| RÉHABILITER, verbe trans. A. − 1. Vieilli a) DR., DR. CANON. Rétablir quelqu'un dans un état, dans des droits, des privilèges perdus. Lorsqu'un prêtre est tombé dans l'irrégularité, il a besoin d'être réhabilité (Ac.1798-1878). b) Réhabiliter un mariage. ,,Réparer le vice d'un mariage par une nouvelle célébration`` (Ac. 1835, 1878). 2. DR. Rendre à quelqu'un, en reconnaissant son innocence, sa situation juridique, ses droits perdus et l'estime publique. Être réhabilité dans ses fonctions. Je voudrais bien vivre assez pour voir Dreyfus réhabilité et Picquart colonel (Proust, Sodome, 1922, p. 714): 1. Marcel Le Perderel, qui fut condamné à 20 ans de travaux forcés par les assises de la Seine pour le meurtre, dans un bar de Montmartre, de Jean Conance, puis réhabilité deux ans plus tard, vient d'être arrêté à Nantes pour le vol de 500 kilos de cuivre...
Le Figaro, 19-20 janv. 1952, p. 2, col. 4. B. − P. ext. 1. Rétablir quelqu'un, quelque chose dans l'estime, dans la considération d'autrui. Réhabiliter qqn dans l'opinion publique; réhabiliter la mémoire de qqn. Les prouesses de l'armée Leclerc réhabilitent l'armée française (Gide, Journal, 1943, p. 224).Il nous donne à entendre qu'il sait aussi être sérieux et qu'il étudie l'astronomie. À ces mots je dresse l'oreille: le voilà réhabilité à mes yeux (Green, Journal, 1956, p. 164). − Empl. pronom. réfl. Synon. de se racheter.Français qui se sont réhabilités par leur participation directe et active à la résistance (De Gaulle, Mém. guerre, 1956, p. 573). ♦ [Avec un compl. prép.] Se réhabiliter aux yeux d'autrui, dans l'esprit de qqn. Se réhabiliter dans le cœur de son mari était son unique désir (Theuriet, Mais. deux barbeaux, 1879, p. 129).Il faut que je me réhabilite dans son estime (Arnoux, Rêv. policier amat., 1945, p. 148). 2. P. anal. a) [Le compl. désigne une coutume, une notion, un domaine, un genre artist.] Réhabiliter le travail manuel; réhabiliter le mélodrame. Allaitement mixte (...) il permet de suppléer, par l'addition d'une, deux ou trois tétées artificielles, à l'insuffisance de lactation (...) observée chez nombre de femmes, ce qui a réhabilité l'allaitement maternel dans les classes aisées (Macaigne, Précis hyg., 1911, p. 168): 2. ... la notion d'élément à l'infini [point, droite ou plan], introduite par Desargues au XVIIesiècle (...) mais qui ne se manifeste guère au XVIIIesiècle que comme abus de langage, est réhabilitée et systématiquement utilisée par Poncelet (...) qui fait ainsi de l'espace projectif le cadre général de tous les phénomènes géométriques.
Bourbaki, Hist. math., 1960, p. 136. b) [Le compl. désigne un objet] Rendre à quelqu'un la qualité, la grandeur (qui est la sienne). Impossible de nier que l'homme n'eût grand air. Il réhabilitait l'uniforme si laid (La Varende, Contes fervents, Meyerdorff, 1948, p. 46). 3. MÉD. ,,Rétablir, remettre en bon état physique ou mental`` (Kamen. 1972). 4. ARCHIT. [En parlant de bâtiments, d'un quartier] Remettre en état. Dans les décombres et les misères laissées par « les bâtisseurs de ruines » [à Beyrouth], il [le patron de l'Apur] recense (...) les zones à raser, à réhabiliter ou à préserver (Le Point, 28 févr. 1977, p. 77, col. 2).V. réhabilitation ex. 2. REM. Réhabilitateur, -trice; réhabiliteur, -euse, subst.,rare. Celui, celle qui réhabilite. Des aveugles volontaires, des réhabiliteurs embrigadés, des revisionnistes à gages faisant très consciemment leur partie dans l'œuvre scélérate (Clemenceau, Iniquité, 1899, p. 68).[Marolles] en appelle, tout en s'humiliant, à cette justice tardive et à cette immortalité qui s'assied sur la tombe: Cineri gloria sera venit. C'est à croire que le bonhomme nous prévoyait de si loin, nous et ses autres réhabilitateurs, s'il en vient (Sainte-Beuve, Caus. lundi, t. 14, 1857, p. 132). Prononc. et Orth.: [ʀeabilite], (il) réhabilite [-lit]. Ac. 1694, 1718: re-; dep. 1740: ré-. Étymol. et Hist. 1. 1234 reabiliter une ville a maire « lui rendre le droit d'avoir un maire » (doc. ap. A. Thierry, Rec. des monuments inédits de l'hist. du Tiers-État, t. 4, Paris, 1870, p. 710); 2. 1456 « rétablir dans un état, des droits, des privilèges perdus » (Archives du Nord, B 1686, f o74 ds IGLF); 3. a) 1675 « rétablir (un failli) dans ses droits » (J. Savary, Le Parfait négociant, Paris, p. 313); b) 1808 « rendre à (un condamné) ses droits perdus et l'estime publique, en reconnaissant son innocence » (Code instr. crim., p. 793); 4. 1680 « rendre aptes à posséder des bénéfices et des ordres ceux qui étaient tombés en hérésie, en irrégularité » (Rich.); 5. a) 1751 pronom. « se rétablir dans l'estime d'autrui » (Duclos, Considérations sur les mœurs de ce siècle, p. 72); b) av. 1755 trans. (Saint-Simon, Mémoires, VIII, 73 ds Adam, p. 189); 6. 1969 « remettre en état, rénover (un quartier, un immeuble) » (Vie et langage, octobre ds Gilb. 1971). Dér. de habiliter*; préf. re-*. Au sens 6, cf. l'angl. to rehabilitate « remettre en état, rénover (un immeuble, etc.) » (1971, Webster's), issu de « remettre dans son état antérieur, remettre en fonction (une chose) » (1845 ds NED). Fréq. abs. littér.: 134. DÉR. Réhabilitable, adj.Qui peut être réhabilité. Le négociant serait déclaré failli réhabilitable ou banqueroutier. Failli réhabilitable, il serait tenu de tout payer (...). Banqueroutier, il serait condamné (Balzac, C. Birotteau, 1837, p. 226).− [ʀeabilitabl̥]. − 1reattest. 1837 id.; de réhabiliter, suff. -able*. BBG. − Quem. DDL t. 11 (s.v. réhabiliteur). |