| REVUE, subst. fém. A. − Fait de se revoir, de se rencontrer de nouveau. − Locutions ♦ Vieilli. Être gens de revue. V. gens1A 2 f. ♦ Mod., fam. Être de revue. Vous me paierez une autre fois, nous sommes de revue (Rob.1985). B. − 1. Action, fait d'examiner de nouveau; fait de reprendre point par point les divers éléments, les divers aspects d'une question. Poursuivons la revue sommaire des opinions des principaux philosophes relativement aux idées (Broussais, Phrénol., leçon 1, 1836, p. 17).Cette très rapide et incomplète revue de la biologie du virus grippal permet de se rendre compte d'un fait qui saute aux yeux; l'idendité du cycle de reproduction de ce virus avec celui du bactériophage virulent (P. Morand, Confins vie, 1955, p. 132). ♦ Faire une/la revue de. Conclusion de ce chapitre. Je viens de faire une longue revue de tous les élémens du discours. Ce n'était point pour prescrire des règles au langage (...). Je voulais rechercher ce que les signes sont aux idées (Destutt de Tr., Idéol. 2, 1803, p. 157).V. magazine ex. de Mallarmé: 1. Il faudra avant peu faire une bonne et sérieuse retraite de dix jours. Une confession générale, une revue, une récapitulation de tout le passé, de toutes mes retraites, de toutes mes confessions annuelles, de toutes mes fautes, de toutes les grâces de Dieu. Cela sera très utile à mon ministère futur.
Dupanloup, Journal, 1851-76, p. 66. Absol. V. faire1II A 4 c ex. de Chateaubriand.♦ Passer qqc. en revue. V. cinglant ex. 2, passer11reSection IV B 4 a α ex. de Murger. − En partic. Revue de presse. Compte rendu ou citations d'articles de journaux, commentés ou non, reflétant diverses opinions sur des sujets d'actualité, faits dans la presse ou à l'antenne. Une revue de presse très soignée donne les opinions des journaux, résumant les articles au lieu de citer (Morienval, Créateurs gde presse, 1934, p. 59).V. presse A 2 b ex. de Martin du Gard: 2. L'information n'est pas tout. Il y a le commentaire de l'information, et l'adaptation de ce commentaire à la politique générale. C'est ici que Maurras devait inventer et composer une nouvelle rubrique, ignorée jusqu'à lui: la revue commentée de la presse.
L. Daudet, Brév. journ., 1936, p. 24. 2. P. méton. a) PRESSE. Publication périodique, le plus souvent mensuelle ou trimestrielle, brochée, qui présente généralement un bilan de la période écoulée dans un domaine particulier et qui s'intitule souvent « revue » (Revue des deux mondes, Nouvelle revue française, etc.). L'un de nous, poète, peintre ou chroniqueur, aurait bien dû collectionner pour les amateurs futurs l'ensemble des revues et publications qui virent le jour à Montparnasse (Fargue, Piéton, Paris, 1939, p. 152).V. jeune I A 1 c β ex. de Nizan, magazine ex., périodique II ex. de Colette, présentoir A ex. de Cain: 3. Caractères et rôle de la revue (...). Comme son nom l'indique, elle a le devoir ou du moins la prétention de revoir, de reviser − partant de juger − une petite période de la vie locale ou mondiale, et, selon les cas, de la vie littéraire, scientifique, philosophique, etc.
Civilis. écr., 1939, p. 32-3. SYNT. Revue périodique, revue hebdomadaire, mensuelle, trimestrielle; revue illustrée; revue de luxe; revue française, étrangère; revue d'entreprise; revue catholique, protestante; revue de gauche; revue sérieuse, subversive; revue traditionnelle, novatrice; revue d'avant-garde; revue féminine; revue pour la jeunesse; revue d'information, de propagande, de vulgarisation; revue professionnelle, savante, spécialisée; revue financière, littéraire, philosophique, politique, scientifique, sportive; revue d'histoire, de physique; revue d'art, de cinéma; revue d'horticulture; article, colonne, couverture, page, sommaire, titre d'une revue; exemplaire, numéro d'une revue; coupure d'une revue; publication, tirage, diffusion, vente d'une revue; directeur, rédacteur en chef d'une revue; abonné, lecteur d'une revue; fonder, lancer une revue; diriger, éditer, publier une revue; consulter, feuilleter, lire une revue. b)
α) THÉÂTRE. Revue (de fin d'année). Genre théâtral qui apparut au début du xviiies. dans les petits théâtres de la foire, et dans lequel étaient présentés sur un mode comique ou satirique des personnalités connues et des événements de l'année, genre repris ensuite dans les cabarets de chansonniers (d'apr. Lar. 19eSuppl. 1890). Revue de chansonniers; la revue des Variétés. Commère de revue (v. commère B 1 a ex. de Beauvoir);compère de revue (v. compère B 1 b ex. de Colette).[La troisième tentative des frères de Goncourt] était une revue de fin d'année pour la Comédie-Française, une conversation au coin de la cheminée entre un homme et une femme pendant la dernière heure du vieil an (A. Daudet, Crit. dram., 1897, p. 280).Reçu aujourd'hui l'invitation à la Soirée Mortier (...) où on jouera une revue de Salmon sur le Monde littéraire (Léautaud, Journal littér., 3, 1911, p. 44). ♦ P. métaph. Les provinces admirèrent longtemps l'Ahasvérus de Quinet (...) qui est une somme de l'histoire, des religions, des philosophies, développée panoramiquement, avec grandiloquence, mythes, personnages animateurs, le Juif-Errant de la légende paraissant désigné par la Providence même comme le compère de cette revue planétaire (Thibaudet, Hist. litt. fr., 1936, p. 335). − P. anal. Spectacle d'amateurs joué par les membres d'un groupe et mettant en scène les plus marquants d'entre eux. Revue de l'École normale supérieure; revue de khâgne (Rob. 1985).
β) MUSIC-HALL. Revue (à grand spectacle). Spectacle à mise en scène somptueuse composé de sketches, de chansons et de danses sans lien véritable entre eux. Tableau, final d'une revue. « Paris qui marche » était le titre de la pièce, une idiote revue à grand spectacle, toute en décors et en nudités féminines (Lorrain, Phocas, 1901, p. 262).[Le Moulin-Rouge] brûlé en 1914, ne fut reconstruit qu'en 1924 et débuta vraiment en tant que music-hall avec la revue de Jacques-Charles: New York-Montmartre (Hist. spect., 1965, p. 1546). C. − [La notion d'action que l'on renouvelle s'efface, parfois jusqu'à disparaître] 1. Action, fait d'examiner avec attention chacun des éléments d'un ensemble. Synon. inspection.Enfin, le grand jour arriva. Monsieur se leva de bonne heure, inquiet, nerveux, agité (...). Cinq ou six fois (...) [Madame] passa la dernière revue de l'hôtel, dérangea et remit sans raison des bibelots et des meubles, alla d'une pièce dans l'autre, sans savoir pourquoi (Mirbeau, Journal femme ch., 1900, p. 197). − [Le compl. de nom désigne des pers.] Le jeune évêque d'Agde parut, il eut l'air fort étonné quand, faisant la revue des présents, ses yeux arrivèrent à Julien (Stendhal, Rouge et Noir, 1830, p. 372).Au clair de lune, sur la vaste arène qui s'étend derrière le gîte d'étape, grande revue des porteurs. Marc les dénombre; les range par groupes de dix; leur apprend à se compter (Gide, Voy. Congo, 1927, p. 744). ♦ Se passer en revue. S'observer mutuellement, se dévisager. Pendant les premiers moments qui suivent un départ en chemin de fer, les personnes assemblées dans le même wagon s'examinent, se passent en revue en silence (Kock, Compagn. Truffe, 1861, p. 54). 2. ARM., MAR. a)
α) Vieilli. Inspection destinée à réexaminer ce qui avait déjà fait l'objet d'une montre, troupes, chevaux, armes et équipement (d'apr. Lar. encyclop.). ♦ Commissaires aux montres et revues. Responsables institués au xves. pour contrôler périodiquement les effectifs des compagnies d'ordonnance (d'apr. Lar. encyclop.). ♦ Inspecteurs aux revues. Responsables institués par Bonaparte et chargés des opérations administratives relatives notamment et, peu à peu principalement, aux questions intéressant le personnel tandis que l'ordonnancement des dépenses était confié aux commissaires des guerres qui, au xviies., avaient succédé aux commissaires aux montres et revues (ces deux postes étant remplacés en 1817 par l'intendance) (d'apr. Lar. encyclop.). V. artillerie ex. 4.
β) Mod. Inspection des troupes, de leurs équipements, des armes, du matériel de toute sorte. − Revue + compl. de nom précisant ♦ Revue + compl. de nom précisant l'objet de l'action.Pas une journée qui ne fût agrémentée d'une revue quelconque, revue d'armes, revue de détail, revue de linge et chaussures, revue de grand équipement, revue de petit équipement (Courteline, Train 8 h 47, Inspection trimestr., 1885, i, p. 190).V. barda ex. 1.Revue d'armes. V. décision ex. 4.Revue de détail. V. détail B 2 en partic. ex. de Dorgelès.Revue d'effectifs. ,,Revue passée par un fonctionnaire du service de l'intendance pour constater la présence de l'effectif porté sur les états de solde`` (Lar. encyclop.). Revue d'armement. ,,Revue de l'équipage d'un navire de commerce, qui doit être passée par le représentant de l'autorité maritime avant le départ du navire ou à l'arrivée avant le congédiement de l'équipage`` (Cap. 1936). ♦ Revue + compl. de nom précisant les circonstances de l'action.Revue d'appel. ,,Revue à laquelle peuvent être soumis les hommes appartenant à la réserve de l'armée territoriale pour les dénombrer`` (Lar. 20e). Les CS, les « cas spéciaux » étaient ainsi appelés par la municipalité pour donner le change aux Allemands. Il s'agissait en réalité de réfractaires, de ceux qui, comme l'avait fait un moment Alain, avaient refusé de se soumettre aux revues d'appel et de se faire immatriculer (Van der Meersch, Invas. 14, 1935, p. 245).
γ) P. méton. [Dans la Marine Royale] Document administratif justificatif des paiements effectués à la suite d'une montre. Mod. [Dans l'Administration de l'Inscription maritime et de la Marine Militaire] Document relatif à la solde. (Ds Le Clère 1960). P. anal. Les documents établis pour la liquidation de l'alimentation sont ceux établis pour la liquidation de la solde: − Situation du nombre de journées d'alimentation, − fiches revues de liquidation, − états récapitulatifs des revues établis par l'intendant militaire (Lubrano-Lavadera, Législ. et admin. milit., 1954, p. 209). ♦ MAR. MILIT. Bureau des revues. Synon. vieilli de bureau de la solde (d'apr. Lar. encyclop.). ♦ LÉGISL., FIN. Dépenses sur revues. Comptabilité particulière de certaines dépenses publiques, paiement des soldes notamment, pour lequel une ordonnance globale est émise au profit du chef de corps qui règle lui-même individuellement les bénéficiaires sur des fonds remis par le comptable (d'apr. Cap. 1936 et Lar. encyclop.). b) En partic.
α) Inspection des troupes passée lors d'une cérémonie. Passer en revue, passer la revue de. Le matin, j'ai déjeuné avec ma femme au café de la Comédie. Nous avons été ensuite voir passer la revue de la garde nationale, dans une maison du Chapeau-Rouge (Maine de Biran, Journal, 1816, p. 208).V. passer11reSection IV B 4 a α. ♦ Vieilli. Revue + compl. de nom désignant celui qui fait l'action.Nous sommes à la Revue du Roi (Restif de La Bret., M. Nicolas, 1796, p. 89).Quand on battit le rappel à deux heures, pour la revue des commissaires, c'est alors qu'il aurait fallu voir avec quel ordre et quelle précision on défilait, et comme on criait: « Vive la nation! Vivent les commissaires! Vivent la commune de Paris et l'Assemblée Nationale! » (Erckm.-Chatr., Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 17). − P. métaph. Je rôdais à l'écart dans les jardins d'où le contrôleur général Machault, à l'âge de quatre-vingt-treize ans, était allé s'éteindre aux Madelonnettes; car la mort dans sa grande revue n'oubliait alors personne (Chateaubr., Mém., t. 2, 1848, p. 626).
β) P. méton. Cérémonie au cours de laquelle les troupes en grande tenue sont publiquement présentées à des personnalités civiles ou militaires. Aller, assister, paraître, se rendre à une revue. [Il] raconta l'affaire de Saverne, les défilés des étudiants strasbourgeois devant la statue de Kléber, les pèlerinages des Alsaciens à Belfort pour la revue du 14 Juillet (Maurois, Sil. Bramble, 1918, p. 154).[Les jeunes officiers et aspirants des troupes du Levant ralliées] seront présents aux revues et défilés parmi les officiers sans troupe [des Forces Françaises Libres] (De Gaulle, Mém. guerre, 1954, p. 435).V. caisson ex. 1, galop A 1 ex. de Aymé.
γ) Loc. fig., pop. et fam. Être de la revue. Être frustré dans ses espérances; être déçu; en être pour ses frais. V. frais2C 3. « Être de la revue », pour le quidam, c'est d'abord être coincé dans une corvée dont il se passerait volontiers.Ces circonstances sont sans doute à l'origine de l'expression commune, mais je crois que c'est le jeu de mots « revoir, revue » qui en a assuré la circulation. On est « de la revue » quand le coup est manqué, qu'il faudra revenir « se faire voir » à une prochaine occasion. Il faudra repasser! (Cl. Duneton, La Puce à l'oreille, 1978, p. 210). REM. Revuette, subst. fém.[Corresp. à supra B 2 b] Revue sans prétention. M. de Marquet avait passé la nuit à Paris (...) pour assister, à la Scala, à la répétition générale d'une revuette dont il était l'auteur masqué et qu'il avait signé simplement: Castigat Ridendo (G. Leroux, Myst. ch. jaune, 1907, p. 13). Prononc. et Orth.: [ʀ
əvy]. Ac. 1694-1718: reveue; 1740: revûe; dep. 1762: revue. Étymol. et Hist. A. 1. 1317 « action d'examiner de nouveau » (Partage, ap. Moreau, Hist. de Bret., I, 1725 ds Gdf. Compl.); 2. a) 1356 « inspection d'hommes de troupe » (Ordonnance de Jean le Bon ds Isambert, Rec. gén. des anc. lois fr., t. 4, p. 858); b) 1466 faire les reveues de (Archives du Nord, B 17051, f o91 ds IGLF); 1560 faire la reveuë de (Du Bellay, Ample Discours au Roy, 531 ds
Œuvres poét., éd. H. Chamard, t. 6, p. 222); 1723 faire passer en revue (Marivaux, Le Spectateur fr., feuille 16, p. 203); 1735 intrans. passer en revue « être soumis à un examen détaillé » (Id., Le Paysan parvenu, 300 ds IGLF); 1749 trans. passer en revue « soumettre à un examen détaillé » (Condillac, Traité des systèmes, p. 213); c) 1670 mar. (Colbert, À Arnaul, 4 juillet, Ordres du Roy, Galères, vol. 11, fol. 83, Arch. de la Mar. ds Jal); d) 1894 être de la revue « ne pas manger » (Virmaitre, Dict. arg. fin-de-s., p. 8); 3. 1533 « fait de se revoir, de se rencontrer à nouveau » (C. Marot, Epître à un gentilhomme de la court, 48, éd. C. A. Mayer, p. 157); 1775 gens de revue « gens que l'on revoit de temps à autre » (MmeRoland, Let., nouv. série, I, 274-5 ds Quem. DDL t. 19); 1808 nous sommes gens de revue (Désaugiers et Gentil, La Comédie chez l'épicier, p. 16, ibid.). B. 1708 Review subst. masc. « publication périodique anglaise » (G. Miege, État de la Gr. Bretagne, I, 202 ds Bonn., p. 119); 1711 revue « id. » (R. Harley, Fautes des deux côtez, 63 ds Fonds Barbier); 1792 en France Revue du patriote (Hatin, Bibliographie hist. et crit. de la presse périodique, 236 ds FEW t. 14, p. 430a, note 20). C. 1843 Revue titre d'une pièce (Balzac, Lettres Étr., t. 2, p. 221); 1858 Revue des variétés, Revue du Palais-Royal (Flaub., Corresp., p. 246); 1866 (Bussy, Art dram., p. 73: Les parodies et les revues sont des pièces de circonstance). Part. passé fém. subst. de revoir*. Sens B d'apr. l'angl. review, issu du fr., att. comme terme désignant une publication périodique dep. 1705 (NED). Fréq. abs. littér.: 3 765. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 3 882, b) 5 747; xxes.: a) 6 453, b) 5 739. DÉR. Revuiste, subst. masc.,théâtre. [Corresp. à supra B 2 b] Auteur de revue. Le « revuiste » n'est pas soutenu par l'action, par des péripéties de la longue histoire qu'imaginent les autres auteurs dramatiques. C'est dix ou douze histoires qu'il doit raconter, lui (L'Œuvre, 26-27 mai 1941).[Molière] se moquait du neuf comme nos revuistes de fin d'année (Cocteau, Poés. crit.I, 1959, p. 69).− [ʀ
əvyist]. Warn. 1968 [-vɥist], v. aussi Lerond 1980. Ds Martinet-Walter 1973, subsistance du [y]. − 1reattest. 1887 (H. Buguet, Au général Boulanger, Revues et Revuïstes ds Lar. Lang. fr.); de revue, suff. -iste*. BBG. − Dauzat Ling. fr. 1946, p. 326 (s.v. revuiste). − Dub. Dér. 1962, p. 42. − Hasselrot 1957, p. 194 (s.v. revuette). − Quem. DDL t. 10 (s.v. revuette), 17 (id.), 19. |