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* Dans l'article "SATANIQUE,, adj."
SATANIQUE, adj.
A. − Qui a rapport à Satan.
1. [En parlant d'une chose]
a) Qui est propre à Satan, se rapporte à Satan. Culte satanique; arcanes sataniques. Ses merveilleuses facultés [de Melmoth], acquises instantanément par un pacte satanique (Baudel.,Paradis artif.,1860, p. 383).V. diabolisme dér. s.v. diabolique ex. de Huysmans.
Anti-satanique. Destiné à combattre Satan. Le chanoine de Lyon, qui lui a donné des renseignements sur la messe noire, dit-il, lui a écrit que ces choses devaient lui arriver et chaque jour, il lui mande ce qui suivra le lendemain, avec accompagnement d'ordonnances anti-sataniques pour s'en défendre (Goncourt,Journal,1891, p. 62).
b) Qui est une manifestation des pouvoirs de Satan, qui est donné, inspiré par lui. Charme satanique; sollicitation satanique. Je venais de commettre, en toute naïveté, le péché d'orgueil sous sa forme la plus satanique: l'orgueil de l'esprit! (H.Bazin,Vipère, 1948, p. 24):
Tout pouvoir laïque (...) est forcément un pouvoir athée, œuvre de Satan (...). Le pouvoir « satanique » ne peut engendrer que la « corruption sur la terre », le mal suprême qui doit être impitoyablement combattu et déraciné. Pour ce faire nous n'avons d'autre solution que de renverser tous les gouvernements qui ne reposent pas sur les purs principes islamiques, et sont donc corrompus et corrupteurs... Khomeiny,Princ. pol., philos., soc. et relig., trad. par J.-M. Xavière, 1979, p. 27.
2. [En parlant d'une pers., d'une collectivité] Qui rend un culte à Satan, qui a fait un pacte avec lui. Association satanique. Étant allé trouver ce jour-là, dans une ruelle de Montmartre, un prêtre satanique, qui pratiquait la magie noire et opérait l'envoûtement (France,Révolte anges,1914, p. 269).Êtes-vous une sorte d'alchimiste satanique, qui composez les sentiments que vous souhaitez qu'on ait pour vous, aussi glacialement que vous dosez ceux que vous avez pour les autres? (Montherl.,J. filles,1936, p. 1048).
[P. méton.] Toute la Lorraine ne parle plus que des scandales de Sion. Toute la Lorraine regarde la ronde satanique menée sur la colline (...) par les trois prêtres et leurs religieuses échevelées (Barrès,Colline insp.,1913, p. 208).
Empl. subst. Personne vouée à Satan. Ah çà, est-ce qu'elle aussi était une satanique! Mais non, elle n'avait nullement l'allure d'une possédée (Huysmans,Là-bas, t. 1, 1891, p. 231).Mathieu le fit prévenir qu'il reprenait sa parole et ne louerait pas sa maison. Sa femme lui avait fait honte de loger des sataniques (Barrès,Colline insp.,1913p. 223).
3. HIST. DES ARTS. [En parlant d'un artiste, d'un écrivain ou de son œuvre] Qui a Satan, le Mal, le vice pour sujet ou centre d'intérêt. Puis la conversation déraille, et elle va à Rops, à cet aquafortiste du royaume de Satan, et c'est pour Rodenbach une occasion pour faire un amusant historique de la légion satanique, en tête de laquelle étaient Baudelaire et Barbey d'Aurevilly et qui se continue aujourd'hui par Verlaine et Huysmans (Goncourt,Journal, 1893, p. 477).Toute une salle de dessins de William Blake, de la plus abstraite folie cabalistique, satanique et dantesque (...) apparaissent rehaussés de flammes bleues ou soufre, à la Greco, dans des nuages carminés (Morand,Londres,1933, p. 158).
École satanique. Courant de l'école romantique. Le chef de l'école satanique auquel nous devons lord Byron, ainsi que toutes les compositions où le crime en gants blancs produit de vigoureux contrastes (Balzac, Œuvres div., t. 2, 1830, p. 99).On veut voir dans celui-ci [Baudelaire] le chef d'une école satanique, quand il est souvent voisin de Veuillot (Barrès,Amori,1902, p. 204).V. antonomase ex.
B. − Qui rappelle Satan, est digne de Satan. Synon. démoniaque, diabolique, infernal, méphistophélique.
1. Qui rappelle l'aspect, les attributs physiques prêtés à Satan. Yeux sataniques; expression, beauté, laideur satanique. Une grosse mégère [dans un dessin de Guys] dont la tête, serrée dans un sale foulard qui dessine sur le mur l'ombre de ses pointes sataniques, fait penser que tout ce qui est voué au Mal est condamné à porter des cornes (Baudel.,Curios. esthét.,1863, p. 361).Des sourcils à la remontée un peu satanique (Goncourt,Journal, 1893p. 421).V. barré ex. 7.
Rire, sourire satanique. Qui dénote la méchanceté, la joie de ceux qui approuvent le mal. Il y a des moments où le rire de Renan, vaticinant du mal pour l'humanité, est vraiment satanique. Il était intéressant à regarder ce soir, (...) détaillant les angoisses, les catastrophes, les ruines, les morts tragiques, qui nous attendent (Goncourt,Journal, 1873, p. 953).Quand elle redescendait, elle était frigide, avec un sourire satanique dans les yeux comme si elle venait de faire subir au type la torture et l'eût avili et mortifié mille et mille fois en une seule séance (Cendrars,Bourlinguer,1948, p. 86).
2. Qui évoque les pouvoirs de Satan, qui a quelque chose de surnaturel. Habileté, intelligence satanique. Comme ces mots de Barrès, que tu me rappelles, sont tout de même vertigineux! Il est impossible qu'on aille jamais plus loin dans la subtilité de l'élégance: c'en est presque satanique (Rivière,Corresp. [avec Alain-Fournier], 1906, p. 314).Les anciennes dépouillèrent les volailles en détachant d'un seul coup avec une prestesse satanique, la gaine d'argile, la peau et le plumage (Arnoux,Rossignol napol.,1937, p. 143).
3. Qui rappelle la perversité de Satan.
a) [En parlant d'une pers.] Qui est pervers, qui fait le mal, ne se conforme pas à la morale. Cette pléiade de jeunes Anglais indécents, sataniques et heureusement morts au ban de la société, Byron, Shelley, etc. (Morand,Londres,1933, p. 46).Empl. subst. − Comme il est très difficile d'être un saint, dit des Hermies, il reste à devenir un satanique (...). − On peut avoir l'orgueil de valoir, en crimes, ce qu'un saint vaut en vertus. Tout Gilles de Rais est là! (Huysmans,Là-bas, t. 1, 1891, p. 85).
b) [En parlant d'un sentiment, d'une manifestation de la pers.] Qui est inspiré par le désir de faire le mal, par la vue du mal, par une chose pernicieuse. Synon. cruel, méchant.C'était une femme cruelle, logique, froide, jamais à court d'idées, d'une invention et d'une perversion sataniques quand il s'agissait de monter une nouvelle affaire, d'exécuter un attentat ou d'éventer les traquenards de la police (Cendrars,Moravagine,1926, p. 102).Aimablement, le vieillard [Goethe] demanda au jeune homme à quoi il travaillait. « J'écris un Faust », répondit Heine. Un Faust! il n'y songeait même pas. Mais il trouvait dans l'insolence un plaisir satanique (Tharaud,Qd Israël n'est plus roi,1933, p. 56).
c) Dans une tournure impers. Il est satanique de tenter les pauvres humains (Bloy,Journal,1895, p. 184).
d) Empl. subst. masc. sing. à valeur de neutre. Caractère pervers, méchant de quelqu'un ou quelque chose; ce qui est pervers. Je retrouve aujourd'hui, au Temps, Clemenceau. Il perd à mes yeux son satanique. Ce n'est qu'un gastralgique, à la conversation intelligente (Goncourt,Journal1871, p. 786).Sa vie se passait à fouiller celle des autres, heureux de découvrir du satanique et du sans nom. Flore et faune du mal étaient les seules sciences dont il eût souci (Péladan,Vice supr.,1884, p. 175).
4. P. ext. Qui fait souffrir, qui est extrêmement désagréable. Synon. infernal.À trois heures [de la nuit], le tumulte est devenu assourdissant, que dominent toujours les grincements sataniques [d'un accordéon] (Jammes,Mém.,1923, p. 83).
REM.
Sataniquement, adv.D'une manière qui évoque les pouvoirs, la perversité de Satan. Rire sataniquement. Sataniquement, Malatesta songea à l'irrésistible séduction qu'exercerait sa femme à Paris et à son plaisir d'en voir d'autres, beaucoup d'autres, damnés comme lui, en l'enfer du désir vain (Péladan,Vice supr.,1884p. 50).Sa rupture providentielle (sataniquement providentielle) avec Rome (...) a porté l'A. F. [l'Action Française] sur un champ de bataille où ses humeurs belliqueuses, ses acides, ses âcretés, ont immédiatement retrouvé leur emploi (J.-R. Bloch, Dest. du S.,1931, p. 25).
Prononc. et Orth.: [satanik]. Att. ds Ac. dep. 1798. Étymol. et Hist. 1475 (J. Molinet, Le Temple de Mars, 113 ds Faits et dits, éd. N. Dupire, t. 1, p. 69: Guerre a le chief cornu, long, satanique). Dér. de Satan*; suff. -ique*. Cf. gr. Σ α τ α ν ι κ ο ́ ς (ives.) et lat. médiév. satanicus (xiies. ds Blaise Latin. Med. Aev.). Fréq. abs. littér.: 157. Bbg. Darm. 1877, p. 123 (s.v. sataniquement).