| SORTIR1, verbe I. − Empl. intrans. A. − Passer du dedans au dehors. 1. a) Qqn (ou un animé) sort de qqc. (d'un lieu).Aller hors d'un lieu. Sortir d'un abri, d'un appartement, d'un bois, d'une boutique, d'un cabaret, d'une cave, d'une chambre, d'une cour, d'un immeuble, d'une maison, d'une pièce, d'une place; sortir de son bain, de son lit; sortir de sa prison, de sa retraite. Un chasseur sortit de sa cachette (Fromentin,Dominique, 1863, p. 275).Tu sors de toi, Sans faire de bruit, comme d'une chambre, On sort par le toit (Cocteau,Poèmes, 1916-23, p. 188).Quinette était sorti de chez lui en tâchant de garder les allures les plus naturelles (Romains,Hommes bonne vol., 1932, p. 128). − En sortir. Quitter un lieu. Son palais l'ennuie, et toutefois elle craint d'en sortir (Laclos,Éduc. femmes, 1803, p. 446).Les morts C'est sous terre: Ça n'en sort Guère (Laforgue,Poés., 1887, p. 160).(En) sortir les pieds devant. Quitter mort un lieu. Le bruit courut que la jolie fille était sequestrée. Dans un cabinet noir et qu'elle n'en sortirait que les pieds devant. − About: C'est-à-dire (...) morte, emboîtée dans un cercueil (Larchey,Excentr. lang., 1862, p. 446). − Faire sortir qqn.Faire que quelqu'un quitte un lieu; lui enjoindre fermement de quitter un lieu. Si vous ne voulez pas sortir de bonne volonté (...). Ils vous feront sortir de force (Dumas père, Laird de Dumbiky, 1844, i, 2, p. 8). b) P. anal. Qqc. sort d'un lieu.Comme un bateau sort de l'antre du rocher avec les marins sans que la mer en frémisse davantage (Jacob,Cornet dés, 1923, p. 70). c) Loc. fig. Avoir l'air de sortir d'une boîte. V. ce mot III B 2.Sortir de sa chrysalide*. Sortir de sa coquille. V. ce mot A 2.Sortir de l'œuf. V. ce mot I C 5. 2. Se dégager d'un endroit difficile. Cette rue est si sale, qu'on ne peut sortir des boues (Ac.1878, 1935). 3. ESCR. Sortir de mesure. ,,Se mettre hors d'état de porter une botte de pied ferme à son adversaire`` (Ac. 1798-1878). B. − [Sans compl. prép. d'origine] Qqn sort 1. a) Aller dehors. Sortir un instant, tous les jours, le lendemain, le matin, un moment; sortir pour faire qqc.; sortir avec qqn; sortir par la droite, la gauche, la fenêtre, la porte; sortir à la campagne, dans le couloir, la cour, l'écurie; sortir à pied, à reculons; sortir aussitôt, bientôt, brusquement, lentement, précipitamment; sortir par mauvais temps. Les médecins ne lui ont pas encore permis de sortir (Ac.1935).Se coiffant de son large feutre, il sortit faire un tour sur la place (Erckm.-Chatr.,Ami Fritz, 1864, p. 152). − En partic. ♦ Pop. Aller dehors pour se battre. Sors donc, si tu es un homme (Sandry-Carr.1963). ♦ Aller se promener. Sortir en barque. Dans la journée, après le déjeuner, monsieur et madame sont sortis en voiture (Mirbeau,Journal femme ch., 1900, p. 72).Rue de la Paix, les midinettes sortaient en bandes et traversaient la place Vendôme et la rue de Rivoli en se donnant le bras (Nizan,Conspir., 1938, p. 51). b) P. anal. [Le suj. désigne un bateau] Quitter le port. Je vais à la jetée voir entrer et sortir les bateaux (Delacroix,Journal, 1854, p. 241). c) Loc. Sortir avec qqn, ensemble. Entretenir des relations amoureuses avec quelqu'un. Bernard continua, bien qu'il se jugeât lâche, à sortir avec Catherine (Nizan,Conspir., 1938, p. 130). 2. Quitter une maison, un lieu et ses occupants. Sortir discrètement, sur la pointe des pieds, en claquant la porte; sortir le premier, le dernier. Mais est-ce que le petit jeune homme a la permission de sortir après le dîner? (Romains,Hommes bonne vol., 1932, p. 264). 3. Aller hors de chez soi. J'étais sorti toute la matinée. En revenant (...), je rencontrai la mère et la fille en voiture (Restif de La Bret.,M. Nicolas, 1796, p. 92).Elles ne sortaient plus que le dimanche, pour l'église c'est-à-dire aussi pour s'y retrouver (Gide,Si le grain, 1924, p. 375). − En partic. ♦ Aller dans le monde, au spectacle, se distraire. Sortir beaucoup, peu. Lorsque je commençais de sortir un peu, et quand mes premiers succès me jetèrent brusquement de ma cellule au quartier Latin dans un opulent décor de haute vie (Bourget,Physiol. am. mod., 1890, p. 366). ♦ Être sorti. Ne pas être chez soi. Madame est sortie. Dites que je suis sortie! (Guitry,Veilleur, 1911, ii, p. 12). C. − Qqn sort de qqc. 1. a) Quitter un lieu d'occupation, de réunion, de séjour. Sortir d'une audience, d'un entretien; sortir d'une conférence, de l'hôpital, de l'hôtel, de la messe, de l'opéra, de l'église; sortir de l'école, du lycée, de prison; sortir de son bureau, de son cabinet; sortir de chez qqn; sortir de table à quatre heures. Et l'on est sorti de table en même tems que les dames pour arriver à tems au concert (Jouy,Hermite, t. 4, 1813, p. 110).Un petit café où il lui arriva de boire très tard avec des amis du Figaro, en sortant d'un bal de l'Opéra (Fargue,Piéton Paris, 1939, p. 251). − Loc. Sortir d'avec qqn (vx). Venir de le quitter. Je ne pouvais vivre sans voir Sara, que la raison me disait de quitter; je sentais qu'il le fallait; en sortant d'avec elle, j'en formais la résolution (Restif de La Bret.,M. Nicolas, 1796, p. 159). b) Au fig. Quitter, avoir fini une occupation. Tous avaient un accablement, comme s'ils sortaient d'une besogne écrasante (Zola,Nana, 1880, p. 1328). ♦ Loc. fam. En sortir. Venir à bout d'une tâche. Cela est inutile quant à présent puisque vous n'avez pas fini vos analyses de philosophes. Quand vous en serez sorti, et je vous prie de vous hâter autant que possible, nous reprendrons ce côté pratique du sujet (Tocqueville,Corresp.[avec Gobineau], 1843, p. 62). ♦ Sortir de + inf.Venir de (faire quelque chose). Il semble qu'en sortant de coucher avec son amant, elle laisse dans sa chambre son sexe comme l'outil de son travail (Goncourt,Journal, 1864, p. 56). ♦ Loc., fam. Sortir d'en prendre. Ne pas être disposé à recommencer quelque chose de désagréable à l'expérience; en avoir assez de quelque chose. C'est compréhensif; c'est philosophique; c'est synthétique; ça doit t'aller. − Merci! je sors d'en prendre, répliqua le rapin avec humeur (Reybaud,J. Paturot, 1842, p. 360). 2. a) Passer d'un état (psychologique, social) à un autre. Sortir d'un cauchemar, de l'enfer; sortir de sa léthargie, d'un rêve, de son sommeil, de sa torpeur; sortir de l'adolescence, de l'enfance, de l'ignorance; sortir d'un état de. Cosette n'était plus en guenilles, elle était en deuil. Elle sortait de la misère et elle entrait dans la vie (Hugo,Misér., t. 1, 1862, p. 527). − Loc., vieilli. Sortir + inf.Venir de passer d'un état à un autre. Cette pauvre petite fille, qui sort d'avoir quinze ans (Balzac,Cous. Bette, 1846, p. 405). b) Au fig. Se dégager d'une situation difficile. Sortir avec peine de qqc.; sortir d'affaires, d'embarras; sortir de là; (se) sortir des pattes, des mains, de l'emprise de qqn; sortir furieux, radieux de qqc.; sortir d'une impasse, d'un mauvais pas. La civilisation rend les esprits routiniers; aucun ne peut sortir de l'ornière (Fourier,Nouv. monde industr., 1830, p. 30). ♦ Empl. pronom. réfl. Se sortir de. Se dégager d'une situation difficile, guérir d'une maladie grave. On ne se souvenait plus au juste si telle personne qu'on n'avait jamais l'occasion de voir s'était sortie de sa fluxion de poitrine ou avait trépassé (Proust,Temps retr., 1922, p. 977).S'en sortir. Synon. s'en tirer.Paul est libre et, du reste, il est incapable, il est nul, c'est un âne, un demeuré. Il faut que je m'en sorte toute seule (Cocteau,Enfants, 1929, p. 98).En partic. Se tirer d'une situation financière difficile. Vous ne vous en sortirez pas (...). Les chiffres sont là (Zola,Bonh. dames, 1883, p. 156). ♦ [Avec adj. attribut] Sortir indemne, victorieux de qqc. Quand je vous disais (...), que la guerre (...) serait terrible, j'avais raison. N'importe! Nous en sommes sortis vainqueurs (Erckm.-Chatr., Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 283).Dans l'ensemble, nous avons eu la chance, oui, oui, la chance, d'en sortir sains et saufs (Cocteau,Parents, 1938, iii, 2, p. 277). ♦ [Avec compl. sans art.] Sortir d'affaire, d'inquiétude, de mélancolie. M. de Saint Pri*** (...) vient de se brûler la cervelle pour sortir d'embarras (Stendhal,Prom. ds Rome, t. 1, 1829, p. 198). − Loc., pop., fam. En sortir les braies nettes. V. braie B.(N')être (pas) sorti de l'auberge. V. ce mot A. c) Passer d'une époque, d'une saison, d'un moment à un(e) autre. Sortir de l'hiver, de l'été, d'un règne. On sort de Louis XIV comme on sort de Robespierre, avec un grand besoin de respirer (Hugo,Quatre-vingt-treize, 1874, p. 120). − Loc. fig. Sortir de l'ombre. V. ombre1I D 2 b. 3. Abandonner un comportement normal. Sortir de son calme, de son caractère, de son impartialité. [Doré] coupait tout le jour les jambes à son monde, en sortant plus que de raison du ton et de la mesure (Sand,Prom. autour vill., 1860, p. 118). − Locutions ♦ Sortir de soi. Devenir momentanément différent. « Sortir de soi-même, se transporter en quelque chose que l'on n'est pas », ce vœu à jamais insatisfait fait paraître bien misérable la tentative de l'idylle (Béguin,Âme romant., 1939, p. 44).Faire abstraction de soi-même, cesser d'être préoccupé. Il faut d'ailleurs savoir sortir de soi-même et s'élever assez haut pour voir le monde au lieu de ne voir qu'un point (J. de Maistre,Soirées St-Pétersb., t. 1, 1821, p. 167). ♦ Sortir de sa réserve. Quitter une attitude prudente et circonspecte. Synon. se départir de.M. de Galais, qui n'avait rien dit encore, eut le tort de vouloir sortir de sa réserve (Alain-Fournier,Meaulnes, 1913, p. 272). ♦ Sortir de ses gonds. V. gond1B 1. ♦ Fam., vieilli. Être sorti. Avoir une absence, une perte momentanée de conscience. Cependant, toutes les dix minutes, elle retombait dans ses réflexions, elle était sortie, comme on dit (Zola,Assommoir, 1877, p. 785). 4. S'écarter de ce qui était fixé, passer outre. Sortir d'une formule, d'une loi, d'une règle; sortir d'une décision, d'une opinion, d'un rôle; sortir de la matière, de la question, du sujet; sortir de son devoir, des bornes de la modestie, de la bienséance. On ne peut sortir de ce principe général que sans liberté point de moralité et sans moralité point d'éducation (Laclos,Éduc. femmes, 1803, p. 429): Leuwen était cependant assez civilisé pour ressentir une crainte mortelle que son amour pour le bien ne le fît sortir des bornes que le ton du ministre semblait vouloir mettre à ses rapports avec lui.
Stendhal,L. Leuwen, t. 3, 1835, p. 192. ♦ Loc., fam. Ne pas (vouloir) sortir de (là). Soutenir une idée, une opinion avec obstination. Synon. fam. ne pas en démordre.[Xavière] a répondu avec horreur qu'elle détestait les fleurs, et elle n'a jamais voulu sortir de là (Beauvoir,Invitée, 1943, p. 134). − En partic. S'écarter du cadre d'une activité habituelle, d'une compétence, d'une fonction. Je suis intimement persuadé que, sorti de ses affaires, il est l'homme le plus délicat et le plus probe qu'il y ait à Paris (Balzac,Gobseck, 1830, p. 420).Un service qui (...) semblait sortir des visites ordinaires d'un médecin (Zola,Page amour, 1878, p. 15). 5. Avoir pour ascendance. Sortir d'un sang noble; sortir de si bas, de rien, d'une bonne famille, du peuple. Et vous m'apportez les papiers à l'aide desquels il me sera possible de constater le sang dont je sors? (Dumas père, Villefort, 1851, i, tabl. 10, 2, p. 159). ♦ Expr. Se croire sorti de la cuisse de Jupiter. V. cuisse I A 2 a α. 6. Avoir été élevé, formé par quelqu'un, quelque chose (un milieu). Sortir des mains de qqn; sortir de sa province. ♦ Sortir de + subst. désignant un établissement d'enseignement.Avoir fini avec succès un cursus universitaire ou scolaire. Sortir d'une école, d'une grande école; sortir de Normale Sup., de Polytechnique. Elle a un fils qui est sorti de Saint-Cyr l'année dernière (France,Orme, 1897, p. 132). ♦ Sortir du rang. V. ce mot A 1 b α. ♦ D'où sort-il? [À propos de qqn dont les manières, l'ignorance choquent] De quel milieu (familial, social) vient-il? Dès ma première leçon, ç'a été une clameur dans le palais (...). D'où sort-il donc? Que nous veut ce barbare? (A. Daudet,Rois en exil, 1879, p. 45). D. − Qqc. sort (de qqc.) 1. [Le suj. désigne un fluide, un objet en mouvement, un son] Aller en dehors d'un lieu. Une vague senteur aromatique sort de toutes ces pousses vertes [des orangers] (Taine,Voy. Ital., t. 1, 1866, p. 52).Un autre (...) avançait les naseaux sous le robinet même, où l'eau sortait fraîche (Montherl.,Bestiaires, 1926, p. 519).Une à une les notes sortaient du violon sous l'archet (Giono,Triomphe vie, 1941, p. 175). − En partic. Aller hors d'un contenant; se détacher de. Sortir des rails. Au virage, la roue sortit de son axe et s'échappa vers le bas-côté de la route, en zigzaguant (Bernanos,M. Ouine, 1943, p. 1502). ♦ SPORTS. Sortir des limites matérielles fixées. Un ballon sort du terrain. (Dict. xxes.). 2. [Le suj. désigne un inanimé] Ne plus être dans la tête. Les entretiens qu'ils eurent, lui et ce fonctionnaire, je regrette qu'ils me soient sortis de l'esprit (Benoit,Atlant., 1919, p. 63).Ce que nous avons dit dès l'abord devait être insignifiant − ou alors singulièrement grave et plein d'importance − car cela est sorti de ma mémoire (Jouve,Scène capit., 1935, p. 233). − En partic. ♦ Ne plus appartenir à, quitter un groupe défini. Un objet, un secret sort de la famille. Je regrette Combourg, mais avec moins de résignation, bien qu'il ne soit pas sorti de ma famille (Chateaubr.,Mém., t. 3, 1848, p. 61).On lui demanda de donner sa parole d'honneur que rien n'était sorti de la caserne (Nizan,Conspir., 1938, p. 94).Loc., fam., p. iron. (Ça) ne sort pas de la famille. Un Grec dépouillé par ses frères se dit avec une certaine résignation que son argent ne sort pas de la famille (About,Roi mont., 1857, p. 22). ♦ Cesser de faire partie de; ne plus être du ressort de. Sortir de la compétence de qqn, de ses fonctions. Sortir de l'ordinaire. V. ce mot II A. 3. Faire saillie; être visible en totalité ou en partie hors de quelque chose. L'enfant arriva sur le bras de sa bonne, dans sa longue chemise de nuit, d'où sortaient ses pieds nus, sérieuse et presque rêvant encore (Flaub.,MmeBovary, t. 2, 1857, p. 173). − Loc., fam. Les yeux lui (en) sortent de la tête. Il a les yeux saillants, exorbités. Schumacker resta quelques instants immobiles (...) ses prunelles flamboyantes sortaient de leur orbite (Hugo,Han d'Isl., 1823, p. 444). ♦ [Dans un cont. fig.] Être très étonné. Il a survécu, à ce qu'il dit (...)! Les yeux m'en sortent de la tête (Feuillet,Scènes et com., 1854, p. 263). − Proverbe, au fig. La vérité sort de la bouche des enfants. V. bouche II B 2 a. 4. Apparaître à l'extérieur, dépasser (de quelque chose). Ah! dame oui, les blés sortiront de bonne heure (Colette,Cl. ménage, 1902, p. 137). 5. Se découper, être nettement visible sur un fond, ressortir. [Fernande] s'arrêta sous un bec de gaz dont l'éclat jaune fit sortir de la nuit son troublant et sérieux visage (Carco,Jésus-la-Caille, 1914, p. 229). 6. Avoir été fabriqué par un artisan, par quelque chose (usine, machine). [Sans compl. prép.] Les pièces de porcelaine moulées (...) sortaient nettes (Al. Brongniart, Arts céram., t. 1, 1844, p. 143). − Au fig. Avoir son origine dans, être issu de. En regardant un portrait de Wagner, je me suis demandé comment il se pouvait que de cette tête de proprio avare fût sorti Siegfried (Green,Journal, 1932, p. 111). ♦ Loc., fam. Ça sort du cœur. Si je t'en parle, ce n'est pas pour te faire de la peine, c'est parce que ça me sort du cœur, malgré moi (Zola,Bête hum., 1890, p. 249).Il (n')est (rien) sorti de. Il (ne) résulte (rien) de. Tu me ressembles: j'ai eu ce visage pointu, ce sang inquiet, ces yeux sournois − et il n'en est rien sorti de bon (Sartre,Mouches, 1943, i, 5, p. 34).En sortir. Résulter de. Le pot-au-feu mitonne. Quel bouillon en sortira? (Arnoux,Roi, 1956, p. 323). 7. Qqc. sort.Être présenté au public, être commercialisé. Un nouveau modèle, une collection, un article sort. En partic. Être édité. Un livre sort parce qu'un homme, qui ne l'a pas lu, somme de l'acheter un troupeau de gens qui ne le liront pas (Montesquiou,Mém., t. 3, 1921, p. 276). 8. Être tiré par le sort ou le hasard. Je croyais par moments que le nom de Charlie, allait malgré Robert « sortir » comme le numéro d'une loterie, j'avais de quoi être fier (Proust,Temps retr., 1922, p. 702). − En partic. Être tiré comme sujet d'examen. (Dict. xxes.). II. − Empl. trans. A. − 1. Qqn sort qqn/qqc.Mener dehors quelqu'un ou un animal qu'il faut accompagner. Sortir un enfant, un malade, un chien. L'air libre fouette nos joues, et nous [la troupe] plissons les yeux, blessés, comme des convalescents qu'on sort trop tôt (Colette,Music-hall, 1913, p. 3).Leur mère, fatiguée, n'avait guère le temps de les sortir (Gyp,Souv. pte fille, 1928, p. 73).Le béret sur les yeux, le bâton à la main, il siffla le chien et sortit le bétail (Pesquidoux,Livre raison, 1928, p. 107). − SPORTS. [Le suj. désigne l'arbitre] Expulser du terrain un joueur fautif. M. fait mine de « sortir » D. et L. qui échangent des coups (L'Auto, 9 avr. 1906ds Petiot 1982).[Le suj. désigne des joueurs] Éliminer une équipe adverse. En Coupe ils furent éliminés en demi-finale, après avoir sorti Nantes (L'Auto, 11 août 1965ds Petiot 1982). 2. Qqn sort qqc. de qqc.Extraire, tirer quelque chose de. Sortir la voiture de la remise; sortir un couteau de la gaine; sortir son mouchoir, un paquet, sa main de sa poche; sortir son costume de l'armoire. [Gobseck] les sortait de l'écrin, les y remettait, les y reprenait encore (...) − Beaux diamants! (Balzac,Gobseck, 1830, p. 412). 3. Qqn sort qqn de qqc. a) Extraire quelqu'un d'un lieu dont il ne peut se dégager. On sort Renée de son lit. On l'habille. Mais le moindre mouvement aggrave les douleurs (Dabit,Hôtel Nord, 1929, p. 88). b) Au fig. − Tirer quelqu'un d'une situation embarrassante, difficile. Dans la situation où se trouve ma famille, je ne dois reculer devant rien pour la sortir d'embarras (Becque,Corbeaux, 1882, iv, 2, p. 219).S'il y a une chance de sortir les gosses de cette saloperie de guerre, il faut les en sortir (Malraux,Espoir, 1937, p. 589). − Tirer quelqu'un de sa façon habituelle de faire. Car, hélas! M. Schuver ne valait plus rien comme décorateur quand on le sortait de ces roses en papier (France,Servien, 1882, p. 166). − Tirer quelqu'un de son milieu. Un des princes de la finance L'avait sortie on ne sait d'où (Monselet,Poés., 1880, p. 92). c) Fam. [Sans compl. prép.] Mettre quelqu'un dehors de façon expéditive. − Tu seras bien avancé quand vous vous serez disputés par devant les autres. Ferdinand n'a sûrement pas mauvaise intention. − Par la peau du cul que je vas te le sortir, le vétérinaire! (Aymé,Jument, 1933, p. 190). 4. Qqn sort qqc.Tenir des propos désagréables ou inconvenants. À force de dire des choses plus ou moins absurdes, l'un de nous finira peut-être par en sortir une qui soit comestible (Aymé,Mouche, 1957, p. 30). 5. Qqn sort de qqc.Se démarquer nettement. Il mange de plus avec l'Empereur, ce qui le sort absolument de la ligne des Ministres du second ordre et le place à côté de l'Ambassadeur de France (J. de Maistre,Corresp., 1811, p. 4). B. − Qqn/qqc. sort qqc.Produire, fabriquer en vue de sa commercialisation. Un fabricant sort un produit; une usine, une manufacture sort un modèle. (Dict. xxes.). Prononc. et Orth.: [sɔ
ʀti:ʀ], (il) sort [sɔ:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. Trans. 1. ca 1145 « décider » (Wace, Conception ND, éd. W. R. Asford, 1285); en partic. ca 1160 « décider par les sorts » (Enéas, 2617 ds T.-L.), en a. et m. fr.; 2. a) 1453 « mettre brutalement quelque chose hors de, tirer dehors » crollant et sortissant la porte (Arch. JJ 182, f o38 v ods Gdf.); b) 1888 « mettre brutalement quelqu'un dehors » (Courteline, Train 8 h 47, II, VIII ds Rob. 1985); 3. a) 1529 « franchir en sortant, passer au-delà de » sortir les limites de mon propos (Tory, Champfleury, L. III, 49 v ods Hug.); b) 1596 « faire prendre l'air à un animal » sortez mon cheval (Béroalde de Verville, Le Cabinet de Minerve, p. 151 ds Littré); c) 1788 « accompagner une personne dehors, à la promenade » (Fér. Crit. t. 2 d'apr. Lar. Lang. fr.); 1871 (Littré); 4. a) 1611 « porter, mettre quelque chose dehors » (Cotgr.); b) 1688 « tirer hors de, sortir » (Sévigné, Corresp., éd. R. Duchène, t. 3, p. 361); c) 1903 « dire, proférer » (Colette, Cl. s'en va, p. 27: elle a déjà sorti tout ce qu'on pouvait imaginer); d) 1938 « produire pour le public, mettre dans le commerce » sortir cent paires de « grosses godasses » par jour (Romains, Hommes bonne vol., p. 168); 5. ca 1630 « faire changer d'état, de condition » (Bassompierre d'apr. FEW t. 12, p. 126b); 6. 1752 jeu de tric trac sortir son coin (Trév. Suppl.); 7. 1904 comptab. (Nouv. Lar. ill.). B. Intrans. 1. ca 1150 « se tirer de, se dégager de » sortir de la mort (Conte de Floire et de Blancheflor, éd. J. L. Leclanche, 1020); 2. 1155 « tirer au sort, prédire » unt sorti et deviné (Wace, Brut, éd. I. Arnold, 123); d'où 1634 « être amené par un tirage au sort ou le hasard » (Boileau, Satire, éd. A. Cahen, IV, 76); 3. a) 1175 « aller hors d'un lieu dans lequel on se trouvait » (Benoît de Ste-Maure, Ducs Normandie, éd. C. Fahlin, 43417); en partic. 1553 « quitter un lieu où l'on a séjourné quelque temps » sortir de prison (La Bible, s. l. impr. J. Gérard, Eccl. 4, d); 1608 cynég. sortir au fort (M. Regnier, Satyre, III, 218 ds
Œuvres compl., éd. G. Raibaud, p. 36); 1623 sortir les pieds devant (Sorel, v. pied étymol. I A 2 d); b) 1713 d'où diable sors-tu? pour indiquer que l'on n'a pas vu qqn depuis longtemps (Hamilton, Gramm., 8 ds Littré); 1792-97 d'où sors-tu donc? se dit à l'adresse de quelqu'un qui manque d'éducation ou dont l'ignorance choque (Beaumarchais, Mère coupable, I, IV, collection Génie de la France, t. II, p. 251); c) 1559 « aller hors de chez soi pour se promener, faire des visites, etc. » (Amyot, Démosth., 20 ds IGLF: il n'ozast de honte sortir en tel estat [la tête rasée]); cf. 1573 quand je sors de chez moi pour aller à la chasse (Garnier, Hippolyte, acte I, 246 ds Tragédies, éd. W. Foerster, II, 15); 1664 être sorti (Molière, Mariage forcé, sc. 1); 4. ca 1485 « provenir de, être issu » sortir du ventre de « naître » (Myst. Vieux Testament, 34420 ds éd. J. de Rothschild, t. 4, p. 320); a) 1585 un Escholier sortant du collège (Noël du Fail, Contes et Discours d'Eutrapel ds
Œuvres facétieuses, éd. J. Assézat, t. II, p. 16); b) 1701 sortir de « avoir été formé par » (Trév.); 1782 sortir des mains de « id. » (Mmede Genlis, Ad. et Th., t. III, p. 72 ds Littré); 1842 sortir du rang (Stendhal, Napoléon, t. 1, p. 207: nos plus grands généraux sortirent du rang des soldats pour commander); 5. a) ca 1485 « se répandre à l'extérieur (d'un son, d'une odeur, d'un liquide) » de la pierre eaue sortit (Myst. Vieux Testament, 24716, éd. citée, t. 3, p. 323); ca 1495 fig. le feu luy sortist du visaige (Le Roman de Jehan de Paris, éd. E. Winkersheimer, 66); b) 1640 sortir de la mémoire (Corneille, Cinna, V, 1, 1474); 6. ca 1485 « (d'une plante, d'un fruit...) pousser » (Myst. Vieux Testament, 49215, éd. citée, t. 6, p. 219: un fruis magnifique Doit un jour sortir d'une fleur); cf. déb. xvies. rameaulx sortissans de une racine (Jard. de santé, I, 112, impr. La Minerve ds Gdf.); 7. ca 1500 « ne pas se tenir à ce qui était fixé » sortir d'un propos (Commynes, Mém., éd. J. Calmette, t. I, p. 70); 1799 ne pas sortir de là (Mmede Genlis, Théat. d'éduc., Le Voyageur, I, 1 ds Littré); 1829 ne pas vouloir sortir de là (Th. Leclercq ds Lar 19e); 8. 1538 « passer d'un temps, d'une époque ... dans un(e) autre » sortir hors enfance (Est.); 1693 sortir de fille (La Fontaine, Je vous prends sans verd, sc. 6, 170 ds
Œuvres, éd. H. Régnier, t. 7, p. 573); 9. a) 1538 « cesser d'être dans tel ou tel état physique ou moral » sortir de servitude (Est.); 1559 sortis hors de soy « en colère » (Amyot, Cam., 51 ds Littré); b) fin xviies. sortir de soi même « faire abnégation de sa propre personne » (Boss. ds Lar. 19e); 10. 1553 « avoir tel résultat » (La Bible, éd. citée, Matth. XII, 6); 11. 1561 « franchir une limite » ici fig. (J. Grévin, Les Esbahis, éd. E. Lapeyre, acte IV, sc. 4, p. 176: pensez-vous que cela sorte d'entre nous?); au propre 1636 sortir des bornes d'équité (Monet); 12. 1574 sortir de l'onde « (du soleil) apparaître à l'horizon en ayant l'air de sortir de l'eau » (Garnier, Cornelie, 307 ds
Œuvres, éd. citée, I, 95); cf. 1604 le soleil est sorti de la mer (Montchrétien, Hector, acte II ds Tragédies, éd. L. Petit de Julleville, p. 19); 13. 1675 « ressortir, avoir des traits, des caractères perceptibles » (Sévigné, Corr., éd. R. Duchène, t. 2, p. 91); 1745 laisser sortir les ouvrages larges du devant (Bosse, Manière de graver, p. 78); 14. a) 1690 sortir de chez le marchand « être à l'état neuf » (Fur.); b) 1874 « être présenté au public, mis en vente, édité, etc... » (A. Daudet, Fromont jeune, p. 177: sa fameuse invention qui malheureusement ne sort pas). Du lat. class. sŏrtι
̄ri « tirer au sort, fixer par le sort, obtenir par le sort » en gén. « obtenir du sort, de la destinée » puis « choisir » (lui-même dér. de sors, v. sort); le développement du sens de « passer du dedans au dehors », propre au fr. et qui a évincé à partir du xvies. issir*, est difficile à expliquer; un rapprochement sém. avec ressortir* au sens anc. de « rebondir », v. ressortir1* étymol. 1 fait difficulté, à moins d'y voir avec J. Storm ds Romania t. 5, p. 183, suivi par EWFS2, un dér. de *surctus, lat. class. sŭrrectus part. passé de surgere « jaillir », hyp. qui convient à l'esp. surtir « jaillir » mais fait difficulté pour le -o- du fr. sortir. Fréq. abs. littér.: 35 089. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 52 174, b) 55 632; xxes.: a) 50 684, b) 44 414. DÉR. Sorteur, -euse, adj. et subst. masc.a) Adj., rare. Qui aime sortir de chez lui (pour se distraire, se promener). On ne pouvait plus la retenir dans son taudis. Elle était devenue sorteuse (Céline,Voyage, 1932, p. 364).b) Subst. masc., mines. Celui qui sort le minerai de la mine. Les sorteurs de Saint-Étienne s'acheminaient courbés sous le poids d'un sac, qu'ils retenaient sur leur dos au moyen d'une corde serrée entre les dents, afin de conserver l'usage des deux mains pour leur lampe et leur béquille (Haton de la Goupillière,Exploitation mines, 1905, p. 675).− [sɔ
ʀtœ:ʀ], fém. [-ø:z]. − 1resattest. a) 1872 « qui aime sortir, qui quitte souvent le logis » (Littré); b) 1905 « celui qui sort le charbon de la mine » (Haton de La Goupillière, loc. cit.); de sortir1, suff. -eur2*. BBG. − Meier (H.). Neue lateinisch-romanische Etymologien. Bonn, 1980, p. 172-179. − Quem. DDL t. 19. − Robinson (A. H.). Les Désignations de la « marche dans l'espace »... Fr. mod. 1974, t. 42, p. 155, 159. − Schwarze (Ch.). Lexikalische Bedeutung und Bedeutungskonstruktion... In: Mél. Hilty (G.). Bern; Frankfurt am Main; New York; Paris, 1987, pp. 511-585. |