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SICILIEN, -IENNE, adj. et subst.
I.
A. − Adj. et subst. (Celui, celle) qui habite la Sicile ou qui en est originaire. J'allais donc à Prague, comme le soldat sicilien, pendu à Paris du temps de la Ligue, allait à la corde (Chateaubr., Mém., t. 4, 1848, p. 180).Sous le ciel jeune et frais, qui rayonne le mieux, De la Sicilienne au doux rire, aux longs yeux, Ou de l'Aube qui sort de l'écume marine? (Leconte de Lisle, Poémes ant., 1874, p. 240).
B. − Adjectif
1. Relatif, propre à la Sicile à ses habitants. Paysage sicilien; temple sicilien; maffia sicilienne; marionnette sicilienne. Sous les portiques de marbre du plus beau cloître sicilien baigné par les flots (Sainte-Beuve, Volupté, t. 1, 1834, p. 134).Cherchons hors de ces murs quelque image du printemps sicilien (Alain, Propos, 1922, p. 393).
a) HIST. Vêpres* siciliennes.
b) ART CULIN., empl. subst. fém. Macédoine de fruits (agrumes, amandes). Comme légumes des fonds d'artichauts à la jardinière, suivis d'un soufflé au chocolat et d'une sicilienne de fruits (Zola, Pot-Bouille, 1882, p. 188)
À la sicilienne. ,,Se dit de petites pièces de boucherie ou de volailles poêlées, garnies de tomates farcies, de timbales de riz et de pommes croquettes`` (Courtine Gastr. 1984).
c) JEU D'ÉCHECS. Défense Sicilienne, p. ell., Sicilienne, subst. fém. Une des ouvertures. Plus de 25 % des parties de maîtres sont des Siciliennes (...). La défense Sicilienne est tenue pour (...) dynamique: dès le troisième coup le plan de bataille est tracé; les Blancs ont un avantage d'espace, les Noirs une prépondérance en pions sur les colonnes centrales (D. N. L. Levy, K. J. O'Connell, Comment jouer la défense Sicilienne, trad. par S. Zinser, 1983, pp. 9-10).
2. Qui présente ou qui évoque certaines caractéristiques propres à la Sicile ou à ses habitants. Je voyais, frappés au bord de la mer violette par les rayons obliques d'un soleil d'or, les cubes roses d'une cité antique dont je ne doutais pas que le prince − de passage à Paris par un bref miracle − ne fût lui-même, aussi lumineusement sicilien et glorieusement patiné, le souverain effectif (Proust, Guermantes 2, 1921, p. 433).V. auroral ex. 3.
LITT., BEAUX-ARTS. Qui est fréquent sur cette île, ou qui en est originaire. Il déplorait que l'allumette ne permît pas de voir, juste sous la croix du paratonnerre [du clocher Saint-Martin], un motif sicilien pur (Giraudoux, Siegfried et Lim., 1922, p. 65).V. perle C 1 a ex. de France.
C. − Adj. et subst. masc., LING. (Dialecte) sicilien. Parmi les différens langages des divers États de l'Italie, il n'y a pourtant que le napolitain, le sicilien et le vénitien qui aient l'honneur d'être comptés (Staël, Corinne, t. 3, 1807, p. 94).Les douces poésies de l'abbé Melli, en dialecte sicilien (Stendhal, Amour, 1822, p. 278).
II. − Spécialement
A. − Adj. et subst. masc., GÉOL., PALÉONT. Étage sicilien, ou absol., Sicilien. Étage du Quaternaire (Paléolithique supérieur), caractérisée par la présence en Méditerranée de mollusques d'eau froide (d'apr. Bréz. 1969); p. méton., période correspondante. C'est seulement avec la terminaison du pliocène, lors du sicilien, que des colonies de mollusques arctiques ont pu pénétrer dans la Méditerranée (Lapparent, Abr. géol., 1886, p. 390).Un étage Sicilien, défini dans le golfe de Palerme et correspondant à une ligne de rivage située à 80-90 m [au-dessus du niveau actuel de la Méditerranée] (L. Guyot, Hist. de la flore terrestre, 1969, p. 85).
Empl. adj. Qui caractérise cette période. V. adriatique ex. 1.
B. − Subst. fém.
1. MUSIQUE
a) Danse ancienne, d'un tempo modéré, d'un rythme iambique à 6/8 ou 12/8 sous une forme pointée; p. méton., air sur lequel s'exécute cette danse. L'antique sicilienne des Italiens (...) ressemblait au passe-pied par ses petits pas serrés, croisés et dansés très gaiement sur une mesure alerte (Desrat1895).Bach a placé une S[icilienne] (...) dans son Concerto de clavecin en mi majeur (BrenetMus.1926, p. 406).
b) Pièce instrumentale ou vocale, en vogue au xviiies., qui s'inspire de cette danse. Il se remit à chercher prudemment les phrases de la gracieuse et banale sicilienne, craignant de glisser sur un air du Trovatore, de même allure (France, Lys rouge, 1894, p. 133).Dauvergne ne connaîtra plus que la Gigue, la Sicilienne, très en faveur, et le menuet (La Laurencie, Éc. fr. violon, 1924, p. 140).
2. TEXT., HABILL. Étoffe de soie, servant à confectionner des robes et des vêtements d'extérieur au xixes.; p. méton., vêtement fait de cette étoffe. Elle, enveloppée jusqu'aux chevilles d'une sicilienne lilas doublée en chèvre du Thibet (Courteline, Vie mén., Peur des coups, 1895, p. 159).V. pou-de-soie ex. de Zola.
C. − Subst. masc., VITIC. ,,Cépage à raisins blancs, dit Panse précoce, cultivé en Provence comme raisin de table`` (Fén. 1970).
REM.
-sicilien, -ienne, élém. de compos.représentant l'adj. sicilien (supra I), entrant dans la constr. de qq. adj. dans le domaine de l'ethnol. où il indique une relation entre le peuple, la race, l'ethnie ou le pays de Sicile et un autre peuple ou un autre pays; les mots constr. signifient « qui appartient à la fois au peuple de Sicile et au peuple désigné par le 1erélém. ».V. germano-sicilien (s.v. germano- A 2 a) et aussi:
Italo-sicilien, -ienne, -rare. Qui est à la fois propre aux Siciliens et aux Italiens. La Belgique, c'est un bagne pour les filles, qui s'exposent à des châtiments graves de la part de leur protecteur, à la moindre incartade. Ce qui explique en partie l'affaire de Grenoble, c'est la brutalité exceptionnelle du milieu italo-sicilien et l'insoutenable misère morale des filles (Le Nouvel Observateur, 16 août 1980, p. 41, col. 3).
Prononc.: [sisiljε ̃], fém. [-jεn]. Étymol. et Hist. 1. Déb. xives. subst. Sycillien « habitant de la Sicile » (Aimé du Mont-Cassin, Ystoire de li Normant, éd. O. Delarc, p. 214); 1550 adj. « qui se rapporte à la Sicile » (Ronsard, Odes, I, 15, 86 ds Œuvres, éd. P. Laumonier, t. 1, p. 143: épée Sicilienne [de Damoclès]); spéc. 1886 géol. étage sicilien (Lapparent, Abr. géol., p. 370); id. sicilien (Id., ibid., p. 390); 2. 1639 subst. masc. désigne le dial. parlé en Sicile (Chapelain, Lettre 6 janv., éd. Tamizey de Larroque, t. 1, p. 359); 3. subst. fém. a) 1705 nom de danse (Brossard); b) 1873 nom d'une étoffe de soie (La Mode illustrée, p. 348 ds Quem. DDL t. 33, s.v. amiral). Empr. au lat. médiév.sicilianus « sicilien » (1282 ds Du Cange), lat. class. siciliensis, dér. de Sicilia, n. lat. de la Sicile. Fréq. abs. littér.: 103.