| * Dans l'article "PLAT1, PLATE,, adj., adv. et subst. masc." PLAT1, PLATE, adj., adv. et subst. masc. I. − Adjectif A. − [Qualifie une chose concr.] 1. [En considérant la surface de qqc.] a) Qui n'est ni concave, ni convexe et ne présente ni creux, ni reliefs (ou peu prononcés). Synon. plan1.La photographie est l'art qui, sur un fond plat, avec des lignes et des teintes, reproduit (...) sans erreur possible, le contour et le modelé de l'objet qu'elle doit imiter (Taine, Philos. art,t.1, 1865, p.23).De grands murs plats, vastes, sans arêtes, sans reliefs, sans autre aspérité que la rudesse naturelle de la pierre [la cité de Carcassonne] (Hourticq, Hist. art,Fr., 1914, p.94): 1. C'est par la pression plus ou moins forte, plus ou moins directe, que les diverses parties d'un corps exercent sur notre peau, lorsque nous l'y appliquons, que nous reconnoissons si ce corps est plat, ou arrondi, ou diversement anguleux...
Cuvier, Anat. comp.,t.2, 1805, p.534. SYNT. Surface plate; façade plate; rocher plat; nuage plat; chapeau à bord plat; vis à tête plate; tuile plate; fond plat d'un bateau; angle* plat. ♦ [P. méton.] La légère passée de vent froid (...) soudain traversa la route d'un saut (...) le sable plat de la route ondula comme les plis d'une étoffe (Gracq, Beau tén.,1945, p.183). ♦ Bateau plat. Bateau à fond plat, la partie plate des varangues étant très importante. Je reçus (...) l'ordre de m'embarquer sur un des bateaux plats que l'on essayait en mer (Vigny, Serv. et grand. milit.,1835, p.169). − En partic. [En parlant de parties du corps] Qui présente peu de modelé. J'en ai passé, moi, des heures à avoir une plaque de fer blanc dans le dos, pour me le faire plat (Goncourt, Journal,1863, p.1345).Imaginerait-on même qu'un de leurs sujets de jalousie contre les Européens est de ne pouvoir, pour cause de visage trop plat, user d'un pince-nez (Loti, Trois. jeun. MmePrune,1905, p.103): 2. Il avait une tête aplatie, le long de laquelle, sur une joue, était aplatie une mèche de cheveux gris, et les branches de ses lunettes bleues aplatissaient tellement ses tempes, déjà plates, que l'ensemble était celui d'un cahier.
Jammes, Mém.,1921, p.51. SYNT. Crâne, front, nez, ongles, pieds, ventre plat(s); face plate; lèvres, oreilles plates; profil, visage plat comme un carlin (v. carlin2); insecte à dos plat; tête plate de la vipère. Cheveux plats, mèches plates. Non ondulé(e)s, non frisé(e)s. Elle rejette, d'un revers de main, ses cheveux légers et plats qui se défont en mèches fines (Colette, Vagab.,1910, p.69).−Sont-ils bêtes, les gens, avec leurs histoires de cheveux crépus (...) C'est la chaleur qui les fait gondoler ! −D'abord, pourquoi se glorifier d'un poil plat, comme les orangs-outangs? (Morand, Magie noire,1930, p.101).Loc. Avoir le ventre plat. N'avoir pas mangé depuis longtemps. Synon. avoir le ventre creux*.Les bougres n'en pouvaient plus, avaient le ventre plat, les dents longues! (Moselly, Terres lorr.,1907, p.43).♦ [À propos d'une femme] Gorge, poitrine, reins plats; p.méton., être plate (comme une limande/une planche/une punaise). N'avoir ni poitrine ni fesses. Il n'était plus question de la vierge exsangue et plate, sans sexe, dont ils faisaient l'idéal de la beauté humaine (Zola, Fécondité,1899, p.54).Avec son visage régulier, ses bandeaux à la vierge, sa taille trop plate pour la mode d'alors, Madame de Vaugiraud semblait triste et surannée (Gyp, Souv. pte fille,1928, p.191). ♦ [À propos d'un cheval] Il n'est pas beau, mon cheval. Il a trop de noeuds et de salières, les côtes plates, une queue de rat et des incisives d'Anglaise (Renard, Hist. nat.,1896, p.94).[Le cheval] peut avoir un bon dessus, un beau carré de derrière, être plat dans ses arceaux (poitrine sans ampleur) (Larousse du cheval, Paris, 1975, p.188). − P. anal. [En parlant d'une peinture] Qui ne donne pas une impression de relief, qui manque de perspective, de modelé. Ces portraits plats, dessinés et non modelés de Raphaël (Goncourt, Journal,1860, p.817).Ses animaux plats, sombres ou parfois blancs [du douanier Rousseau], mais si souvent couleur d'apparitions, nous les retrouvons dans les «primitifs» américains (Malraux, Voix sil.,1951, p.510). b) Dont la surface est plane et horizontale, qui est dans un plan. Les galeries et les salles qui conduisent à la salle du sarcophage ont des plafonds plats et ne dépassent pas une hauteur de huit ou dix pieds (Gautier, Rom. momie,1858, p.174).Oh ! Villes d'Orient, du Midi; villes aux toits plats, blanches terrasses, où, la nuit, les folles femmes viennent rêver (Gide, Nourr. terr.,1897, p.224). ♦ P. anal. Il se tenait admirablement en selle (...). La ligne de ses larges épaules, malgré la blessure, restait plate comme le fléau d'une balance qui a tout résolu (Giono, Angelo,1958, p.184). − En partic. ♦ [En parlant d'une étendue de terrain ou p.méton. de ce qui a rapport à un tel terrain] Anton. accidenté, montagneux, montueux.Champ, pré, rivage, terrain plat; île, plage plate; horizon, paysage plat; vue plate. Je regarde la campagne qui nous environne: une enfilade de plaines crayeuses (...), un pays plat, triste, grêle, la Champagne pouilleuse! (Huysmans, Soir. Médan,Sac au dos, 1880, p.113).Nous pouvions d'ailleurs aller jusqu'à Nevers par cette petite route plate, sans nous appuyer toutes les côtes de la grand'route (Alain-Fournier, Corresp.[avec Rivière], 1912, p.327).V. accidenté ex. 3, bossuer ex. 5: 3. ... il est allé sur le plateau (...). C'est une étendue toute plate à perte de vue. C'est de l'herbe, et de l'herbe, et de l'herbe, sans un arbre. C'est plat. Quand on est debout, là-dessus et qu'on marche, on est seul à dépasser les herbes.
Giono, Regain,1930, pp.61-62. Le plat pays. La Flandre. V. pays1A 3.Vieilli. Plat pays. La campagne par opposition aux villes, aux places fortes. [On] fait savoir aux habitants du plat pays qu'ils doivent assister et secourir les soldats impériaux, soit déserteurs, soit égarés (Le Moniteur,t.2, 1789, p.47).Il y a eu des siècles rouges, des siècles où nos plats pays, comme on disait, n'ont cessé de clamer de douleur, les femmes violées, les enfants écrasés, les hommes pendus (Zola, Terre,1887, p.79).HIPP. Course plate. Course de chevaux de galop sur un terrain sans obstacles. Synon. course de plat (infra); anton. course* d'obstacles, steeple-chase.La société d'encouragement pour l'amélioration des races de chevaux en France, dite société mère, a la haute main sur l'ensemble des courses plates, disputées au galop. La société des steeple-chases de France donne le «la» pour toutes les courses à obstacles (Zitrone, Courses,1962, p.41).♦ [En parlant d'une étendue d'eau] Sans remous, sans vague. Dans une mer lourde, plate et blanche, (...) le patron (...) laissait tomber des filets plombés (Fromentin, Dominique,1863, p.165).Habitants d'un pays aux courants calmes, les Hollandais affectionnent par exemple la course en ligne, discipline qui se pratique en eaux plates (Jeux et sports,1967, p.1538).Calme* plat. 2. P. ext. [En considérant la surface et la section de qqc.] Qui présente une surface (à peu près) plane et dont une dimension, hauteur, épaisseur est faible par rapport aux autres (v. aplati, mince). Au bord du lac On s'amusa à faire des ricochets Avec des cailloux plats (Apoll., Alcools,1913, p.69).Un cadavre de cheval, plat comme s'il avait passé sous le rouleau compresseur (Montherl., Bestiaires,1926, p.541).Une abeille danse dans le grand rayon plat qui passe au joint des volets (Giono, Gd troupeau,1931, p.155).V. carnet ex. 1, illimité ex. 5, bolduc ex. 2: 4. Nous édifions un barrage [sur le ruisseau] avec de grosses pierres et formons ainsi une cuvette où nous nous étendons côte à côte, nous faisant plats comme des limandes pour avoir de l'eau sur tout le corps.
T'Serstevens, Itinér. esp.,1933, p.83. SYNT. Boîte, lanière, fleur, herbe plate; colis, paquet, flacon, gâteau, pain, livre, bulbe plat; bâtiment plat; ville plate; souliers à talons plats; disque plat de la lune; plat comme une galette. ♦ P. ell. Souliers, chaussures plat(e)s. Chaussures à talons plats. Je me prétendais modèle ou putain. Avec ma robe fanée, mes gros bas, mes souliers plats, mon visage sans art, je ne trompais personne (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p.269).Pied-plat*. ♦ Loc. Avoir la bourse plate. Ne pas avoir d'argent. Il n'était pas encore hors de France qu'il tomba malade. Sa bourse était plate, messieurs les aubergistes l'ayant vidée sans peine (A. France, Génie lat.,1909, p.181).Bourse plate commune; bourse commune quand elle prend de l'embonpoint; cela va de soi; la fortune ne change pas les traditions des mauvais jours (Arnoux, Roi,1956, p.73).[Dans une appellation moqueuse] Elle descendit l'escalier en l'insultant: «Comte, oui! Comte de la bourse plate!» (Montherl., Célibataires,1934, p.828). ♦ [En parlant d'une pers., d'un animal] Très maigre. Gavard compromettait sa graisse, il finirait plat comme une punaise (Zola, Ventre Paris,1873, p.806).Toby-Chien: Vis-tu seulement? Tu es si plat! Tu as l'air d'une peau de chat vide (Colette, Dialog. bêtes,1905, p.7). − [Pour différencier une chose d'autres choses de même nature mais de forme, de caractéristiques différentes] ♦ TECHNOL. Clef plate (opposée à clef à douille), lime plate (opposée à lime ronde ou queue de rat, lime carrée, lime triangulaire ou tiers-point), noeud* plat, pile plate (opposée à pile ronde), vaisselle* plate (opposée à vaisselle montée). Sur ce bureau (...) les équerres, les compas, la règle plate en forme de T (Bourget, Disciple,1889, p.67).Toutes les fabrications où l'on désire à la fois une fleur fine et une épaisseur réduite exigent des peaux exemptes de défauts et dites «plates», c'est-à-dire présentant une épaisseur faible par rapport à leur surface (Bérard, Gobilliard, Cuirs et peaux,1947, p.13).Nous citerons: −les wagons plats, destinés au transport de charges indivisibles lourdes ou encombrantes (...). [Les] côtés, ou bien (...) possèdent des bords, généralement rabattants, qui constituent des parois de faible hauteur (...) ou bien (...) sont pourvus de supports recevant (...) des montants amovibles (Bailleul, Matér. roulant ch. de fer,1951, p.98). Rem. Vaisselle plate a aussi le sens de «vaisselle d'argent», plat est ici à rapprocher de l'esp. plata «argent». ♦ ANAT. Os plat (v. os ex. 1). Une autre espèce [de muscles] est celle des muscles plats, à fibres parallèles: ils forment des espèces de membranes charnues (Cuvier, Anat. comp.,t.1, 1805, p.135). ♦ ZOOL. Les bancs naturels de l'Huître plate sont localisés au nord de la Loire. Les Portugaises, ovipares, préfèrent les eaux limoneuses de l'embouchure des fleuves (Zool.,t.1, 1963, p.1111 [Encyclop. de la Pléiade]).Les Pleuronectiformes ou Poissons plats ont le corps aplati, et les yeux du même côté, ils vivent couchés sur le flanc sur les fonds sablo-vaseux (Zool.,t.3, 1972, p.1044 [Encyclop. de la Pléiade]).Les Plathelmintes, ou Vers plats ou Platodes ont une importance biologique ou économique. Certains (...) ont été utilisés pour des études sur la régénération. D'autres (...) sont des parasites de l'homme et des différents animaux domestiques (Encyclop. Sc. techn.t.81972, p.963). − En partic. ♦ [En parlant d'un objet creux] À fond plat et peu profond. Plat plat; baquet, panier plat; casquette plate. Vous n'oublierez pas au moins de me donner mes oeufs à la crème dans une assiette plate? (Proust, Swann,1913, p.57).C'était un de ces chapeaux plats, de paille blanche à ruban noir, de l'espèce de ceux qu'on appelle communément: canotiers (Gide, Caves,1914, p.777).Un long bureau garni de tiroirs plats qui renfermaient les cartes (Peisson, Parti Liverpool,1932, p.109). ♦ Qui ne forme pas d'épaisseur, de volume important. Pli plat (v. pli1I A 1). Coiffure plate; bandeaux, cheveux plats. Cheveux non bouffants, plaqués sur la tête. Cette éducation consistait à apprendre au brave Auvergnat à jouer au boston (...), à relever ses cheveux au lieu de les tenir plats (Balzac, Employés,1837, p.50).Linge plat. Linge ne comportant pas de fronces, de pinces comme les draps, les torchons, les mouchoirs. L'apprentie (...) repassait à côté d'elle du linge plat, des bas et des mouchoirs (Zola, Assommoir,1877, p.505).Vêtement plat. Vêtement sans fronces ni plis, qui suit la ligne du corps. Corsage, jupe plat(e). Eh! Mon Dieu, aurai-je des manches plates ou bouffantes? (Leclercq, Prov. dram.,Manie prov., 1835, 4, p.30).Il (...) appréciait de haut, en connaisseur (...) la grâce à lignes fuyantes qu'Edmée habillait si bien de robes plates et de tuniques glissantes (Colette, Fin Chéri,1926, p.20).Couture, broderie plate. Couture, broderie dont le relief est peu marquée. Loc. Battre à plate couture*. ♦ Dans loc. À main* plate. [P. méton.] Le barman (...) asséna la monnaie rendue d'un coup plat de main comme s'il tuait une mouche (Hamp, Champagne,1909, p.213). B. − Au fig. 1. [Caractérise une sensation ou ce qui procure une sensation] a) [En parlant d'une couleur] Uni, sans dégradés, sans nuances. La peinture racontait les mythes anciens et les guerres nationales. Elle ne connut d'abord que la teinte plate, sans doute très simplifiée, très éclatante, dure, en brutales oppositions, avant que le modelé apparût avec Parrhasios (Faure, Hist. art,1909, p.125).Les créateurs (...) peuvent, à des moments différents de leur existence, passer d'une famille à l'autre, (...) de la couleur violente et plate, aux profonds remous du modelé sculptural, aux ombres rembranesques striées de mille écailles de clartés (Lhote, Peint. d'abord,1942, p.19): 5. ... le patron est opposé (...) aux mélanges. Il soutient, non sans raison, qu'il en résulte une perte de temps, parce que l'ouvrier, au lieu de coucher en toute tranquillité d'esprit des teintes plates, se lance dans des recherches de nuance, cède à la tentation de dégradés savants, de passages de tons subtils...
Romains, Hommes bonne vol.,1932, p.78. − P. métaph. Sa musique symphonique [d'Antoine Rubinstein], taillée à grands plans, enluminée en teintes plates, n'était pas d'une lecture difficile (Saint-Saëns, Portr. et souv.,1909, p.145).Lu hier soir à Em. ce que j'ai fait de mon roman (...). Cela est trop nuancé; de tons trop rompus. Quand j'écrirai Les Caves, à côté d'un ton plat, je poserai tout net un autre ton plat (Gide, Journal,1910, p.322). b) [En parlant d'un son, d'une voix] Uniforme, sans coloration. Tout cela débité avec une parole froide, lente et coulante, une voix plate et sans timbre qui semblait frappée par un palais de bois (Goncourt, Ch. Demailly,1860, p.19).L'oreille a de la complaisance à l'égard des parties qui se séparent, se retrouvent et jouent; elle n'en peut avoir pour l'unisson, car l'unisson est plat et faible s'il n'est plus plein et plus riche que tout accord (Alain, Beaux-arts,1920, p.117). − P. ext., POÉS. Rimes plates. Rimes dans lesquelles deux rimes masculines alternent avec deux rimes féminines. Nul [que Baudelaire] ne sait mieux donner à l'hexamètre à rimes plates cette souplesse qui seule le sauve de la monotonie (Verlaine, OEuvres posth.,t.2, Baudel., 1865, p.27). − Silence plat. Silence total. Mais la plus grande mort de tout était le silence, un de ces silences que la terre fait pour dormir, un silence plat qui avait enterré tous les bruits des silences de l'été (Goncourt, Man. Salomon,1867, p.295). c) [En parlant d'une saveur ou d'un aliment] Sans caractère, sans arôme. Goût plat. Le petit vin de Moselle, ce vin un peu plat, froid et dont la saveur n'étonne pas tout d'abord, mais séduit un délicat réfléchi (Barrès, Homme libre,1889, p.98).Les plantes potagères sont d'habitude plates et fades, tandis que celles qui poussent en pleine liberté ont une saveur astringente, une cordiale amertume (Huysmans, Cathédr.,1898, p.438).La pasteurisation préalable des laits (...) fournit une crème bactériologiquement propre, mais aussi un beurre plat, sans arome (Brunerie, Industr. alim.,1949, p.43).V. bouquet ex. 2. − [Dans une métaph.] Les femmes sont ballotantes de chair, comme construites d'eau, comme de l'eau dans les outres d'étoffes. (...) la race est bonne, au fond, mais c'est une eau à goût plat (Giono, Manosque,1930, p.74). − P. ext. Eau, bière plate. Eau, bière sans gaz. La bière collée par le haut est toujours un peu plate au début; il lui faut quelques jours pour se charger de nouveau d'acide carbonique (Boullanger,Malt., brass.,1934, p.520).Mettre dans un verre la dose de whisky qu'aimait Lucile, un glaçon, de l'eau plate; dans l'autre verre, une dose plus forte, l'eau Perrier (M. Saint-Lô, La Majesté nue,1967ds Gilb. 1971). d) [En parlant d'une odeur] Fade. De l'horizon venaient un bruit égal de perles versées dans l'eau et la plate odeur de l'étang criblé de pluie, vanné sur ses vases verdâtres (Colette, Sido,1929, p.37).Il devina vaguement (...) l'arrivée sur la route, la saveur différente de la nuit, l'odeur plate et rustique des terres (Malègue, Augustin,t.2, 1933, p.202). 2. a) [En parlant d'une chose] Qui n'a aucun caractère qui suscite l'intérêt, qui est tout à fait banal, commun ou qui manque d'élévation. Cet admirable édifice sert à je ne sais quel plat usage municipal et bourgeois (Hugo, Rhin,1842, p.367).Son regard allait, de sa mère, au décor terne et plat de la loge (Carco, Innoc.,1916, p.47).V. aimer ex. 60: 6. ... au milieu des plats intérêts d'argent, et de la froideur décolorée des pensées vulgaires qui remplissent notre vie, les démarches inspirées par une vraie passion manquent rarement de produire leur effet...
Stendhal, Chartreuse,1839, p.377. − Dans le domaine des facultés, des productions de l'esprit.Tu diras encore que mon billet est plat, mais il me semble qu'on ne fait de l'esprit qu'avec les indifférents (Staël, Lettres jeun.,1789, p.297).Une race plate [les artistes] (...) avec des goûts plats, des sens plats, des appétits plats (Goncourt, Man. Salomon,1867, p.254).À peine si elle lisait quelques tracts insipides, quelque fade histoire miraculeuse, dont le style prétentieux et plat lui semblait la poésie même (Rolland, J.-Chr.,Buisson ard., 1911, p.1303): 7. Qu'est-ce donc qu'il y manque? Le je ne sais quoi, l'esprit, la verve, le talent, le relief, l'étincelle, en un mot l'originalité ou le style. Le livre est honnête mais plat, judicieux mais ennuyeux, érudit mais terne, solide mais pas littéraire.
Amiel, Journal,1866, p.177. SYNT. Plate pensée; invention, constatation, raillerie, imitation, réflexion (bien) plate; conception plate de qqc.; dire des choses plates, de plates banalités; donner un sens plat à une phrase; musique, mélodie plate; air plat; peinture plate; roman plat; nouvelle plate; sujet, développement, personnage plat; vers plat; plate sagesse; plat bon sens. ♦ Expr. Plat comme un trottoir de rue. La conversation de Charles était plate comme un trottoir de rue, et les idées de tout le monde y défilaient, dans leur costume ordinaire, sans exciter d'émotion, de rire ou de rêverie (Flaub., MmeBovary,t.1, 1857, p.46). − [En parlant de l'existence ou de ce qui s'y rapporte] Sans imprévu, sans piquant, banal. Vie plate; bonheur plat; la plate réalité. Rien ne paraît plus plat à l'homme qui pense, et qui a entendu siffler quelques balles dans sa jeunesse que la vie de café (Stendhal, Hist. peint. Ital.,t.2, 1817, p.72).J'ai envie d'être heureux, tout bonnement, comme la plupart (...) je me marierai (...) j'aurai une femme que j'aimerai, des enfants (...). C'est fort plat, j'en conviens (Estaunié, Empreinte,1896, p.75): 8. ... je te promets que mon existence ne va pas être plate; Je fourmille de projets (...) −D'abord je vais quitter ce studio, il m'ennuie (...) j'ai décidé de devenir célèbre (...); je veux sortir, voyager, connaître des gens, je veux la gloire et l'amour...
Beauvoir, Mandarins,1954, p.494. b) [En parlant d'une pers.] Sans personnalité, sans talent particulier, manquant d'élévation dans les pensées ou les sentiments. Plat honnête homme; âme plate; caractère, esprit plat. Rien n'est plus plat, plus nul, plus incolore et plus insipide que M. Genès. Il est bête comme un juge et aussi assommant que la biographie des hommes utiles (Flaub., Champs et grèves,1848, p.331).Je ne cherche (...) que l'intérêt du curieux et de l'amateur, et on conçoit qu'à ce titre un Marat ou un Danton doivent bien plus me plaire par leur pittoresque que de plats personnages plus honnêtes ou même plus capables [citation de Renan] (Massis, Jugements,1923, p.100): 9. Ces paysages si vrais, si francs, et où respire l'agreste génie des lieux, ne lui serviront [à Flaubert] qu'à encadrer des êtres vulgaires, plats, sottement ambitieux, tout à fait ignorants...
Sainte-Beuve,Caus. lundi,t.13, 1857, p.348. − [En parlant de la physionomie, d'un trait physique] Sans expression. [Marat] s'écriait, avec une physionomie plate et ce demi-sourire d'une banalité de politesse que l'ancienne éducation mettait sur toutes les faces: «Peuple, il te faut couper deux cent soixante-dix mille têtes!» (Chateaubr., Mém.,t.2, 1848, p.376).Il m'a envoyé Lavaux... oui, il a osé... pour me demander ses lettres... Ah! je l'ai reçu, la face plate, à lui ôter le goût de revenir (A. Daudet, Immortel,1888, p.242).Devos (...) remue sans répit, sous son crâne têtu, les projets ténébreux que ne trahira jamais son regard plat, son regard heureux et niais de gars du Nord (Bernanos, Gde peur,1931, p.377). − [En parlant d'un artiste, d'un écrivain] Qui ne montre aucune originalité dans ses oeuvres. Dans la jeunesse, où toutes leurs qualités les étouffent, ils donnent [les grands maîtres] la préférence à l'enflure, à l'Esprit (...), ils veulent briller plus que toucher (...), ils se croient plats quand ils ne sont que clairs ou touchants (Delacroix, Journal,1844, p.431).Par parti pris, je travaille pour les pensionnaires, je me fais plat et gris. Ensuite avec Nana, je rentrerai dans le féroce (Zola, Corresp.,t.2, 1877, p.477).Relu avec délices Hero and Leander de Marlowe. Cette sensualité élisabéthaine est la seule qui m'ait jamais paru authentique. Les écrivains d'aujourd'hui sont froids et assez plats en comparaison (Green, Journal,1950, p.54). 3. [En parlant d'une pers.] Qui manifeste une trop grande humilité, se montre trop empressé, trop poli. Synon. obséquieux; anton. digne, fier.Plat courtisan. Ils n'étaient pas plats également pour tous. Tel d'entre eux se fût laissé malmener par le marquis, qui se fût révolté contre un mot dur à lui adressé par Mmede La Mole (Stendhal, Rouge et Noir,1830, p.250).Je trouvais original, au moment où Zola venait de se faire si plat pour la décrocher [la Légion d'honneur], de la rejeter si superbement (Goncourt, Journal,1889, p.1071).La bassesse qui le faisait être plat devant la dureté et répondre par l'insolence à la douceur (Proust, Sodome,1922, p.1063): 10. Connaissait-on quelque chose d'aussi plat qu'un peintre devant un fonctionnaire, et les courbettes, et les concessions, et les lâchetés?
Zola, L'OEuvre,1886, p.361. − [En parlant d'actes, d'attitudes, de paroles] Qui dénote le manque de dignité, la servilité. Faire de plates excuses. Vous pensez quelles plates louanges, quelles exclamations de paysans nourriciers, accueillaient ces largesses inconsidérées (A. Daudet, Jack,t.1, 1876, p.95).Il mit un peu de temps et d'effort à se ressaisir, à s'excuser avec une sorte de contrition plate qui lui fut agréable (Colette, Blé en herbe,1923, p.163): 11. ... cette chambre n'était plus celle de madame de la Roche-Jugan. Cette digne femme avait absolument voulu la céder à mademoiselle Charlotte, à laquelle elle témoignait une plate déférence, depuis qu'elle la voyait fiancée aux sept cent mille francs de rente du général.
Feuillet, Camors,1867, p.185. II. − Empl. adv. A. − Verbe + plat 1. De manière à rendre plat. Ses cheveux collés plat et séparés honnêtement par une raie (Estaunié, Empreinte,1896, p.187).Deux sardiniers de Douarnenez par tribord. Le premier vient passer à cinquante mètres devant nous; il est au plus près, ses deux voiles bordées plat l'enveloppant jusqu'à l'arrière, masquant l'équipage (Chevrillon, Bret. hier,I, 1925, p.145). 2. Au fig. a) Sans résonner. Il cria et tout le monde avec lui. Comme s'ils avaient crié dans une boîte. Le cri restait autour de leurs têtes (...) Ça a sonné plat comme dans de l'enfermé (Giono, Batailles ds mont.,1937, p.110). b) De manière banale, commune. Il semble avoir trouvé une mécanique qui se règle de jour en jour et qui le mène à faire plat, couramment (Zola, MmeSourdis,1902, p.48). B. − Loc. adv. et adj. 1. À plat a) De manière à rendre plat, à former une surface plane. Cheveux brossés à plat; tissu étalé, mis à plat; main tendue à plat; friser* à plat. Le mur, épais et haut (...) dont le faîte, large comme un trottoir, dallé à plat, me servait de piste et de terrasse (Colette, Mais. Cl.,1922, p.51).Chaque fois qu'il s'était bien tamponné les yeux, il étalait son mouchoir sur ses genoux, le repliait dans les plis et l'introduisait dans sa poche, à plat, comme un portefeuille (Martin du G., Thib.,Mort père, 1929, p.1311).Il était d'une maigreur effrayante. Les couvertures du lit tombaient à plat sur son corps débile (Roy, Bonheur occas.,1945, p.436). − Spéc. Labour à plat. ,,Labour caractérisé par le renversement de toutes les bandes du même côté`` (Lexis 1975). Les charrues utilisées pour les labours à plat, telles que les brabants doubles (Passelègue, Mach. agric.,1930, p.26). − Empl. subst. masc., PAPET. Caractère lisse du papier. Le papier contient souvent des matières de structure non fibreuse qui lui communiquent des propriétés spéciales. Ces corps peuvent (...) donner du poids et de l'à-plat (ce sont des charges: talc, kaolin, sulfate de baryte, etc.) (Civilis. écr.,1939, p.6-6). b) Horizontalement. Rivière qui coule à plat. Entre les labours et les prairies artificielles, le sentier s'en allait à plat (Zola, Terre,1887, p.15).Elle n'avait d'attention que pour la malade, étendue à plat, sans oreiller (Martin du G., Thib.,Belle sais., 1923, p.941).Ils montent, ils vont de nouveau à plat, ils montent; c'est un long voyage que ce voyage du chalet (Ramuz, Gde peur mont.,1926, p.19). c)
α) Mettre, étendre, poser... qqc. à plat (sur qqc.). Sur la face la plus large (et horizontalement). Poser les pieds à plat sur le sol; mettre les mains à plat sur les cuisses. Plusieurs planches minces assemblées les unes à plat, les autres de champ (Nosban, Manuel menuisier,t.2, 1857, p.262).Il avait posé non les coudes, mais les deux bras à plat, sur la table (Duhamel, Notaire Havre,1933, p.186).Un de ces livres était posé à plat sur la tranche des autres, comme si on le consultait plus fréquemment (Abellio, Pacifiques,1946, p.104). − Au fig. Mettre à plat (un problème, un différend...). Exposer en détails (ce qui est embrouillé, compliqué) pour y voir plus clair. Pourquoi demande-t-elle tant, aussi, cette grande conne? Absolue comme une chèvre. Et ce besoin de tout dire, de tout mettre à plat, toujours... (Fr. Cavanna, Les Yeux plus grands que le ventre,1983, p.184).
β) Se coucher, s'étendre, tomber à plat (sur qqc.). De tout son long. Son cheval a passé au petit pas sur le corps de plus de deux cents hommes couchés à plat sur le ventre (Flaub., Corresp.,1850, p.161).Il est tombé sur le nez sur le parquet... à plat... un coup de foudre (Goncourt, Ch. Demailly,1860, p.373).Les chiens (...) dormaient (...) étendus à plat sur le sable (Fromentin, Dominique,1863, p.14).V. aussi infra à plat-ventre. ♦ Vieilli. Tout à plat. Même sens. C'était une bande de bohémiens, qui, couchée tout à plat dans un fossé, se releva comme une volée de moineaux à l'approche des cavaliers (Sand, Beaux MM. Bois-Doré,t.1, 1857, p.18). − Au fig. Tomber à plat. N'avoir aucun succès. Je suis certain que le drame tombera à plat, et que le malheureux auteur servira pendant un mois aux gorges chaudes de la France entière (Zola, Mes haines,1866, p.130).Quelquefois, faisant crédit au comique que lui-même avait l'air de trouver à ce qu'il allait dire, on lui faisait la faveur d'un silence général. Mais le récit tombait à plat (Proust, Sodome,1922, p.872). ♦ La conversation tombe à plat. Ne rebondit pas, cesse. La conversation, atténuée par l'effet de délicieux canards aux olives, tomba soudain à plat (Balzac, Vieille fille,1836, p.341).La conversation, à peine soutenue par la loquacité du Sanégrol, menaçait de tomber à plat (Fabre, Courbezon,1862, p.64). d) Pneu, roue à plat. Pneu, roue dégonflé(e). Il n'est pas inutile de souligner le désagrément résultant d'une crevaison en rase campagne lorsque la roue de secours est à plat (Chapelain, Techn. automob.,1956, p.324). ♦ Rouler à plat. [Le suj. désigne un pneu ou une pers.] Rouler en étant dégonflé, rouler avec un pneu dégonflé. Un pneu ayant roulé à plat quelques dizaines de mètres est neuf fois sur dix inutilisable (Chapelain, Techn. automob.,1956p.326).P. compar. Comme il [le soleil] ne descendait pas de l'horizon, il s'usait en dent de scie sur les bords et finissait par rouler à plat comme un pneu crevé (Cendrars, Dan Yack,Plan de l'Aiguille, 1929, p.93). ♦ Être à plat. [Le suj. désigne une pers.] Avoir un véhicule dont un pneu est dégonflé. C'est à vous, la bécane? −Oui. Mais je suis à plat (Queneau, Pierrot,1942, p.181). − P. anal. Batterie, pile à plat. Déchargée. Si les vis platinées se touchent, la batterie se vide dans la bobine. Celle-ci «grille», et la batterie est à plat (Chapelain, op.cit.,p.150). − Au fig., fam. Être à plat ♦ Être sans force, sans courage. Mettre à plat. Ôter toutes forces, tout courage. Synon. abattre, couper* les bras, les jambes.On avait déjà fait des prisonniers, dont le moral était fort à plat, car ils n'avaient plus rien à se mettre sous la dent (Benjamin, Gaspard,1915, p.48).Quand je suis à plat, tu me dis «du nerf!» et dès que je fais preuve de nerf, tu soupires «du calme!» (Duhamel, Combat ombres,1939, p.56): 12. Il garde toujours le même souci de ne me faire aucun compliment; mais maintenant, du moins, je sais ne m'en laisser pas assombrir. Il y eut un temps où ses silences du côté de l'éloge me mettaient à plat.
Gide, Journal,1924, p.789. ♦ Vieilli. Être sans un sou. Comment ça, tu es à plat? Tu n'as plus de galette? −Plus un rotin. Je suis fauché (L. Daudet, Ariane,1936, p.168).Synon. usuel être à sec (fam.). e) Au fig.
α) (Poser une) teinte à plat. Teinte sans dégradé. Ces images s'alignaient (...) le long des murailles, qu'elles tachaient de plaques jaunes, bleues et rouges; les teintes, mises à plat, violentes et crues, relevaient singulièrement les tons blafards du papier (Zola, M.Férat,1868, p.188).Ses détracteurs [de Goya] disent que ses toiles font grincer l'oeil. Mais on a dit la même chose (...) de Renoir, pour ses roses ardents, posés à plat (L. Daudet, Idées esthét.,1939, p.257). ♦ P. métaph. Flaubert n'avait pas épuisé les belles couleurs dures qu'il posait à plat sur ses proses (Malègue, Augustin,t.1, 1933, p.164). − Empl. subst. masc. V. aplat.La lithographie ne «rend» vraiment bien que dans les à-plats (...); les demi-teintes sont très grenues et par suite ne sont agréables d'aspect que d'un peu loin (Arts et litt.,1935, p.28-16).La ligne, le modelé et la couleur, l'à-plat et le clair-obscur, ces éléments antagonistes s'y trouvent réunis [chez Seurat] (Lhote, Peint.,1950, p.189).
β) Empl. fig. rares ou vieillis − Tout à plat. Sans ménagement. Synon. carrément, purement* et simplement.Je demandais (...) un congé pour aller en France; mais on m'éconduit tout à plat (Courier, Lettres Fr. et Ital.,1808, p.773).[Les patriciens] savent que dans le cas d'alliance supposée de leur part avec les étrangers, avec la diplomatie, l'opinion publique les abandonnerait tout à plat à la vengeance des radicaux (Gobineau, Corresp.[avec Tocqueville], 1850, p.109). − Complètement. Il me fit boire d'une liqueur qui me grisa à plat (Goncourt, Journal,1875, p.1046).Il songeait: «Me voici donc ruiné à plat, car cette canaille a évidemment tout raflé» (L. Daudet, Médée,1935, p.262). − Dans une attitude obséquieuse (plus cour. à plat-ventre). Le Chef de Cabinet à plat devant le représentant du peuple et, pour l'équilibre, de la plus cassante hauteur vis-à-vis du Chef de service responsable (Arnoux, Double chance,1958, p.170). 2. À plat + subst. a) [Le subst. désigne une partie du corps]
α) Rare. Avec le plat de. Le bol nettoyé à plate langue, il relève enfin la tête (Genevoix, Rroû,1931, p.41).
β) [Le subst. désigne la partie du corps en contact avec le sol] À plat(-)ventre, à plat(-)dos. Il pousse un cri et tombe à terre. Il se retrouve devant sa cabane, étendu à plat dos sur le sol, les bras en croix, immobile (Flaub., Tentation,1849, p.423).Un gamin joue aux osselets, à plat-ventre dans la poussière (Lenormand, Simoun,1921, 11etabl., p.126).Pour moi, la guerre (...) ç'a été une période où l'on marchait courbé (...). À certains jours, ça devenait une fuite en avant, coupée de chutes à plat ventre (Vercel, Cap. Conan,1934, p.29).P. euphém. Comme ça marque, sur une femme, une première chute à plat dos! Je ne saurais pas que celle-ci a un amant que je le devinerais rien qu'à la voir (Farrère, Homme qui assass.,1907, p.110). − Rare. [Sans prép.] Je suis très bien dans mes couettes. Couché plat-dos, je ne changerais pas de place pour tout l'or du monde (Giono, Gds chemins,1951, p.214).V. joute ex. de Céline. ♦ Empl. subst. Faire du plat-ventre. Tant que le navire gouvernera, n'y a pas de soin, ça balance, c'est, sauf respect, comme le tape-cul qui est à Nantes au panier fleuri, autant jouer à ça qu'à autre chose, et on n'a pas à craindre les plats-dos (Sue, Atar-Gull,1831, p.3).Rampez! Debout! Pas de gymnastique! À plat ventre! Debout! Le fin du fin consistait pour le facétieux Feldwebel à ordonner le plat ventre aux endroits les plus sales (Ambrière, Gdes vac.,1946, p.255).P. ell. Faire un plat. Pour un plongeur, tomber à plat ventre sur l'eau. (Ds Dupré 1972). − Au fig. (Être) à plat ventre (devant qqn). (Être) obséquieux, sans dignité. Synon. ramper (devant qqn), lécher les bottes (de qqn) (fam., v. botte2).Ce que MgrTriaurault, si à plat ventre pourtant devant le gouvernement, va apparaître tel qu'un évêque indépendant, en comparaison de celui-là! (Huysmans, Oblat,t.2, 1903, p.249).Un salaud, le tire-cordon! Toujours à plat ventre devant les locataires endollardés, et une vache cuite avec les prolétaires ramasse-miettes! (Malraux, Espoir,1937, p.479). b) [Le subst. désigne la nature du sol sur lequel qqn est étendu à plat] Les matelots de quart, en vêtements de toile, dorment à plat pont, par rangées, couchés sur le même côté tous (Loti, Mon frère Yves,1883, p.340).Cette idée les avait prises qu'à dormir ainsi à plate-terre, elles se réveilleraient un matin avec un collier de vipères au cou (Pourrat, Gaspard,1925, p.113). c) À plat joint. V. joint1A 1 c. − Empl. subst. Liaisons de cadres à arêtes vives. Il existe divers modes de réalisations: plats-joints ou entailles, enfourchements ou tenons et mortaises (RaucBât.1983, p.367). III. − Empl. subst. masc. A. − [Désigne une chose concr.] 1. Surface plane sur quelque chose. Il y a d'ailleurs intérêt [à ne pas serrer les freins à bloc] (...) pour éviter la formation de plats sur les bandages et l'usure des rails (Bricka, Cours ch. de fer,t.2, 1894, p.83).Être sûr qu'au plus creux des fines, des délicates (...) moulures, pas plus qu'au plat le plus plan (...) au plus beau plat de bois luisant, au plus beau panneau. Être plus que mathématiquement sûr qu'il ne reste pas pour aujourd'hui un grain de la poussière d'hier (Péguy, V.-M., comte Hugo,1910, p.692).Sa soutane jouait sur lui en plats et en plis comme sur une armure (Giono, Eau vive,1943, p.275). 2. Partie plate d'un terrain. Julia est venue se planter devant le champ de blé. Elle a regardé tout le plat de ce champ qui est comme un étang entre les haies de cognassiers (Giono, Gd troupeau,1931, p.146).J'arrive sur une sorte de plat dans des prairies. C'est un col. Et là, du côté du nord, une vue du tonnerre (Giono, Gds chemins,1951, p.16). ♦ P. métaph. Le génie a un côté lisse par lequel le vulgaire l'aborde. Chez Sue, il y a un plat qui permet au public de l'aborder (Balzac, Lettres Étr.,t.2, 1844, p.457). − En partic. ♦ HIPP. Terrain sans obstacles. Les courses en plat ont lieu de mars à novembre et les courses d'obstacles en hiver (Morand, Londres,1933, p.139).Course sur un terrain sans obstacles. Moïse s'était couronné la veille, en plat (Gyp, Mariage civil,1892, p.104).Tout à l'heure, Armagnac-Noir (...) va partir dans une course de trois ans. C'est la première grande épreuve de plat qu'il dispute (Pesquidoux, Chez nous,1923, p.51).Cheval de plat, écurie de plat. Cheval/chevaux spécialisé(s) dans les courses sans obstacles. Je n'ai que des chevaux de plat. J'achète des chevaux d'obstacle (Giraudoux, Folle,1944, ii, p.153). ♦ [Dans la course à pied] Épreuve de x mètres plat. Épreuve courue sur un terrain sans haies. Il doit être aussi fait mention du mille mètres et du trois mille mètres (trois mille mètres «plat» par opposition au trois mille mètres «steeple») (Jeux et sports,1967, p.1224). 3. Le côté plat, le plus large de quelque chose. Plat d'un fer de hache, d'une rame; donner des coups de plat d'épée, de sabre. Sigognac mit flamberge au vent et courut à ces malotrus, les frappant du plat de sa lame et les menaçant de la pointe (Gautier, Fracasse,1863, p.153).Le jeune homme (...) s'essayait à recevoir et à tenir en équilibre un ballon sur le plat d'une baguette (E. de Goncourt, Zemganno,1879, p.25).Il frappait à petits coups, selon le rite, du bout de sa cigarette, le plat de l'étui étincelant (Bernanos, Mauv. rêve,1948, p.884). − [Le subst. compl. désigne une partie du corps] Le plat de la fesse, de la cuisse (v. plat de côtes). Il reçut un coup droit qui glissa sur le plat des côtes. L'épée avait piqué, mais si peu! (A. Daudet, Trente ans Paris,1888, p.203).Elle allait, tout d'une pièce, mais sur des pieds souples et qui s'appuyaient de tout leur plat (Giono, Que ma joie demeure,1935, p.26). ♦ Plat de la main. Surface constituée par la paume et les doigts tendus et serrés. L'ordonnance était occupé à repasser son grand billet, du plat de la main, sur un couvercle de cantine (Druon, Gdes fam.,t.1, 1948, p.171). ♦ Expr. fig. vieillies, fam. Faire merveille du plat de la langue. ,,Tenir de beaux discours mais ne point les mettre à exécution`` (Hautel t.2 1808). Donner du plat de la langue. ,,Flatter, cageoler quelqu'un`` (Hautel t.2 1808). P. ell., fam. Faire du plat (à qqn). Essayer de séduire par de belles paroles quelqu'un (gén. une femme). Synon. pop. et fam. baratiner.La garce! songea Bouve aussitôt; si je ne lui fais pas de plat, je suis cuit (Carco, Équipe,1919, p.230).Je suis sûr qu'il y a des tas de types qui viennent vous faire du plat, sous prétexte de s'amuser avec cet ustensile. −Ça c'est vrai. Il y en a qui sont collants (Queneau, Pierrot,1942, p.25). 4. Spécialement a) MÉTALL. Fer plat. [La penture] est découpée dans du large plat en ménageant les fleurons des bouts de volutes, contournée en rinceaux et en évitant le soudage (Fillon, Serrurier,1942, p.11). b) RELIURE. Chacune des deux parties qui avec le dos forment la reliure, la couverture d'un livre. Plats décorés, mosaïques. Pendant la messe, elle lisait dans un livre de cuir noir, frappé d'une croix sur les deux plats (Colette, Mais. Cl.,1922, p.185).En occident, c'est dans la seconde moitié du XVesiècle que les plats de carton commencent à se substituer couramment aux planchettes de bois (ais) pour la reliure des livres (L'Hist. et ses méth.,1961, p.1079). B. − Au fig. 1. [À valeur de neutre] Ce qui est banal, commun. Les gens, en général, aiment le médiocre et le plat, qui ne leur procurent aucun mouvement de leurs moignons d'âmes et ne les excitent pas à penser (L. Daudet, Rech. beau,1932, p.39).Le Démon-du-changement-pour-le-changement est le vrai père de bien des choses (...) Il nous jette du beau dans le vrai, du vrai dans le pur, du pur dans l'absurde, et de l'absurde dans le plat (Valéry, Degas,1936, p.138): 13. ... la tête pleine des assassins de l'Italie (...) [les voyageurs] voient quelque chose de sinistre et de sombre dans le paysan qui passe à côté d'eux; l'âme transportée de cette fièvre d'amour pour le beau et la volupté, que l'approche de l'Italie donne aux coeurs nés pour les arts, jouit délicieusement de cette nuance de terreur. Le plat et l'insipide s'enfuit à ses yeux.
Stendhal, Hist. peint. Ital.,t.2, 1817, p.19. 2. Rare. Plat fixe. Synon. calme* plat.La politique m'a l'air de se calmer! Nous allons être pour quelque temps au plat fixe, jusqu'à un nouveau tremblement (Flaub., Corresp.,1873, p.98). 3. Personne sans caractère, sans valeur, servile. Je citais à ma famille les noms de MM. de La Bayette et de Barral, mes nouveaux amis. «La Bayette! bonne famille, dit mon grand-père (...). Pour Montferrat, c'est un plat...» (Stendhal, H. Brulard,t.1, 1836, p.309). REM. Plat(e),(Plat, Plate) adj.,région. (Canada). Ennuyeux, monotone; bête, idiot. C'est plate à mourir. Allons-nous en, dit-elle. Je trouve ça plate icitte. Pas toi? (Roy, Bonheur occas.,1945, p.402).Les gamins n'étaient pas méchants, mais ils prenaient un malin plaisir à se servir de mon nom pour faire des farces plates (M. Cabay-Martin, Les Bergers,1976, p.36 ds Richesses Québec 1982, p.1824). Prononc. et Orth.: [pla], fém. [plat]. Ac. 1694 et 1718: plat, platte; dep. 1740: plat, plate. Étymol. et Hist.I. Adj. 1. a) Ca 1100 «faiblement creux» gambes ... plates «jambes non cambrées» (Roland, éd. J. Bédier, 1491); mil. xiiies. plaspiez (Du prestre et des .II. ribaus, 236 ds Fabliaux, éd. A. de Montaiglon et G. Raynaud, t.3, p.65); 1573 au fig. (v. pied-plat); b) 1176-81 «(du corps ou de ses parties) qui a peu de saillie, de modelé» vis plat (Chrétien de Troyes, Chevalier Lion, éd. M. Roques, 299); c) 1260 «(d'une chose) dont le relief est peu accentué; qui a peu d'épaisseur» boutons plas (Etienne Boileau, Métiers, éd. R. de Lespinasse et Fr. Bonnardot, titre LXXII, XX, p.154); 1611 [avoir la] bourse plate (Cotgr.); 1694 broderie plate (Ac.); d) 1375 «dont le relief est inexistant ou faible» en partic. ici «sans fortification» plat pais (Eustache Deschamps, Ballades de moralitez, II, 5 ds OEuvres, éd. de Queux Ste Hilaire, I, 71); d'où 1671 coucher à plate terre (Pomey); e) 1678 «peu élevé» souliers plats (La Fontaine, Fables, VII, X, 6 ds OEuvres, éd. H. Régnier, t.II, p.150); 2. a) 1119 «dont la surface est plane, unie» en partic. «dont la surface est voisine de l'horizontale» (Philippe de Thaon, Comput, 2651 ds T.-L.); 1559 vaisseaux plats (Amyot, Pyrrh., 31 ds Littré); 1842-43 bateaux à fond plat (Sue, Myst. Paris, t.6, p.55); b) ca 1500 mer ... plate (Philippe de Commynes, Mém., VII, XVIII, éd. J. Calmette, t.3, p.108); 1704 calme tout plat (Trév.); 3. a) 1316 iaue plate «eau pure» (Jehan Maillart, Roman du conte d'Anjou, éd. M. Roques, 1335); 1640 vin plat «de peu de saveur, de peu de force» (Oudin Curiositez); b) fin xves. [ms.] «qui se caractérise par son uniformité» platte rime (Traité de Rhétorique, 2 ds E. Langlois, Rec. d'arts de seconde rhét., p.253); cf. 1548 (Th. Sebillet, Art poet. fr., 106); 1835 teintes plates (Ac.); cf. 1855 «appliqué à la musique» (Sand, Hist. vie, t.4, p.441); d'où 1904 un son ... plat (Widor, Techn. arch. mod., p.243); c) 1588 «qui se caractérise par un manque d'originalité» les plus plattes raisons (Montaigne, Essais, éd. Villey-Saulnier, III, VIII, p.933); d) 1650 «(d'une personne) qui manque d'élégance, d'élévation» [un] auteur ... plat (St-Évremont, Comédie de l'Académie ds Richelet ds Littré); 1798 un plat personnage «personne dépourvue de tout mérite (Ac.); e) 1573 «(d'une personne) qui montre de la bassesse» pied-plat (supra I 1 fig.); cf. 1690 c'est un gros pied plat, un gueux un rustre (Fur.); 1825 «qui dénote de la bassesse, de la servilité» une humilité plate (Delécluze, Journal, p.107). II. Subst. 1. a) 1erquart xiies. «partie plate d'une chose» ici d'une épée (Chanson Guillaume, éd. J. Wathelet-Willem, 1885); b) 1285 «étendue de terrain plate» ici peut-être «lit d'une rivière» (Doc., fo283 ds Livre Roisin, éd. Brun-Lavainne, p.313); fin xives. sur le plat «en plaine» (Eustache Deschamps, Balades, M, 3 ds OEuvres compl., éd. cit., V, 253); c) ca 1470 jouer du plat «faire de belles paroles, de belles phrases» (Georges Chastellain, Chroniques, éd. Kervyn de Lettenhove, IV, 387); fin xvies. le plat de la langue «bavardage» (D'Aubigné, Hist. universelle, IV, XX, éd. A. de Ruble, III, 331); 1883 faire du plat à qqn (Larch. Suppl., p.123 qui cite Macé); d) 1881 reliure (E. de Goncourt, Mais. artiste, t.1, p.344); e) 1963 métall. (Lar. encyclop.); 2. a) 1666 «personne ou groupe que l'on juge méprisable» (Molière, Misanthrope, II, 4); b) 1669 «ce qui est médiocre» (Boileau, Art poét., éd. Ch. H. Boudhors, 93). III. Loc. 1. a) ca 1165 loc. adv. toz plaz «à terre d'un seul coup et de tout son long» (Benoît de Ste-Maure, Troie, 24234 ds T.-L.); b) xives. tout plat «carrément, sans détour» (Roman de Troîlus, VII ds Nouvelles fr. du XIVes., éd. L. Moland et Ch. d'Héricault, p.276); 2. loc. adv. a) 1738 à plat «horizontalement, de tout son long» ici fig. tomber tout à plat «(d'une pièce de théâtre) échouer» (Piron, Métrom., V, 2 ds Littré); 1780 nicher à plat (Buffon, Hist. nat. des oiseaux, Paris, Impr. royale, VIII, 261); b) 1767 à plat ventre (Diderot, Salon de 1767, OEuvr., t.XIV, p.500 ds Littré, s.v. ventre); 1828 au fig. (Delécluze, Journal, p.218); c) 1796 à plat «sur la face plane» (Dusaulx, Voy. Barège, t.2, p.185); 3. a) ca 1770 loc. adj. à plat de lit «alité» (J.-J. Rousseau, Confessions, IX, éd. B. Gagnebin et M. Raymond, p.411); b) 1878 être à plat ici fig. «être sans force, sans courage» (Goncourt, Journal, p.1227); 1927 au propre «avoir ses pneus dégonflés» (Homme dans la roue, Pédale, 5 oct., p.14, col. 3: Zut je ne peux pas partir, je suis à plat à l'avant). D'un lat. pop. *plattus, empr. au gr. π
λ
α
τ
υ
́
ς «large et plat». Bbg. Quem. DDL t.27. _Vidos 1939, p.239. |