| REPLIER, verbe trans. A. − Rabattre plusieurs fois sur elle-même une matière souple (étoffe, papier, etc.); plier de nouveau une chose dépliée. Anton. déplier, déployer.Replier un drap, une nappe, un journal, une lettre. Il tira (...) de son portefeuille un papier plié en quatre, qu'il déplia et replia avec une attention qui ressemblait à du respect (Dumas père, Monte-Cristo, t. 2, 1846, p. 724): ... chaque fois qu'il s'était bien tamponné les yeux, il étalait son mouchoir sur ses genoux, le repliait dans les plis et l'introduisait dans sa poche, à plat, comme un portefeuille.
Martin du G., Thib., Mort père, 1929, p. 1311. − P. métaph. Cette réponse coupa net la morale du prêtre. Sans ajouter une parole, il replia ses arguments, il remit en poche Dieu inutile, désolé de l'avoir risqué dans une telle avanie (Zola, Pot-Bouille, 1882, p. 359). − Empl. pronom. À valeur passive. Ils portaient des calottes noires hexagonales (...) cela se repliait en la forme d'un carnet et se glissait sous la couverture d'un bréviaire (Adam, Enf. Aust., 1902, p. 178).Réfl. Le col visqueux et froid du reptile se collait sur le sein de la jeune fille. Et là, se repliant sur lui-même, il la mordit à la gorge (Sue, Atar-Gull, 1831, p. 29).P. métaph. L'esprit du Seigneur s'agite dans tous les sens, il se plie et se replie jusqu'à ce qu'il trouve une issue (Saint-Martin, Homme désir, 1790, p. 77). B. − Rapprocher, rabattre les unes sur les autres les parties articulées (d'un objet, d'un ensemble déployé, étalé). Synon. refermer; anton. déplier, ouvrir.Replier une tente. « Boulevard Beaumarchais! » cria-t-elle au valet qui replia le marchepied garni de moquette (Ponson du Terr., Rocambole, t. 5, 1859, p. 384).Les mulâtres replièrent le plan incliné sur l'embarcadère et sautèrent d'un seul mouvement sur le bac (Camus, Exil et Roy., 1957, p. 1657).Empl. pronom. à valeur passive. Sans secousse et bien graissé, un rideau de bois, derrière la grille, se repliait panneau par panneau (Malègue, Augustin, t. 2, 1933, p. 430). 1. En partic. [L'obj. désigne une partie articulée de corps] Replier les bras, les jambes. Pour porter ce corps si léger, le héron a assez, il a trop d'une patte; il replie l'autre; presque toujours sa silhouette boiteuse se dessine ainsi sur le ciel dans un bizarre hiéroglyphe (Michelet, Oiseau, 1856, p. 58).Le baron de Guermantes (...) repliant le petit doigt, l'index et le pouce, me tendait le troisième doigt et l'annulaire (Proust, J. filles en fleurs, 1918, p. 753).Empl. pronom. Les étuis de leurs ailes sont mous; elles se replient en éventail dessous (Cuvier, Anat. comp., t. 1, 1805, p. 86). 2. Au fig. [En parlant d'une pers., d'une manifestation de l'esprit] Provoquer un retrait, un retour sur soi; isoler des impressions extérieures. Incapable de lire, d'écrire, de me promener, je passe presque tout le jour étendu sur mon lit, accaparé par la douleur. À quel point la souffrance replie l'être sur lui-même (Gide, Journal, 1935, p. 1225).L'enfant déconcerte et quelquefois irrite l'adulte par ses questions en fusées. Y répondre de biais, par des mensonges grossiers, ou les rabrouer, en ricaner, replie définitivement sur elle-même l'intelligence enfantine: or le repli est la porte ouverte, par l'inhibition, à l'obtusion (Mounier, Traité caract., 1946, p. 643). − Empl. pronom. L'homme, en se repliant sur lui-même, atteint plus ou moins distinctement des phénomènes intellectuels (Cousin, Hist. philos. XVIIIes., 2, 1829, p. 301). C. − TECHN. MILIT. Ramener (une troupe, un corps d'armée) sur des positions établies en arrière. Le 4 octobre, les nôtres pénètrent dans Bastia, d'où l'ennemi a pu replier par mer son arrière-garde (De Gaulle, Mém. guerre, 1956, p. 145). − Empl. pronom. Reculer, battre en retraite, se retirer. Se replier en bon ordre, sur ses bases. Les fascistes se repliaient en tiraillant à travers les bois (Malraux, Espoir, 1937, p. 490). ♦ P. anal. Se trouvant en présence d'un homme qui « entendait le latin », il se replia prudemment dans le maquis de l'esthétique (Rolland, J.-Chr., Foire, 1908, p. 673).Dans le vieil hôtel des comtes de Clérambard, où j'ai dû me replier avec les miens, je suis assiégé par les créanciers (Aymé, Cléramb., 1950, i, 2, 17). Prononc. et Orth.: [ʀ
əplije], (il) replie [-pli]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1213 replié « recourbé » (Faits des Romains, éd. L. F. Flutre et K. Sneyders de Vogel, p. 95, 14); 2. a) 1538 replier « faire former plusieurs plis à quelque chose » (Est.); 1690 se replier « former plusieurs plis (en parlant d'un serpent) » (Fur.); b) 1607 « plier à nouveau un objet » (Hulsius); 1636 « plier une deuxième fois un objet plié (p. ex. une lettre) » (Monet); 3. ca 1670 se replier sur soi-même « se recueillir, réfléchir en soi-même » (La Chambre ds Rich. 1679); 4. 1674 se replier « prendre de nouveaux biais pour parvenir à ses fins » (Boileau, Art poét., chant 3, p. 151); 5. 1718 art milit. se replier sur qqc. (Ac.). Dér. de plier*; préf. re-*. V. aussi reployer. Fréq. abs. littér.: 872. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 1 250, b) 841; xxes.: a) 1 159, b) 1 492. DÉR. 1. Repliable, adj.Susceptible d'être replié; dont les parties articulées peuvent se rabattre les unes sur les autres. Des tableaux muraux, noirs ou en couleurs, visibles par tous les enfants et, de préférence, montés sur charnières et repliables en triptyque (Encyclop. éduc., 1960, p. 115).− [ʀ
əpliabl̥]. − 1reattest. 1842 (Mozin-Peschier); de replier, suff. -able*. 2. Repliage, subst. masc.Action de replier quelque chose; résultat de cette action. Un des bouts [de la chambre à air] étant coupé en languette demi-circulaire (...) qui est enduite de dissolution et collée après repliage pour fermer l'extrémité (Rousset, Trav. pts matér., 1928, p. 53).− [ʀ
əplija:ʒ]. − 1reattest. 1924 (A. Leclerc, Télégr. et téléph., p. 256); de replier, suff. -age*. |