| PORTIER, -IÈRE, subst. A. − [Désigne une pers.] 1. Personne qui a la charge d'ouvrir, de fermer et, généralement, de surveiller l'entrée principale d'un édifice. a) Vieilli. [Dans une propriété privée] Synon. usuel concierge, gardien.Loge du portier; maison à, sans portier; jeter son nom au portier; interroger la portière. Après une demi-heure de recherches dans la maison sans portier, l'avoué, arrivé au cinquième étage, poussa un cri de joie en lisant le nom de Larochelle écrit à la craie sur une méchante petite porte (Champfl., Bourgeois Molinch.,1855, p.255).Administrée par le propriétaire lui-même (...) notre maison (...) était honnête (...). Un soir, il avait tiré le cordon lui-même plutôt que de réveiller son portier (A. France, Pt Pierre,1918, p.108): 1. Il travaillait encore, quoiqu'il eût cinquante-huit ans; mais cinquante-huit ans, c'est le plus bel âge des portiers; ils se sont faits à leur loge, la loge est devenue pour eux ce qu'est l'écaille pour les huîtres, et ils sont connus dans le quartier!
Balzac, Cous. Pons,1847, p.44. ♦ [Considéré comme représentant d'une classe soc. inférieure] Peuple de portiers; style de portier; lectures de portière. Offrir du café au lait, ce n'est pas une faute, c'est un ridicule. Il n'y a plus que les portières qui prennent cette mixtion populacière (Balzac, OEuvres div.,t.2, 1830, p.45).Empl. adj. Qui manque de distinction, populaire. Je serais trop sévère pour votre style, que je trouve un peu portier. J'ai du mal à faire, etc., pour: J'ai de la peine à faire, etc. (Stendhal, Corresp.,1829, p.509). − P. méton. Personne bavarde et souvent médisante. ♦ [En fonction de déterm. introd. par de] Conversations, racontars, ragots de portier/portière. MlleFischer vivre avec un jeune homme!... répéta l'employé. C'est des cancans de portière, ne parlons pas si légèrement de la cousine d'un conseiller d'État qui fait la pluie et le beau temps au ministère (Balzac, Cous. Bette,1846, p.51). ♦ [En apostrophe] :
2. dardard, à part: Qu'est-ce qu'il a donc? (Haut.) Quant au salon, je voulais vous consulter... pontbichet: As-tu fini, portier? dardard: Mais, beau-père... pontbichet, gouaillant:; Ah çà! galopin, tu tiens donc toujours à épouser ma fille?
Labiche, J. homme pressé,1848, 7, p.362. − Au fém. Épouse du portier. Pas de Monsieur Fabre, rue Saint-Dominique (...)! J'ai parlé au portier et à la portière, qui est une belle forte femme, ils ne connaissent pas ça! (Hugo, Misér.,t.1, 1862, p.958). − P. anal., en appos. avec valeur d'adj. Chien, dogue portier. L'un des plus curieux de ces masques [de fourmis] est celui dont s'affuble le soldat concierge ou portier (Maeterl.,Vie fourmis,1930, p.200). b) Gén. au masc. [Dans un établissement public] Préposé chargé de surveiller les entrées et les sorties et d'assurer divers contrôles. Portier d'ambassade, de banque, de cimetière, de collège, de préfecture, de prison. Nous avions remis nos passeports au portier de l'hôtel, parce qu'il les exigeait (Green, Journal,1939, p.201). − Vx, au masc. Portier de la comédie. Membre de la troupe auprès duquel les spectateurs devaient s'acquitter du prix des places à l'entrée du théâtre. Devant lui chevauchait tant bien que mal le portier de la comédie, déterminé gaillard habitué à jouer des poings et à se débattre contre les assauts de la foule (Gautier, Fracasse,1863, p.411). − ARM. Portier-consigne. Sous-officier du génie, du rang d'adjudant, qui était autrefois portier de l'avancée d'une place forte. Quand les portes de la place étaient fermées après onze heures, ils faisaient le tour des remparts sans vouloir attendre l'arrivée du portier-consigne, le père Lebrun, pour leur ouvrir (Erckm.-Chatr., Hist. paysan,t.1, 1870, p.387). c) [Dans une communauté ou un édifice relig.] Portier de la mosquée, du séminaire, du temple. Du malvoisie que le père portier du couvent m'a fait une fois boire un soir (Claudel, Soulier,1929, 4ejournée, 1, p.847).En appos. avec valeur d'adj. Père portier; mère, soeur portière. Pendant trente jours (...) sa portion [du trappiste mort] est servie, comme de coutume, mais le frère portier la distribue aux pauvres (Huysmans, En route,t.2, 1895, p.246). ♦ P. anal., littér. Le portier éternel, des élus, du paradis. Saint Pierre. La route est vide où s'en venaient les âmes; Toutes cuisent, sitôt la mort, aux grandes flammes; Et le portier divin, tant harcelé jadis, Laisse pendre les clefs aux gonds du paradis! (Leconte de Lisle, Poèmes barb.,1878, p.324). − Au masc. [Avant le concile de Vatican II] Clerc qui a reçu le premier des ordres mineurs (d'apr. Foi t.1 1968). 2. P. métaph. Charles Morice, depuis dix ans, est le portier du symbolisme. Il est là, sur le seuil, et c'est par lui que les jeunes entrent dans la vie littéraire (Renard, Journal,1891, p.96).Depuis la fin du XVIIIesiècle jusqu'au Congrès de Berlin, (...) [l'Angleterre] a défendu pied à pied contre la poussée slave l'intégrité de l'Empire Ottoman, ce vieux portier de la Méditerranée orientale (Morand, Route Indes,1936, p.152). 3. P. anal., au masc., FOOTB. Synon. moins usuel de gardien* de but.L'équipe de Paris qui jouera dimanche prochain contre celle de la Normandie, aura la bonne fortune de recevoir l'appui du merveilleux portier Rudi Aiden (L'OEuvre,6 mars 1941). B. − Au masc. [Désigne un objet] 1. Portier (électrique). Télécommande d'ouverture automatique d'une porte. Nécessaire pour installer soi-même un portier téléphonique (Catal. Manufrance,1975, p.807). 2. COMM. ,,Personnage en bois décoré personnalisé à la marque, disposé devant la porte du point de vente`` (Cham. 1969). Prononc. et Orth.: [pɔ
ʀtje], fém. [-jε:ʀ]. Ac. 1694, 1718: -ier, -iere; dep. 1740: -ier, -ière. Étymol. et Hist.1. 1119 «celui qui garde l'entrée de quelque chose» (Philippe de Thaon, Comput, 1050 ds T.-L.: jenvier signifïet portier); ca 1160 «celui qui garde la porte» (Eneas, 2561, ibid.); ca 1200 subst. fém. (Moralités sur Job, 301, 29, ibid.); 2. 1688 «dans l'Église primitive, clerc qui a reçu le premier des quatre ordres mineurs» l'ordre de portier (Rich. t.2); 3. a) id. «moine qui a soin d'ouvrir la porte d'un couvent» (ibid.); 1694 Le Frere portier (Ac.); b) 1688 subst. fém. (Rich. t.2); 1694 la soeur portiere (Ac.). Du lat. tardif portarius «portier», dér. de porta «porte». Fréq. abs. littér.: 857. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 1240, b) 3016; xxes.: a) 650, b) 578. Bbg. Gougenheim (G.). Lexicol. du 19es.: portier et concierge, client, mascotte. Fr. mod. 1946, t.14, pp.249-251. |