| * Dans l'article "-AILLER,, suff." -AILLER, suff. Suff. formateur de verbes fréquentatifs et gén. péj., à partir de bases essentiellement verbales (plus rarement subst.). A.− La base est un verbe : courailler , verbe« fam., mener une vie frivole, légère » criailler , verbe« 1. crier sans cesse, se plaindre fréquemment et d'une façon désagréable. 2. crier (oie, perdrix, faisan, paon, pintade) » criticailler , verbe« fam., critiquer, blâmer sans raison » discutailler , verbepéj., « discuter sans cesse et sur de petites questions » (Lar. encyclop.) disputailler , verbevx, « disputer longuement et inutilement » dormailler , verbe« dormir mal, dormir d'une façon interrompue » (Littré) godailler , verbe« faire de faux plis » (Pt Lar. 1968) ou « se livrer à la boisson » (DG) harpailler1, (dér. péj. de harper : mal saisir, prendre le change)verbeterme de chasse, « prendre le change, se séparer en parlant des chiens » (Littré) harpailler2, (fréquentatif de harper : se saisir violemment l'un l'autre)verbe pronom. réfl.« se quereller avec aigreur » (Littré) jouailler , verbefam. et vieilli. « 1. jouer petit jeu. 2. jouer médiocrement et sans passion (d'un instrument, à un jeu) » rimailler , verbevieilli, « faire de mauvais vers » rodailler , verbe« fam., rôder, traînailler » tirailler , verbe« 1. a) tirer à plusieurs reprises, en diverses directions. b) fig., agir d'une manière fréquente et importune sur..., en sollicitant contradictoirement; pronom., s'entendre mal. 2. tirer souvent, irrégulièrement, en divers sens; spéc., faire un tir irrégulier, à volonté » tournailler , verbe« fam. 1. verbe intrans., faire des tours à droite et à gauche. 2. rare, verbe trans., faire tourner à plusieurs reprises » (DG) toussailler , verbe« tousser un peu et souvent » traînailler , verbe« var. de traînasser » traitailler , verbe« faire sans cesse de nouveaux traités, de petites conventions mal observées; tripoter dans les négociations » (Littré) De même :intrigailler, - philosophailler (dér. de philosopher),- réglementailler, - semailler (dér. de semer et non de semaille) (Darm. 1877); dessinailler, - répétailler, - tripotailler (Nyrop t. 3 1936, § 435); plaidailler, - préchailler (Goug. Lang. pop. 1929, p. 142); politiquailler (dér. de politiquer) (Nyrop t. 3 1936, § 435). B.− Rare. La base est un subst. ou un rad. quelconque : Morphol. − Modifications graph. de la consonne finale : critiquer − criticailler; intriguer − intrigaillerbrétailler , verbe(de brette, épée)« tirer l'épée à tout propos; hanter les salles d'armes et s'y escrimer sans cesse » (Littré) fouailler , verbe[dér. de l'a. fr. fou, issu du lat. fagus, hêtre (Dauzat 1964)]« frapper de coups de fouet répétés » gouailler , verbe[même racine que engouer, d'apr. un sens fig. de gorge (ibid.)]« railler sans délicatesse, dire des railleries »; « se moquer grossièrement » (DG) piailler , verbe(d'un rad. onomatopéique pî-)« pousser de petits cris aigus » pinailler , verbepop., « ergoter sur des vétilles, se perdre dans les subtilités » Rem. Certains verbes en -ailler sont formés à partir de dér. en -aille* et ne sont donc pas traités ici; on peut citer, p. ex. : cisailler, embroussailler, encanailler, grenailler, mitrailler, ravitailler, ripailler, sonnailler, tenailler, etc. Prononc. − Cf. -aille. Étymol. ET HIST.
A.− Étymol. − Issu du lat. -aculare ou créé secondairement sur le suff. nom. -aille*. Le grand nombre des dér. en -aille et de leurs correspondants verbaux (bataille/batailler; cisaille/cisailler) a permis la création de dér. en -ailler à partir d'un verbe (crier/criailler) ou à partir d'un subst. (fouet/fouailler).
B.− Vitalité et productivité
1. Vitalité
a) Dans tous les cas, l'analyse des dér. se fait aisément que la base soit un verbe ou un subst. : discuter/discutailler, dormir/ dormailler, tousser/toussailler...; fouet/fouailler...
ou qu'elle soit sentie grâce à la commutation possible du suff. avec une autre finale : piauler/piailler
b) Finales homophones :
brailler « crier », du lat. pop. *bragŭlare, dimin. de bragĕre « braire » (Dauzat 1964)
carcailler, courcailler onomat. « crier en parlant de la caille » (ibid.)
chamailler « frapper, batailler, se battre »; auj. sens plus faible; renforcement probable de l'a. fr. mailler, de mail, avec un préf. cha-, var. de ca- (ibid.)
débrailler (de dé- et a. fr. braiel, brail; de braie) « fam., se découvrir la poitrine d'une manière indécente en ouvrant ses vêtements »
dérailler, composé du préf. dé- et de rail
égailler « disperser, s'étendre; répartir »; mot de l'Ouest, vulgarisé par les Chouans de Balzac, sens venu du Midi; du lat. pop. *æquāliare, de æqualis « égal », peut-être croisé avec aiguail « rosée » (ibid.)
érailler (xiie) « rouler les yeux »; (1560) « retourner le blanc de l'œil »; (xviie) « détériorer en écartant »; de l'a. fr. roeillier « rouler des yeux », issu du lat. pop. *roticŭlāre, de rota « roue » (ibid.)
grailler1, de graille « corneille », du lat. grăcŭla « crier en parlant de la poule » (ibid.)
grailler2, « sonner du cor », de l'a. fr. graile « trompette » (avec l mouillé par influence de graille); même mot que grêle, adj., c.-à-d. « clairon au son grêle »; peut-être repris au prov. graile, qui avait les 2 sens de « grêle » et de « trompette » (ibid.)
railler, de l'a. fr. ralhar « bavarder, plaisanter », du lat. pop. *ragulare « bramer », b. lat. ragere, d'où est issu l'a. fr. raire (ibid.)
rouscailler (de rousser « gronder » et cailler « bavarder ») « parler; réclamer, protester »
2. Productivité. − Sert encore à former des dér. exprimant la répét. rapide d'une action, toujours avec une nuance péj. :
1792 tournailler (Dauzat 1964)
1842 courailler (Pt Rob.)
1875 rôdailler (Dauzat 1964; 1862 pour Pt Rob.)
1877 toussailler (Dauzat 1964)
xxetraînailler (Dauzat 1964; 1877 pour Pt Rob.)
xxecriticailler (Pt Rob.)
1949 discutailler (ibid.)
xxepinailler (Dauzat 1964; 1959 pour Pt Rob.)
À cette liste, il convient d'ajouter les mots nouv. cités par Darm. 1877 (cf. supra A).
C.− Styl. − Nombre de verbes (cf. notamment supra A intrigailler) sont des créations d'auteur n'appartenant guère, en tant que tels, à la lang.; mais le procédé restant vivant, ils peuvent toujours renaître dans l'instant du discours. BBG. − Darm. 1877, p. 120. − Dub. Dér. 1962, p. 19. − Goug. Lang. pop. 1929, p. 142. − Lew. 1960, p. 338. |