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SAILLIE, subst. fém.
I. − [Corresp. à saillir I]
A. − Vx ou littér.
1. Le plus souvent au plur. Mouvement brusque.
a) [Le compl. du n., explicité ou non, désigne un liquide] Ce jet d'eau ne vient que par saillies (Littré). Le sang sortait de sa veine par saillies (Ac.1935).
b) [Le compl. du n., explicité ou non, désigne un animal] Synon. bond, saut.Le chien progresse par saillies (Pesquidoux,Chez nous, 1923, p. 8).
2. Au fig.
a) Mouvement brusque, impulsion des sentiments, de la pensée. La princesse a des saillies d'observation très fines (Goncourt,Journal, 1866, p. 288).
b) Trait d'esprit. Synon. boutade.Ce tempérament [flegmatique] ne comprend les saillies qu'un quart d'heure après (Stendhal,Hist. peint. Ital., t. 2, 1817, p. 54).Il (...) lançait quelques mots d'une ironie froide, une saillie bouffonne sur les gens de province (Rolland,J.-Chr., Révolte, 1907, p. 544).
P. méton. Esprit, verve. Des lettres (...) de la mère Agnès (...) dans lesquelles, à mesure qu'on avance, on voit le bel-esprit tomber et la saillie subtile s'éteindre (Sainte-Beuve,Port-Royal, t. 1, 1840, p. 197).
B. −
1. Partie qui dépasse, qui avance, qui s'élève. Synon. bosse, élévation, éminence, proéminence, protubérance, relief, saillant; anton. cavité, creux.Saillie osseuse; saillie que forment les pommettes. La lumière accuse les saillies et les rides de son visage penché (Malraux,Conquér., 1928, p. 103).Un paysage de bois et de saillies rocheuses, au relief très tourmenté (Romains,Hommes bonne vol., 1939, p. 124).V. colline ex. de Gracq, escaladeur dér. s.v. escalader ex. de Peyré.
ARCHIT. Saillie de rive. Saillie de protection d'un mur, située sur la rive des combles d'un toit. (Dict. xxes.).
Locutions
Loc. verb. Faire, former saillie. Dépasser, avancer, s'élever. Synon. ressortir.Balcon, fenêtre qui fait saillie sur la façade; maison, toit qui fait saillie sur la rue. Surplomb de la muraille qui faisait saillie à une quarantaine de pieds au-dessus du sol (Verne,Île myst., 1874, p. 175).Blouse où font saillie deux pointes vigoureuses (Jouve,Scène capit., 1935, p. 76).
Loc. adj. En saillie. Qui dépasse, qui avance, qui s'élève. Balcon, fenêtre, toit en saillie. Un front (...) bombé, proéminent, retombant en saillie sur un petit nez écrasé (Balzac,Chef d'œuvre, 1831, p. 5).Une tourelle (...) en saillie sur la façade (Reybaud,J. Paturot, 1842, p. 243).V. accentuer ex. 5, aunage2ex.
P. méton. Fait de dépasser, d'avancer, de s'élever. De faible saillie. Cette corniche a deux pieds de saillie (Ac.1835, 1878).Les fenêtres (...) étaient abritées par ces auvents d'une saillie prodigieuse (Balzac,Séraphita, 1835, p. 183).Tout le monde a pu noter l'amaigrissement du visage, auquel la saillie des os et des muscles donne un singulier caractère de force brutale (Bernanos,Joie, 1929, p. 633).
2. P. anal. ou au fig., vieilli ou littér. Synon. relief.
a) PEINT. Fait d'apparaître nettement, par contraste. Cette figure n'a pas assez de saillie (Ac.).[Dans les Syndics de Rembrandt] la saillie des lignes, des visages, des mains est extraordinaire (Fromentin,Maîtres autrefois, 1876, p. 363).
b) [Le compl. du n., explicité ou non, désigne une chose abstr., une pers.] Ensemble de traits caractéristiques qui mettent en relief, en valeur. Prenez la difformité morale la plus hideuse (...); placez-la là où elle ressort le mieux, dans le cœur d'une femme, avec toutes les conditions de beauté physique et de grandeur royale, qui donnent de la saillie au crime (Hugo,L. Borgia, 1833, p. VII).Pour montrer un travers ou un vice dans toute sa lumière et sa saillie, il faut le poser avec toutes ses conséquences sociales (Thibaudet,Réflex. crit., 1936, p. 53).V. douzaine ex. 4.
Loc. verb. Mettre en saillie. Mettre en relief, en valeur. Par l'égalité des conditions elle [l'égalité politique] met en saillie l'inégalité des intelligences (Hugo,Rhin, 1842, p. 467).Le faux dévot [dans Tartuffe] (...) est tout-à-fait dégagé, mis en saillie et accusé en des traits à la fois généraux et précis (Sainte-Beuve,Port-Royal, t. 3, 1848, p. 223).
II. − [Corresp. à saillir II] Accouplement. Synon. monte.[Il] assistait à la saillie des juments, et commettait cent ordures affreuses (Bourges,Crépusc. dieux, 1884, p. 71).Ce n'est que par la saillie de ses verrats et la gésine de ses truies qu'il devine peut-être l'essence et les suites du péché de chair (Huysmans,En route, t. 2, 1895, p . 165).
Prononc. et Orth.: [saji]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. Ca 1165 « attaque des assiégés lorsqu'ils sortent pour repousser les assiégeants » (Benoît de Sainte-Maure, Troie, éd. L. Constans, 11085); 2. 2emoit. xiiies. de saillie « d'une manière soudaine, irréfléchie » (Baudoin de Condé, Li Contes dou Dragon, 85, éd. A. Scheler, I, 66); 3. 1580 « mouvement soudain de la pensée; trait d'esprit » (Montaigne, Essais, II, 10, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, 413); 4. spéc. 1870-71 « accouplement des animaux domestiques en vue de la reproduction » (Littré). B. 1. 1260 salie archit. « partie qui dépasse l'alignement » (ap. Brossart, Hist. du chât. de Douay, I, 83 ds Gdf. Compl.); 1287 saillie (ds Bevans, The old French vocabulary of Champagne, p. 106); 1690 en saillie (Fur.); 2. 1611 saillie d'un os (Cotgr.). Part. passé fém. subst. de saillir*. Fréq. abs. littér.: 657. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 1 490, b) 976; xxes.: a) 621, b) 625.