| SÉCULAIRE, adj. A. − 1. Qui existe, qui a lieu une fois par siècle, à chaque siècle; de cent ans en cent ans. En matière de civilisations, les récoltes ne sont pas annuelles, mais séculaires ou millénaires (Fourastié, Gd espoir du XXes., 1969, p. 360). 2. Spécialement a) HIST. ROMAINE. Jeux séculaires. Jeux publics que l'on célébrait à des intervalles assez longs assimilés à des intervalles d'un siècle. Les manières de compter (...) par règnes, jeux pythiques, néméens, séculaires (Chateaubr., Génie, t. 1, 1803, p. 124).Poème séculaire. Poème composé pour cette occasion. Ainsi Horace avait réuni dans son Poëme séculaire tout ce qu'il y a de plus vigoureux et de plus doux dans l'harmonie conjugale (Bern. de St-P., Harm. nat., 1814, p. 339). b) MÉTROL. Année séculaire. Année qui termine un siècle: ... Grégoire XIII établit qu'on retrancherait à l'avenir trois jours bissextils par période de 400 ans et que cette suppression porterait sur les années séculaires dont les deux premiers chiffres ne seraient pas divisibles par 4. D'après cette règle, les années 1700, 1800 et 1900 ont été des années communes, tandis que 1600 a été bissextile et l'an 2000 le sera.
Chauve-Bertrand, Question calendrier, 1920, p. 83. B. − 1. Qui a un siècle ou environ un siècle; qui s'étend, se mesure sur un siècle. Une ablation séculaire de 3 mètres fait perdre à la superficie continentale 780 kilomètres carrés par siècle (Lapparent, Abr. géol., 1886, p. 40). − [Modifié par un adv.] Massif de verdure formé par de hauts tilleuls presque séculaires (Ponson du Terr., Rocambole, t. 1, 1859, p. 148).Vis-à-vis, la maison du notaire, tapissée de glycine, où il ferait bon entrer dans l'odeur quatre fois séculaire des coings, de la cire à parquet et des registres moisis (J.-R. Bloch, Dest. du S., 1931, p. 47). − En compos. Demi-séculaire, mi-séculaire. Qui a un demi-siècle ou environ un demi-siècle. Carriole demi-séculaire (Ponson du Terr., Rocambole, t. 1, 1859, p. 407).Était-ce une concession mi-séculaire ou perpétuelle? (Flaub., Éduc. sent., t. 2, 1869, p. 227). 2. Qui a plusieurs siècles, beaucoup de siècles; qui existe depuis plusieurs siècles, depuis longtemps; qui s'étend sur plusieurs siècles, à travers les siècles. Belle nappe de cailloux roulés, arrondis et polis par la séculaire caresse des vagues (Maupass., Contes et nouvelles, t. 2, Saut, 1882, p. 9).L'idéal séculaire français de liberté, d'égalité, de fraternité (De Gaulle, Mém. guerre, 1954, p. 679). SYNT. Arbre, châtaignier, chêne, hêtre, olivier, orme séculaire; forêt, voûte séculaire; effort, expérience, travail séculaire; coutume, pratique, tradition séculaire; haine séculaire. − En partic., rare. Antique, passé de mode, sans âge. Grand gilet à poches de forme séculaire (Hugo, Misér., t. 1, 1862, p. 472). 3. Empl. subst. masc. sing. à valeur de neutre. L'œuvre n'apparaît plus que comme le signe. Se manifeste, dès lors, une présence; en elle collaborent le collectif et l'individuel, le séculaire et le momentané, parfois même, chez les génies, l'éternel (Huyghe, Dialog. avec visible, 1955, p. 234). 4. Rare. Qui marque un siècle. Aucun homme en particulier ne peut être considéré comme l'auteur de la révolution de France; mais, si l'on voulait s'en prendre à un individu d'un événement séculaire, ce serait les fautes de M. de Calonne qu'il faudrait en accuser (Staël, Consid. Révol. fr., t. 1, 1817, p. 91). C. − P. anal. 1. ASTRONOMIE a) [En parlant d'un mouvement, d'un phénomène phys.] Qui s'effectue, qui est observé, mesuré sur une durée longue par rapport à la période. Le refroidissement séculaire de la Terre la contracte et diminue son moment d'inertie (H. Poincaré, Hyp. cosmogon., 1911, p. 180).On constate aussi de l'irrégularité dans la distribution de la variation séculaire du champ magnétique (Rothé, Géophys., 1943, p. 381). b) [Dans les équations du mouvement] Terme séculaire. Terme correspondant à un mouvement observé sur une durée longue par rapport à la période. Comme θ+θ' n'est jamais une constante, les termes séculaires correspondent à θ-θ'= const. (H. Poincaré, Hyp. cosmogon., 1911, p. 157). 2. ÉCON. [En parlant d'un mouvement, d'une situation] Qui porte sur une période de longue durée et semble se répéter de manière cyclique. Les théoriciens de la maturité économique qui redoutaient une stagnation séculaire par manque d'occasion d'investissements massifs nouveaux (Univers écon. et soc., 1960, p. 32-16). Prononc. et Orth.: [sekylε:ʀ]. Ac. 1694, 1718: seculaire; dep. 1740: sé-. Étymol. et Hist. 1. 1erquart xiiies. « qui appartient au siècle, à la vie laïque » (Reclus de Molliens, Charité, 129, 9 ds T.-L.); 2. 1549 terme d'antiq. jeuz seculares « jeux qui se célébraient de cent ans en cent ans » (Rabelais, La Sciomachie, éd. Ch. Marty-Laveaux, t. 3, p. 410); 3. 1690 fête séculaire « qui se fait de siècle en siècle » (Fur.); 4. 1718 année séculaire « qui termine un siècle » (Ac.); 5. a) 1781 « qui date de plusieurs siècles » neiges séculaires (Raymond, Lettres de Coxe, t. 2, p. 45); b) 1796 astron. inégalités séculaires (Laplace, Expos. syst. du monde, IV, 3). Empr. au lat.saecularis « séculaire », en lat. chrét. « du siècle, séculier, profane », dér. de saeculum « siècle ». Fréq. abs. littér.: 492. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 343, b) 500; xxes.: a) 1 286, b) 757. DÉR. Séculairement, adv.a) Depuis des siècles; de tout temps. [Fez] éclata en manifestations tout à fait exceptionnelles pour cette cité séculairement farouche (De Gaulle, Mém. guerre, 1956, p. 128).b) (Tant de fois) séculairement. Depuis (tel nombre) de siècles. Le nom de Racine, jusque là près de deux fois séculairement vénéré (Verlaine,
Œuvres posth., t. 2, Crit. et conf., 1896, p. 372).c) Rare. Pour toujours. [Patouillet et Nonotte] doivent être honnis séculairement pour cette impertinence (Veuillot, Odeurs de Paris, 1866, p. 54).− [sekylε
ʀmɑ
̃]. − 1reattest. 1842 (Ac. Compl.); de séculaire, suff. -ment2*. BBG. − Geckeler (H.). Zur Wortfelddiskussion... München, 1971, pp. 390-393. |