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POING, subst. masc.
A. − Main fermée.
1. [Le poing dans son aspect] Poing droit, gauche; poings amaigris, crasseux, enflés, ensanglantés, gantés, meurtris, velus. C'était un gros charcutier qui avait des poings de géant (Zola, Fortune Rougon, 1871, p.224):
1. ... des bras énormes, des poings disproportionnés, où, bleu pâle, grimpaient des tatouages, des coeurs, des serpents et des entrelacements... Aragon, Beaux quart., 1936, p.172.
[En partic., p.réf à ses dimensions] Il avait un trou dans le ventre, on y aurait mis les deux poings (Maupass., Contes et nouv., t.1, Hautot, 1889, p.267).
Gros comme le poing. La loupe qui lui bouchait l'oeil droit était maintenant grosse comme le poing (A. France, Vie fleur, 1922, p.454).[Pour ironiser sur la petitesse d'un individu ou d'un animal] Je vous demande un peu!... Un petit chien gros comme le poing! et gentil, et doux (Courteline, Gend. sans pitié, 1899, 2, p.162).
2. [Le poing dans ses mouvements]
a) [Le poing comme aboutissement de l'action qui consiste à fermer la main autour de qqc.] Il (...) lève trois hommes au bout du poing (Flaub., Champs et grèves, 1848, p.340).Je serrai dans mes poings les cinq ou six journaux que je venais d'acheter au dernier kiosque ouvert de la ville (Abellio, Pacifiques, 1946, p.39):
2. Il reste, pour une enfant fragile et mal entraînée comme Kate, même au poing d'un Jos-Mari, le malaise du mauvais réveil et de l'heure, l'angoisse, le vertige que donne par intervalles, à des distances trop profondes, l'appel de la ténèbre, la rumeur abîmée d'un torrent. Peyré, Matterhorn, 1939, p.214.
Prendre à plein poing. Empoigner. Il prit à plein poing la chandelle et la posa sur la cheminée avec un frappement si violent que la mèche faillit s'éteindre et que le suif éclaboussa le mur (Hugo, Misér., t.1, 1862, p.941).
MAR. Noeud à plein poing. ,,Boucle double faite dans un cordage rapidement pour servir de marque ou pour isoler une faiblesse du filin`` (Galopin, Lang. mar., 1925, p.31).
Au poing. Dans la main fermée. Arme, couteau, drapeau, fer, fusil, glaive, hache, pistolet, revolver, sabre au poing. Peindre comme un halluciné, la bougie au poing, dans cette clarté pâle que ses gestes effaraient (Zola, L'OEuvre, 1886, p.375).Je suis celui qui marche, une vipère au poing (H. Bazin, Vipère, 1948, p.276).
b) [Le poing servant à porter]
Présenter le poing à une dame. Présenter sa main à une dame pour la conduire. Sigognac, s'inclinant, se hâta de présenter le poing à l'Isabelle, qui appuya sur la manche râpée du baron le bout de ses doigts délicats, de manière à donner à cette légère pression la valeur d'un encouragement (Gautier, Fracasse, 1863, p.57).
FAUCONN. L'aîné de la maison de Chastellux serait chanoine honoraire, et pourrait assister aux offices, armé de toutes pièces, avec un surplis par-dessus, et tenant son faucon sur le poing (Barante, Hist. ducs Bourg., t.4, 1821-24, p.412).
Oiseau de poing. ,,Oiseau de proie qui, étant réclamé, revient sans leurre sur le poing du fauconnier`` (Baudr. Chasses 1834). Porter un oiseau de poing, chasser avec un oiseau de poing (Baudr. Chasses 1834).
3. [Le poing comme instrument d'actions violentes] Poing brutal, puissant, vigoureux; cogner, frapper, heurter, taper du poing; envoyer son poing dans la figure de qqn; se servir de ses poings. Tu veux mon poing sur la gueule? demanda le gardien (Malraux, Cond. hum., 1933, p.389).Je ne peux pas leur faire courir des dangers, avec leurs seuls poings pour armes (Triolet, Prem. accroc, 1945, p.365):
3. Moi, j'assomme. Il avait fermé les poings, des poings gras, velus aux phalanges, et il les balançait, heureux de les voir énormes. Zola, E. Rougon, 1876, p.77.
Avoir le poing sur la gorge (vieilli). Être menacé. Quand on serait les maîtres, on dicterait des lois aux patrons, ils auraient à leur tour le poing sur la gorge (Zola, Germinal, 1885, p.1348).
Coup de poing. Coup porté avec le poing. Assener, donner, envoyer un coup de poing dans le dos, dans l'estomac, dans la figure. Souvent, les combattants se mettent en colère et s'assènent des volées de coups de poing au milieu des «hou» de la foule (Morand, Londres, 1933, p.150).
Faire le coup de poing. Se mêler à une bagarre. À la rente, on aurait dit une rixe, un paquet central, acharné et faisant le coup de poing (Zola, Argent, 1891, p.333).
Coup(-)de(-)poing*.
Opération coup de poing. Opération de police déclenchée par surprise ayant un objectif dissuasif bien précis (répression contre le petit banditisme, lutte contre la drogue, contre l'ivresse au volant, etc.). Une opération «coup de poing» menée en mars a permis de vérifier cinquante-quatre trains en une seule nuit (L'Express, 8 sept. 1977, p.58, col. 1).
Droit du poing (vx, au fig.). Droit du plus fort. En Allemagne (...) jusque sous Maximilien règne le droit du poing c'est-à-dire l'appel à la force et l'habitude de se faire justice soi-même (Taine, Philos. art, t.1, 1865, p.127).
Jouer des poings. Se battre. Habitué à jouer des poings et à se débattre contre les assauts de la foule (Gautier, Fracasse, 1863, p.411).Au fig. Du moment qu'on n'était plus collé chacun à sa place pour l'existence entière, et qu'on pouvait avoir l'ambition de prendre la place du voisin, pourquoi donc n'aurait-on pas joué des poings, en tâchant d'être le plus fort? (Zola, Germinal, 1885, p.1277).
[Accompagnant, dans une prise de parole, l'énoncé d'une opinion que l'on veut ainsi renforcer] Taper du poing sur la table. Quand nous sommes sortis de là, tu tapais du poing sur la table et tu criais: «L'autorité! Je ne comprends plus que l'autorité!» (Duhamel, Combat, 1939, p.55).
4. [Le poing dans sa gestuelle]
a) [Le geste du poing révélant un sentiment, une émotion puissante (la colère, l'inquiétude) qui précède ou contient l'acte violent] Laure serra les poings. Ce n'était pas la première fois que, sous les regards d'un homme, elle éprouvait un sentiment d'exaspération et de révolte (Daniel-Rops, Mort, 1934, p.6).Je me mordis le poing de rage pour ne pas l'insulter (Drieu La Roch., Rêv. bourg., 1937, p.280).
b) [Le geste du poing considéré comme un signe]
[pour menacer] Les hommes parlent, menacent, ragent, tendant le poing vers les quartiers riches (Morand, Londres, 1933, p.124).C'étaient eux, les Allemands, qui étaient emprisonnés là-dedans. On leur montrait le poing, on leur criait des railleries, des injures, on se vengeait de quatre années d'une épouvantable tyrannie (Van der Meersch, Invas. 14, 1935, p.356).
[pour manifester sa fraternité de gauche dans une lutte politique] Les deux sortent du rang, saluent du poing et s'en vont sans phrases (Camus, Révolte Asturies, 1936, ii, 1, p.412):
4. Avec le même mouvement que celui de fusils qui se lèvent, il lève le poing pour le salut du front populaire. Malraux, Espoir, 1937, p.652.
[pour manifester son défi] Poings sur les hanches. Sa colère d'elle-même tomba, et, les deux poings sur les hanches, il considérait les bourgeois d'un air mélancolique et gouailleur (Flaub., Bouvard, t.1, 1880, p.51).Je me campai le poing sur la hanche et jurai comme un mécréant (A. France, Bonnard, 1881, p.387).
Au fig. Dormir à poings fermés. Dormir très profondément. Christophe (...) se jeta sur son lit, et dormit aussitôt, à poings fermés (Rolland, J.-Chr., Révolte, 1907, p.580).
B. − Main (et poignet). Un grand jeune homme qu'on emmenait les poings liés, tandis que ses parents, derrière, essayaient de le défendre (Van der Meersch, Invas. 14, 1935, p.224).Deux agents l'emmenèrent enfin, menottes toujours aux poings (Simenon, Vac. Maigret, 1948, p.30).
Pieds et poings liés. L'homme, pieds et poings liés, était couché sur la terre, parmi des vomissures (Pourrat, Gaspard, 1931, p.144).P. exagér. Pieds et poings liés. Impuissant. Vous étiez, il me semble, d'une imprudence extraordinaire?... Vous vous livriez à ces inconnus, pieds et poings liés (Romains, Hommes bonne vol., 1939, p.152).
Couper, trancher le poing (vieilli). Tu coupas le poing à mon maître, je vais te couper le tien (Barante, Hist. ducs Bourg., t.4, 1821-24, p.261).La première victime de Gilles fut un tout petit garçon dont le nom est ignoré. Il l'égorgea, lui trancha les poings, détacha le coeur, arracha les yeux, et il les porta dans la chambre de Prélati (Huysmans, Là-bas, t.2, 1891, p.9).
Prononc. et Orth.: [pwε ̃]. V. poignée. Homon. point1 et 2, formes de poindre. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist.1. Ca 1050 puing «main fermée» (Alexis, éd. Chr. Storey, 348); 2. a) fin xiies. considéré comme symbole de pouvoir, de puissance (Béroul, Tristan, éd. E. Muret, 275: as poinz tenir); b) 1566 venir aux poings «se battre» (H. Estienne, Apologie pour Hérodote, chap.22, éd. P. Ristelhuber, t.2, p.37); c) 1680 montrer le poing à qqn (Rich.). Du lat. pugnus «poing». Fréq. abs. littér.: 3389. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 1499, b) 6970; xxes.: a) 7308, b) 5003.