| SŒUR, subst. fém. I. A. − Personne de sexe féminin considérée dans son lien parental avec les autres enfants de ses propres parents (père et/ou mère). Mariage, mort, nom de sa sœur; embrasser sa sœur. L'homme qui n'a pas connu l'influence féminine d'une sœur dans son jeune âge se reconnaît souvent à on ne sait quoi d'un peu dur, le garçon seul parmi des sœurs garde une certaine fragilité (Mounier,Traité caract., 1946, p. 104): 1. ... je ne vivais pas seule ma condition d'enfant; j'avais une pareille: ma sœur, (...) elle avait deux ans et demi de moins que moi. On disait qu'elle ressemblait à papa (...). Sa naissance avait déçu car toute la famille désirait un garçon...
Beauvoir,Mém. j. fille, 1958, p. 44. − Locutions ♦ Sœur aînée, grande sœur. Sœur (la) plus âgée. Sa petite sœur Marguerite, qui n'avait encore que douze ans, vint (...) se jeter dans les bras de l'aînée, et lui dit: « Grande sœur, je ne veux pas que tu sois malheureuse... » (Maupass.,Contes et nouv., t. 1, Confess., 1883, p. 890).V. aîné ex. 8. ♦ Sœur cadette, jeune/petite sœur. Sœur moins âgée. Il vivait (...) avec deux sœurs; l'une, sensiblement plus âgée, s'était faite insignifiante, par effacement et affectueuse abnégation devant sa sœur cadette (...), prenant à sa charge (...) toutes les corvées et les soins les plus rebutants du ménage. La seconde sœur (...) était charmante (Gide,Si le grain, 1924, p. 472).Les deux petites sœurs (...), même robe blanche et bleue, même ruban de natte, même petit pas posé, l'une ingénue et docile, l'autre importante et ingénue, se donnaient la main (Malègue,Augustin, t. 1, 1933, p. 113).P. métaph. V. cadet ex. 2. ♦ Sœur consanguine, sœur de père. Sœur née du même père mais non de la même mère. Certains collatéraux sont parents à la fois dans les deux lignes [paternelle et maternelle]; ainsi les frères et sœurs issus des mêmes père et mère, qu'on appelle frères et sœurs germains. Au contraire, les frères et sœurs par le père seulement, qu'on appelle consanguins, les frères et sœurs de mère, qu'on appelle utérins, ne sont parents que dans une seule ligne (A. Colin, H. Capitant,Cours élém. de dr. civil fr., Paris, Dalloz, t. 1, 1931, p. 260). ♦ Sœur germaine. V. germain1A 1 et ex. de Bremond et supra A. Colin, H. Capitant, loc. cit. ♦ Sœur naturelle, illégitime. Sœur née hors mariage. J'avais une sœur illégitime (...), élevée, depuis sa naissance, au fond d'une province (...). On ne m'en parlait jamais. Notre père, qui aurait pu la reconnaître, avait pris sur lui de me priver de cette affection (Bloy,Femme pauvre, 1897, p. 199). ♦ Sœur utérine, sœur de mère. Sœur née de la même mère mais non du même père. − Tu as déjà (...) une parente dans ma maison? − Elle est ma sœur de mère (Bourges,Crépusc. dieux, 1884, p. 28).Voir A. Colin, H. Capitant, loc. cit. ♦ Sœur(s) jumelle(s). Sœur(s) née(s) d'un même accouchement. Sa mère (...) avait succombé en les mettant au monde, lui et sa sœur jumelle Henriette, qui, toute petite, l'avait élevé (Zola,Débâcle, 1892, p. 6).P. métaph. Les misères et les grandeurs sont sœurs jumelles, elles naissent ensemble; mais quand les couches sont vigoureuses, les misères à une certaine époque meurent, les grandeurs seules vivent (Chateaubr.,Mém., t. 3, 1848, p. 671). ♦ Sœurs siamoises. V. siamois I A 2 p. anal. ♦ Sœur de lait. Personne de sexe féminin considérée dans son rapport non parental avec une autre personne ayant (eu) la même nourrice qu'elle. V. lait I A 1 ex. de Dumas père. − En compos. Belle-sœur*; demi-sœur*. Byron avait une demi-sœur (d'une autre mère). Il la vit quand elle était déjà grande, la séduisit, fut son amant. Pourquoi se maria-t-il? Ils continuèrent leurs relations. La femme s'en douta. La demi-sœur lui avoua sa faute (Barrès,Cahiers, t. 5, 1907, p. 263). − Littéraire ♦ Les sœurs filandières, les trois sœurs ou, absol., les sœurs. Les Parques. Un fuseau, arme (...) terrible quand les trois Sœurs filandières y tordent et y enroulent le fil de nos destinées (France,Barbe-Bleue, Hist. duchesse de Cicogne, 1909, p. 133).V. filandière ex. ♦ Les doctes/neuf sœurs. V. docte A p. ext. et ex. de Chateaubriand, neuf1I A poét. et ex. de Chénier. − [P. allus. au conte de Ch. Perrault, La Barbe-bleue ds Contes de Ma Mère l'Oye, Paris, Delagrave, 1947 [1697], p. 48: La sœur Anne monta sur le haut de la tour; et la pauvre affligée lui criait de temps en temps: − Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir?; pour exprimer une situation d'attente] Si nous écrivons à un ami dont la correspondance avec nous est en retard: Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir? nous exprimons notre état subjectif d'attente par une pure dénomination extrinsèque (Théol. cath.t. 4, 11920, p. 918). B. − P. anal. 1. [Avec une idée prédominante d'affectivité] a) Femme qui est liée à une autre femme par une grande amitié et affection. Elle lui avait ouvert ses bras en lui disant: « Soyez ma sœur, mon amie, ma compagne, et aimez-moi comme je vous aime » (Ponson du Terr.,Rocambole, t. 3, 1859, p. 379). b) Femme qui est liée à un homme par un amour très chaste, en dehors de toute relation (ou même intention) sexuelle. Je serais le plus abject des hommes, si je pensais à Valérie autrement qu'avec la plus profonde vénération! (...) Qu'elle est belle l'âme de Valérie, de celle qui daigne être ma sœur, mon amie! Et qu'il serait lâche celui dont la passion ne s'arrêterait respectueusement devant cet ange (Krüdener,Valérie, 1803, p. 127).Il (...) ajouta, très bas: « C'est vous que j'aimais d'un amour fraternel, d'un amour pur. C'est vous que j'aimais comme une sœur (...)! » (Martin du G.,Thib., Été 14, 1936, p. 322).V. ami ex. 35. c) Femme qui est liée à un homme par une tendresse amoureuse, dans le cadre même de relations charnelles. Hélène en mourant tranchait ma vie (...). Je perds tout: mon amante, ma mère, ma sœur, la source, la femme (Jouve,Scène capit., 1935, p. 256): 2. Mon enfant, ma sœur,
Songe à la douceur
D'aller là-bas vivre ensemble!
Aimer à loisir,
Aimer et mourir
Au pays qui te ressemble!
Baudel.,Fl. du Mal, 1857, p. 86. 2. P. ext., arg. ou pop., plus ou moins iron. a) Vieilli. Fille, femme. Le soir, après avoir semé la sœur [levée dans l'après-midi], parce que tu sais, moi, ça dure pas, pour les frangines (Simonin, J. Bazin,Voilà taxi!1935, p. 187).[Notre cambrioleur] tombe à point nommé dans la villa de son idole, s'explique avec elle (...) et se farcit la sœur (Trignol,Pantruche, 1946, p. 104). b) Maîtresse, concubine. Dans le peuple et dans l'armée, pour désigner sa maîtresse, on dit indifféremment: (...) ma sœur, ma ménesse (Larch.1858, p. 521). c) Prostituée. Maison de tolérance populaire, où pour une thune on pouvait se farcir une sœur (Trignol,Pantruche, 1946, p. 48).Leurs putes [de ces souteneurs] mettaient les autres sœurs au pli: à coups de razif [rasoir] (Le Breton,Rififi, 1953, p. 129). d) Homosexuel(le). Chacune a quitté (...) La fine chemise (...) La plus jeune étend les bras, et se cambre, Et sa sœur, les mains sur ses seins, la baise (Verlaine,
Œuvres compl., t. 2, Parall., 1889, p. 131).Quant au tzar des Bulgares, c'est une pure coquine, une vraie affiche (...), cela pourrait être la cause pour laquelle le tzar Ferdinand s'est mis du côté des « Empires de proie ». (...) on est indulgent pour une sœur, (...) ce serait très joli comme explication de l'alliance de la Bulgarie avec l'Allemagne (Proust,Temps retr., 1922, p. 788). e) Loc. Et ta sœur! [Exclam. railleuse pour mettre fin à des propos jugés inadmissibles et qui s'attire parfois la réplique non moins narquoise Elle bat le beurre!] Le gars Pinceloup (...) disait (...): − On les verra p't' être seulement point, les Alboches. − Non, et ta sœur? disait Gaspard. − Mon gars, y a pas d'ma sœur; nous aut' on est réserve! − Continue: tu m'intéresses! (Benjamin,Gaspard, 1915, p. 29). C. − P. anal. ou au fig., littér. [Gén. avec une valeur méliorative] Personne ou chose liée à une autre par des rapports de ressemblance physique ou morale, de filiation matérielle ou spirituelle, de chronologie, de situation, etc. 1. a) [À propos d'animés, de personnages mythiques, etc.] Gilland s'attacha sérieusement à une ouvrière, sa sœur de condition, sa compagne de labeur (Sand,Quest. art et litt., 1876, p. 241).MmeArnaud n'avait aucun doute que la vie de ces êtres de romans ne fût aussi réelle que la sienne. (...) la tendre jalouse lady Castlewood, l'amoureuse silencieuse (...) lui était une sœur (Rolland,J.-Chr., Amies, 1910, p. 1218). − Par personnification. Oies, sœurs des cygnes, blanches comme eux (Pesquidoux,Livre raison, 1932, p. 61). − En appos. avec valeur d'adj. Que les grandes démocraties sœurs (!) ne nous rebattent pas les oreilles de leurs propos vertueux (Le Dantec,Savoir!1920, p. 48). − En compos. L'ami intime, l'intelligence-sœur de M. de Tocqueville, et qui lui fut de bonne heure un confident unanime et comme une seconde conscience (Sainte-Beuve,Caus. lundi, t. 15, 1860, p. 100).La Convention (...) eût préféré que la France s'entourât de républiques-sœurs. Mais (...) la majorité des populations se montrait hostile (Lefebvre,Révol. fr., 1963, p. 295).Âme-sœur. V. âme II C 1 d et ex. 103. − HISTOIRE ♦ ,,Titre que les rois de la chrétienté donnent aux reines en leur écrivant`` (Ac. 1835, 1878). Les Rois et les Reines de la Chrétienté se traitent de Frères et de Sœurs en s'écrivant (Ac.1798). ♦ [Chez les Compagnons] On appelle sœurs et frères, les fils et les filles du Père et de la Mère ainsi que leurs domestiques de l'un ou l'autre sexe (E. Martin Saint-Léon,Le Compagnonnage, 1901, p. 266). ♦ Femme franc-maçonne. La vicomtesse de Beauharnais s'était-elle fait inscrire à quelque loge maçonnique? Avait-elle suivi l'engouement des jeunes dames de la Cour (...) amusées à la pensée de se faire appeler Vénérable sœur? (...) deux loges (...) prennent le nom de Joséphine et implorent la protection de leur impériale « sœur » (A. Castelot,Joséphine, 1964, p. 398). b) [À propos de pers. et de choses concr., de phénomènes physiques] Une orchidée, (...) cette fleur si « chic », (...) sœur élégante et imprévue que la nature lui donnait, si loin d'elle dans l'échelle des êtres et pourtant raffinée, plus digne que bien des femmes qu'elle lui fît une place dans son salon (Proust,Swann, 1913, p. 221): 3. Ô ville, toi ma sœur à qui je suis pareil (...)
Nous sommes tous les deux la tristesse d'un port
Toi, ville! Toi ma sœur douloureuse qui n'as
Que du silence et le regret des anciens mâts;
Moi, dont la vie aussi n'est qu'un grand canal mort!
Rodenbach,Règne sil., 1891, pp. 105-106. − [P. allus. au Cantique des Créatures de saint François d'Assise (1224)] Je serai pareille, Dans ma candeur nouvelle et ma simplicité, À mon frère le pampre et ma sœur la groseille (Noailles,Cœur innombr., 1901, p. 18).Je ne suis pas un saint (...); la pluie n'était pas ma sœur, le vent n'était pas mon frère; mais je disais au vent: « Doux frère de Clarice »; et je disais à la pluie: « Tendre sœur d'Annalena! » (Milosz,Amour. init., 1910, p. 90). c) [À propos d'une pers., d'un personnage mythique ou d'une chose abstr.] La liberté divine Poserait ses pieds blancs sur ta poupe marine! Cette sœur de Vénus, cette fille des flots (Barbier,Ïambes, 1840, p. 155).Les chrétiens confortables et bien vêtus qu'incommode le Surnaturel et qui « ont dit à la Sagesse: Tu es ma sœur », la jugent dérangée d'esprit (Bloy,Femme pauvre, 1897, p. 297). 2. a) [À propos de choses concr., de phénomènes physiques] Cette sœur de l'azur, La source, dont le cœur est infiniment pur (Jammes,De tout temps, 1935, p. 33).V. de1ex. 109: 4. ... la vie m'apparaissait trop belle et trop charmante pour que je ne sentisse pas aussi du goût pour la mort, sa sœur et son amie, toujours enlacée à elle, et (...) je chérissais la nature jusqu'à vouloir m'anéantir dans son sein.
France,Vie fleur, 1922, p. 408. − Arg. ou pop. Les deux sœurs. Les fesses. Fait's vos discours à mes deux sœurs (Bruant1901, p. 223). − En appos. avec valeur d'adj. Deux pièces sœurs dont on avait fait sauter la porte vitrée (Morand,Extrav., 1936, p. 9).La jambe (...) se croise sur sa jambe sœur (Butor,Modif., 1957, p. 24). − En compos. Cellules-sœurs. Cellules issues de la division d'une même cellule-mère. La partie supérieure du nucelle, d'où ont disparu la calotte et les cellules-sœurs du sac embryonnaire (Plantefol,Bot. et biol. végét., t. 1, 1931, p. 460). b) [À propos de choses concr., de phénomènes physiques ou de choses abstr.] L'hagiographie était la sœur de l'art barbare et charmant des enlumineurs (...) et de la chaste peinture des primitifs (Huysmans,En route, t. 1, 1895, p. 38).Amie et sœur de la jeune Espérance Ô nuit qui panses toutes les blessures (Péguy,Porche Myst., 1911, p. 304). − [P. allus. au poème de Baudelaire, Le Reniement de Saint Pierre ds Les Fleurs du Mal, 1857, p. 214: Certes, je sortirai, quant à moi, satisfait D'un monde où l'action n'est pas la sœur du rêve] Si le théâtre nous a montré parfois, avec Hamlet, que l'action n'est pas la sœur du rêve, il nous fait voir toujours en elle la sœur du discours, rend claire cette union de l'action et du discours (Thibaudet,Réflex. litt., 1936, p. 86). c) [À propos de choses abstr.] La prière est la sœur tremblante de l'amour; Qui prie adore; aimer, c'est prier une femme; Les deux lumières sont au fond la même flamme (Hugo,Légende, t. 6, 1883, p. 237).Telle est la démocratie théorique. Elle proclame la liberté, réclame l'égalité, et réconcilie ces deux sœurs ennemies en leur rappelant qu'elles sont sœurs, en mettant au-dessus de tout la fraternité (Bergson,Deux sources, 1932, p. 300). − En appos. avec valeur d'adj. Langues sœurs. V. langue II A 1 et ex. 11. d) [Avec une valeur emphatique] Divers toasts ont été portés: (...) M. Derozerays, à l'agriculture! M. Homais, à l'industrie et aux beaux-arts, ces deux sœurs! (Flaub.,MmeBovary, t. 1, 1857, p. 176).Les ténèbres avec leurs sombres sœurs, les flammes, Ont pris Paris (Hugo,Année terr., 1872, p. 278). II. − RELIG. CATH. A. − 1. Synon. de religieuse.Il n'y a rien de trop sale et trop vilain pour la vieille sœur chiffonnière. (...) ce que personne ne veut, c'est ça qu'elle passe son temps à chercher (...) pour nourrir beaucoup de pauvres et de vieillards et pour bâtir les couvents de la Mère Thérèse (Claudel,Soulier, 1929, 4ejournée, 11, p. 931).V. monastique ex. 2, moniale ex. de Huysmans et de Lefèvre: 5. ... les sœurs qui se vouent à la garde des malades et des infirmes sont admirables, mais combien leur tâche est aisée, en comparaison de celle qu'assument les ordres cloîtrés, les ordres où les pénitences ne s'interrompent jamais, où même les nuits alitées sanglotent!
HuysmansEn route, t. 1, 1895, p. 78. Rem. Certains aut. établissaient une distinction (auj. périmée) selon laquelle le mot sœur devait s'appliquer aux religieuses de vœux simples uniquement: ,,Le mot de sœur désigne (...) selon le can. 488, 7 o, les religieuses de vœux simples, par opposition aux religieuses de vœux solennels qui sont dites moniales`` (R. Naz, Dict. de dr. canonique, Paris, Letouzey, t. 7, 1958, col. 1065). − Fam. Bonne sœur ou (plus rare, vieilli) chère sœur, synon. Deux bonnes sœurs enfoncées sous la cornette égrenant de longs chapelets qui leur mesuraient l'attente (A. Daudet,Nabab, 1877, p. 141).La femme aux chapelets pendants parla des maisons de son ordre, de (...) la chère sœur Saint-Nicéphore. On les avait demandées au Havre pour soigner dans les hôpitaux des centaines de soldats (...) elle se révéla tout à coup une de ces religieuses à tambours et à trompettes (...); une vraie bonne sœur Ran-tan-plan (Maupass.,Contes et nouv., t. 2, Boule de suif, 1880, p. 146). 2. a) [Les sœurs selon leur statut, leur fonction] Sœur économe, enseignante, garde-malade, hospitalière, supérieure. − Vx. Sœur converse, laie. V. convers A 3 empl. adj. et ex. 2 lai1relig. cath. − Sœur écoute. V. écoute1B 1 a et ex. de Sand et de Estaunié. − Sœur tourière. Sœur qui remplit la fonction de portière. Le tour, à l'intérieur du couvent, près de la clôture. Blanche et une très jeune sœur (...) prennent les provisions et les objets usuels que la sœur tourière leur passe (Bernanos,Dialog. Carm., 1948, 2etabl., 6, p. 1591).P. métaph. La cloche (...) Se dépêchait (...) Dans sa tour (...). Sœur tourière du ciel (...) Semant un bruit de clés au fond de l'air transi (...) Elle faisait sa ronde, en robe noire aussi (Rodenbach,Régne sil., 1891, p. 127). b) [Les sœurs selon leur congrégation, leur ordre] − Sœurs dominicaines. Congrégation vouée à l'éducation, à l'éveil de la foi, à la garde des malades, etc.; au sing., personne appartenant à cette congrégation. La sœur dominicaine est toujours assise auprès de mon lit (...). C'est une excellente fille, d'humble origine (...), le visage congestionné dans ses coiffes blanches, mais portant son habit avec dignité (Coppée,Bonne souffr., 1898, p. 32).Dominicains (tiers-ordres) (...). Ils offrent une grande variété de buts: soins des malades, enseignement, orphelinats, refuges, etc., où se dévouent les petites sœurs dominicaines (Marcel1938, p. 197). − Sœurs de la Doctrine (chrétienne). V. doctrine A 2 p. méton. et ex. de Theuriet. − Sœurs de Saint-Charles. Congrégation fondée à Nancy en 1652 par Joseph Chauvenel et vouée au service des pauvres, des malades. J'y retrouve [en Lorraine] (...) les coiffes blanches de vos saintes institutrices, les sœurs de Saint-Charles. (...) leur maison-mère est à Nancy. Et quand j'incline ici devant elles mon respect, c'est au double titre catholique et lorrain que je leur dis: « Mes sœurs » (Barrès,Cahiers, t. 4, 1906, p. 173). − Petites sœurs de l'Assomption. Congrégation fondée ,,à Paris par le P. Pernet en 1864 pour soigner les pauvres à domicile gratuitement`` (d'apr. Marcel 1938, p. 50). Synon. fam. sœurs hirondelles.V. hirondelle B 2 b ex. de Bourget. − Petites sœurs des Pauvres. Congrégation fondée vers 1840 par Jeanne Jugan et vouée au service des vieillards (notamment par le moyen de quêtes). J'ai visité hier les Petites Sœurs des pauvres. Le soin de ces infirmes, de ces vieillards est quelque chose de divin (...). C'est la vraie charité (Dupanloup,Journal, 1861, p. 224). 3. a) Sœurs grises (vx), sœurs/filles de (la) Charité, sœurs de saint Vincent de Paul. Société de vie apostolique en communauté fondée en 1633 par saint Vincent de Paul et sainte Louise de Marillac, vouée au service des malades, des pauvres et à l'éducation; au sing. ou au plur., personne(s) appartenant à cette société. Des sœurs de Saint-Vincent de Paul, avançant en troupe, semblaient de grands oiseaux bleus aux ailes blanches étendues (Estaunié,Empreinte, 1896, p. 2).V. bon ex. 37, charité ex. 20: 6. Pour aider ses Dames de Charité dans leurs visites aux malheureux, il [saint Vincent de Paul] engageait quelques filles des champs, quelques servantes ayant le cœur chrétien, et partait de là pour instituer la sainte et admirable famille des Sœurs Grises, qui sont aujourd'hui, au nombre de vingt mille, répandues dans le monde entier.
CoppéeBonne souffr., 1898, p. 138. Rem. Les sœurs de saint Vincent de Paul, ne prononçant pas de vœux perpétuels mais les renouvelant chaque année, ne sont pas des religieuses au sens strict du terme. Pourtant, elles sont couramment assimilées à des religieuses. b) P. anal. Sœur de charité − Personne qui se dévoue au service d'autrui. C'est [le Médecin de campagne] l'histoire d'un homme fidèle à un amour méconnu (...), au lieu de se faire chartreux, il se fait la sœur de charité d'un pauvre canton qu'il civilise (Balzac,Lettres Étr., t. 1, 1833, p. 13).Je ne trouve pas délicat à un vieillard, à un maladif (...) de prendre une jeune femme, même avec son assentiment, pour en faire la garde-malade et la sœur de charité de ces tristes années (Goncourt,Journal, 1887, p. 686). − P. iron., arg., vieilli. Synon. de voleuse.Les pauvres honteux possèdent (...) quelques débris de leur fortune passée (...) pendant qu'elle fouille dans les tiroirs, la Sœur de Charité sait s'emparer adroitement de ces objets (Vidocq,Voleurs, t. 2, 1836, p. 153-154). B. − Ma sœur; sœur + prénom. ,,Appellation dont les religieuses usent entre elles pour exprimer les sentiments de charité qui animent leurs relations, et dont, par extension, les laïques usent également envers elles`` (R. Naz, loc. cit.). Sœur Marthe, à Mère Marguerite: Sœur Claire a regardé deux fois comment allait sa cornette, devant la glace. Mère Marguerite, à sœur Claire: C'est très laid (Rostand,Cyrano, 1898, v, 1, p. 202).− Oui, ma Sœur (...); des rires étouffés coururent le long des bancs. (...) je dis à la religieuse (...): − Je vois bien que j'ai fait une gaffe... Mais je ne sais pas comment il faut vous appeler... Aux religieuses que je connais, on dit ma sœur (Gyp,Souv. pte fille, 1928, pp. 97-98). Prononc. et Orth.: [sœ:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1100 sorur (Roland, éd. J. Bédier, 1720); id. soer (ibid., 294); spéc. mythol. a) 1550 les neufs sœurs « les muses » (Ronsard, Odes, I, 10, v. 13, éd. P. Laumonier, t. 1, p. 122); 1552 les doctes sœurs « id. » (Du Bellay,
Œuvres, éd. H. Chamard, t. 4, p. 185); b) 1561 les trois fatales sœurs « les Parques » (J. Grevin, L'Olimpe, I, éd. L. Pinvert, p. 279); 2. a) 1100 « nom qu'on donne à une personne pour laquelle on a de la tendresse » (Roland, éd. cit., 3713); b) 1533 « nom donné à des chrétiennes par les autres membres de la chrétienté » sœurs en nostre seigneur Jesus (Farel, Maniere et fasson, p. 61 ds Richard, p. 16); c) 1671 « femme qui a une communauté de situation avec une autre » sœurs d'infortune (Molière, Psyché, I, 1); d) 1694 « nom donné aux reines par les rois quand ils leur écrivaient » (Ac.); 3. a) ca 1225 « nonne, religieuse » suer Eülaile (Gautier de Coinci, Miracles de Notre Dame, I Mir 29, éd. V. F. Koenig, t. 2, p. 273, 16); 1680 sœurs de la croix (Rich. t. 2); b) id. « nom donné aux femmes qui vivent ensemble sans être religieuse » sœur de la Charité (ibid.); 4. ca 1225 en parlant de deux choses qui ont de nombreux points communs » (Huon de Bordeaux, éd. P. Ruelle, 7610). Du lat. soror « sœur ». L'a. fr. avait les formes suer, cas suj., et seror, avec différentes var., cas régime issu de l'acc. sororem, très tôt le cas suj. devint le plus usuel à cause de son utilisation fréq. au vocatif. Fréq. abs. littér.: 13 346. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 20 137, b) 23 760; xxes.: a) 20 066, b) 14 775. DÉR. Sœurette, subst. fém.Appellation affectueuse pour une sœur plus jeune. − Sœurette, je voulais te dire quelque chose. Cécile frappa du poing (...). − Non, dit-elle (...) tu sais que je déteste ces façons de parler: sœurette, frérot. Non, non! Je t'appelle frère et tu m'appelles sœur (Duhamel,Nuit St-Jean, 1935, p. 210).− [sœ
ʀ
εt]. Att. ds Ac. dep. 1835. − 1resattest. a) 1463 « religieuse » (Texte in Rec. de docum. p. servir à l'histoire de Montreuil s. mer, éd. G. de Lhomel, 176 ds Fonds Barbier: couvent de noires seurettes religieuses de Saint-François), b) 1565 les neuf seurettes de Parnasse (Tahureau, Sec. Dial., p. 164 ds Hug.), 1571 sœurette (La Porte, Épith., 379 r oet v o, ibid.); de sœur, suff. -ette (v. -et). BBG. − Chautard Vie étrange Argot 1931, p. 147. − Dub. Pol. 1962, p. 424. − Hasselrot 1957, p. 174, 204, 219 (s.v. sœurette); 20es. 1972, p. 71 (s.v. sœurette). |