od'une langue (...); 2od'un genre (...); 3od'un écrivain (...) c'est l'objectif aussi bien de L. Spitzer que de G. Devoto ou de Ch. Bruneau (...). Un second type embrassera (...) les analyses d'un ou plusieurs procédés d'expression (G. Antoineds R. de l'enseign. sup., t. 1, 1959, pp. 59-60). B. − Domaine artist., peu fréq., adj.Relatif à un genre esthétique particulier. Kalgren a montré comment les décors animaux des pièces archaïques se sont transformés (...) en flamboyantes arabesques, et il a mis en relation les phénomènes d'évolution stylistique avec l'effondrement de la société féodale (Lévi-Strauss, Anthropol. struct., 1958, p. 293).En Gromaire nous avons un artiste complet, et dont la personnalité (...) dépasse (...) l'école, l'étape stylistique qui l'ont suscitée (Cassou, Arts plast. contemp., 1960, p. 626). REM. 1. Stylisticien, -ienne, subst.Spécialiste de stylistique. Certains stylisticiens raisonnent comme si l'écrivain se plaçait devant la langue comme un organiste devant ses claviers (...). Une étude stylistique d'une œuvre devrait d'abord (...) définir les différents choix qu'impose le genre adopté (P. Larthomasds Fr. mod.t. 32 1964, p. 191). 2. Stylistiquement, adv.D'une manière, d'un point de vue stylistique. La stylistique littéraire s'attache fondamentalement à l'œuvre d'art (...); l'écrivain, le groupe, l'époque sont des réalités secondes qui, de toute manière, ne peuvent être atteintes, stylistiquement, quand elles le peuvent, qu'à travers l'œuvre (A. Henry, La Styl. littér. ds Fr. mod. t. 40 1972, p. 3). Prononc.: [stilistik]. Étymol. et Hist. 1. 1872 « connaissance pratique des particularités caractéristiques d'une langue donnée et particulièrement des idiotismes » (Littré); 2. 1905 « étude scientifique des procédés de style que permet une langue » (Bally, Précis de styl., Genève, pp. 7-8); 1905 empl. adj. (Id., ibid., p. 15). Empr. à l'all.Stilistik (fin du xviiies. d'apr. Duden Etymol.; Fr. mod. t. 21 1953, p. 49), dér. de Stil « style », de même orig. que le fr. style1*. Bbg. Antoine (G.). La Stylistique française... Paris, 1959, t. 1, pp. 39-60. − Bally (C.). Traité de stylistique fr. Genève; Paris, 1951, t. 1, pp. 1-30. − Bruneau (Ch.). La Stylistique. Rom. 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