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OBÉRER, verbe trans.
Accabler d'une lourde charge financière, endetter jusqu'à la ruine. Il est de pratique constante, en effet, que l'on demande à une société de préparer un ouvrage important dans des délais courts et souvent avec un minimum de répétitions, afin de ne pas obérer un budget déjà lourd (Arts et litt., 1935, p.36-11).L'intervention [de Solon] confirma [son] renom de sagesse, lors du règlement des dettes qui obéraient les petits propriétaires de l'Attique (L'Hist. et ses méth., 1961, p.333):
1. Si riche que fût l'Espagne, ses charges l'obéraient. Les gaspillages de la cour, les gros gages des dignitaires, les bénéfices ecclésiastiques, l'ulcère sans cesse agrandi de la misère populaire, la guerre des Pays-Bas, les guerres d'Amérique et d'Asie, la cherté de la politique secrète, l'entretien des supports cachés qu'on avait partout, le travail souterrain de l'intrigue universelle, qu'il fallait payer et soutenir dans le monde entier, ces mille causes épuisaient l'Espagne. Hugo, Rhin, 1842, p.443.
Emploi pronom. Lévichon fournissait généreusement les cinquante autres [mille francs], n'ayant point supporté que ses deux amis s'obérassent (Gide, Caves, 1914, p.764).
Par pléonasme. Obérer de/par des dettes. Le capital est toujours une chose liquide, et la fortune est souvent obérée par des dettes hypothécaires qui empêchent d'en disposer ou de la convertir en monnaie (Boyard, Bourse et spécul., 1853, p.164).
P. anal. Accabler d'une lourde charge, constituer une entrave à quelque chose. L'ethnographe Marcel Griaule a bien perçu cette difficulté qui obère tant de recherches de «terrain» (Traité sociol., 1967, p.140).Les éléments qui quittent le sol sont généralement les plus jeunes, ce qui obère les possibilités de renouvellement de l'esprit agricole et des méthodes d'exploitation (Belorgey, Gouvern. et admin. Fr., 1967, p.368):
2. L'adolescence −du moins dans les régions de la bourgeoisie où il situe son Gillou −sera probablement dans un proche avenir ce qu'elle fut dans le passé: amorphe et versatile, inconsistante et malléable, elle continuera de jouer à la belote, de s'intéresser aux vedettes du sport et du cinéma... Mais, et c'est là que la conclusion qui se dégage de la tragédie de M. de Montherlant prend un poids et un sens terribles, une pareille jeunesse obère gravement l'avenir du pays... G. Lenormand ds Marcel, Heure théâtr., 1959, p.49.
REM.
Obérateur, subst. masc.,rare. Celui qui charge d'une dette, d'un poids. P. métaph. Je déteste en toi ceci, que, ayant des hanches sèches, bref anti-maternelles, tu marches cependant avec ce dandinement perpétuel de petit mammifère délesté depuis quelques jours à peine des kilos de ses couches (...), comme profitant de ta légèreté d'entr'acte, avant que ça recommence, et faisant même de ce dandinement de délivrance un appât à de prochains obérateurs! (Laforgue, Moral. légend., 1887, p.133).
Prononc. et Orth.: [ɔbeʀe], (il) obère [ɔbε:ʀ]. Ac. 1694, 1718 oberer, dep. 1740 obé-. Étymol. et Hist. 1690 (Fur.). Dér. de obéré*; dés. -er.