| * Dans l'article "POUCE,, subst. masc." POUCE, subst. masc. I.− ANATOMIE A.− 1. Premier doigt de la main ou du pied, le plus court, le plus gros et le plus fort, chez les vertébrés tétrapodes, opposable aux autres doigts chez les primates, et comportant deux phalanges chez les mammifères : 1. ... c'est un « paresseux ». Il n'a que quatre doigts aux pattes de devant, l'index restant atrophié; les pattes de derrière sont prenantes, les pouces nettement opposés au reste des doigts.
Gide, Voy. Congo,1927, p. 770. 2. Doigt postérieur isolé chez certains oiseaux. Le pouce devient libre chez les Goëlands (E. Perrier, Zool.,t. 4, 1931, p. 3124). 3. Partie double de la pince des crustacés. (Dict. xxes.). B.− 1. [Chez l'homme] a) Premier doigt de la main, le plus court, le plus gros et le plus fort, à deux phalanges, opposable aux autres doigts et jouant, grâce à cette aptitude, un rôle essentiel dans la préhension. Son pouce ne trembla pas, lorsqu'il le trempa doucement dans les Saintes Huiles et qu'il commença les onctions sur les cinq parties du corps où résident les sens (Zola, Rêve,1888, p. 190).C'était un beau violon rouge. D'un grattement du pouce il en fit vibrer toutes les cordes (Châteaubriant, Lourdines,1911, p. 64): 2. Mathieu prit l'ouvre-boîte (...); il l'appuya sur le rebord de fer-blanc et pesa dessus de toutes ses forces. Mais la lame glissa sans mordre, sauta hors de la rainure et vint heurter son pouce gauche.
Sartre, Mort ds âme,1949, p. 172. SYNT. Pouce carré, épais, plat, écarté, enflé; pouce droit, de la main droite; ongle, gras du pouce; gros, haut, long comme le pouce, de la grosseur du pouce; saisir qqc. entre le pouce et l'index; faire claquer son pouce; empreintes de pouce, du pouce gauche; blessure, écorchure au pouce; fracture du pouce; coup de pouce, geste, pression du pouce. b) P. anal. Pouce (du pied). Gros orteil. Sa façon de guérir les entorses en faisant une croix dessus avec le pouce du pied gauche (Claudel, Otage,1911, ii, 1, p. 250). c) P. méton. − Endroit de pièce de vêtement recouvrant cette partie de la main. Je me retourne, (...) vois le pauvre homme mettant ses gants. Ils étaient (...) décousus au pouce (Musset, Il ne faut jurer,1840, i, 1, p. 105). − Trace, marque de pouce. Pages les plus usées, noires de crasse, marquées çà et là d'un pouce énorme, au chapitre sans doute lu et relu (Bernanos, Nuit,1928, p. 37). 2. Loc. fam. − Manger (un morceau), déjeuner, dîner sur le pouce. Prendre un repas debout et sans couvert; p. ext., consommer à la hâte. Est pris d'une rage de tout apprendre, soupant sur le pouce et courant à tous les cours du quartier (Goncourt, Journal,1858, p. 513).Après un court repas froid, avalé sur le pouce (Van der Meersch, Empreinte dieu,1936, p. 130).Sur le pouce, loc. adv., vieilli. Rapidement. Je me mis à parler sur le pouce, comme ça, de la campagne de 1816 (Céline, Voyage,1932, p. 432).Tout de suite, sur le pouce, pour vider l'affaire en cinq-secs et qu'il n'en soit plus question (Duhamel, Cécile,1938, p. 41). − Mettre les quatre doigts et le pouce (vx). Se servir de façon impolie à table; au fig., manquer de délicatesse et de ménagement; agir carrément, sans hésiter. (Dict. xixeet xxes.). − Mettre, coucher (vx) les pouces. Cesser de résister, céder. Synon. capituler, se rendre, venir à jubé (vieilli, v. ce mot B).On se déteste, mais on se craint et chacun met les pouces, parce qu'on pense à mille circonstances où il serait fâcheux d'être brouillés (Goncourt, Journal,1860, p. 851).Oh! dans trois mois la Société aura couché les pouces. Nous en sommes à dix mille francs près (Maupass., Mt-Oriol,1887, p. 229). − Jouer du pouce. V. jouer I F 2. − Malade du pouce. V. malade I A 1. − Se tourner les pouces, tourner ses pouces (vx). Ne rien faire; vivre dans l'oisiveté. Synon. être les bras* ballants, les bras* croisés, se croiser les bras*, ne rien faire de ses dix doigts (s.v. doigt).Grandet tourna ses pouces pendant quatre heures, abîmé dans des calculs dont les résultats devaient, le lendemain, étonner Saumur (Balzac, E. Grandet,1834, p. 119).Non, je ne resterai pas longtemps à me tourner les pouces ici, pendant qu'ils continuent à torturer et à tuer (Triolet, Prem. accroc,1945, p. 304). − Serrer les pouces à qqn (vieilli). Contraindre par force à avouer. D'abord, il entendait savoir ce qu'il y avait eu entre Pauline et ce jeune homme. Et si elle avait été tant soit peu imprudente, il lui serrerait les pouces (Pourrat, Gaspard,1930, p. 153). − S'en mordre les pouces. V. mordre I A 3 a loc. − Donner un/le coup de pouce ♦ à la balance. Donner une chiquenaude au plateau de la balance pour falsifier le poids. P. métaph., p. ell. Le délit pesé en une seconde, avec un coup de pouce dans la balance (Goncourt, Journal,1853, p. 97). ♦ Au fig. Aider discrètement et efficacement, en particulier en faveur d'un avancement, d'une réussite. Synon. pistonner.Il paraît que c'est lui [Félix Faure] qui a donné le dernier coup de pouce à Zurlinden pour le mettre en ligne contre Brisson (Clemenceau, Vers réparation,1899, p. 176).P. ell. coup de pouce. V. coup B synt.Donner une impulsion favorisant le développement de quelque chose. Et il sembla que la divinité qui réglementait le climat du lieu donnât soudain à la marche naturelle des saisons un coup de pouce auguste (...) la chaleur arriva soudain (Hémon, M. Chapdelaine,1916, p. 66).Et voilà. Maintenant le ressort est bandé. Cela n'a plus qu'à se dérouler tout seul. C'est cela qui est commode dans la tragédie, on donne le petit coup de pouce pour que cela démarre, rien, un regard pendant une seconde à une fille qui passe et lève les bras dans la rue, une envie d'honneur un beau matin, au réveil, comme de quelque chose qui se mange, une question de trop qu'on se pose un soir... C'est tout (Anouilh, Antigone,1946, p. 165).Donner le coup de pouce (à un ouvrage). Achever (un ouvrage). Depuis quatre jours, je ne fais pas autre chose que de relire mes douze pages, auxquelles je trouve un coup de pouce à donner, si bien que je me trouve en retard d'une semaine (Flaub., Corresp.,1876, p. 380).Déformer légèrement la réalité de quelque chose. Donner un coup de pouce à l'histoire, à un texte. J'aurais pu donner, çà et là, dans mon récit, un coup de pouce pour produire l'effet, mais je respectais trop mon sujet pour chercher rien d'autre que la justesse de sentiment (Barrès, Serv. All.,1905, p. xiii). ♦ Arg. Étrangler Marius songeait à ces mots de Thénardier dont il entrevoyait la signification sanglante : Si vous me faites arrêter, mon camarade donnera le coup de pouce à l'Alouette (Hugo, Misér.,t. 1, 1862, p. 957). − BEAUX-ARTS. Coup de pouce (d'un artiste, d'un artisan). Manière d'exécuter une œuvre picturale ou sculpturale à l'aide du pouce. Sa face, maigre et allongée, semblait creusée par le coup de pouce d'un sculpteur puissant (Zola, Fortune Rougon,1871, p. 11).Chaque artiste a donc sa manière de peindre comme il a sa taille et son coup de pouce, et Rembrandt pas plus qu'un autre n'échappe à cette loi commune (Fromentin, Maîtres autrefois,1876, p. 324). 3. JEUX. Crier, demander, faire pouce et p. ell., pouce! interj. Lever le pouce pour demander à sortir momentanément du jeu ou à suspendre le jeu; au fig., abandonner la partie. Léo : Pouce! Pas de disputes (Cocteau, Parents,1938, iii, 4, p. 283). − Pouce cassé! [Pour marquer la reprise du jeu] Jessica : Tu joues? Hugo : Oui. Jessica : Alors, pouce : je ne joue plus. Ouvre la valise. Hugo : Pouce cassé : je ne l'ouvrirai pas (Sartre, Mains sales,1948, 3etabl., 1, p. 68). II.− MÉTROLOGIE A.− MÉTROL. ANC. 1. Avant l'établissement du système métrique, mesure de longueur équivalent au douzième du pied de roi, soit 2,7 cm. Autrefois, quand les hommes vivaient trois cents ans et plus, et avaient huit pieds de haut... − Avocat, passez au déluge; le pied n'avait alors que six pouces (Karr, Sous tilleuls,1832, p. 74). 2. Pouce d'eau, (de) fontainier (rare). Quantité d'eau s'écoulant, par une ouverture d'un pouce de diamètre, d'un réservoir situé un pouce au-dessus du niveau de l'eau, et équivalant à quatorze pieds environ par minute. Le nouveau pouce d'eau généralement adopté (...) fournit vingt mères cubes en vingt-quatre heures (Ac.1878).Des robinets coulant toujours, qui versent sur le plancher de marbre environ un demi-pouce d'eau (Lamart., Voy. Orient,t. 1, 1835, p. 196). B.− Unité de longueur anglo-saxonne (traduisant « inch ») équivalent à 25,4 mm. Le pouce se fractionne par 2, 4, 6, 8, 16, 24, etc. (Dew.Mes.1973).Dans les annonces de journaux, chacun d'eux indique sa taille, 5 pieds 9 pouces 1/2 (Taine, Notes Anglet.,1872, p. 53). C.− Loc. verb., surtout à la forme nég. ♦ Ne pas perdre un pouce de sa taille. Se tenir très droit. J'avais un mètre soixante-neuf de taille, il y a dix ans (...). Je me tiens droit et ne perds pas un pouce de cette taille honorable et médiocre (Duhamel, Notaire Havre,1933, p. 10). ♦ Ne pas perdre un pouce de terrain*, ne pas céder un pouce de. Ne pas céder sur un seul point; rester ferme dans ses convictions. Puisqu'on le prend avec moi sur ce ton-là, je ne céderai pas un pouce de mes prétentions. Je veux cinq cent mille francs, je les aurai (Sandeau, Sacs,1851, p. 56). ♦ Ne pas avancer, bouger, céder, reculer d'un pouce. Rester sur place; au fig., se maintenir sur ses positions. Chassebœuf (...) n'était nullement disposé à céder d'un pouce de son système, ni à répondre aux interruptions (Nerval, Fayolle,1855, p. 38).Je ne bougerais pas d'un pouce jusqu'à ce que la lumière revienne; je ne suis pas faite pour marcher à tâtons. J'ai besoin de savoir où je pose le pied (Bernanos, Joie,1929, p. 678). ♦ Ne pas... d'un pouce/un pouce de. Ne pas... du tout, ne pas... d'une semelle. Ne pas quitter qqn d'un pouce. Te connaissant depuis toujours, je ne m'y suis pas trompé : tu n'as pas changé d'un pouce (Estaunié, Ascension M. Baslèvre,1919, p. 139).Il a fallu que je promette (...) de ne plus obéir aux voyous... de plus quitter ma mère d'un pouce (Céline, Mort à crédit,1936, p. 136). ♦ (N'avoir) pas un pouce de + subst. concr. ou abstr.N'avoir pas la moindre quantité de. Synon. pas un brin de, une miette de, une once de, une parcelle de.Eva : Il était pauvre? Il n'avait pas de maison à la campagne, pas un pouce du sol français n'était le sien? (Giraudoux, Siegfried,1928, iii, 5, p. 145).Un grand voyou, lui-même tellement tatoué sur toute la peau qu'il ne lui en restait plus un pouce de libre (Van der Meersch, Invas. 14,1935, p. 164). − Loc. adv. Pouce à/par pouce. Progressivement et de façon opiniâtre. Synon. pied* à pied, d'arrache-pied*.Il émit (...) une quantité d'ordres catégoriques. Pouce à pouce, la Notre-Dame avança, comme un coin émoussé dans un bois dur (Hamp, Marée,1908, p. 12).On fouilla pouce par pouce la métairie et le château des Chapioux : rien, rien (Pourrat, Gaspard,1925, p. 120). III.− Au fig. pop. Et le pouce (!) [Dans la lang. parlée, pour rectifier une sous-estimation] Et encore plus, et bien davantage, bien plus que vous ne croyez. La mère Bavoureau a soixante ans? − Oui, et le pouce! (France1907).[La durée] s'éternise. 8h.50, et le pouce (Arnoux, Double chance,1958, p. 198). Prononc. et Orth. : [pus]. Homon. pousse, formes de pousser. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1 a) Ca 1130 pouz « le plus fort des doigts » (Lois G. le Conquérant, éd. J. E. Matzke, 10, § 1); b) loc. 1718 y mettre les quatre doigts et le pouce « se servir avidement et malproprement d'un plat » (Ac.); 1790 coucher les pouces « s'avouer vaincu, céder » (Jugement de M. Necker in Braesch, Le Père Duchesne d'Hébert, p. 205 ds Quem. DDL t. 19); 1790 mettre les pouces « id. » (Jean Bart, numéro 80, p. 5, ibid.); 1829 prendre un petit verre sur le pouce (Vidocq, Mém., t. 3, p. 244); 1834 tourner ses pouces (Balzac, E. Grandet, p. 11); 1893 se tourner les pouces (Courteline, Boubouroche, p. 277); 1847 donner le coup de pouce « étrangler » (Balzac, Cous. Pons, p. 232); 1872 donner le coup de pouce à balance (Larch., p. 104); 1862 donner le coup de pouce « arranger, forcer, exagérer légèrement la réalité » (Flaub., Corresp., p. 66); 1853 coup de pouce dans la balance (Goncourt, loc. cit.); 1874 donner le coup de pouce à un roman, à un dessin « donner la dernière main à un ouvrage, le finir, le parachever » (Lar. 19e); 1883 pouce! interj. (empl. par les enfants) servant à se mettre momentanément hors du jeu (Delvau Suppl.); 2. a) fin xiiies. peuce « premier orteil du faucon » (trad. du Traité de fauconnerie de l'emp. Frédéric II ds Z. rom. Philol. t. 46, p. 276); 1845 « doigt postérieur des oiseaux » (Besch.); b) 1549 le poulce du pied (Est.); 3. a) ca 1140 pouz « mesure de longueur, 1/12 du pied » (Pèlerinage Charlemagne, éd. Favati, 811); b) loc. av. 1654 pas un pouce de terre « pas la moindre propriété territoriale » (Guez de Balzac, Le Romain ds Littré); 1831 ne pas céder un pouce de terre (Michelet, Hist. romaine, t. 2, p. 192); 1836 ne pas reculer d'un pouce (Stendhal, L. Leuwen, t. 1, p. 248); c) 1842 et le pouce! (Balzac, Début vie, p. 314). Du lat. pollicem, acc. de pollex « pouce »; les formes sans e final en 1 a et 3 a étant dues à une syncope précoce de la pénultième atone. Coucher (var. mettre) les pouces, peut-être p. allus. à la coutume antique de diriger le pouce vers le bas pour signaler la défaite acceptée ou la sanction de la défaite par la mise à mort. Sur le pouce, l'expr. fait sans doute réf. au rôle des pouces dans le maniement du couteau et du pain tranché ainsi qu'à la nourriture rapidement « poussée ». Tourner ses pouces, cf. 1611 les poulces à la ceinture « oisif » (Cotgr.); 1862 malade du pouce « fainéant qui refuse le travail sous prétexte de maladie » (Larch., p. 259). Donner le coup de pouce, par suite de l'infl. homon. du verbe pousser. 3 c en raison de son domaine d'application (prix, commerce en partic.), doit peut-être être rapproché de certaines expr. de l'anc. lang. du commerce telles que poulce sur aune (1606, Nicot, s.v. fust), pouce et aune (1723, Savary, s.v. bon d'aunage), (marché fait) au pouce de la chandeille « vente aux enchères limitée en durée par une marque faite sur une chandelle, qui devait se consumer jusqu'à une pouce de sa base » (1450 a un poch de candeille alumée, Cartulaire de l'Abbaye de Flines, fo504 ro). Fréq. abs. littér. : 1 511. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 2 646, b) 2 294; xxes. : a) 1 653, b) 1 944. DÉR. Poucier, subst. masc.a) Doigtier qui protège le pouce; spéc., doigtier servant à protéger le pouce dans certaines professions. Les pastourelles du XIIIesiècle (...) les montrent [les bergers] en des accoutrements ridicules (...) avec (...) des moufles sans poucier (Faral, Vie temps st Louis,1942, p. 121).b) Serr. Pièce de loquet servant à ouvrir une porte, sur lequel on appuie avec le pouce pour soulever la clenchette (d'apr. Martellière, Gloss. Vendômois, 1893, p. 252). Loquet à poucier (Chabat1881).− [pusje]. Homon. poussier. Att. ds Ac. dep. 1835. − 1resattest. a) 1530 « doigtier pour préserver le pouce, dans certains métiers » (Palsgr., p. 220); b) 1765 serr. (Encyclop.); de pouce, suff. -ier*. BBG. − Quem. DLL t. 2, 14, 19, 27 (s.v. appui du pouce). |