| RECOUVRIR, verbe trans. A. − [Avec une valeur fréquent.] Qqn/qqc. recouvre qqn/qqc.Couvrir de nouveau. Recouvrir un livre, une maison, un toit. Effriter la terre, d'un doigt léger qui découvrait pour les recouvrir aussitôt les énormes haricots aux robes d'évêques tachetées d'ébène luisante (Courteline,Ronds-de-cuir,1893, 4etabl., ii, p. 134). − En partic. Recouvrir un enfant, un malade. Remonter le drap, la couverture sur un enfant, sur un malade qui s'était découvert. Recouvrir un enfant qui s'est découvert dans son sommeil (Rob.). − Empl. pronom. ♦ [Le suj. désigne une chose] Être de nouveau couvert. Déjà le ciel se recouvre et s'ennuage (Amiel,Journal,1866, p. 203). ♦ [Le suj. désigne une pers.] Couvrir à nouveau son corps, se rhabiller; en partic., remettre son chapeau. Les ministres anglais avaient fort blâmé le respect qu'on avait témoigné à l'empereur à bord du Bellérophon; (...) aussi affectait-on, à bord du Northumberland, des expressions et des manières toutes différentes: on s'empressait ridiculement surtout de se recouvrir devant lui (Las Cases,Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 52).Geneviève se recouvrit, et elle répétait: − Vous voyez bien, je ne suis plus une femme (Zola,Bonh. dames,1883, p. 739). B. − [Avec une valeur intensive] 1. Qqn/qqc. recouvre qqn/qqc. de qqc.Couvrir complètement. Synon. enrober, revêtir.Recouvrir une casserole d'un couvercle, un gâteau de chocolat. Cette fumée avait recouvert les poutres de la toiture d'un glacis de bitume (Gautier,Fracasse,1863, p. 58).Devant moi, un garçon recouvrit de son manteau une jeune fille frissonnante (Mauriac,Journal 2,1937, p. 131). − Empl. pronom. ♦ réciproque. [Le suj. désigne une chose] Se superposer. Les tuiles mécaniques sont à emboîtement ou à recouvrement; elles ne se recouvrent à la pose que de quelques centimètres (Robinot,Vérif., métré et prat. trav. bât., t. 4, 1928, p. 35). ♦ réfl. [Le suj. désigne une pers.] Se couvrir entièrement. Je me recouvre de sable. Mon visage seul émerge (Saint-Exup.,Terre hommes,1939, p. 236). 2. Au fig. a) Qqc. recouvre qqc. − Couvrir une chose, se superposer à une chose en la dissimulant. Synon. masquer.L'étrange mélancolie (...) était là depuis longtemps et (...) la joie dont je me disais fière ne faisait que la recouvrir (Gide,Porte étr.,1909, p. 582).La colère recouvrit l'effroi et la tristesse dans l'âme simple mais ferme de MmeLigneul (Drieu La Roch.,Rêv. bourg.,1937, p. 47). ♦ Empl. pronom. Se couvrir, se superposer. Un homme qui, ayant parcouru une allée de peupliers, veut se représenter un peuplier ou qui, ayant regardé une grande basse-cour, veut se représenter une poule, éprouve un embarras. Ses différents souvenirs se recouvrent (Taine,Intellig., t. 1, 1870, p. 149). − Embrasser, correspondre exactement à quelque chose. On ne sait trop ce que le mot bonheur signifie et encore moins quelles valeurs authentiques il recouvre (Beauvoir,Deux. sexe, t. 1, 1949, p. 30). ♦ Empl. pronom. Se confondre, coïncider. Les deux notions [le beau et l'utile], (...) ne pourront jamais se recouvrir (Huyghe,Dialog. avec visible,1955, p. 38). b) Péj. Qqn recouvre qqc.Dissimuler, cacher, masquer quelque chose sous de faux semblants. Hugo était un tyran domestique (...) recouvrant toujours d'un beau prétexte sa dureté ou sa sensualité (L. Daudet, Fant. et viv.,1914, p. 254).Le silence, l'étouffement, je ne connais que ça. J'agirai, j'y mettrai le prix; mais, pour la famille, il faut recouvrir tout ça... Il faut recouvrir... (Mauriac,Th. Desqueyroux,1927, p. 174). C. − [Avec une valeur fréquent. ou intensive] Mettre un nouveau revêtement de tissu (notamment à un siège). Meubles à recouvrir. Le canapé, recouvert d'un gros satin rose de la Chine, brodé de scarabées et de fleurs (Bourges,Crépusc. dieux,1884, p. 239): Elle se hâta d'ajouter dans la crainte d'un refus positif: « Je demande seulement que vous le fassiez recouvrir ». Le directeur, embarrassé, déclara: « Mais... Madame... Nous ne sommes pas marchands de parapluies. Nous ne pouvons nous charger de ces genres de réparations ».
Maupass.,Contes et nouv., t. 1, Parapluie, 1884, p. 450. Prononc. et Orth.: [ʀ
əkuvʀi:ʀ], (il) recouvre [-ku:vʀ
̥]. Homon. formes de recouvrer. Att. ds Ac. dep. 1798. Étymol. et Hist. 1. Ca 1160 verbe pronom. « se couvrir de nouveau » (Eneas, éd. J. J. Salverda de Grave, 8402); 2. 1160-74 « couvrir complètement » (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, III, 1740); 3. 1949 « correspondre exactement à qqc. » (Beauvoir, loc. cit.). Dér. de couvrir*; préf. re-*. Fréq. abs. littér.: 2 593. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 4 055, b) 3 254; xxes.: a) 3 116, b) 3 947. Bbg. Bogacki (K.). Les Prédicats locatifs stat. en fr.: ét. de sém. et de synt. Warszawa, 1977, p. 68. − Dauzat Ling. fr. 1946, p. 258. |