| SOURIS2, subst. fém. I. A. − ZOOLOGIE 1. Souris (commune). Petit mammifère rongeur omnivore de la famille des Muridés dont l'espèce commune ou souris domestique (mus musculus) mesure de 8 à 10 cm, possède un pelage gris, une longue queue, de grandes moustaches, un museau pointu, et peut, par ses facultés extrêmes d'adaptation et de reproduction, causer de nombreux dégâts dans les habitations, etc. La souris grignote, ronge; souris grise, mâle, femelle; le chat/le rat et la souris; nid, portée de souris; bruit, grattement, grignotement, trot, trottinement de souris. Le bon Dieu, ayant fait la souris, a dit: Tiens, j'ai fait une bêtise. Et il a fait le chat. Le chat c'est l'erratum de la souris (Hugo,Misér., t. 2, 1862, p. 418).La bête attrapée se sauve; il la rattrape, après l'avoir laissée aller; il lui laisse de l'avance, la souris se croit sauvée; en deux bonds, il est dessus; puis la lâche encore, se détourne, fait semblant de ne plus la voir, de l'avoir oubliée. La souris fait dix pas, elle est reprise (Goncourt,Journal, 1862, p. 1137). ♦ Souris blanche. Variété albinos de souris domestique utilisée comme animal de compagnie ou de laboratoire. Il aperçut, en relevant la tête, une petite souris blanche qui sortait d'un trou (Flaub.,St Julien l'Hospitalier, 1877, p. 85): 1. ... à la porte de la Pépinière, il y avait un homme qui vendait des souris blanches. − En veux-tu une? − me demanda brusquement le maréchal. Et comme, intimidée par l'œil angoissé de Grand-père qui apercevait déjà l'accueil que nous recevrions en rentrant avec une souris, je n'osais pas accepter, il reprit, bourru et sympathique: − Allons!... voyons!... Décide-toi... Oui... C'est oui, n'est-ce pas?...
Gyp,Souv. pte fille, 1927, p. 111. − [P. compar. avec l'aspect physique ou les habitudes de la souris] Une mine, un museau de souris; des yeux, des oreilles de souris. [M. Bergeret] trottait avec une agilité de souris surprise dans des démolitions (France,Anneau améth., 1899, p. 5).Elle pousse des petits cris de souris prise dans une porte et ferme à demi les yeux pâmés (Colette,Cl. école, 1900, p. 279).Dans l'entre-baîllement de la porte, Louise passe sa tête de souris (Courteline,Linottes, 1912, ix, p. 133). 2. P. ext. [Souvent suivi d'un adj. ou d'un compl. déterminatif] a) [N. donné à des espèces non domestiques voisines de la souris commune et présentes sur les cinq continents] Souris agraire ou souris des champs; souris bananière d'Amérique, souris épineuse (Afrique, Asie); souris naine ou souris des moissons (Europe et nord de l'Asie); souris rayée (Afrique); souris à queue blanche (Afrique); souris à pattes blanches (Canada, États-Unis); souris des bois (synon. mulot). Plusieurs petits terriers creusés dans la neige par la souris arctique (Bellot,Voy. mers polaires, 1863, p. 268).Les Zapodinae, ou Souris sauteuses, ont également une alimentation mixte (Zool., t. 4, 1974, p. 1012 [Encyclop. de la Pléiade]). b) [N. donné à de petits marsupiaux ressemblant un peu à une souris] Souris marsupiale; souris volante (synon. acrobate, v. ce mot II). Le Tarsipède rostré ou Souris à miel (...) a un long museau mince et une longue langue extensible (M. Burton,Encyclop. du monde animal, trad. par B. Heuvelmans, t. 6, 1984, p. 17). c) Souris chauve ou souris chaude (var. berr.). Synon. moins usité de chauve-souris (v. ce mot rem. 1).Eustache (...) rencontra une petite porte au centre de laquelle une souris chauve était clouée (Nerval,Nouv. et fantais., 1855, p. 216). B. − P. métaph. Personne qui, par son comportement, son allure, sa petite taille, fait penser à une souris. Le vicaire général Valette, cette souris timide qui ne sort pas de son trou si je me montre, a osé dire à l'archiprêtre Rupert: − « (...) M. Jourfier n'a pas encore remplacé Pie IX! » (Fabre,Lucifer, 1884, p. 228).Ah! si tu m'avais connue il y a seize ans, quand je suis entrée dans la classe préparatoire! Une vraie petite souris rousse (Martin du G.,Thib., Belle sais., 1923, p. 977). ♦ [Dans un cont. développant les rapports de force entre le chat et la souris] Tu jouis d'abord de la rigolade, bon! Et puis un jour, c'est la rigolade qui jouit de toi. De chat, te voilà devenu souris, tu te rends compte? (Bernanos,M. Ouine, 1943, p. 1439): 2. En amour, l'homme est la souris
Pour qui toute femme est la chatte.
Le sot ne voit pas l'ongle gris
Sous le doux velours de la patte.
Rollinat,Névroses, 1883, p. 119. − [P. réf. à rat de bibliothèque*] Souris de bibliothèque. Vous savez bien que j'en sais plus que n'en exige le programme, sur les bouquins de littérature. Je suis souris dans la bibliothèque de papa (Colette,Cl. école, 1900, p. 230). C. − Expr. et loc. fig. 1. Se cacher/entrer/ se mettre dans un trou de souris. Être dans une situation de gêne, d'embarras telle que l'on aimerait disparaître de la vue d'autrui. Il l'aurait virée dans la cage... Il se serait mis dans un trou de souris (Céline,Mort à crédit, 1936, p. 240). − Var. Il n'y a pas de trou de souris assez petit pour se/me cacher. Voir Chateaubr., Mém., t. 4, 1848, p. 218. 2. Souris qui n'a qu'un trou est bientôt prise. (Dict. xixeet xxes.). C'est le nid d'une souris dans l'oreille d'un chat. C'est une chose impossible (Dict. xixeet xxes.). Jouer au chat et à la souris. V. chat1II A 6.Le jeu du chat et de la souris. V. chat1III B 3 c.Quand le chat n'est pas là, les souris dansent. V. chat1II B 3. 3. C'est la montagne qui accouche d'une souris. V. montagne I D 1. − P. anal. [Avec invers. des termes] Et de quelle cause est sorti tout ce mal? Ah! ici la souris accouche d'une montagne (M. de Guérin,Corresp., 1837, p. 271). 4. Arg., pop. Faire la souris. a) Chatouiller (quelqu'un) (d'apr. France 1907). b) Faire des caresses. Ma môme me fait la souris toute la journée (Virmaitre,Dict. arg. fin-de-s., Suppl., 1899, p. 166). D. − Couleur (gris) (de) souris, gris de souris, gris(-)souris. Couleur gris argent semblable au pelage de la souris commune. Le papier de tenture, gris de souris, bordé de rose, annonçait par des teintes fuligineuses le séjour malsain de quelques fumeurs (Balzac,C. Birotteau, 1837, p. 310).On n'en finit pas de définir la nuance exacte de ce ripolin, intermédiaire entre tous les gris. Gris-perle est trop clair. Gris-souris, trop foncé (H. Bazin,Tête contre murs, 1949, p. 31). − P. ell. ♦ Empl. subst. masc. Jersey pure laine, (...) en Noir, Souris, Raton, Vert lichen (Le Figaro, 22 nov. 1951, p. 5, col. 7 et 8). ♦ En appos. Cheval souris. Cheval dont la robe est gris cendré (Dict. xixeet xxes.). II. − P. anal. A. − [À propos d'une femme] 1. Argot a) Femme légère, prostituée. Souris ravageuse; souris de rempart. [Les policiers] étaient obligés de se rabattre sur les souris et les putes (Le Breton,Razzia, 1954, p. 23). b) Souris (d'hôtel). [Corresp. à l'empl. masc. de rat* d'hôtel] Femme s'introduisant dans un endroit public pour y repérer les lieux et les objets à y voler. La souris opère d'une autre façon. Le jour, elle s'introduit dans les boutiques momentanément abandonnées, se faufile près du comptoir et (...) barbote (Hogier-Grison,Monde où l'on vole, 1887, p. 237). c) HIST., pop., fam. Souris grise. Femme soldat de l'armée allemande pendant la guerre de 1939-1945, surnommée ainsi en raison de son uniforme gris. C'était Gretel, une « souris grise », comme on les appelait à cause de leur uniforme (Vialar,Dansons, 1950, p. 174). 2. Arg., pop. Synon. nana. a) Jeune femme. Une chouette souris. L'homme étant, comme chacun sait, l'animal qui secrète l'amour, je me suis mis à aimer cette souris (Malraux,Espoir, 1937, p. 626).Cette souris, c'est sa frangine. Elle a l'air gironde (Fallet,Banl. Sud-Est, 1947, p. 67). b) [Gén. précédé d'un poss.] Bonne amie, maîtresse, concubine. Chaudrut lui répondait invariablement (...): c'est ma souris qui me mange tout, je suis un pauvre vieillard (Huysmans,Sœurs Vatard, 1879, p. 289).Elle est drôlement roulée, sa souris, et elle n'a pas dix-huit ans (Sartre,Mort ds âme, 1949, p. 177). B. − Arg., vieilli. Baiser furtif sur l'œil. Tu verras que t'auras pas à t'en repentir... Je te ferais plutôt une souris (Vidocq,Mém., t. 3, 1828-29, p. 192).Dès qu'elle rentrait, il la visitait, il la regardait bien en face, pour deviner si elle ne rapportait pas une souris sur l'œil, un de ces petits baisers qui se fourrent là sans bruit. Il la flairait, la retournait (Zola,Assommoir, 1877, p. 722). C. − SC. ET TECHN., p. anal. (de forme, de couleur avec la souris ou avec une partie ou une particularité de la souris) 1. BOTANIQUE a) Oreille de souris. Synon. pop. de myosotis, piloselle.L'herbe à bouillon, le pois sauvage, l'oreille de souris, l'oignon, l'ail, le panais sauvage (Baudry des Loz.,Voy. Louisiane, 1802, p. 173). b) Queue de souris. Espèce de Renonculacée (myosorus minimus). Une renonculacée est appelée populairement queue de souris; c'est aussi le nom que lui ont donné les paysans dans une grande partie de l'Europe (Gourmont,Esthét. lang. fr., 1899, p. 197). 2. DÉFENSE. Pas de souris. ,,Escaliers étroits qui font communiquer les différents ouvrages d'une fortification`` (Mots rares 1965). 3. ÉLECTRON., INFORMAT. a) Souris (électrique, électronique, automatique), micro-souris. Petit robot électrique ou électronique autonome doté d'une intelligence artificielle et capable de reconnaître un environnement donné. La course des souris électroniques à travers les labyrinthes, c'est bien plus qu'un jeu: un exercice pour ingénieurs et étudiants fous d'informatique (L'Express, 29 mai 1981, p. 136): 3. ... [Shannon] a mis au point tout récemment la « souris automatique » qui « apprend » un labyrinthe. Elle le parcourt d'abord en tâtonnant, et n'arrive au but qu'après beaucoup d'essais et d'erreurs. Mais comme l'appareil est doué d'une mémoire, si l'on replace ensuite la souris électrique au point de départ, elle arrive au but sans erreur.
Ruyer,Cybern., 1954, p. 77. b) Périphérique d'entrée relié à l'ordinateur par un cordon et permettant, en guidant le déplacement du curseur sur l'écran, de sélectionner une commande ou une option, sans passer par le clavier de l'ordinateur. Après les « puces », voici les « souris ». Le MacIntosh, nouvel ordinateur domestique lancé par Apple, possédera une « souris », petit périphérique permettant de visualiser sur l'écran les fonctions à réaliser (L'Express, 27 janv. 1984, p. 41, col. 3). 4. MÉDECINE a) Souris articulaire. ,,Petit fragment osseux ou cartilagineux, flottant librement dans une cavité articulaire et fuyant sous les doigts à la palpation`` (Man.-Man. Méd. 1977). b) Mouvement convulsif et involontaire de l'œil qui affecte la paupière et parfois même l'iris. (Dict. xixeet xxes.). 5. TECHNOL. Dents de souris. Entaillures très fines sur une pièce mécanique ou un instrument spécial. Pince longuette à dents de souris, de 20 cent., du Dr Cathelin (Catal. instrum. chir. (Collin), 1935, p. 54). 6. TYPOGR. On appelle souris un morceau de plomb suspendu à une ficelle et qui pend sur le papier pour l'empêcher de glisser dans les pinces du cylindre. (E. Chautard) (Coston,A.B.C. journ., 1952, p. 199). 7. ZOOLOGIE a) ANAT., BOUCH., ART CULIN. [Chez le mouton] Muscle charnu situé à l'extrémité du gigot près de la jointure. (Dict. xxes.). b) Synon. de aphrodite (v. ce mot II). (Ds Quillet 1965). c) ICHTYOL. Souris (de mer). [Dénom. pop. de différents poissons, notamment la baliste (v. baliste2), la baudroie et l'aspidophore (v. aspid(o)-)] Aspidophore armé (...) appelé aussi Souris de mer (Coupin,Animaux de nos pays, 1909, p. 193). Prononc. et Orth.: [suʀi]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. a) Ca 1175 soriz « petit mammifère rongeur » (Benoît, Ducs de Normandie, 13479 ds T.-L.); ca 1200 (Lai d'Ignauré, éd. R. Lejeune, 371, 73: soris ki n'a c'un trau poi dure); b) p. ext.
α) 1562 souris terrestre « espèce de musaraigne qui habite les environs des lieux humides » (Du Pinet, L'Histoire du Monde, 2, 505 d'apr. FEW t. 12, p. 113a); 1812 souris d'eau (Mozin-Biber);
β) 1576 blanches souris (De Baïf, Mimes, fol. 42 ds Le Roux de Lincy, Proverbes fr., t. 1, p. 202);
γ) 1723 souris de Moscovie « martre zibeline » (Savary);
δ) 1753-67 souris de terre « petit mulot » (Buffon, Hist. nat. quadrupèdes, t. 2, p. 283);
ε) 1765 souris d'Amérique « petite espèce de sarigue » (Encyclop.);
ζ) 1768 souris de montagne « lemming » (Valm.); c) 1777 souris de mer « nom courant de divers poissons osseux » (Duhamel du Monceau, Traité gén. des pêches mar., t. 3, p. 114); 2. loc. compar. et fig. 1640 on entendroit une souris trotter (Oudin Curiositez); id. il est esveillé comme une potée de souris (ibid., s.v. potée). B. 1. a) xiiies. anat. soris de le gambe (Jean de Garlande, Jahrbuch, VI, 288); b) 1690 (Fur.: Les Medecins appellent souri, l'espace qui est dans la main entre le pouce et l'indice, qu'ils appellent aussi thenar); c) 1958 souris articulaire (Garnier-Del.); 2. 1690 « l'un des cartilages des naseaux du cheval » (Fur.); 3. 1694 « muscle charnu à l'extrémité du gigot » (Ac.). C. 1689, 24 déc. « nœud de ruban mis dans la coiffure des femmes » (Mmede Sévigné, Lettres, éd. R. Duchêne, t. 3, p. 789). D. 1. 1690 terme de fortif. pas de la souri (Fur.); 2. 1933 « outil utilisé pour calibrer les trous obtenus par alésage » (Lar. 20e); 3. 1964 pyrotechnie (Lar. encyclop.). E. 1. a) 1611 souris du palais « avocat » (Cotgr.); b) 1880 souris d'une bibliothèque (Hugo, Âne, p. 281); 2. a) 1640 faire la souris « voler adroitement » (Oudin Curiositez); b) 1907 souris d'hôtel (Lar. pour tous); 3. a) 1833 souris de rempart « fille à soldats » (Vidal, Delmart, Caserne, p. 197); b) 1905 « femme légère » (d'apr. Esn. 1966); c) 1938 fam. « jeune fille, jeune femme » (ibid.); 4. 1940-44 souris grise « auxiliaire féminine des troupes d'occupation allemande » (ibid.); 1950 (Vialar, Dansons, p. 174). Du lat. pop. *soricem, acc. de *sōrι
̄x, altér. du lat. class. sōrex, sorĭcis « souris ». STAT. − Souris1 et 2. Fréq. abs. littér.: 698. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 782, b) 1 000; xxes.: a) 1 194, c) 1 042. DÉR. Souricier, subst. masc.Animal qui chasse et mange les souris. Le hérisson, ce souricier inconnu, est jeté à l'eau (Journ. offic., 8 oct. 1872, p. 6300, col. 2 ds Littré Suppl. 1877).En appos. avec valeur d'adj. Un chat souricier. (Dict. xixeet xxes.). − [suʀisje]. − 1reattest. 1611 (Cotgr.), absent de la lexicogr. jusqu'à Littré; de souris2, suff. -ier*. BBG. − Arveiller (R.). R. Ling. rom. 1972, t. 36, p. 229. − Chautard Vie étrange Argot 1931, p. 670. − Quem. DDL t. 2, 13, 16, 18, 21, 28 (s.v. oreille de souris). |