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SALE, adj.
A. − [Gén. après le subst., ou en fonction d'attribut]
1. [En parlant de qqc.]
a) Qui a perdu sa netteté, sa pureté sous l'effet d'une matière étrangère qui souille, tache et donne à la chose altérée un aspect déplaisant ou dégoûtant. Synon. crasseux, dégoûtant, encrassé, maculé, malpropre, taché; (pop.) crado (s.v. -o), dégueulasse; salingue; anton. propre.J'ai été deux fois déjà aux écoles de natation. (...) une eau sale, des moutards ridicules ou des vieillards stupides qui y clapotent (Flaub.,Corresp., 1842, p. 109):
1. ... [la chambre d'Antelme] n'est pas beaucoup plus grande que la sienne, à Fenouille, et parfaitement inoffensive, banale même. Sale seulement. Et encore la crasse de tant d'années n'y excite-t-elle plus le dégoût. Elle a ce caractère de nécessité, cette vigueur vivante des lèpres végétales. Bernanos,M. Ouine, 1943, p. 1418.
Sale de + subst. (désignant ce qui salit).[Simon] se relevait, en nettoyant machinalement avec sa main sa petite blouse toute sale de poussière (Maupass.,Contes et nouv., t. 1, Papa de Simon, 1879, p. 16).
Loc. fig. Laver* son linge sale en famille.
MAR. Vaisseau sale. Vaisseau dont l'extérieur de la carène est couverte de coquillages, de goémon (d'apr. Will. 1831). Côte sale. Côte dangereuse, bordée de roches, d'écueils cachés sous la mer. (Dict. xixeet xxes.).
Empl. subst. masc. sing. à valeur de neutre. Synon. de saleté.Ne t'inquiète pas, dit Berthe, je lui mettrai [à un cochon] une grosse chaîne au cou, et je l'empêcherai bien de marcher dans le sale (Renard, Œil clair, 1910, p. 136).
En partic., surtout dans la loc. verb. mettre au sale. Ensemble de linges ou d'effets devant être prochainement lavés ou nettoyés. MmeLagave (...) entrait dans la chambre de Bob, où il semblait qu'un cyclone eût sévi, constatait, amère, qu'il avait mis encore une chemise au sale (Mauriac,Destins, 1928, p. 39).
SYNT. Assiette, bouteille, couvert, vaisselle, verre sale; escalier, logement, meuble, vitre sale; rue, ville sale; bas, chaussette(s), chaussure(s), col, habit, drap, mouchoir, serviette, tablier, torchon, vêtement sale(s); brosse, peigne sale.
b) Qui manque de netteté, d'éclat; qui est terne. Aube, ciel sale; cheveux d'un blanc, d'un gris sale. Le jour enfin se leva, ce petit jour sale des nuits d'hiver, si mélancolique sur le pavé boueux de Paris (Zola,Nana, 1880, p. 1281).Il y avait une pauvre lampe (...) un cercle de carton réduisait sa lumière à une tache (...) une lueur jaune, sale, triste de la suie et de la crasse accumulée depuis des années (Vialar,Bal sauv., 1946, p. 19).
PEINT. [En parlant d'un tableau, des couleurs d'un tableau] Dont les teintes sont confuses, brouillées. [P. méton.] Une rue pleine de bâtisses misérables et rustiques, (...) une rue à la façon de ces rues de banlieue que peint Hervier, de son pinceau sale (Goncourt,Journal, 1862, p. 1029).
2. [En parlant de qqn] Qui se lave insuffisamment ou mal; qui manque de propreté corporelle et/ou vestimentaire. Synon. crasseux, dégoûtant.Sale comme un cochon, un peigne, un porc; sale des pieds à la tête; sale à faire peur. Oh! je ne lui ai rien caché dit orgueilleusement Saint Victor nous lui avons dit qu'elle était sale sur elle et tout (Goncourt,Journal, 1862, p. 1004).Sénac a déjà sous les yeux des poches mauves et translucides. Il est sale avec lyrisme. Il a l'air de suer la crasse, de la produire, de la sécréter, exactement, de la faire sourdre des profondeurs de son être (Duhamel,Désert Bièvres, 1937, p. 238).
Sale de + subst. (désignant ce qui souille, qui salit).La femme n'ose pas partir avec le Tony et elle reste là, chez nous, assise près de la fontaine, toute seule, toute sale de larmes (Giono,Regain, 1930, p. 70).
Empl. subst. masc. sing. à valeur de neutre. Je l'aimais bien, c'était tout. D'abord, il était d'un sale! Vous aimez beaucoup ça, vous, les gens qui ne se lavent jamais? (Proust,Sodome, 1922, p. 939).
[En parlant d'une partie du corps] Cheveux, cou, dents, doigts, ongles, oreilles, pieds, tête sale(s). MmeCaroline resta surprise devant ce gros homme mal rasé, à la figure plate et sale, vêtu d'une belle redingote graisseuse et cravaté de blanc (Zola,Argent, 1891, p. 152):
2. ... des manches de sa camisole rouge [d'une vieille femme] dépassaient deux longues mains (...). La poussière des granges, la potasse des lessives et le suint des laines les avaient si bien encroûtées, éraillées, durcies, qu'elles semblaient sales quoiqu'elles fussent rincées d'eau claire... Flaub.,MmeBovary, t. 1, 1857, p. 172.
Loc. verb. fig., fam. Avoir le nez sale. Être ivre. Synon. avoir le nez* dur.
Sale de + subst. (désignant ce qui souille, qui salit).Madeleine est assise sur le lit, les yeux fermés. Elle a vomi tout le long d'elle. Sa chemise est toute tachée, son sein est sale de tisane (Giono,Gd troupeau, 1931, p. 222).
3. P. ext.
a) [En parlant d'une chose] Qui souille, qui tache; qui donne un aspect malpropre, manquant de netteté. C'était le tableau le plus complet de la misère, mais non une misère sale et repoussante, car le peu de meubles qui garnissaient cette chambre nue étaient propres et cirés, les carreaux nets et transparents (Sue,Atar-Gull, 1831, p. 34).
En partic., PHYS. NUCL. [En parlant d'une bombe atomique] Qui provoque d'importantes retombées radioactives. Anton. propre.À puissance égale, une bombe faisant appel à des processus de fusion peut être moins sale qu'une simple bombe atomique (Le Monde, 5 janv. 1968ds Gilb. 1971).
b) [En parlant d'une pers.] Qui travaille salement, qui manque de soin. Être sale dans son travail. (Dict. xixeet xxes.).
Empl. subst. Ah! la sale! elle a encore apporté mon Lamartine dans la cuisine! (Zola,Pot-Bouille, 1882, p. 28).
B. − [Placé avant ou après le subst. qu'il qualifie]
1. Vieilli. Qui est impur, souillé moralement. Âmes sales. (Dict. xixeet xxes.).
2.
a) Qui est contraire à l'honneur, à la bienséance. Mener une vie sale. Je crois qu'il avait dû faire une chose sale et qu'il avait changé d'air pour quelque temps (Giono,Baumugnes, 1929, p. 14).
b) Qui corrompt. L'argent est une chose sale et ne peut se réhabiliter que par la quantité (Goncourt,Journal, 1890, p. 1104).
3. [Avec une forte connotation sexuelle]
a) [En parlant d'un inanimé] Qui blesse la pudeur par son caractère obscène, ordurier. Chanson, conte, histoire, paroles, presse, roman sale(s); dire des choses sales. Toujours les termes les plus crus, les plus grossiers, les plus abjects (...). Qu'ils racontent une anecdote, qu'ils rendent compte de ce qu'ils ont éprouvé, toujours le mot sale et physique (...). Ils ne disent pas: cette femme m'a aimé; ils disent: j'ai eu cette femme; ils ne disent pas: j'aime; ils disent: j'ai envie (Musset,Confess. enf. s., 1836, p. 318).
Fam. Sale maladie. Maladie sexuelle. Quand il a fallu aller repêcher le garçon des Roumanières qui s'était jeté dans le puits parce qu'il avait attrapé une sale maladie, c'est lui qui est descendu au bout de la corde (Giono,Baumugnes, 1929, p. 82).
b) [En parlant d'une pers.] Dont le comportement, les propos sont habituellement orduriers, obscènes. Vous croyez que j'ai été sale à plaisir; eh bien! non, j'ai voulu simplement (...) condamner ce vice! (Zola,Corresp., t. 2, 1882, p. 578).Souvent, les reproches de Stopwell étaient une manière de taquineries anglaises. Mais Petitcopain (...) ne comprenait pas. Il se croyait sale, vicieux et idiot (Cocteau,Gd écart, 1923, p. 21).
C. − [Avant le subst.]
1. [En parlant d'une chose]
a) Qui a des conséquences fâcheuses, très désagréables; qui entache la réputation de quelqu'un. Synon. mauvais, méchant.Sale affaire, aventure; jouer un sale tour à qqn. « ... je sais qu'il a eu de sales histoires et que la police l'a à l'œil ». (...) « il paraît qu'il a fait de la prison... » (Proust,Prisonn., 1922, p. 280).
Sale coup pour la fanfare* (fam.).
b) Laid, mauvais. Sale écriture; sale habitude. Il y avait près de la barrière un sale bastringue appelé le bal Jansoulet avec un petit garni au-dessus et des chambres à cinq sous l'heure où l'on passait entre deux contredanses (A. Daudet,Nabab, 1877, p. 30).
c) [En parlant de quelque chose qui procure des désagréments, que l'on rejette, que l'on maudit] Mauvais, détestable. Sale bagnole, boîte, guerre, pluie, raffiot, temps. La Société n'est-elle pas l'infini tissu de toutes ces petitesses, de ces finasseries, de ces hypocrisies, de ces misères? L'humanité pullule ainsi sur le globe, comme une sale poignée de morpions sur une vaste motte. Jolie comparaison. Je la dédie à Messieurs de l'Académie française (Flaub.,Corresp., 1853, p. 250).
Intensif. [La nourrice] boit vraiment d'une sale façon, comme il n'est pas permis à une femme de boire (Zola,Fécondité, 1899, p. 303).
Par litote, pop. C'est pas sale! C'est beau, c'est bien! Synon. c'est pas dégueulasse*.Le muscadet se fait rare, c'est la vieille qui siffle tout. − C'est qu'il n'est pas sale, dit la veuve Mouaque (Queneau,Zazie, 1959, p. 236).
2. [En parlant d'une pers.] Qui est digne de mépris; dont la conduite, les actes sont condamnables. Sale bourgeois, cochon, mec, ouvrier, type; sale vache; sale rosse; quelle sale bête. Les amoureux, tenez! J'ai horreur de ça! Quand ils passent devant moi, je crache dessus. Dans leur dos, bien entendu, parce qu'il y en a de rancuniers! Et les enfants, cette sale engeance! (Camus,État de siège, 1948, 2epart., p. 237):
3. Mais que vais-je faire au sortir du collège? Aller à Paris tout seul, faire du droit, perdu avec des crocheteurs et des filles de joie; et tu m'offriras sans doute, pour me divertir, un café aux Colonnades dorées ou quelque sale putain de la Chaumière. Merci! Le vice m'ennuie tout autant que la vertu. Flaub.,Corresp., 1839, p. 61.
[En partic.] Synon. mauvais.Sale genre; (avoir un) sale caractère. Tout le monde, m'a-t-il dit, me trouve un sale caractère, mais on me juge intelligent. Ce n'est pas vrai, je suis bête (...). Moi seul, je suis assez intelligent pour comprendre combien je suis bête (Duhamel,Maîtres, 1937, p. 31).
Avoir une sale gueule, une sale figure, une sale tête (pop., fam.). Ne pas inspirer confiance, être antipathique. Lepic (...) a ce qu'on appelle une sale tête; pommettes saillantes; énorme moustache; nez pointu; on n'est pas étonné d'apprendre qu'il a déjà été condamné sept fois pour vol (Gide,Souv. Cour. ass., 1913, p. 656).Avoir l'air malade. (Dict. xxes.).
Faire une sale gueule (pop.). Ne pas avoir l'air satisfait. Nous avions sûrement l'occasion d'une reconnaissance nationale!... Cependant toutes ces perspectives ne grisaient guère la grosse mignonne!... Elle faisait même plutôt une sale gueule! (Céline,Mort à crédit, 1936, p. 526).
Sale gosse. Enfant insupportable, mal élevé, qui gêne, dérange. Mon compagnon n'est plus un « sale gosse » avec lequel il est insoutenable de penser qu'on puisse rivaliser en quoi que ce soit. Le voici l'homme, l'égal, enfin l'adversaire (Montherl.,Olymp., 1924, p. 266).
[Terme d'injure; sale renforçant l'injure raciste] Sale bicot, métèque, raton. Je tombe sur Bing, ce sale et bas Juif (...) qui s'accroche à moi, me force à lui donner la main (Goncourt,Journal, 1896, p. 966).
Prononc. et Orth.: [sal]. Homon. et homogr.: sale, salent (de saler), salle. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. a) 1176-81 « qui a perdu sa netteté » (Chrétien de Troyes, Chevalier Lion, éd. M. Roques, 5197); b) α) ca 1210 « mal tenu, qui se lave insuffisamment (d'une personne) » (Dolopathos, 212 ds T.-L.); β) 1874 p. ext. « qui salit ce qu'il touche, qui fait malproprement un travail » (Goncourt, Journal, p. 1018); c) 1968 « qui provoque d'importantes retombées radioactives (d'une bombe atomique) » (Le Monde, loc. cit.); 2. 1611 gris sale (Cotgr.; déjà sale « gris, d'une teinte équivoque » apr. 1480, Rec. Trepperel, Les Sotties, éd. E. Droz, XI, 161, p. 250). B. 1. mil. du xiiies. pensee sale (Contes dévots, I, 335 ds T.-L.); 2. 1690 âme sale (La Bruyère, Caractères ds Œuvres, éd. G. Servois, t. 1, p. 264). C. 1. a) 1585 « digne de mépris » (N. Du Fail, Contes et discours d'Eutrapel ds Œuvres facétieuses, éd. J. Assézat, t. 2, p. 349: que ceux qui estoient vilains et salles, soient nettoyez et purgez de tous vices); b) 1888 sale gueule (Courteline, Train 8 h 47, p. 174); 2. a) 1847 sale affaire (Balzac, Cous. Pons, p. 316); b) sale temps α) 1858 au fig. (Goncourt, op. cit., p. 459); β) 1877 au propre (Zola, Assommoir, p. 652). Du frq. *salo « trouble, terne, sale »; cf. a. h. all. salo, m. h. all. sal « id. » (v. FEW t. 17, pp. 14b-15a). Fréq. abs. littér.: 3 210. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 1 928, b) 4 064; xxes.: a) 7 541, b) 5 292.
DÉR.
Salingue, adj. et subst.,pop. a) Adj. [En parlant de qqc.] α) Qui est sale, dégoûtant au physique ou au moral. Blouse, chemise salingue. Le chômage, ça vous rend amer, on se met à causer en tordant la gueule avec les mots les plus salingues (Aymé,Mouche, 1957, p. 120). β) Par litote. (C'est) pas salingue. (C'est) bien, bon; de bonne qualité. Du cave (...) surtout préoccupé de la jaffe qui méritait bien qu'on s'y attarde, et du pichet sélectionné, pas salingue lui aussi (Simonin,Touchez pas au grisbi, 1953, p. 211).b) Adj. et subst. (Personne) sale physiquement ou de moralité douteuse. Il en avait assez vu, à la Sorbonne, de ces faux malins, des normaliens salingues et à lunettes, qui avaient toujours une théorie personnelle en réserve (Sartre,Âge de raison, 1945, p. 143).[salε ̃:g]. 1reattest. 1925 adj. et subst. « sale (au physique et au moral) » (d'apr. Esn. 1966); de sale, suff. pop. -ingue, sur le modèle de mots tels que lourdingue, sourdingue, etc.
BBG.Esnault (G.). Lois de l'Arg. R. de Philol. fr. 1929, t. 41, p. 124.