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PERVERSION, subst. fém.
A. − Action de faire changer en mal, de corrompre (v. ce mot II B); résultat de cette action. Perversion de la jeunesse, des moeurs. Par l'insensible progrès de la perversion, l'homme peut en venir à aimer ce qu'il nomme le mal, pour le mal même (Blondel, Action,1893, p.364).Sous la pluie battante des millions, une perversion extraordinaire s'aggravait de jour en jour, changeait en Gomorrhe et en Sodome le Bethléem de Bernadette (Zola, Lourdes,1894, p.42).
B. −
1. Action de détourner quelque chose de sa vraie nature, de la normalité; résultat de cette action. Perversion physiologique; perversion du goût, des institutions, de l'intelligence, du jugement, des sens, des sensations, de la sensibilité. La concupiscence, c'est-à-dire la perversion de la charité et de la bonne volonté, de la volonté primitivement animée d'amour divin (Sainte-Beuve, Port-Royal,t.2, 1842, p.145).Cette subtilité des hommes politiques (...) n'est que la perversion d'une certaine finesse d'interprétation souvent désignée par la locution «lire entre les lignes» (Proust, Guermantes 2,1921, p.474).Sous les apparences du régime représentatif, grâce à une perversion des principes qui le fondent (...) peut s'instituer un régime oligarchique (Vedel, Dr. constit.,1949, p.142).La nation en vient à subir les conséquences d'une perversion de la notion même de salaire (Perroux, Écon. XXes.,1964, p.529).
2. PSYCHOPATHOL. ,,Déviation des instincts conduisant à des comportements immoraux et antisociaux`` (Carr.-Dess. Psych. 1976). Perversion mentale, psychologique; perversion des facultés, des fonctions affectives, intellectuelles, morales; perversion de l'instinct. Les compromis nécessaires entre les instincts font que la paresse est une perversion sur le plan de la vie collective, alors qu'elle répond, sur le plan de la conservation, à la loi biologique de l'économie de l'effort (Porot1960).L'impulsivité, la grande facilité du «passage à l'acte», l'intolérance à la frustration et à toute discipline, la tendance toxicomaniaque, sont en étroite corrélation avec la perversion (Méd. Biol.t.31972).
Perversion (sexuelle). Comportement sexuel qui s'écarte de la normalité. Sa désadaptation [du paranoïaque] en fait souvent aussi un timide sexuel qui se réfugie parfois dans les perversions précoces (Mounier, Traité caract.,1946, p.554).La déviation peut porter sur le choix du partenaire sexuel (homosexualité, pédérastie, gérontophilie, zoophilie) (...). La perversion peut également porter sur les conditions extérieures pour arriver à l'orgasme (voyeurisme, exhibitionnisme, sadisme, masochisme) (Thinès-Lemp.1975):
. ... l'antiquité revenait toujours aux mêmes familles, qui réunissaient dans un petit nombre de personnages vraiment tout ce qu'un honnête homme pouvait désirer: aucun crime, aucune perversion sexuelle ne semblent ignorés de ces héros de fait-divers... Brasillach, Corneille,1938, p.370.
Prononc. et Orth.: [pε ʀvε ʀsjɔ ̃]. Att. ds Ac. dep. 1762. Étymol. et Hist. 1444 «changement de bien en mal, corruption» (Trad. du Gouv. des princ. de G. Colonne, Ars. 5062, fo170 vods Gdf. Compl.); 1546 «altération d'une fonction» (Rabelais, Tiers Livre, éd. M. A. Screech, XXXI, p.217, 24). Empr. au b. lat. perversio, -onis «dépravation, désordre» (déb. ives. ds Blaise Lat. chrét.), att. dès le déb. du iiies. chez Tertullien au sens de «bouleversement, falsification d'un texte», formé sur le supin perversum, de pervertere, v. pervertir. Fréq. abs. littér.: 171.