| RÉSURRECTION, subst. fém. A. − 1. MYTH., RELIG. a) Retour de la mort à la vie. Résurrection miraculeuse; résurrection de Lazare. Les résurrections accomplies par le Christ redonnent aux bénéficiaires une vie normale; il ne s'agit pas d'une glorification appartenant à l'autre vie (Dheilly1964). b) THÉOL. Passage de la mort à l'immortalité.
α) RELIG. CHRÉT. [Souvent avec une majuscule] Passage à la vie glorieuse de la nature humaine de Jésus-Christ, trois jours après sa mort sur la croix. Le mystère de la Résurrection. Sa première apparition [de Jésus] après sa résurrection glorieuse, fut à Magdeleine (Chateaubr.,Mém., t. 4, 1848, p. 389): ... si nous parlons de la Résurrection de Jésus-Christ, de l'Ascension de Jésus-Christ, de son intercession pour nous dans les cieux, qui ne voit que toutes ces gloires de Jésus-Christ sont le triomphe de l'homme racheté par Lui? Jésus ressuscité: c'est l'homme vainqueur de la mort et du péché...
Monod,Sermons,1911, p. 300. − P. méton. Fête annuelle célébrant cet événement. Célébrer la Résurrection; jour de la Résurrection. Synon. Pâques.Avant Pâques il y a la semaine sainte, dans laquelle les jours du jeudi saint et du vendredi saint sont presque aussi anciens que celui de la Résurrection (Chauve-Bertrand,Question calendrier,1920, p. 76).V. ascension ex. 10.
β) RELIG. (notamment cath., juive, musulmane). Croyance ou dogme selon lequel le corps humain ressuscitera à la fin des temps. Résurrection éternelle, universelle; résurrection de la chair, des corps; résurrection des morts. Le Mauvais Esprit: « Le courroux céleste te menace, Marguerite, les trompettes de la résurrection retentissent; les tombeaux s'ébranlent, et ton cœur va se réveiller pour sentir les flammes éternelles (...) » (Staël,Allemagne, t. 3, 1810, p. 109).Par la résurrection, nous rentrons dans la vie absolue, la vie éternelle (...) nous touchons à la vie totale, définitive, cette vie (...) sur laquelle reposent l'apologétique augustinienne et plus généralement l'apologétique chrétienne (J. Vuillemin, Essai signif. mort,1949, p. 260).V. corps ex. 19, palingénésie ex. 1 et résurrectionniste ex. de P. Leroux.
γ) P. méton., BEAUX-ARTS.
Œuvre d'art représentant la résurrection du Christ. La Résurrection de Rembrandt (Dict. xixeet xxes.). 2. P. anal., BIOL. [À propos d'un animal inférieur] Reprise d'un processus de vie observable après une suspension prolongée de tout phénomène vital. V. résurrectionnisme rem. s.v. résurrectionniste ex. de J. Rostand. B. − P. ext. 1. Guérison prompte ou surprenante d'un malade qui a été proche de la mort; retour inattendu et rapide à la santé. C'est une véritable résurrection. Rieux trouva Grand assis sur son lit, parlant avec Tarrou (...). Le soir, Grand pouvait être considéré comme sauvé. Rieux ne comprenait rien à cette résurrection (Camus,Peste,1947, p. 1433). 2. Littéraire
α) [À propos d'un élément de la nature] Action de se manifester à nouveau, résultat de cette action; nouvelle vigueur, vie nouvelle. [La lune] répandait (...) cette lueur mourante (...) qu'elle nous jette chaque mois, à la fin de sa résurrection (Maupass.,Contes et nouv., t. 1, Amour, 1886, p. 739).Les pâmoisons et les résurrections du végétal, ses voltes rapides vers la lumière (Colette,Gigi,1944, p. 190).
β) [À propos d'un État] Renaissance, nouvel essor. La situation créée par la résurrection de l'Europe et des puissances européennes (Beaufre,Dissuasion et strat.,1964, p. 162). − Vx. Résurrection à qqc.Je souhaite à la Pologne la résurrection à la liberté, et à la Russie la résurrection à l'honneur (Hugo,Actes et par., 2, 1875, p. 53). C. − Au fig. ou p. métaph. 1. Résurrection de qqn.Fait de retrouver la joie de vivre, le bonheur, la paix de l'âme. L'abbé Taffin: (...) je cherche son autel [de sainte Letgarde], je m'agenouille (...) une douceur me réchauffe, me rassure, me sauve (...) comment exprimer la résurrection morale qui suivit? (Estaunié,Vie secrète,1908, p. 48). 2. Résurrection de qqc./qqn.Fait de faire revivre le passé ou d'évoquer une personne défunte ou que l'on n'a pas vue depuis longtemps. De très-bonne heure (...) M. Michelet (il nous l'a dit) a voulu faire, de l'histoire, non une narration comme Augustin Thierry, non une analyse comme M. Guizot, mais une résurrection (Sainte-Beuve, Nouv. lundis, t. 2, 1862, p. 152).La résurrection de son image (d'Edmée), non moins que son abolition momentanée, mettait Chéri de bonne humeur (Colette,Fin Chéri,1926, p. 65). 3. Résurrection de qqc./qqn.Renaissance, retour, remise en vogue d'une idée, d'une doctrine et, p. méton., d'une personne, tombée dans l'oubli ou passée de mode. Résurrection d'un art. Des citoyens armés par la Révolution, qui ne vouloient point la résurrection du despotisme (Robesp.,Discours, Guerre, t. 8, 1792, p. 15).Maintenant l'heure de sa résurrection est arrivée; je serais heureux d'avoir donné la main à Milton pour sortir de sa tombe comme prosateur; depuis long-temps la gloire lui a dit comme poète: « Lève-toi » (Chateaubr.,Litt. angl., t. 2, 1836, p. 28). Prononc. et Orth.: [ʀezyʀ
εksjɔ
̃], [-ʀe-]. Ac. 1694-1740: re-; dep. 1762: ré-. Étymol. et Hist. 1. 1remoit. xiies. resurrectiun « action de se lever » (Psautier Oxford, éd. Fr. Michel, 138, 1, p. 215, également att. ds le Psautier Cambridge, 138, 2, p. 246: resurrecciun); 2. déb. xiies. « fête de la Résurrection, Pâques » (ds Drüppel Afr. Urk., p. 102); ca 1175 resurrection « action de ressusciter » (Chron. Ducs Normandie, éd. C. Fahlin, 26337); spéc. 1680 (Rich.: Résurrection. Estampe qui représente le mistere de la resurrection); 3. 1676 résurrection « retour à l'existence, à l'activité, guérison » (Mmede Sévigné, Corresp., éd. R. Duchêne, Lettre 2 oct., t. 2, p. 414). Empr. au b. lat. eccl.resurrectio, -onis « action de se relever » ves. ds Blaise Lat. chrét., « résurrection » fin ives., ibid., « fête de la Résurrection » ca 870 ds Nierm., formé sur le supin resurrectum de resurgere, v. résurgent. Cf. l'a. m. fr. resuscitement « action de ressusciter » ca 1200 (Dialogue Grégoire, 244, 3 ds T.-L.) − xvies.: 1547, Budé, Institution, ch. 38 ds Hug., repris comme ,,v. lang.`` par Ac. Compl. 1842, et resordement « id. » ca 1210 (Guillaume le Clerc, Bestiaire, éd. R. Reinsch, 2155 ds T.-L.) − 1721, Trév.: résordement. Fréq. abs. littér.: 906. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 1 320, b) 968; xxes.: a) 1 378, b) 1 378. DÉR. 1. Résurrecteur, subst. masc.,rare, littér. a) Personne ou chose qui ressuscite, qui rend la vie ou la santé. « Du vin? En quantité modérée (...). Le plaisir physique? (...). Je vous le permets sans abus (...). L'excès en tout est un défaut. » Du coup, quelle tentation pour le malade de renoncer à ces deux résurrecteurs, l'eau et la chasteté! (Proust,Sodome,1922, p. 641).Saint Nicolas, le protecteur des naufragés et résurrecteur des enfançons [« petits enfants »] réduits en hachis (Arnoux,Rhône,1944, p. 280).b) P. métaph. À Michelet. (...) Votre Louis XV est un de vos plus beaux livres. Ce roi gisait, pourri. Vous êtes venu, résurrecteur. Vous avez dit à ce cadavre: debout! et vous avez remis dedans son âme horrible (Hugo,Corresp.,1866, p. 551).− [ʀezyʀ
εktœ:ʀ], [-ʀe-]. − 1reattest. 1788 (Fér.); de résurrect[ion], suff. -eur2*. − Fréq. abs. littér.: 12. 2. Résurrectionnel, -elle, adj.,rare, littér. a) ,,Relatif à la résurrection du Christ`` (Rob.). b) Qui ressuscite, rend la vie. Il s'agissait de pousser en Pologne (...) au soulèvement national universel, (...) de s'associer, en le dirigeant habilement, à ce mouvement résurrectionnel d'une race si naturellement électrisée (Sainte-Beuve,Nouv. lundis, t. 9, 1864, p. 232).− [ʀezyʀ
εksjɔnεl], [-ʀe-]. − 1reattest. 1832 (Balzac,
Œuvres div., t. 2, p. 560); de résurrection, suff. -el*. BBG. − Gohin 1903, p. 262 (s.v. résurrecteur). − Quem. DDL t. 3 (s.v. résurrectionnel). |