| RÉPUGNER, verbe trans. indir. A. − Qqc. répugne (à) qqn/qqc. 1. [La cause est phys., concr.] Inspirer de la répugnance à. Synon. dégoûter, écœurer. a) Rare, vieilli. [Avec un compl. d'obj. dir.] J'ai à décrire les Bienheureux qui sont, pour la plupart, déplorablement sales: Labre, dont la vermine et la puanteur répugnaient les hôtes mêmes des étables (Huysmans, Là-bas, t. 2, 1891, p. 27). b) [Avec un compl. d'obj. indir.] Si les perruques de cheveux (...) ont le malheur de répugner à votre altesse sérénissime, que votre altesse essaie des perruques de soie! (Bourges, Crépusc. dieux, 1884, p. 193): ... beaucoup d'entre elles [les femmes] sont sujettes à des fleurs blanches (...). Quelques auteurs ont proposé l'inspection de la partie souffrante, pour s'assurer quel est le siège et l'origine de l'écoulement. Mais, outre que ce moyen répugne à la pudeur des femmes honnêtes, il est souvent incertain et trompeur.
Geoffroy, Méd. prat., 1800, p. 528. 2. [La cause est morale, abstr.] Être en opposition, en contradiction avec. Synon. déplaire, dégoûter, faire horreur.L'association répugne à l'homme autant qu'elle lui est nécessaire (Proudhon, Syst. contrad. écon., t. 2, 1846, p. 104).Une de ces carrières toute remplie d'occupations extérieures répugne à mes goûts (Massis, Jugements, 1923, p. 46). − Rare. [Le compl. désigne un inanimé] Ces antiques provinces [telle la Bretagne] étaient un étang; courir répugnait à cette eau dormante; le vent qui soufflait ne les vivifiait pas, il les irritait (Hugo, Quatre-vingt-treize, 1874, p. 23). B. − Empl. impers. Il (cela) répugne à qqn de + inf.Il est contraire aux goûts, aux tendances de quelqu'un de. Il lui répugne [au Grec] de se courber vers la terre (About, Grèce, 1854, p. 63).Mary-Ann fit observer à son tour qu'il lui répugnait de quitter ses pendants d'oreilles (About, Roi mont., 1857, p. 157). − Vieilli. Il répugne que.Il ne répugne donc pas qu'un moderniste soit arrivé à ses conclusions indépendamment de Kant et de Spencer (Théol. cath.t. 4, 11920, p. 811). C. − Qqn répugne à qqc.Éprouver beaucoup d'aversion pour quelque chose, être rebuté par quelque chose, l'accepter difficilement. Ceux (...) qui répugnent aux remèdes proposés (Sainte-Beuve, Port-Royal, t. 2, 1842, p. 117).On peut vivre dans le siècle et croire à l'éternel. Cela s'appelle accepter. Mais je répugne à ce terme et je veux tout ou rien (Camus, Sisyphe, 1942, p. 118). ♦ [P. méton. du suj.] Le moralisme et l'idéalisme suisses ont répugné absolument au roman naturaliste (Arts et litt., 1936, p. 38-4). ♦ Rare. Qqn répugne qqc.La marquise bien faible, toujours couchée, pauvre femme, répugnant toujours la soupe à l'ail (A. Daudet, Port-Tarascon, 1890, p. 205). − [L'obj. est un subst. d'action] C'est pour moi-même, pour mes aises propres, que je répugne à la dépense (Gide, Ainsi soit-il, 1951, p. 1168).L'on répugne à l'établissement d'un statut juridique global (Scelle, Fédéralisme eur., 1952, p. 47). − Répugner à + inf.Je répugne à voir couler le sang (A. France, Dieux ont soif, 1912, p. 73).La plupart des romanciers répugnent à écrire pour le théâtre (Mauriac, Journal 3, 1940, p. 257). ♦ Rare [Le suj. désigne un inanimé] Les maisons répugnent à ouvrir des fenêtres sur l'extérieur, les communications intérieures s'opèrent par des passages couverts (Meynier, Paysages agraires, 1958, p. 36). REM. Répugné, -ée, part. passé en empl. adj.,rare. Qui éprouve de la répugnance. Synon. dégoûté, écœuré.Il courut chez une prostituée qu'il connaissait (...). Jamais il n'avait plus exécré la chair, jamais il ne s'était senti plus répugné, plus las qu'au sortir de cette chambre! (Huysmans, Là-bas, t. 1, 1891, p. 151). Prononc. et Orth.: [ʀepyɳe], (il) répugne [-pyɳ]. Ac. 1694, 1718: repugner; dep. 1740: ré-. Étymol. et Hist. 1. a) 1213 repugnant part. prés. adj. « contraire, opposé, résistant » venins forz et si repugnanz (Faits des Romains, éd. L. F. Flutre et K. Sneyders de Vogel, p. 612, ligne 25); ca 1365 [ms. xves.] repugner a « s'opposer à, être contraire » (N. Oresme, Monnaies, éd. Wolowski, p. XIII); b) 1662 « mettre obstacle à » (Corneille, Sertorius, Au lecteur ds
Œuvres, éd. Ch. Marty-Laveaux, t. 6, p. 359); 2. a) av. 1553 « ressentir une grande aversion à faire quelque chose » repugnant part. prés. adj. (Hugues Salel, Ballade de deux amoureux, 25 ds
Œuvres poét., éd. L. A. Bergougnioux, p. 265); b) 1643 « manquer d'enthousiasme pour faire quelque chose (+ inf. ou nom verbal) » (Rotr.[ou], Bélis., IV, 8 ds Littré); 3. 1718 « (d'une chose ou de personnes) inspirer de la répugnance à quelqu'un » (Ac.); cf. 1785 [une] saveur [...] répugnante (Buffon, Hist. nat. des minéraux, Paris, Impr. royale, t. V, p. 93). Empr. au lat. class.repugnare « lutter contre, s'opposer à; être incompatible avec quelque chose ». Fréq. abs. littér.: 912. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 985, b) 1 602; xxes.: a) 1 392, b) 1 340. |