| RACCROC, subst. masc. A. − JEUX (billard), vieilli. Coup inattendu et heureux, dû au hasard plutôt qu'à l'habileté. Et l'emballeur de la rue Amelot eut beau faire une série de raccrocs (...). M. Matoussaint le regarda caramboler, tranquillement (Coppée, Vingt contes nouv., 1883, p. 259). ♦ P. métaph. L'hostilité d'un univers où l'âme humaine est un raccroc, une réussite de hasard (Malègue, Augustin, t. 2, 1933, p. 365). − Loc. fig. ♦ De raccroc. De hasard, d'occasion. Une somptuosité pauvre et de raccroc, comme un intérieur de vieille actrice retirée (Goncourt, Journal, 1862, p. 1029).Et pourtant (...) [Philippe VI] n'était qu'un roi de raccroc, un neveu, un cousin de roi (Druon, Lis et lion, 1960, p. 51). ♦ Par raccroc. Par hasard; grâce à une chance inespérée. Obtenir un examen par raccroc. On ne m'écrit guère de Paris et je ne sais les nouvelles que par raccroc (Mérimée, Lettres E. Ellice, 1860, ds R. Universelle, t. 38, 1929, p. 522).Faguet ne lui donne pas de place [à Flaubert] parmi ses maîtres du XIXesiècle (...) et lui consacre plus tard, par raccroc, un petit volume hâtif (Thibaudet, Réflex. crit., 1936, p. 79): Pour revenir aux vrais élèves de Port-Royal, à ceux qui le sont non par raccroc, mais en ligne directe, ce qui les caractérise, c'est la marque profonde que cette éducation leur laisse, l'attache constante à leurs maîtres, et, même à travers les dispersions orageuses du monde, le câble de retour à la foi.
Sainte-Beuve, Port-Royal, t. 3, 1848, p. 516. B. − Action de ressaisir, de rattraper quelque chose. Le spectacle d'une folle jeunesse qui se noie dans les plaisirs et dans l'orgie au sortir de l'enfance est de tous les temps: il est vrai qu'ici ces circonstances caractéristiques d'être colonel presque à la jaquette et de faire sa première communion de raccroc à la dernière heure (...) impriment à l'historiette une variété piquante et y mettent en plein la signature du XVIIIesiècle (Sainte-Beuve, Nouv. lundis, t. 11, 1867, p. 157). C. − Vieilli. [En parlant des prostituées] Racolage. Synon. raccrochage.Il glissait au ménage avec cette goule, lui qui, pour ne pas payer, vivait autrefois des raccrocs de la rue (Zola, L'Œuvre, 1886, p. 247).D'inquiétantes silhouettes, dans l'ombre bleue, les lumières, le grouillement, se perdaient pour réapparaître et se dérober encore, au milieu du raccroc obstiné des femmes (Carco, Jésus-la-Caille, 1914, p. 92). Prononc. et Orth.: [ʀakʀo]. Att. ds Ac. dep. 1798. Étymol. et Hist. 1. 1374 « renouvellement d'une fête, spécialement d'un repas de noce » (Arch., JJ 105, pièce 504 ds Gdf., s.v. racroc); 2. a) 1798 coup de raccroc « coup inattendu et heureux dans un jeu » (Ac.); 1810 raccroc « id. » (Molard, Mauv. lang. corr., p. 225); 1862 subst. + de raccroc « dû au hasard » (Goncourt, loc. cit.); 1864 verbe + de raccroc « par hasard, en plus » (Sainte-Beuve, Nouv. lundis, t. 9, p. 34); b) 1835 par raccroc « par une chance inespérée (au jeu) » (Ac.); 1845 « id. (en gén.) » (Besch.); 3. 1950 fig. « action de raccrocher, de rattraper quelque chose » (Arnoux, Contacts all., p. 15). Déverbal de raccrocher*. Fréq. abs. littér.: 21. Bbg. Tafel (Ch. E.). Beitr. zur frz Etymol. Bonn, 1976, p. 40. |