| PAPILLOTER, verbe I. − Empl. trans. A. − Vieilli. [L'obj. désigne la tête, les cheveux] 1. Garnir de papillotes, rouler en papillotes pour friser ou onduler. Papilloter ses cheveux; papilloter une perruque (Littré). La vieille dame, qui avait une figure très douce, couronnée entre le front et la coiffure par une ligne neigeuse de cheveux frisés papillotés chaque jour avec soin (Maupass.,Contes et nouv., t.1, Alex., 1889, p.757): 1. ... ces tire-bouchons raides et ces torsions excessives donnent plutôt aux cheveux l'aspect de balais irrités; mais les mamans de toutes ces petites filles (...) n'ont pas le temps, ni l'envie, ni l'adresse de papilloter toutes ces têtes.
Colette,Cl. école, 1900, p.268. ♦ Empl. pronom. réfl., vx. Se mettre des papillotes. (Ds Littré). − [P. méton. de l'obj.] Papilloter qqn.Mettre des papillotes sur la tête de quelqu'un. Vais (...) me faire papilloter, car il faut que je sorte (Barbey d'Aurev.,Memor. 1, 1838, p.219).Aujourd'hui nous commençons à papilloter ces gamines de huit à onze ans; accroupies à terre, elles nous abandonnent leurs têtes, et, comme bigoudis, nous employons des feuilles de nos vieux cahiers (Colette,Cl. école, 1900, p.268). 2. P. ext. Friser, boucler (comme) à l'aide de papillotes. Un portrait de lui, jeune visage au teint rosé, tout papilloté de boucles brunes (Fromentin,Dominique, 1863, p.27). B. − CUIS. [L'obj. désigne un poisson, une viande] Mettre en papillote, envelopper d'une papillote. Papilloter une côtelette (Rob.). II. − Empl. intrans. A. − 1. [Le suj. désigne les paupières, les yeux] Battre rapidement, avoir un mouvement oscillant nerveux et involontaire; p.méton., voir trouble. Synon. ciller, cligner, clignoter.Avoir les yeux qui papillotent. J'ai eu la simplicité de me mettre à lire cela (...) Je ne sais pas s'il faut attribuer cet effet à la traduction, mais (...) les yeux me papillotaient, je n'ai pas pu continuer (Balzac,Modeste Mignon, 1844, p.36).Vous ... croyez que tous les gens sont mythomanes? Les paupières de Clappique papillotaient nerveusement; il marcha moins vite (Malraux,Cond. hum., 1933, p.375): 2. Antoine (...) considérait sans complaisance cette figure de Chinois blond et ces lunettes d'or derrière lesquelles deux petits yeux bridés papillotaient sans cesse avec une expression joyeuse.
Martin du G.,Thib., Pénitenc., 1922, p.683. 2. [P. méton. du suj.] Nous suivons une avenue peu éclairée; il se penche pour me voir; je fais de loyaux efforts pour ne pas papilloter (Colette,Cl. Paris, 1901, p.233). ♦ P. métaph. L'image de Corinne papillotait au dehors de son coeur, comme un insecte qui bat des ailes de l'autre côté des carreaux (Rolland,J.-Chr., Révolte, 1907, p.481).Cette question qui papillotait là sous ses yeux, tandis qu'il marchait sous les arbres (Guéhenno,Jean-Jacques, 1948, p.273). B. − Littér. [Le suj. désigne un objet brillant ou une source lumineuse intense ou intermittente] Avoir un éclat scintillant, des reflets mouvants par une lumière ou des couleurs trop vives. Synon. miroiter, scintiller, trembloter.[Salle du Conseil au palais ducal de Venise] De toutes parts, le velours miroite, la soie ruisselle, le taffetas papillote, le brocart d'or étale ses orfrois grenus (Gautier,Italia, 1852, p.122). − Au fig. ♦ [Le suj. désigne le style d'un aut.] Accumuler les effets, les expressions brillantes, éblouir. Ce style au pinceau, fait de notations qui papillotent (...) a fait de leurs romans [des Goncourt], au bout d'un demi-siècle, de singuliers phénomènes (Thibaudet,Hist. litt. fr., 1936, p.366). ♦ [Le suj. désigne une pers. et p.méton. une manifestation de son comportement] Éblouir par un flot de paroles. Et il y avait autour des guéridons une conversation multiple et joyeuse qui papillotait aux oreilles (Toulet,Nane, 1905, p.92). C. − Spécialement 1. BEAUX-ARTS, PEINT. Présenter des points d'ombre, manquer de cohérence dans les rapports de lumière et de couleur. Il y a des tons bien notés, entre autres celui d'un coup de lumière sur un mur blanc, mais l'ensemble est cru et les détails papillotent (Huysmans,Art mod., 1883, p.51). 2. IMPR. [Le suj. désigne un caractère ou un tirage] Donner à l'impression un aspect flou, tremblé. Synon. friser (v. friser1II B 2 b).[L'annonce anglo-américaine] Dans ce papillotant concert, seules détonnent les noires «antiques» (E. Leclerc,Nouv. manuel typogr., 1932, p.376). 3. TÉLÉV. Manquer de netteté, trembloter. Image qui papillote (Rob.). REM. Papilloteur, subst. masc.,hapax. Coiffeur qui met des papillotes. M. Clarkson, tourneur en boucles, papilloteur breveté, est le plus illustre des figaros londoniens (Morand,Londres, 1933, p.248). Prononc. et Orth.: [papijɔte], (il) papillote [papijɔt]. Att. ds Ac. dep. 1762. Étymol. et Hist.1. a) Part. passé ca 1400 papeloté «garni de paillettes» (Doc. ds Chronique de la traison et mort de Richart II, éd. B. Williams, p.110); 1420 papilloté (Ducs de Bourgogne, no6409 ds Laborde 1872); b) verbe trans.
α) 1600 [éd.] «couvrir de paillettes» (Fauchet, Origines des dignitez et magistrats de France, livre I, chap.4, fo12 vo);
β) 1680 papilloter une perruque (Rich.); 2. verbe intrans. a)
α) 1762 les yeux lui papillotent continuellement (Ac.);
β) 1762 peint. «fatiguer les yeux par le trop vif éclat des lumières» (ibid.); b) 1762 impr. «marquer double et être embrouillé (des caractères d'imprimerie)» (ibid.); c) 1839 «scintiller comme des paillettes» (Balzac, Béatrix, p.207). Dér. de papillote*; dés. -er. Fréq. abs. littér.: 38. |