| * Dans l'article "RENARD,, subst. masc." RENARD, subst. masc. A. − ZOOLOGIE 1. Mammifère carnivore (de la famille des Canidés) qui se caractérise par une tête triangulaire, de larges oreilles pointues, dressées, des yeux obliques, un museau effilé, un corps allongé, des pattes assez courtes, une longue queue touffue, un pelage épais, roux chez l'espèce commune, et qui est réputé pour sa finesse, sa prudence. Renard roux; battue, chasse au renard. Le renard a des ruses qu'il faut déjouer (...). J'ai observé, la nuit, des renards qui chassaient le lapin. Ils avaient organisé une vraie battue (...) ce n'est pas facile de déloger un renard de son terrier (A. France,Lys rouge, 1894, p. 63).V. fauve ex. de Genevoix: Ils s'accouplent en décembre, durant les longues nuits limpides (...). C'est à cette pâleur vive que les renards se cherchent et s'appellent. Couverts de leur plus riche fourrure, paraissant d'or clair quand ils sont roux, et quand ils sont gris d'argent pur, ils errent (...). Ils glapissent, ils aboient, ils miaulent...
Pesquidoux,Chez nous, 1923, p. 142. − Roman de/du Renard/Renart. Recueil médiéval de fables satiriques où le renard personnifie la ruse. Le renard, qui s'appelait goupil (...) doit le nom qu'il porte aujourd'hui à la vogue extraordinaire dont jouit autrefois le roman du Renard (Sarcey,Mot et chose, 1862, p. 201). 2. [Avec déterm. spécificateur] − Renard arctique, polaire. Renard de l'Arctique, caractérisé par un pelage qui devient blanc en hiver. Le renard arctique est un animal vif, élégant et gracieux. (...) il déploie (...) autant de finesse que d'adresse pour se saisir de quelques poissons (Rouch,Régions polaires, 1927, p. 180).Cas du Renard polaire (...) : dans l'Arctique européen et américain où ce Carnivore subsiste essentiellement aux dépens des Lemmings, ce Renard présente un cycle parallèle à celui de ses proies (Zool., t. 4, 1974, p. 889 [Encyclop. de la Pléiade]). ♦ Renard bleu. Variété de renard polaire, à pelage long, épais, moelleux, généralement blanc bleuâtre ou nuancé de beige en hiver, très recherché. V. glouton2ex. de Boule, isatis ex. de R. Thévenin. − Renard argenté. Renard d'Amérique du Nord, à long pelage soyeux, noir, mêlé de blanc, très recherché. Une faune américaine ignorée de l'Europe (...), renards rouges ou argentés (...) retrouvaient avec plaisir ce climat violent de leurs plaines (Morand,New-York, 1930, p. 242). − Renard blanc. Renard à pelage blanc. Les renards blancs ou bleus sont couverts en été d'une livrée grise qui leur donne l'aspect d'un animal galeux (D'Orléans,Chasses arct., 1911, p. 1). − Renard charbonnier. Renard à pelage parsemé de noir. Gris il l'est sur la tête et le corps, queue et pattes restant noires (...). Ce renard-là est dit « charbonnier » (Pesquidoux,Chez nous, 1923, p. 131).V. charbonnier ex. de H. Bazin. − Renard des sables. Synon. pop. de fennec.Ce ravissant renard des sables mesure de 35 à 38 cm de sa truffe d'un noir brillant à l'extrémité sombre de sa queue en panache, ocrée comme son corps (...) toute la personnalité (...) est dans la tête (...) en forme de triangle (...) surmontée d'oreilles démesurées (M.-L. Vidal de Fonseca, Les Animaux de bonne compagnie, 1976, p. 374). Rem. Renard des sables désigne aussi le renard pâle et le renard du Tibet, qui sont des renards au sens strict (du genre Vulpes), tandis que le fennec est un canidé d'un autre genre. De même, le renard arctique/ polaire, le renard bleu et parfois le renard argenté appartiennent à un autre genre et représentent des empl. p. ext. 3. P. méton. a) Fourrure du renard apprêtée pour confectionner ou orner des vêtements et des coiffures. Col, cravate de renard. Les enfants s'amusaient de sa lévite jaune fourrée de renard et du haut bonnet de même poil (Vogüé,Morts, 1899, p. 27).Mizzi portait un gros manteau de renards roux, presque jaunes, qui la faisait ressembler à un poussin, tout rond dans son duvet (Triolet,Prem. accroc, 1945, p. 129). − En partic. Dépouille complète du renard, portée en guise de parure autour du cou, sur les épaules. Porter un renard. Cette dame en gris, assaillie par deux renards qui semblaient vouloir lui dévorer les épaules, était la distinguée MmePépin (H. Bazin,Tête contre murs, 1949, p. 326). b) Représentation de cet animal, à valeur décorative, symbolique. Fibules à tête de renard (Malraux,Cond. hum., 1933, p. 305).Les armoiries dont les figures ont un rapport direct avec le nom de famille comme (...) Renard, un renard (L'Hist. et ses méth., 1961, p. 749). B. − P. anal. (d'aspect) 1. Personne (homme généralement) qui évoque un renard par son aspect physique. Le vicaire, gros homme, frais, forte encolure, des yeux fins et obliques: lion et renard (Michelet,Journal, 1834, p. 137).Roux (...) et l'œil creux dans une face de renard, grippée, futée, chafouine (Pourrat,Gaspard, 1925, p. 229). 2. a) Ce qui rappelle un renard par sa forme, etc. Le passage de l'eau serait difficile. Il resta longtemps à la regarder filer avec des bonds de renard (Giono,Batailles ds mont., 1937, p. 115). − (Couleur) de renard, queue de renard. D'un roux ardent. Les hautes graminées (...) passent du vert sombre au roux « queue de renard » (...). Elles prennent cette couleur fauve tout le long d'un petit panache (Pesquidoux,Chez nous, 1923, p. 73). b) Spécialement − Arg., pop., vieilli. (Queue de) renard. Synon. de vomissement, vomissure.Quelque chose qu'il ne peut pas retenir lui échappe avec la violence d'une fusée; il s'est avancé vers la portière, dans l'espoir d'y lancer son renard (Kock,Compagn. Truffe, 1861, p. 113).De grands silences se faisaient, coupés par (...) des chutes sourdes d'ivrognes (...) le vin coulait si fort depuis six heures, qu'il allait se promener sur les trottoirs. Oh! de belles fusées, des queues de renard élargies au beau milieu du pavé (Zola,Assommoir, 1877, p. 772). ♦ Loc. Aller au renard, écorcher le renard, piquer un renard. Vomir. On en avale un verre, deux verres, dix verres sans piquer de renard; mais quand on en a jusqu'au goulot, finalement, faut dégueuler (La Petite lune, 1878-79, n o13, p. 2).Ça chlinguait drôlement (...). Ça (...) donnait envie d'aller au renard (Le Breton,Rififi, 1953, p. 146). − BOT. Queue-de-renard. V. queue. − JEUX. Jeu du renard. Jeu pratiqué sur un damier et où la pièce appelée renard attaque d'autres pièces appelées poules. Ayant mis la main sur un échiquier, je lui appris le jeu des poules et des renards, qui le passionna (Gide,Isabelle, 1911, p. 624). − TECHNOL. ,,Dans la paroi d'un canal ou d'un bassin, fente ou trou par où l'eau se perd et qu'il est difficile de découvrir`` (Plais.-Caill. 1958). Les pertes imputables aux renards qui se produisent dans les talus ou dans le plafond du canal (Bourde,Trav. publ., 1929, p. 359). − ZOOLOGIE ♦ Renard (marin). ,,Poisson du genre des squales (...). Il a le lobe supérieur de la nageoire de la queue de la longueur du corps; la peau (...) bleuâtre sur le dos et blanche sous le ventre; la tête courte; le museau pointu`` (Baudr. Pêches 1827). Des renards marins, longs de huit pieds et doués d'une extrême finesse d'odorat, apparaissaient comme de grandes ombres bleuâtres (Verne,Vingt mille lieues, t. 2, 1870, p. 76). ♦ Renard volant. Grande chauve-souris. Fougères arborescentes, entre lesquelles passaient d'énormes chauves-souris, justement nommées des renards volants (Verne,Enf. cap. Grant, t. 2, 1868, p. 205). C. − P. anal. (d'attitude) 1. a) Parfois péj. Homme rusé, parfois perfide, fourbe. Fin, vieux renard. Ce n'était qu'un filou parmi des brigands, un renard dans une bande de loups (Gautier,Fracasse, 1863, p. 75).Tu es fin, sagace, un vrai renard (Bernanos,Joie, 1929, p. 651).V. lion ex. de Lemaitre, loup ex. de Rolland. b) Arg., pop., vx − [Chez les Compagnons] ,,Aspirant compagnon`` (Larch. 1861, p. 233). [Le compagnon charpentier:] renard, va m'acheter du tabac. L'aspirant savait que tout « renard » doit obéir à un « compagnon » (D'Esparbès,Lég. outil, 1903, p. 4). ♦ Renard de liberté. ,,Postulant compagnon refusé après les épreuves d'initiation`` (France 1907). − Je suis renard de liberté (...) Vous n'êtes point maçon? J'ai voulu en tâter. Compagnon du Devoir! Ah! c'est de belles duperies tout ça! (...), on ne veut pas que les gens pensent: « Il a reculé devant les épreuves » (H. Le Roux,ibid.).Charpentier non affilié au « Devoir » (d'apr. Esn. 1965). Tu n'appartiens à aucune société constituée. Tu n'as pas de Devoir, ou bien tu es un révolté, un indépendant, un Renard de liberté (Sand,Compagn. Tour de Fr., Paris, M. Lévy, 1869 [1840], p. 68). − [Chez les bagnards] Mouchard. De fortes haines ont dû souvent s'élever dans les chiourmes contre ceux des condamnés qui trahissent la cause commune et se font renards ou moutons (Alhoy,Bagnes Rochefort, 1830, p. 182). − Ouvrier qui refuse de faire grève. Synon. jaune. (Dict. xxes.). 2. [P. allus. littér.] a) [P. allus. à l'A.T., Juges 15, 4-5; pour exprimer un danger, une cause de destruction] La littérature immonde a servi à pourrir l'Allemagne. C'est le renard à la queue enflammée qu'on lance dans les vignes des philistins (Barrès,Cahiers, t. 9, 1911, p. 260). b) [P. allus. à Plutarque, Vie des hommes illustres, trad. par Amyot, Paris, Club fr. du livre, t. 1, 1967, p. 100, § 37; pour exprimer l'emprise d'une idée ou d'une souffrance courageusement supportée] Montaigne se peut étudier (...) au sein de Pascal. Il fut pour lui à certaines heures le renard de l'enfant lacédémonien, le renard caché sous la robe; Pascal en était souvent repris, et mordu, et dévoré (Sainte-Beuve,Port-Royal, t. 2, 1842, p. 395). c) [P. allus. aux Fables de La Fontaine] − [Fables I, 2: Le Corbeau et le renard; pour exprimer l'art de tromper par la flatterie] La ville au séjour enchanteur, − comme disent les impudens flagorneurs, les renards mangeant le fromage d'une bourgeoisie ignorante, orgueilleuse (Borel,Champavert, 1833, p. 222).V. corbeau ex. 2. − [Fables I, 18: Le Renard et la cigogne; pour exprimer la situation désavantageuse où se retrouve celui qui a voulu abuser autrui ou traduire une forme de désaccord, d'inadéquation] Il jouait un rôle fort gauche, le rôle des coups et des risées. Le capitaine en était tout penaud. Il éprouvait cette espèce de honte que notre La Fontaine a définie si admirablement: Honteux comme un renard qu'une poule aurait pris (Hugo,N.-D. Paris, 1832, p. 388).V. amphore ex. 3. − [Fables III, 11: Le Renard et les raisins; pour exprimer un mépris feint à l'égard d'une chose qui reste hors d'atteinte] Lui, n'arrive pas à décrocher de son échec. Quand les raisins sont inaccessibles, il ne doit pas dire: « Ils sont trop verts », ce qui, estime Janet, est une vraie ruse de renard contre la psychose menaçante (Mounier,Traité caract., 1946, p. 452).V. beauté ex. 27. 3. Loc. fig. − Se confesser au renard. V. confesser II A 1 b. (Dict. xixeet xxes.). − Coudre la peau du renard à celle du lion. V. coudre1A 1 a loc. − Faire la guerre en renard. Faire la guerre en déployant des ruses. (Dict. xixeet xxes.). − Prendre martre pour renard. V. martre proverbe. − Pop. Tirer au renard. [Le suj. désigne un animal, notamment un cheval] Tirer sur la bride, essayer de se dégager. Le cheval, un instant, tire au renard (...) s'écarte (Vialar,Éperon arg., 1952, p. 53).[Le suj. désigne une pers.] Essayer d'esquiver une tâche, des obligations. (Dict. fin xixeet xxes.). − Vendre la poule au renard. ,,Trahir les intérêts qui nous sont confiés`` (Littré). Nos métayers sont des fripons qui vendent la poule au renard; leurs valets me semblent comme à vous les plus méchants drôles (Courier,Pamphlets pol., Lettres partic. 1, 1820, p. 55). − Un bon renard ne mange pas les poules de son/du voisin. V. poule1I A 4. D. − Loc. adv., rare. À la renarde. D'une manière qui évoque l'aspect physique ou le comportement du renard (ou de la renarde). Le nez révélait des gourmandises et des sensualités faciles. Le profil s'aiguisait à la renarde (La Varende,Roi d'Écosse, 1941, p. 26). Prononc. et Orth.: [ʀ
əna:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) Déb. du xiiies. savoir de renart « être maître dans l'art de tromper » (Roman des sept sages, éd. J. Misrahi, 2250); b) ca 1223 adj. « rusé, fourbe » (Gautier de Coinci, éd. V. F. Koenig, II Mir. 23, 263); ca 1259 subst. (Rutebeuf, Du Pharisien, 80 ds
Œuvres compl., éd. E. Faral et J. Bastin, t. 1, p. 253); 2. a) 1247 zool. (doc. ds Du Cange, s.v. tesura2); 1589 jeu du renard (ap. Bonnaffé, Inventaire des meubles de Catherine de Médicis, p. 89 ds IGLF); b) 1797 « peau, fourrure de renard apprêtée » (Voy. La Pérouse, t. 3, p. 148); 3. fin du xves. écorcher le renard « vomir » (Molinet, Faits et dits, éd. N. Dupire, p. 738, 71: Renars escorchier); 4. a) 1578 « sorte de poisson » (Du Bartas, 1èreSem., 5eJ., p. 224 ds Hug.); b) 1611 regnard de mer ichtyol. (Cotgr.); 5. sens techn. a) 1676 « pierre attachée au bout d'une ficelle, servant aux maçons à déterminer la verticale » (Félibien, p. 720); b) 1678 « espèce de rose des vents » (Guillet, IIIepart.); c) 1690 « fente, trou par où se perd l'eau (d'un canal, d'un bassin) » (Fur.); d) 1904 « sonnerie de trompe indiquant que les chiens de meute viennent de lancer un renard » (Nouv. Lar. ill.); 6. a) 1829 « mouchard, espion » (d'apr. Esn.); b) 1839 « aspirant compagnon » (ibid.); c) 1909 « ouvrier non affilié à un syndicat, ou qui refuse de faire grève » (ibid.). Empl., comme n. commun, de Renart, nom du héros du Roman de Renart, qui remonte au frq. *Reginhart. La forme latinisée Reinardus se trouve dans l'Ysengrimus de Nivardus (1151-52), précurseur du Roman de Renart (Bossuat, Le Roman de Renard, p. 68). A remplacé l'a. fr. volpil, goupil*, qui s'est maintenu jusqu'au xviies. Fréq. abs. littér.: 830. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 1 031, b) 1 095; xxes.: a) 1 222, b) 1 327. DÉR. 1. Renardé, -ée, adj.Qui évoque le renard. Lion renardé. Des têtes d'avoués, − fines, retorses, renardées, − ou des têtes d'imbéciles (Goncourt,Journal, 1862, p. 1205).− [ʀ
ənaʀde]. − 1resattest. a) 1694 « (ambre gris) qui a une couleur noirâtre » (Corn.), 1870 « (ambre jaune) qui a une couleur noirâtre » (Littré), b) 1752 « (parfum) éventé » (Trév.), c) 1862 « qui dénote de la ruse » (Goncourt, loc. cit.); de renard, suff. -é*. 2. Renardier, -ière, adj. et subst. masc.a) Adj. ,,Qui appartient au renard`` (Littré). En évaluant à cinq cents individus le nombre de la population renardière des autres départements, nous resterons certainement au-dessous de la vérité (Journ. offic.,27 oct. 1876,p. 7708, 1recol., ibid.).P. anal. Qui évoque le renard. C'était une émulation de saleté [entre Mlledu Tesson et Pénélope] (...), un tournoi d'exhalaisons renardières, de remugles, de relents (Bloy,Hist. désobl., 1894, p. 76).b) Subst. masc. Celui qui a charge de détruire les renards. (Dict. xixeet xxes.). − [ʀ
ənaʀdje], fém. [-jε:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1718. − 1resattest. a) fin du xves. supra sens b (Compt. de la vénerie de Ch. VIII, p. 10, Lyon, Perrin ds Gdf.), b) 1562 raisin renardier « raisin dont la grappe a la forme d'une queue de renard » (Du Pinet, trad. de l'Histoire naturelle de Pline d'apr. FEW t. 16, p. 688b), 1611 « qui appartient, est relatif au renard » (Cotgr.); de renard, suff. -ier*. BBG. − Counson (A.). Noms épiques entrés dans le vocab. commun. In: [Mél. Chabaneau (C.)]. Rom. Forsch. 1907, t. 23, p. 411. − Gamillscheg (E.). Z. fr. Spr. Lit. 1930-31, t. 54, p. 211. − Lenoble-Pinson (M.). Le Lang. de la chasse. Bruxelles, 1977, pp. 38-42, 200, 221, 302-310. − Quem. DDL t. 19, 21. − Tallez (P.). À propos du mot renard. R. de Gascogne. 1911, t. 11, pp. 179-181; 1912, t. 12, p. 139. − Thomasson (de). Naissance et vicissitude de 300 mots et loc.: essai de sémantique... Paris, 1935, p. 23. |