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PARDON, subst. masc.
A. − Action de tenir pour non avenue une faute, une offense, de ne pas en tenir rigueur au coupable et de ne pas lui en garder de ressentiment. Ses pardons étaient si divins qu'en m'humiliant devant elle je ne me sentais pas abaisser, mais je me sentais relever et grandir (Lamart.,Raphaël,1849, p.193).Il s'agenouille devant elle. Je suis à vos pieds. Ce pardon, je vous le demande à genoux, je vous prie, je vous supplie (Pailleron,Âge ingrat,1879, iii, 9, p.128):
1. Si l'effort est trop grand pour la faiblesse humaine De pardonner les maux qui nous viennent d'autrui, Épargne-toi du moins le tourment de la haine; À défaut de pardon, laisse venir l'oubli. Musset,Nuit oct.,1837, p.154.
Pardon des injures. V. injure.
SYNT. Pardon généreux, mutuel; pardon des offenses; demande, geste de pardon; être digne, indigne de pardon; implorer le pardon de qqn; accorder son pardon; obtenir le pardon de qqn.
Loc. et expr.
Demander pardon (à qqn de qqc., pour qqc.).Je vous demande mon pardon. Il dit obstinément que jamais il ne demanderait pardon au roi; qu'il ne voulait aucune grâce (Barante,Hist. ducs Bourg., t.3, 1821-24, p.11).Un de ces coups d'oeil par lesquels une femme sait demander pardon, sans parler, pour un tort de quelqu'un qu'elle aime (Bourget,Disciple,1889, p.143).P. ell. [Sous la forme interj.] Je n'avais même plus la force de crier: «Pardon! pardon pour tout ce que j'ai fait, écrit, pensé depuis que je suis au monde (...)»(Larbaud,Barnabooth,1913, p.199).
(Je demande) pardon de + inf.Pourquoi ne pas voler à Nancy? Je lui demanderai pardon à genoux de m'être mis en colère (Stendhal,L. Leuwen, t.3, 1835, p.202).
(Je demande) pardon si + ind.Il s'agenouilla devant elle et lui baisa la main: −Pardon... Pardon... dit-il. Rosa (...) comprit qu'il voulait dire: «Pardon si je suis injuste... Pardon si je ne t'aime pas... Pardon si je ne puis pas... Si je ne puis t'aimer (...)» (Rolland,J.-Chr., Adolesc., 1905, p.313).
[Dans des tours négatifs]
(Être) sans pardon. (Être) impitoyable. Maladie sans pardon. Dans sa première révolte, elle s'était juré d'être sans pardon. Ensuite, elle avait souffert secrètement de n'avoir pas à pardonner (Zola,Joie de vivre,1884, p.952).Les amis d'Armand Carrel entamèrent contre Girardin une lutte sans merci, ni pardon (Morienval,Créateurs gde presse,1934, p.65).
(Il n'y a, il n'est) pas, point de pardon. Mon père, s'écrie-t-il, point de pardon, point de pardon; le meurtrier n'en mérite point (Cottin,Mathilde, t.2, 1805, p.343).Les garnisons, munies même de canons, luttent avec les Peaux-Rouges. C'est une guerre d'atrocités et d'horreurs. Il n'y a pas de pardon (Cendrars,Or,1925, p.52):
2. La haine qu'on se porte à soi-même est probablement celle entre toutes pour laquelle il n'est pas de pardon! −Je ne veux pas me pardonner, dit l'ancien brasseur de sa voix lente. Point de pardon! Bernanos,M. Ouine,1943, p.1521.
HIST. Lettres de pardon. ,,Lettres que le prince accordait en petite chancellerie, pour remettre la peine de certains délits moins graves que ceux pour lesquels les lettres de grâce étaient nécessaires`` (Ac. 1835-1935). Synon. lettres de rémission.P. méton. Pardon royal. Tes malheurs ont attendri le souverain; nos voeux sont accomplis, et voici ton pardon. Il lui donne un papier (La Martelière,Robert,1793, v, 9, p.71).
B. − [Dans des tours ou formules avec atténuation du sens]
1. Rare. Indulgence. La virtuosité du chanteur fit à quelques-uns l'effet d'une acrobatie qui ne méritait pas de pardon (Bloy,Femme pauvre,1897, p.148).
2. [Dans des formules de politesse employées en diverses circonstances] Je vous demande (bien) pardon; gén. p.ell. pardon; vieilli au xxes. mille pardons.
[Pour présenter des excuses] Mille pardons, monsieur; mille excuses, mademoiselle. Vous m'avez attendu: j'ai manqué à tous mes devoirs (Sandeau,Sacs,1851, p.9).Le Monsieur, avec une extrême politesse: Je vous demande pardon, monsieur; vous êtes bien M. Boubouroche? (Courteline,Boubouroche,1893, i, 3, p.38).La Bonne: Bien, madame... Oh! pardon, monsieur, je vous ai appelé madame sans le faire exprès... (Guitry,Veilleur,1911, i, p.3).
Fam. Pardon, excuse. Pardon! excuse! du moment que monsieur la [une femme, un modèle] gardait pour son usage intime, on ne lui demandait pas de la prêter (Zola,OEuvre,1886, p.50).Voix de l'Ivrogne: (...) Ho! Tiens un mort!... Pardon excuse: c'est un soldat endormi... Salut, militaire (Cocteau,Machine infern.,1934, iii, p.120).
[Pour faire répéter ce qu'on a mal entendu] Synon. vieilli plaît-il?Clotaire: Excusez-moi, je suis un peu en retard. Jeff: Pardon? Clotaire: Je dis: je suis un peu en retard, excusez-moi (Achard,J. de la Lune,1929, i, 2, p. 4).
[Pour apporter une correction, une contradiction] −Et qui était auprès de son lit? Personne, je gage. −Pardon! Il y avait Mademoiselle de Meilhan qui tenait sa main, la baisait et priait (Gozlan,Notaire,1836, p.243).Vous m'intéressez, pardon, tu m'intéresses beaucoup, dis-je à Saint-Loup (Proust,Guermantes 1,1920, p.113):
3. knock: Aujourd'hui, de votre propre aveu, vous me livrez une clientèle nulle. le docteur: Nulle... pardon! pardon! knock: Revenez voir dans un an ce que j'en aurai fait. La preuve sera péremptoire. Romains,Knock,1923, I, p.5.
3. Pop. [Exclam. qui prévient l'étonnement de l'interlocuteur ou marque l'étonnement admiratif] Le projecteur n'éclairait de la harpiste que les pognes se baguenaudant sur les cordes; mais pardon! rien que ça valait déjà le déplacement (Simonin,Touchez pas au grisbi,1953, p.224).
C. − RELIG. (judéo-chrét.). Acte de miséricorde, don gratuit de Dieu qui, mettant fin à la situation de rupture créée par le péché, rétablit l'homme dans sa relation d'amour avec lui (en particulier dans la religion catholique, sous la forme de l'absolution par le ministère du prêtre dans le sacrement de pénitence). Pardon des péchés. Que Dieu vous absolve, ma fille! Le pardon final dépendra de votre courage à supporter la vie (Renan,Drames philos.,1888, iii, 2, p.657).Dieu est toujours nouveau, il est toujours là comme un beau matin frais et pur et c'est ainsi que nous le retrouvons après la nuit et l'orage du péché. Ses trésors de pardon sont sans limites (Green,Journal,1957, p.174):
4. ... nous Te rendons grâce, ô notre Père, avec une reconnaissance inexprimable, nous Te rendons grâce de ce qu'il y a pourtant une puissance infiniment plus grande que celle du mal, c'est la Tienne! C'est cette puissance de pardon, de relèvement et de vie qui nous a été manifestée en Jésus-Christ. Monod,Sermons,1911, p.183.
Le ministère, le sacrement du pardon. Nous ferons tout [dit Jean-Paul II] pour instruire et persuader les fidèles du besoin de recevoir le pardon de façon personnelle, fervente, fréquente. Et nous mettrons beaucoup de soin à exercer ce ministère (...) pour qu'aucun ne s'en écarte, sous prétexte qu'il trouverait formelle ou superficielle la célébration du sacrement (La Croix,14-16 août 1983, p.6, col. 2).
P. ext. [S'appliquant aux relations des hommes entre eux] La surnaturalité du pardon consiste en ceci que mon opinion au sujet du fautif n'a précisément pas changé: mais sur ce fond immuable c'est tout l'éclairage de mes relations avec le coupable qui se trouve modifié, c'est toute l'orientation de nos rapports qui se trouve inversée, renversée, bouleversée (Jankél.,Le Pardon, Paris, Aubier-Montaigne, 1967, p.197).
Spécialement
1. RELIG. CATH.
Au plur., vx. Indulgence (v. ce mot B 1). Il est allé gagner des pardons (Ac. 1798-1935). Aller chercher des pardons à Rome (Lar. Lang. fr.). Louis: L'Église a des pardons qu'un roi peut acheter. François de Paule: Dieu ne vend pas les siens; il faut les mériter (Delavigne,Louis XI,1832, iv, 6, p.177).
Vx. Prière dont la récitation aux trois moments de la journée (matin, midi et soir) faisait gagner des indulgences. (Dict.xixeet xxes.). Synon. angélus.Sonner le pardon. Le pardon est sonné (Ac.1798-1878).
Pèlerinage religieux, surtout en Bretagne; fête populaire qui a lieu à cette occasion. Le pardon de Sainte-Anne d'Auray (Ac. 1935). Pardon des Terre-neuvas. Il y avait eu un pardon: les saints sous le porche de l'église étaient tout couronnés de fleurs (Flaub.,Champs et grèves,1848, p.362):
5. La première fois qu'elle l'avait aperçu, lui, ce Yann, c'était le lendemain de son arrivée, au pardon des Islandais, qui est le 8 décembre, jour de la Notre-Dame de Bonne-Nouvelle, patronne des pêcheurs, −un peu après la procession... Loti,Pêch. Isl.,1886, p.38.
2. RELIG. JUIVE. Le Grand Pardon, le jour du Pardon. Fête juive de l'expiation, la plus importante de l'année et que la communauté célèbre en automne dans le jeûne et la prière. Fixé au dixième jour de tishri [premier mois de l'année juive], le Grand Pardon suit l'évocation des jugements et des décrets du Seigneur le Jour de l'An. Le caractère solennel et l'obligation rigoureuse de ce jour de pénitence sont fortement inculqués déjà dans l'Écriture (Lv. 16 et 23, 26-32) (P. Démann, Les Juifs, Paris, Fayard, 1961, p.96):
6. C'est le jour du Nouvel An que commencent les dix jours de rémission au cours desquels, plus qu'à une autre saison de l'année, le juif doit effectuer son bilan, «régler ses affaires de conscience» avec son prochain (...). Ce n'est qu'ainsi qu'il peut se préparer dignement au dernier jour de cette décade, à Yom Kippour (le «jour du Grand Pardon»)... La Croix,16 sept. 1983, p.13, col. 3-4.
Prononc. et Orth.: [paʀdɔ ̃]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist.1. 1130-40 «action de pardonner une offense» (Wace, La Vie de Sainte Marguerite, éd. E. A. Francis, 639); mil. xvies. je vous en demande pardon «formule de politesse par laquelle on s'excuse de déranger quelqu'un» (Yver, Le Printemps, cinquième histoire ds Conteurs français du XVIes., éd. La Pléiade, p.1240); 1802 sans pardon «impitoyable» (Delille, Pitié, III ds Littré); 2. 1160-74 «absolution religieuse» (Wace, Roman de Rou, II, 868, éd. A.-J. Holden); 3. ca 1240 «fête où se gagnaient les indulgences» (La Deuxième Collection anglo-normande des Miracles de la Sainte Vierge, 9, 127, éd. H. Kjellman: Une custume soleit aveir a Rome, Ceo poet saver chescun prodome, Ke vunt en les grans parduns En quaralme as estaciuns); spéc. 1834 «fête patronale avec pèlerinage en Bretagne» (Le Magasin pittoresque, p.247); 4. 1458 «se disait de l'angelus, à la récitation duquel des indulgences étaient attachées» (Arch. JJ 188, pièce 20 ds Gdf.); 5. 1721 «fête juive de l'expiation» (Trév.). Déverbal de pardonner*. Fréq. abs. littér.: 4039. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 4948, b) 7311; xxes.: a) 6870, b) 4905. Bbg.. Bar (F.). Superl. et intensifs dans le fr. d'auj. Fr. mod. 1952, t.20, p.27. _Quem. DDL t.19.