| ROULANT, -ANTE, part. prés., adj. et subst. I. − Part. prés. de rouler*. II. − Adj. et subst. A. − 1. a) [Qualifie un objet de forme arrondie] Qui roule, peut rouler. Galets roulants. [Le renard] dévalait à toute vitesse le remblai de pierres roulantes aboutissant à son trou (Pergaud, De Goupil, 1910, p. 10).P. métaph. Il y a d'autres personnes dont les idées me semblent toujours rondes et roulantes comme des cerceaux. Dès qu'elles ont commencé une phrase sur quelque chose, ça roule, ça va, ça sort par dix, vingt, cinquante idées rondes (Maupass., Contes et nouv., t. 2, MllePerle, 1886, p. 628). − En partic. [En parlant d'une pers., de pers. qui luttent] Qui fait des tours sur soi-même. Les deux énergumènes ne faisaient plus qu'une masse roulante, indiscernable, avec des allongements et des rétractions foudroyantes (La Varende, Contes sauv., 1938, p. 22).P. méton. Les deux hommes se livrèrent à une lutte purement horizontale, cette fois. Dans une série de savantes culbutes, de mouvements roulants, d'enlacements de bras et de jambes, nul n'aurait pu distinguer les membres des lutteurs (Guèvremont, Survenant, 1945, p. 226). − P. anal. ♦ [En parlant d'un astre] Qui décrit une courbe tout en tournant sur lui-même. L'éther étoit plein de la mélodie des sphères roulantes (Chateaubr., Essai Révol., t. 1, 1797, p. 269). ♦ [En parlant d'éléments fluides] Qui forme des volutes, des tourbillons. Maintenant, les vagues arrivaient en une seule ligne, roulantes, s'écroulant avec le tonnerre d'un bataillon qui charge (Zola, Doc. littér., Cap. Burle, 1883, p. 300).On ne voyait rien que le noyer dénudé qui allongeait ses bras et encerclait les nuées roulantes (Arnoux, Abisag, 1919, p. 281). ♦ [En parlant d'eaux courantes] Qui s'écoule rapidement. Les truites, les saumons (...) les déposent et les enfouissent [leurs œufs] dans des fosses creusées par eux, sur des bancs de cailloux, de gravier, lavés par des eaux vives, fraîches et roulantes (Code pêche fluv., 1875, p. 116).On se retrouve (...), de chaque côté d'un pont rompu (...) et entre soi l'espace immense des flots roulants et engloutissants (A. Daudet, Sapho, 1884, p. 316). b) Subst. fém., MATH. Courbe d'un plan P qui roule sans glisser sur une courbe fixe plane (d'apr. Bouvier-George Math. 1979). 2. [P. méton.] a) [En parlant d'une chose]
α) Qui est muni de roues et peut être déplacé aisément. Desserte, guéridon, lit, table roulant(e); chaise roulante (d'un infirme, d'un malade); affût roulant (d'un canon). Les lingotières sont montées sur des chariots roulants qu'on amène successivement en regard du jet de métal (Barnerias, Aciéries, 1934, p. 96).Fauteuil roulant. V. insister I B 2 a ex. de Simenon. ♦ Maison, boutique roulante. Véhicule aménagé pour y loger, pour la vente. Synon. roulotte, caravane.J'aperçus devant moi une voiture, ou plutôt une maison roulante, une de ces maisons de saltimbanques et de marchands forains (Maupass., Contes et nouv., t. 1, Père, 1887, p. 744).Au premier dimanche d'août, à la ducasse, les forains installent leurs pauvres boutiques roulantes (Bernanos, Soleil Satan, 1926, p. 197). ♦ Cuisine roulante. V. cuisine A p. ext.P. ell., empl. subst. fém., arg. milit., fam. « Vous autres », dit le brigadier, « cherchez voir si la roulante, des fois, n'aurait pas suivi... Il fait faim... » (Martin du G., Thib., Été 14, 1936, p. 747). ♦ CH. DE FER, INDUSTR. Matériel roulant. V. matériel II B spéc.P. ell., empl. subst. masc., région. (Canada). Matériel d'exploitation d'une ferme. Il décida tout d'un coup (...) de faire annoncer la vente de sa terre le dimanche suivant, à la porte de l'église. Il profiterait aussi de cette occasion pour faire une vente à l'encan de tout son « roulant » (A. Thério, Ceux du Chemin-Taché, 1963, p. 162 ds Richesses Québec 1982, p. 2041). ♦ MANUTENTION. Pont roulant. V. pont I B 1 d. − En partic. ♦ TECHNOL. Qui glisse dans un plan sur des roulettes, des galets. Les ponts tournants (...) occupent un espace latéral important (...). Aussi, dans certains cas, préfère-t-on les ponts roulants dont le mouvement est rectiligne et qui peuvent être retirés en arrière de la longueur nécessaire au service de la navigation (Bourde, Trav. publ., 1929, p. 307).Les portes roulantes [du métro] fonctionnent automatiquement et donnent de plain-pied sur les trottoirs surélevés (Albitreccia, Gds moyens transp., 1931, p. 74). ♦ Qui est animé d'un mouvement de translation continu autour de rouleaux, de galets. Chemin*, escalier*, tapis*, trottoir* roulant.
β) TRANSP., usuel. [En parlant d'un véhicule] Qui est en train de rouler, qui roule (de telle façon). Un moment le sifflet de l'express agita la gare d'un piétinement, d'un bruit de voix et de brouettes roulantes (A. Daudet, Évangéliste, 1883, p. 178).Au détour d'une rue, et tranchant avec tout ce luxe de véhicules silencieux et bien roulants, le char grinçant de Virgile, le lourd char à bœufs classique, apparut (Jammes, Mém., 1921, p. 29). ♦ [P. méton.] Toute cette activité roulante au dehors des fiacres, des omnibus, des tapissières, des tramways, des wagons, menant des gens à l'exposition (Goncourt, Journal, 1889, p. 984).Le sommeil roulant a d'abord été le monopole d'une compagnie créée à cet effet: celle des wagons-lits et des grands express européens (Defert, Pol. tour. Fr., 1960, p. 69).Prix du kilomètre roulant. Prix de revient au kilomètre de l'usage d'une automobile. Afin d'établir de façon précise le prix de revient kilométrique en auto et par train, nous avons mis en parallèle: − D'une part, le prix du kilomètre « roulant », obtenu en tenant compte de la puissance de la voiture, du prix et de la consommation du carburant, des frais d'entretien, graissage et usure des pneus (...) − D'autre part, le prix de vente du kilomètre ferroviaire (Le Point, 29 août 1977, p. 42, col. 1). ♦ Capital roulant. Cela ne m'a pratiquement rien coûté de sauvegarder - un peu - mon capital roulant, et de contribuer - beaucoup - à la sécurité des autres (L'Express,28 févr. 1977,public. autom.). − Empl. subst., arg., pop., vieilli. Voiture à cheval ou automobile. (Ds Esn. 1966, Sandry-Carr. 1963). Des agents des mœurs arrêtent dans les Champs-Élysées, une roulante aux stores baissés (La Petite Lune, 1878-79, n o5, p. 3).− L'automobile, (...) − Vous avez raison. N'achetez pas cette machine-là, je vous prêterai ma roulante (A. France, Anneau améth., 1899, p. 275). ♦ Roulant vif. Chemin de fer. (Ds France 1907, Esn. 1966).
γ) [En parlant d'une surface, d'un sol] Qui permet à quelque chose, à un véhicule de rouler (aisément). Pavage bien roulant. En quinze ans il [Bugeaud] colonise ce pays [le Périgord] (...); on n'y voit plus que blés vigoureux, fermes confortables, paysans bien vêtus, chemins bien roulants (Maurois, Dialog. commandement, 1924, p. 160).Le gazon est tondu régulièrement (...) et rendu le plus « roulant » qu'il soit (Curély, Le Golf, s.d., p. 7 ds Grubb Sports 1937, p. 64). b) [En parlant d'une pers., d'un groupe] (Personne) qui se déplace dans un véhicule. [Les bouviers] tiennent les deux bords de la route (...). Le milieu est réservé « aux roulants ». Et ils roulent! Bicyclistes pliés en deux sur le guidon; automobilistes tout droits au volant (Pesquidoux, Livre raison, 1928, p. 64).V. aussi infra C 1 a. − CH. DE FER., POSTES, adj. et subst. Personnel roulant ou les roulants. Agents de conduite, contrôleurs; postiers travaillant à bord des trains. Grève des roulants. Des femmes sur le rail. Évelyne Ancel, vingt-neuf ans, est l'une des rarissimes femmes « roulantes ». Surveillante des contrôleurs, agent de maîtrise, elle ne changerait de voie pour rien au monde (L'Écho de notre temps, avr. 1981, p. 30).À la S.N.C.F., les « roulants », chefs de train, conducteurs ou contrôleurs peuvent partir à cinquante ans, les chefs de gare ou techniciens d'exploitation à cinquante-cinq ans (Le Monde dimanche, 25 oct. 1981, p. VI). B. − Qui est animé d'un mouvement circulaire, d'un mouvement de balancement, d'oscillation. 1. a) [En parlant d'une partie du corps, d'un organe] Gorge, poitrine, hanches, taille roulante(s). On cause de ces yeux immenses et tournants et roulants des Orientaux (Goncourt, Journal, 1887, p. 716). b) [En parlant de la démarche] Synon. balancé, chaloupé.Après le dîner, marchant à travers le salon de son pas roulant de marin, il commençait (Maurois, Climats, 1928, p. 94). 2. [En parlant de la mer] Qui est soulevé par la houle. Ce soleil couchant, dont le rayon allongé (...) forme une tangente d'or sur l'arc roulant des mers (Chateaubr., Génie, t. 1, 1803, p. 467). − P. anal. [Le vent] serpente entre les cimes roulantes, abaisse l'une tandis que l'autre se relève (Chateaubr., Fragm. Génie, 1800, p. 181). C. − [Idée de déplacement continu] 1. [À propos de pers.] a) Adj. et subst. Nomade, bohémien. Tristes chemineaux (...) caravanes voyageuses dont elle suivait la fumée à perte de regard, (...). Vous étiez son pays, sa tribu roulante (A. Daudet, Pte paroisse, 1895, p. 295).S'il allait ne plus l'aimer, fille de ces roulants, d'une race nomade et ennemie (A. Daudet, Pte paroisse, 1895, p. 311). b) Subst. masc., arg., pop., vieilli. Marchand ambulant; vagabond. Son père était un vieux roulant. − Qu'est-ce qu'un roulant? − C'est un chineur, autrement dit marchand ambulant qui va offrir à domicile des étoffes à bas prix, souvent provenant de vols (Macé, Joli monde, 1887, p. 84). 2. Métier roulant (vieilli). Métier que l'on exerce en voyageant beaucoup. L'habitant de l'Argonne a conservé l'humeur vagabonde, errante: il circule, émigre en été, exerce des métiers roulants, va louer ses bras au dehors (Vidal de La Bl., Tabl. géogr. Fr., 1908, p. 121). D. − [Qualifie un bruit, un son] 1. Sourd, vibrant et prolongé. Fracas roulant des canons, tonnerre roulant, bruit roulant de moulin. La grande voix des Halles grondait plus haut; par instants, des volées de cloche, dans un pavillon éloigné, coupaient cette clameur roulante et montante (Zola, Ventre Paris, 1873, p. 621).La négresse (...) partit tout à coup d'un tel rire, d'un rire si bruyant, roulant, torrentiel, que le cheval excité fit un petit temps de galop (Maupass., Contes et nouv., t. 1, Boitelle, 1889, p. 277). ♦ Voix roulante. Voix vibrante, avec des r roulés. Une voix forte, sonore, roulante, la voix de Patin (...) criait: − Te lèveras-tu, charogne! (Maupass., Contes et nouv., t. 2, Noyé, 1888, p. 1155).Une grosse voix roulante de paysan (Pourrat, Gaspard, 1922, p. 39).[P. méton.] Dans sa Nuit de la garde nationale, on a retenu ces couplets si roulants, si bien frappés: Je pars, Déjà de toutes parts La nuit sur nos remparts (Sainte-Beuve, Portr. contemp., t. 3, 1840, p. 123).Il reste là [dans les Châtiments] (...) des strophes roulantes et explosives, qui font un pétard magnifique et vengeur, un véritable tonnerre de Dieu (L. Daudet, Rech. beau, 1932, p. 107). ♦ MUS. Caisse roulante. ,,Les tambours munis de ces cordes sont appelés caisse claire (...) par opposition à la caisse roulante, tambour ordinaire d'une forme plus allongée, en bois, sans cordes de boyau, dont le son est mat et plus sourd`` (Brenet Mus. 1926, p. 433). − Empl. subst. masc. sing. à valeur de neutre. L'aigu succède au grave et le roulant au sifflant. (...) c'est que sa bouche ne peut garder la même forme, ni sa gorge vibrer de la même façon (Alain, Propos, 1929, p. 826). 2. P. ext. Feu roulant. V. feu1III B 1 spéc. E. − Fam. [Corresp. à se rouler (de rire)] Qui est très drôle. Synon. fam. tordant.Ça devait être vraiment roulant de me voir les quatre fers en l'air dans mon voiturin. Ah! Ah! Ah! (Queneau, Pierrot, 1942, p. 35): − Comment? Vous n'avez pas lu Paludes? C'est roulant... Mais oui, de Gide. − Je n'ai pas trouvé ça drôle, je me souviens maintenant que je l'ai lu; qu'est-ce que ça a de drôle? − Moi, je trouve ça roulant.
Mauriac, Myst. Frontenac, 1933, p. 202. Prononc. et Orth.: [ʀulɑ
̃], fém. [-ɑ
̃:t]. Att. ds Ac. dep. 1694. Fréq. abs. littér.: 1 129. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 1 335, b) 2 238; xxes.: a) 1 971, b) 1 276. Bbg. Chautard Vie étrange Argot 1931, p. 318. − Quem. DDL t. 10, 31. |