| PIERRE, subst. fém. A. − 1. Toujours au sing. Matière minérale solide plus ou moins dure qu'on rencontre en masses compactes à la surface et à l'intérieur du sol. Bloc de pierre; extraire de la pierre, concasser de la pierre; dur comme la pierre. L'eau creuse la pierre et le vent la ronge (R. Bazin, Blé, 1907, p.65).Les contrastes sont visibles et persistent plus qu'on n'est porté à le croire entre les régions où la pierre abonde et celles où elle manque (Vidal de La Bl., Princ. géogr. hum., 1921, p.162): 1. ... il se mit à fouir cette terre molle. Au bout de la journée il avait creusé un trou d'un bon pied de profondeur et de la grosseur de son corps quand les griffes de ses pattes fatiguées crissèrent sur quelque chose de dur... La pierre était là. Goupil creusa plus loin... de la pierre encore; il gratta toujours, il gratta toute la nuit, espérant dans le rocher la faille libératrice...
Pergaud, De Goupil, 1910, p.15. 2. Bloc parfois isolé de cette matière apparaissant à la surface de l'écorce terrestre. Avalanches de pierres, casser des pierres; être assis sur une pierre; sauter de pierre(s) en pierre(s); traverser un torrent sur des pierres. Un beau ruisseau, répandu hors de son lit de granit, courait sous nos pieds, et formait, çà et là, de petits lacs d'eau courante et limpide qui murmurait et écumait autour des énormes pierres tombées du haut des murailles (Lamart., Voy. Orient, t.2, 1835, p.166): 2. On ne pouvait même plus être deux de front; alors les garçons allaient devant, tendant la main aux filles pour les aider à passer par-dessus une grosse pierre, ou bien à franchir un de ces ressauts de roc qui font comme des marches en travers du chemin.
Ramuz, Gde peur mont., 1926, p.50. 3. Fragment de taille variable de cette matière que l'on peut déplacer, porter et même lancer. Monceaux, tas de pierres; chasser, recevoir qqn à coups de pierre(s); tomber comme une pierre au fond d'un trou; être à un jet de pierres. Depuis un moment je maniais une pierre. À la fin, fortement sollicité par un malin désir, je la lançai dans la mare, tout à côté... Aussitôt les trois têtes sortirent en sursaut de dessous l'aile. C'étaient trois canards, j'oubliais de le dire (Toepffer, Nouv. genev., 1839, p.10).Je calai la poterne avec une grosse pierre pour pouvoir rentrer sans sonner et à l'insu de tous (Cendrars, Bourlinguer, 1948, p.228): 3. Ayant aperçu une pierre dans l'allée, il se précipita pour la ramasser, atteignit la haie avec des prudences, des rampements de trappeur, et il lança la pierre dans notre jardin de toutes ses forces. On entendit un bruit de verre cassé.
Mirbeau, Journal femme ch., 1900, p.88. − Locutions ♦ Geler* à pierre fendre, à fendre les pierres. ♦ Loc. fig. Faire d'une pierre deux coups*; marquer (un jour, un événement) d'une pierre blanche* (synon. marquer (un jour, un événement) d'un caillou* blanc); jeter des pierres dans le jardin* de qqn; c'est une pierre dans le jardin* de qqn; être malheureux* comme une pierre, comme les pierres; nager* comme une pierre. ♦ Être muet comme les pierres, être comme une pierre. Rester impassible, immobile, sans réaction. (Dict. xixeet xxes.). ♦ Jeter des pierres, la (première) pierre à qqn. [P. allus. à la femme adultère de l'Évangile] Blâmer quelqu'un, porter des accusations contre quelqu'un. Ce que je réprouve dans le personnage [le malfaiteur], je le réprouve également dans tous les hommes et toutes les femmes qui lui jettent la pierre. Il faudrait avoir les mains bien pures pour jeter la pierre, mais les mains pures ont ceci de remarquable, qu'elles ne jettent point de pierres (Green, Journal, 1956, p.198). ♦ Pierre de scandale. Objet causant du scandale. Les prescriptions juives sur le mariage étaient sans cesse une pierre de scandale entre l'irréligieuse famille des Hérodes et les Juifs sévères (Renan, Vie Jésus, 1863, p.115). − Proverbe. Pierre qui roule n'amasse pas mousse. V. amasser. B. − [La pierre en tant que matériau de construction ou entrant dans la fabrication de certains objets] 1. PRÉHIST. Âge* de (la) pierre; âge de la pierre taillée (paléolithique), de la pierre polie (néolithique). Période de la préhistoire au cours de laquelle l'homme a fabriqué et utilisé des outils de pierre taillée puis de pierre polie. À la fin du dernier âge de glace, les néolithiques, qui venaient de découvrir la technique de la pierre polie, ont inventé l'agriculture et l'élevage, la fabrication de la poterie et celle du vêtement (P. Rousseau, Hist. transp., 1961, p.7). 2. ARCHIT., MAÇONN. Bloc de cette matière taillé et préparé de manière à être employé dans une construction. Synon. moellon.La pierre de construction par excellence est celle qui se laisse tailler par le ciseau, découper en pans réguliers, appareiller, et qui se prête ainsi aux diverses combinaisons de formes qu'imagine et crée l'art de l'architecte (Vidal de La Bl., Princ. géogr. hum., 1921, p.155).Voici le portail de chez nous. Il est vieux et en vraie pierre et non point en ciment comme tout ce qui se fait aujourd'hui (Duhamel, Suzanne, 1941, p.103). − En partic. Pierre de taille. Gros bloc de pierre calcaire taillé sur toutes ses faces suivant des dimensions et des formes déterminées. Les murs étaient construits avec de la pierre de taille, et, quand il choquait la paroi, je le voyais [un bâton] se recourber en lame d'acier et rebondir comme une balle élastique (Lautréam., Chants Maldoror, 1869, p.239). SYNT. Appareiller la pierre; débiter, extraire, scier, tailler des pierres; tailleur de pierres; [pierre + déterm. désignant le type] pierre calcaire, meulière; [pierre + déterm. désignant la qualité] pierre dure, tendre; pierre blanche; pierre plate; pierre gélive; [pierre + déterm. désignant la fonction] pierre portante; pierre à bâtir. − P. méton. Construction. Aimer les vieilles pierres; investir dans la pierre. En ce temps-là, la France avait la maladie de la pierre, partout croissaient des bâtisses, des tours, des nefs d'églises, des clochers (Arnoux, Juif Errant, 1931, p.130). − Subst. + de pierre(s), en pierre(s).Banc, escalier de pierre. [La porte septentrionale] est coupée carrément dans un mur, de pierre en bas, de brique en haut, qui ferme la cour au nord (Hugo, Misér., t.1, 1862, p.368).Ils entreprirent d'édifier une haute bâtisse en pierre de taille, avec fenêtres à meneaux (Billy, Introïbo, 1939, p.29). ♦ En partic. De, en pierres sèches. De, en pierres plus ou moins grosses assemblées sans mortier, posées sans liaison les unes avec les autres. Nous touchâmes enfin la terre, ou plutôt un grand mur en pierres sèches surmonté d'un hangar (Sand, Hist. vie, t.2, 1855, p.216).Histoire d'agir, il renversa un mur de pierres sèches, un autre, un autre encore. Les pierres se choquaient les unes contre les autres et il pensa qu'on avait dû l'entendre (Queffélec, Recteur, 1944, p.200). ♦ Au fig. De pierre.Dur, insensible. Coeur, visage de pierre. Je doute de toute autre entente. Car j'ai le coeur dur, ange aimé. Car je me sens de pierre du sourcil à l'orteil, ange chéri. Car dire un mot de caresse me brûlerait en ce jour de l'âme à la bouche (Giraudoux, Sodome, 1943, ii, 7, p.139). − Locutions ♦ Pierre à pierre, pierre par pierre. Élément par élément, une pierre après l'autre: 4. −Ce baraquement, je l'ai construit de mes mains. Et avec un geste vers le donjon à créneaux qui s'enlevait au-dessus des verdures: −Le château, c'est moi aussi qui l'ai bâti, pierre à pierre.
Billy, Introïbo, 1939, p.188. Au fig. Peu à peu. Énumérer quelques dizaines d'autres noms parmi les plus célèbres n'en donnerait pas mieux la mesure et n'épuiserait pas davantage la liste de ceux qui ont édifié, pierre par pierre, la pathologie médicale (Bariéty, Coury, Hist. méd., 1963, p.621).♦ Ne pas laisser pierre sur pierre de. Détruire complètement. Empl. impers. Il ne reste pas pierre sur pierre de. Il ne reste absolument rien de (quelque chose qui a été anéanti). Au bord du Mouzon, ce plateau de la Mothe qui fut une ville dont il ne reste pas pierre sur pierre (Vidal de La Bl., Tabl. géogr. Fr., 1908, p.212).Au fig. Être anéanti, détruit. Il ne reste aujourd'hui pierre sur pierre de la doctrine proprement dite (David, Cybern., 1965, p.117). ♦ Première pierre (d'un édifice). Pierre, plaque de marbre contenant des documents, des inscriptions commémoratives qui est scellée solennellement. Cérémonie de la première pierre. Au moyen-âge, la pose de la première pierre fut entourée, comme dans l'antiquité, de la pompe des cérémonies (Lenoir, Archit. monast., 1852, p.40).Le travail commença au début de 1667; en mai l'on posa la première pierre de la première écluse, à l'embouchure sur la Garonne (P. Rousseau, Hist. transp., 1961, p.206). ♦ Au fig. Pierre d'achoppement*, d'attente*, d'angle*, angulaire*. Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon église (v. bâtir2). Ajouter, apporter* sa pierre à l'édifice. 3. Bloc de cette matière taillé selon une forme particulière, travaillé ou non, ayant une signification religieuse ou symbolique et constituant en lui-même un monument. Pierre druidique, funéraire, tombale; pierre gravée; être enseveli sous une pierre; la pierre noire de la Mecque. Partout des dolmens sur les bruyères élevées, ou des pierres préparées pour l'être (Michelet, Journal, 1831, p.93).Près d'une allée, une pierre simple sur laquelle on trouve inscrit: ci-gît Almazor. Est-ce un fou? −Est-ce un laquais? −Est-ce un chien? La pierre ne dit rien de plus (Nerval, Filles feu, Angélique, 1854, p.577). ♦ Pierre levée. Menhir. Plévech, à moitié fou, jura qu'il en avait vu comme ça dans les grottes de son pays, près des pierres levées (Mille, Barnavaux, 1908, p.108). ♦ Pierre d'autel. Pierre renfermant des reliques et consacrée par un évêque. (Dict. xixeet xxes.). 4. Morceau, fragment de cette matière entrant dans la fabrication d'objets ou d'outils. ♦ Pierre ponce*; pierre lithographique*; pierre à/d'évier* (vieilli). ♦ Pierre de feu. Pierre de l'âtre. Agenouillé sur la pierre de feu (E. Pérochon, Bernard, 1927, p.233 ds R. Ling. rom. t.42 1978, p.114). ♦ Pierre à aiguiser, pierre à faux, pierre à affûter. Pierre dure, généralement du grès destinée à aiguiser des instruments tranchants. Tournabien passait et repassait son couteau sur son pain, comme sur une pierre à aiguiser (R. Bazin, Blé, 1907, p.108). ♦ Pierre à huile. Variété de pierre à aiguiser. Le racloir de l'ébéniste est un morceau d'acier de 54 ou 81 millimètres de long, sans biseau, aiguisé sur la pierre à huile, de façon que sa tranche fasse des angles parfaitement droits avec les deux faces, et que les arêtes soient bien vives (Nosban, Manuel menuisier, t.2, 1857, p.174). ♦ Arg. Pierre à affûter*. ♦ Pierre de foudre, pierre de tonnerre. Synon. céraunie. − Vieilli ♦ Pierre à brunir. ,,Pierre dure, transparente et polie, taillée en dent de loup ou en coude et adaptée à un manche en bois`` (Adeline, Lex. termes art, 1884). Synon. brunissoir. ♦ Pierre à briquet, à feu, à fusil. Silex pyromaque extrait de la craie blanche produisant lorsqu'il est frappé des étincelles enflammant la poudre. Chacun essuyait froidement sa baïonnette dans le gazon et raffermissait sa pierre à feu dans la batterie (Vigny, Serv. et grand. milit., 1835, p.200).Notre gravier étant parsemé de pierres à fusil bien pointues et dures comme fer, et qui battent des étincelles quand on les frotte (Cendrars, Bourlinguer, 1948, p.116).Mod. Pierre à briquet. V. infra D 3.Fusil à pierre. Fusil fonctionnant avec une pierre. Et, accroché au-dessus de la cheminée, un fusil à deux coups à pierre, ce qui, pour le temps, était une chose rare et précieuse (Nerval, Fayolle, 1855, p.92).Il lui arriva même de chasser avec un fusil à pierre en compagnie de son cousin le meunier (A. France, Servien, 1882, p.62).P. anal. [En parlant d'un vin] Goût de pierre à fusil. Qui rappelle l'odeur âcre du silex frappé par l'acier. On but des vins qui avaient le goût sec de la pierre à fusil et l'odeur de la poudre (A. France, Puits ste Claire, 1895, p.291).Vins de Vouvray (...) ils sont capiteux, parfumés et ont ce qu'on appelle «un goût de pierre à fusil» (Ali-Bab, Gastr. prat., 1907, p.157). ♦ Pierre de touche. Pierre siliceuse noire, très dure, inattaquable par les acides, utilisée pour essayer les monnaies et les bijoux d'or et d'argent afin d'en connaître le titre. L'essai des bijoux et des objets qu'on ne veut pas détériorer se fait à la pierre de touche (Wurtz, Dict. chim., t.1, vol.2, 1870, p.1268).La pierre de touche ressemble au plus beau marbre noir, avec quelque chose de plus souple à l'oeil et de plus harmonieux (Hugo, Fr. et Belg., 1885, p.121).Au fig. Ce qui sert à faire connaître la qualité, la valeur de quelqu'un ou de quelque chose. [Fléchier, Massillon, etc.] retardaient à certains égards sur leur siècle. L'admiration pour Mllede Scudéry est une pierre de touche qui les éprouve eux-mêmes et qui les juge (Sainte-Beuve, Caus. lundi, t.4, 1851, p.140).L'art culinaire, pierre de touche des nations, conduisait (...) doucement nos camarades des kommandos à professer le plus légitime et le plus pacifique des impérialismes (Ambrière, Gdes vac., 1946, p.191). ♦ Pierre à chaux. Pierre calcaire qui à la cuisson fournit la chaux (d'apr. Chabat 1881). C. − JOAILL., ORFÈVR., le plus souvent au plur. ♦ Pierres (précieuses). Substances minérales très dures généralement de couleurs vives utilisées en bijouterie et en joaillerie, comprenant notamment le diamant, l'émeraude, le rubis, le saphir: 5. ... je les vis [ses doigts] étinceler de bagues, de rubis et de bracelets de diamants, et c'est un fait sur lequel je ne saurais me tromper, moi qui apprécie de l'oeil des pierres précieuses, au carat et au grain, et qui défie sur ce point le réactif du chimiste, l'émeri du lapidaire et la balance du joaillier.
Nodier, Fée Miettes, 1831, p.65. ♦ Pierres (fines). Gemmes transparentes (améthyste, grenat, topaze) et gemmes translucides ou opaques (agate, jade, opale, turquoise) utilisées en bijouterie et dans les arts décoratifs. Un collier magnifique, composé de trois rangs de divinités et d'amulettes en or et en pierres fines, entourait le col de la coquette momie (Gautier, Rom. momie, 1858, p.188). ♦ Pierre artificielle, pierre fausse. Produit de synthèse imitant les véritables pierres fines ou précieuses. Un Juif, prêteur à la petite semaine, avec des fausses pierres, des cailloux du Rhin, de la fausse bijouterie en montre (Cendrars, Bourlinguer, 1948, p.157). ♦ Pierre d'azur*. Synon. lapis-lazuli.Pierre de lune*. D. − P. anal. 1. PATHOL., vieilli. Concrétion formée dans certains organes du corps de l'être humain ou de l'animal. Synon. calcul, lithiase, gravelle (vx).Opération de la pierre. [L'inflammation] peut dépendre de quelque corps étranger contenu dans la vessie, qui irrite son col et ses parois, ou qui bouche le passage des urines, comme d'une pierre dans la vessie (Geoffroy, Méd. prat., 1800, p.207).Les femmes ayant des colliers où pendait La pierre prise au foie d'un vieux coq de Tanagre (Apoll., Alcools, 1913, p.92).V. intestin, -ine A 2 ex. de Chateaubriand. ♦ Pierre biliaire*. Synon. calcul biliaire*.Pierre d'écrevisse*. ♦ Pierre de piété. Amas calcaire localisé au genou au-dessous de la rotule (d'apr. Méd. Biol. t.3 1972). 2. Concrétion dure à l'intérieur de certains fruits tels que les poires. (Dict. xixeet xxes.). 3. a) Pierre de, pierre à.Nom donné à certaines roches. ♦ Pierre d'aimant*, pierre d'aigle*, synon. aétite (minér.); pierre d'alun, synon. alunite (chim.). ♦ Pierre à briquet*. V. briquet3. ♦ Pierre à détacher (vieilli). ,,Argile marneuse qui absorbe les corps gras et dont on fait usage pour enlever les taches`` (Chesn. t.2 1858). ♦ Pierre à plâtre, pierre de lune (vx). Gypse. Une masse puissante et pourtant bien stratifiée de gypse ou pierre à plâtre (Lapparent, Abr. géol., 1886, p.104).Le gypse ou pierre à plâtre contient ordinairement à l'état naturel deux équivalents d'eau (Ser, Phys. industr., 1890, p.2). b) Matière fabriquée, ressemblant à de la pierre. Pierre philosophale* (alchim.); pierre infernale* (chim., vieilli). REM. -pierre, élém. de compos.V. carton-pierre, casse-pierre (s.v. casse- A 1 et A 2 a), chasse-pierres (s.v. chasse- A), lance-pierres. Prononc. et Orth.: [pjε:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. Fragment de roche 1. a) servant notamment
α) dans la construction fin xes. (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 64: en tas maisons pedraˑ
ssubr'altre non laiseront); ca 1180 piere secche (Jeu Adam, éd. W. Noomen, 850); ca 1298 pierre de taille (Livre de Marco Polo d'apr. FEW t.13, 1, p.50a); 1528 (Comptes des bâtiments du roi, éd. L. de Laborde, t.1, 26); 1306 pierres taillées (Joinville, Vie de St Louis, éd. N. L. Corbett, § 257); 1636 (Monet: Pierre d'attante, pierre auançant au front de la muraille, pour lier la suite de la maçonnerie);
β) comme arme fin xes. (Passion, 496: Alquanz a'ppetdres lapider); fin xive-déb. xves. fig. geter une pierre en son jardin «faire une remarque désobligeante» (Quinze joies de mariage, éd. J. Rychner, 3e, p.26, 283); 1570 fig. mesnager d'une pierre deux coups (Mont., Lettre du chancelier de l'Hospital, 30 avril ds Littré); 1611 d'une pierre faire deux coups (Cotgr.); 1584 fig. la pierre est jetée (François d'Amboise, Neapolitaines, V, 6 ds Anc. théâtre fr., t.7, p.322);
γ) de monument avec une signification − religieuse . fermeture d'un tombeau fin xes. (Passion, 401: Sus en la peddre l'angel sist); . 1605 pierre levee «menhir» (P. Le Loyer, Hist. des Spectres, p.55); 1835 (Ac.); − ou symbolique xiiies. [date ms.] pierre «borne servant de limite» (Eneas, éd. J.-J. Salverda de Grave, var. 9757); b) servant d'instrument en raison de leurs qualités particulières
α) fin xives. perre a aguisier coutiaux (ds Roques t.2, B.N. lat. 13032, 2498);
β) 1416 pierre à toucher or (Inventaire du duc de Berry, éd. J.-J. Guiffrey, t.1, p.38); 1579 fig. pierre de touche (Larivey, Vefve, IV, 6, éd. Viollet-le-Duc ds Anc. théâtre fr., t.5, p.179);
γ) 1549 pierre ponce (Est.);
δ) 1411 piere a laver (Arch. Nord, B 10367, fo29); 1694 pierre d'évier (Ac.); 2. a) en gén. «matière minérale de nature et d'importance variable répandue à l'intérieur et à la surface de la terre» ca 1100 piere (Roland, éd. J. Bédier, 982); 1240-80 fig. estre de piere (Baudouin de Condé, Dits et Contes, éd. A. Scheler, t. 1, p.375, 3080); 1460-66 il gelle a pierre fendant (Martial d'Auvergne, Arrêts d'Amour, 3e, éd. J. Rychner, p.20, 123); 1690 geler à pierre fendre (Fur.); 1539 pleuvoir pierres «grêler» (Est.); 1535 fig. pierre de choppement (Oliv. Rom. 9, 31 d'apr. FEW t.8, p.315b); 1662 pierre d'achoppement (Pascal, Pensées, éd. L. Brunschvicg, t.3, p.205); 1791 être malheureux comme les pierres ([Lemaire], 60elet. bougrement patriotique du véritable père Duchêne, p.2 ds Quem. DDL t. 19); 1861 âge de la pierre (A. Morlot, Leçon d'ouverture d'un cours sur la Haute Antiquité, p.5); b) spéc. variété de cette matière 1322 peres de eagle (Invent. du comte de Hereford et de sa femme ds Notice des émaux, éd. de Laborde, t.2, p.440); 1553 pierre d'aigle (Belon, ibid.); 1561 (Inventaire des meubles du château de Pau, éd. de la Sté des Bibliophiles fr., 56); 1540 pierre de marbre noir (N. Herberay des Essars, Amadis de Gaule, 1erlivre, éd. H. Vaganay, p.163, 24); 3. ca 1100 perre «minéral de valeur utilisé en bijouterie» (Roland, 1452); déb. xiies. pere preciuse (St Brendan, éd. E. G. R. Waters, 679-680); 1380 pierre faulce (Inventaire de Charles V ds Notice des émaux, t.2, p.442). B. P. anal. 1. a) 1remoit. xiies. piere «concrétion qui se forme parfois dans certains organes de l'homme ou des animaux» (Lapidaire Marbode, 1èreversion ds Studer-Evans, p.55, 669); b) 1690 (Fur.: Pierre, se dit aussi d'une dureté ou espèce de gravier qui se trouve dans quelques fruits); 2. substance naturelle ou artificielle ressemblant à la pierre a) 1225-30 pierre de l'aymant (Guillaume de Lorris, Rose, éd. F. Lecoy, 1157; v. aussi 1269-78 Jean de Meun, ibid., 15366: pierre d'aïmant); b) 1575 pierre philosophale (Paré, OEuvres, éd. J.-F. Malgaigne, III, 582b); c) 1765 pierre infernale «nitrate d'argent» (Encyclop. t.9, p.740b, s.v. lune). Du lat. peĭtra «roche, roc», également att. en lat. médiév. au sens de «pierre de construction» 1086 ds Latham, «pierre tombale» xiiies., ibid., «pierre précieuse» 1300 et comme terme de méd. av. 1150, ibid., empr. au gr. π
ε
́
τ
ρ
α «roche, roc». Petra, mot de la lang. pop., a concurrencé l'a. et class. saxum «id.» et surtout à basse époque l'anc. lapis, auquel il a empr. les sens de «tout objet en pierre, ou qui rappelle la pierre» comme «borne», «monument funèbre» et «pierre précieuse», et qu'il a supplanté dans presque toutes les lang. rom. (cf. ital. pietra, esp. piedra), peut-être à cause de son empl. dans la Vulgate, en jeu de mots avec Petrus, du gr. π
ε
́
τ
ρ
ο
ς (v. Ern.-Meillet), surnom donné par Jésus à l'apôtre Σ
ι
́
μ
ω
ν répondant prob. à l'araméen κ
η
φ
α
̃
ς «pierre» (v. Chantraine). Pierre à aiguiser a éliminé l'anc. terme queux, v. queux2. D'apr. G. et A. De Mortillet, Le Préhist., 3eéd., Paris, 1900 [1882], p.5, le danois Christian Jürgensen Thomsen (1788-1865) publia en 1836 ds Ledetrand til Nordisk Oldkyndighed, «la classification et division des temps préhistoriques en âges [...] de la pierre, du bronze et du fer». Fréq. abs. littér.: 12145. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 15503, b) 18457; xxes.: a) 17422, b) 18055. Bbg. Archit. 1972, p.44, 47 (s.v. pierre de taille). _ Gamillscheg (E.). Wetzstein und Kumpf im Galloromanischen. Archivum Romanicum. 1922, t.6, p.10, 81-84. |