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* Dans l'article "NÈGRE,, subst. masc. et adj."
NÈGRE, subst. masc. et adj.
I. − Subst. masc.
A. − Homme de race noire. Nègres et mulâtres! (...) Viens-tu ici nous insulter avec ces noms odieux, inventés par le mépris des blancs? Il n'y a ici que des hommes de couleur et des noirs (Hugo,Bug-Jargal, 1826, p.152).L'appareil phonatoire varie-t-il d'une race à l'autre? Non, guère plus que d'un individu à un autre; un nègre transplanté dès sa naissance en France parle le français aussi bien que les indigènes (Sauss.1916, p.202).Si nous pensons que les nègres sentent mauvais, nous ignorons que pour tout ce qui n'est pas l'Europe, c'est nous, blancs, qui sentons mauvais (Artaud,Théâtre et son double, 1938, p.14):
1. Des morceaux de la nuit tournés hystériques! Voilà ce que c'est les nègres, moi j'vous le dis! Enfin, des dégueulasses... des dégénérés quoi!... −Viennent-ils souvent pour vous acheter? −Acheter? Ah! rendez-vous compte! Faut les voler avant qu'ils vous volent... Céline,Voyage, 1932, p.208.
Rem. Nègre, employé en parlant des pers. a eu des connotations péj. et, à ce titre, s'est trouvé concurrencé par noir qui est moins marqué (voir Hugo, loc. cit.). Actuellement nègre semble en voie de perdre ce caractère péj., probablement en raison de la valorisation des cultures du monde noir (v. négritude). Et comme le mot soleil est un claquement de balles / et comme le mot nuit un taffetas qu'on déchire / le mot nègre / dru savez-vous / du tonnerre d'un été / que s'arrogent / des libertés incrédules (Césaire, Corps perdu ds Aimé Césaire, Paris, Seghers, 1979 [1949], p.138). Je ne voulais pas être le plus grand des nègres qui ait jamais vécu, pas plus Toussaint Louverture que Walter White. Parce que, tout au fond de moi, là où les Blancs ne peuvent pas regarder, ça n'avait plus de signification (Ch.Himes, S'il braille, lâche-le..., trad. de l'angl. par R. Vavasseur et M.Duhamel, Paris, Gallimard, 1972, p.235).
Nègre blanc. Albinos de race noire. (Dict. xixes.).
Nègre pie. Albinos de race noire, dont l'albinisme n'est pas complet. (Dict. xixeet xxes.).
Loc. fam. Un combat de nègres dans un tunnel. Action, événement qui se déroule dans l'obscurité; au fig. chose obscure, incompréhensible, inintelligible. Elle l'aide à trouver ses mots... (...) il s'exerce péniblement au langage des jeunes rats de cinémathèque. Ça devient tout à fait le fameux combat de nègres dans un tunnel (A. Boudard,Cinoche, 1975, p.261 ds Rey-Chantr. Expr. 1979).
Vulg. (Il fait) noir* comme dans le cul d'un nègre.
Proverbe. pop. À vouloir blanchir* la tête d'un nègre, on perd sa lessive.
B. − P.anal. (de couleur)
1. Couleur brun foncé. Synon. tête-de-nègre.Le vigne-vierge, le patounia et mon nouveau pourpre. Ces couleurs sont foncées et remplacent avantageusement le noir, le marine et le nègre (Femina, oct. 1926, p.17 ds Quem. DDL t.16).
2. CUIS. Nègre en chemise*.
3. INDUSTR. CHIM. ,,Solution dans laquelle se fait la liquidation de la pâte de savon et qui devient brune`` (Rob. Suppl. 1970).
4. CIN. Panneau noir qui intercepte la lumière des projecteurs. C'est un des réflecteurs qui s'est détaché. Nous les appelons «nègres» au studio (M. Rémon,L'Araignée mâle, 1930, p.269, in Giraud ds Quem. DDL t.6).
C. − En partic.
1. [P.réf. à la traite des Noirs et à leur situation d'esclaves dans le Nouveau Monde jusqu'au xixes.] Synon. bois d'ébène (v. bois II C 3).Esclavage, traite des nègres. «Ce vieillard,» disoit un colon, en frappant le sachem de son bambou, «ne vaut pas une pièce d'or (...)» «D'ailleurs», disoit un autre colon (...) «ces sauvages sont des brutes qui ne valent pas le quart d'un nègre: ils aiment mieux se laisser mourir, que de travailler pour un maître (...)» (Chateaubr.,Natchez, 1826, p.344).Des nègres se sont fait tuer au service de la cause esclavagiste, dans la grande guerre civile américaine. On vit des nègres narguer John Brown qui montait à l'échafaud pour avoir voulu délivrer la race noire de ses chaînes (Clemenceau,Iniquité, 1899, p.350):
2. Je possède en ce moment cinquante mille francs qui me donneraient à peine quarante nègres. J'ai besoin de deux cent mille francs, parce que je veux deux cents nègres, afin de satisfaire mon goût pour la vie patriarcale. Des nègres, voyez-vous? C'est des enfants tout venus dont on fait ce qu'on veut (...). Avec ce capital noir, en dix ans j'aurai trois ou quatre millions. Balzac,Goriot, 1835, p.126.
Nègre marron*.
(Faire) bûcher, piocher, travailler (qqn) comme un nègre. (Faire) travailler (quelqu'un) très durement. Je bûche comme un nègre, je ne lis rien, je ne vois personne, j'ai une existence de curé, monotone, piètre et décolorée (Flaub.,Corresp., 1861, p.454).Traiter qqn comme un nègre. Traiter quelqu'un avec dureté et mépris. La Crécy le traite comme un nègre, et l'appelle Bibi!... Il en est fou naturellement (Goncourt,Ch. Demailly, 1860, p.193).
2. [P.réf. au fr. sommaire parlé par certains Noirs des colonies francophones] Nègre, petit (-) nègre. Français approximatif. Je pouvais couramment parler le «tahitien de la plage» qui est au tahitien pur ce que le petit-nègre est au français (Loti,Mariage, 1882, p.134).
3. [P.réf. aux Noirs employés autrefois, en tant que domestiques] Mon papa avait un nègre qui l'a défendu tant qu'il a pu (Sénac de Meilhan,Émigré, 1797, p.1674).Sa voiture était neuve et ses chevaux admirables: ses nègres, un peu trop battus, obéissaient sur un coup d'oeil (Taine,Notes Paris, 1867, p.100).
4. P.anal. (de fonction)
a) Auxiliaire qui prépare le travail de quelqu'un et en partic. personne anonyme qui rédige pour une personnalité, qui compose les ouvrages d'un auteur connu. Tu sais que ce n'est pas le jeune Blaise Delmuter qui fait les livres de Joseph. Delmuter ne lui fait que ses discours. Pour les livres, je ne connais pas le nègre de Joseph (Duhamel,Passion J. Pasquier, 1945, p.116):
3. Un éditeur lui ayant demandé de le traduire en russe, [Le Capital] il se mit à la tâche, mais au cours du travail, il se sentit saisi d'un insurmontable ennui, la plume lui tomba des mains, et il passa la traduction à des nègres qui l'achevèrent pour lui. Tharaud,Cruelle Esp., 1937, p.58.
b) Homme à tout faire; personne exploitée sans limites. Ce que c'est qu'un nègre [chez les chiffonniers] (...) La fillette [du chiffonnier] a des soupirants (...) l'un d'eux se résigne à devenir [pour un an] l'employé, l'ouvrier, l'esclave (...) le nègre du père (Grison,Paris, 1882, p.117).
II. − Adjectif
A. −
1.
a) [En parlant d'une pers. ou d'un groupe] De race noire, qui appartient à la race noire. Synon. noir.Tribus nègres. Un serviteur nègre qui ronflait bruyamment et que nous tirâmes du sommeil, courut avertir son maître (Tharaud,Fête arabe, 1912, p.166):
4. ... des femmes nègres, en chantant au clair de lune des paroles barbares, lui piquèrent la peau du front avec des stylets d'or... Flaub.,Salammbô, t.1, 1863, p.33.
b) [En parlant d'un inanimé] Propre aux gens de race noire, aux populations noires. Danse, masque, sculpture nègre. Les admirables vases géométriques crétois (si près de l'art nègre et des motifs de vannerie des Indiens Hopi) (Morand,New-York, 1930, p.227).
Air, musique nègre. Air, musique africain(e). Synon. vieilli de jazz.On annonça le film africain. L'obscurité se fit. L'orchestre entama un air nègre (Martin du G., Thib., Belle sais., 1923, p.998).
2. Qui a les caractéristiques physiques propres à la race noire. Il n'avait pas le type nègre autant que sa soeur (Michelet,Journal, 1861, p.571).
À la nègre. À la manière des gens de race noire. La chevelure frisée à la nègre (Goncourt,Journal, 1858, p.523).
B. − P.anal. (de couleur). Brun foncé. Jupe-culotte en beau shetland marine ou nègre (Catal. jouets [B.H.V.], 1936).
En compos., au fig. Nègre-blanc. [En parlant d'une motion, d'un texte] Rédigé en des termes ambigus qui ménagent chacune des parties. Mais si (...) un ordre du jour «nègre-blanc» était adopté, alors serait remise en cause l'utilité du déplacement de M. Laniel aux Bermudes (Le Combat, 17 nov. 1953, p.1, col. 2).
REM. 1.
Nègrerie, subst. fém.a) Vieilli. Lieu où étaient enfermés les nègres. b) Hapax. La nègrerie pue sa misère, ses vanités interminables, ses résignations immondes (Céline,Voyage, 1932, p.178).
2.
Négrescent, -ente, adj.Dont le type physique se rapproche de celui du nègre. Pour l'instant, les justes étaient tous noirs, noir d'ivoire, mulâtres olive, quarterons foncés, (...) métis bistres, créoles négrescents (Morand,Magie noire, 1930, p.59).Les puants du cinéma et du porte-plume, tous métèques, négrescants [sic], macaques épouillés de l'avant-veille (Aymé,Travelingue, 1941, p.127).
3.
Négrifier, verbe trans.Rendre nègre (par un apport de population noire). Back Britain not Black Britain: soutenez la Grande-Bretagne, ne la négrifiez pas. C'était une des pancartes brandies par un millier de dockers londoniens (Le Nouvel Observateur, 30 avr. 1968, p.18, col. 3).Au part. passé. Hitler, dans Mein Kampf, parlant de la race française comme abâtardie et négrifiée, prétendit qu'il ne fallait pas essayer de comprendre les Français (J. Lantier,Le Temps des mercenaires, Paris, Marabout, 1969, p.57).
4.
Négro-, élém. de compos.représentant le subst. nègre, entrant dans la constr. de quelques mots.a)
Négro-africain*. , adj.-
b)
Négro-américain, -aine, adj.Relatif aux Noirs d'Amérique. Le jazz est apparu, au lendemain de la Première Guerre mondiale, comme le mode d'expression privilégié du groupe négro-américain (Encyclop. univ.t.91971, p.408, s.v. jazz).
c)
Négro-chamitique, adj.Relatif aux peuples d'Afrique Orientale provenant du métissage des Noirs et des populations supposées issues de Cham, c'est-à-dire les Éthiopiens et les Libyens. (Ds Lar. encyclop., Lar. Lang. fr., Lexis 1975).
5.
Négrité, subst. fém.Négrité, vietnamité et francité, autant de néologismes qui firent un temps leur apparition en ce monde (Thai Van Kiem, inLe Monde,23 avr. 1974, p.9 ds Quem. DDL. t.24).
6.
Négritie, subst. fém.Je bûche, je pioche, (...) comme la négritie en personne (Flaub.,Corresp., 1876, p.360).
7.
Négrure, subst. fém.,rare. Caractère de celle, de celui qui a la peau foncée. Il est brun, terriblement brun, jusqu'à la négrure, comme on dit dans le Midi (L. Daudet,Mésentente, 1911, p.48).
Prononc. et Orth.: [nε:gʀ ̥]. Att. ds Ac. dep. 1762. Étymol. et Hist. A. Subst. 1. a) 1529 «personne de race noire» (Parmentier, Voyage à Sumatra, éd. Ch. Schefer, p.112 ds Gdf. Compl.); b) 1704 «noir employé autrefois dans certains pays chauds comme esclave» (Trév.); c) α) 1740-55 traiter comme un nègre (Saint-Simon, Mémoires, éd. A. de Boislile, t.6, p.412); β) 1812 travailler comme un nègre (Courier, Lettres Fr. et Ital., p.857); 2. 1757 fig. «personne qui ébauche ou écrit entièrement les ouvrages signés par un écrivain célèbre» (Collé, Journ., II, 108, juillet ds Brunot t.6, p.1382); 3. a) α) 1611 neigre adj. «brun foncé» (Cotgr.); β) 1924 subst. «couleur brun foncé» (Gazette du bon ton, no4, 181 ds Quem. DDL t.16); b) 1822 tête de nègre «couleur brun foncé» (Michelet, Mémor., p.211); 4. a) 1857 parler nègre «parler en mauvais français» (Goncourt, Journal, t.1, p.308); b) 1877 petit nègre subst. «mauvais français» (Le Charivari, 6juill. 1 a ds Quem. DDL t.3); 5. 1932 cuis. nègre en chemise (Je sais cuisiner, Paris, Albin Michel, p.469). B. Adj. 1. a) 1759 «qui appartient à la race noire» (Voltaire, Candide, chap. XIV, éd. A. Morize, p.86: esclaves Négres); b) 1814 race nègre (Nysten); 2. 1922 art nègre (Proust, Prisonn., p.237). Empr. à l'esp. negro «personne de race noire» (xves., v. Cor.-Pasc. et Al.), proprement «noir» (ca 1140 ds Cor.-Pasc.), du lat. niger, v. noir. Cf. FEW t.7, p.134a-b et p.136a. Fréq. abs. littér.: 1935. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 2616, b) 4008; xxes.: a) 1936, b) 2684. Bbg. Arv. 1963, p.363 s.v. négrerie. _Brasseur (P.). Le Mot nègre dans les dict. encyclop. fr. du xixes. Cultures et développement. 1976, t.8, pp.579-594. _Delesalle (S.), Valensi (L.). Le Mot nègre dans les dict. fr. d'anc. régime. Lang. fr. 1972, no15, pp.79-104. _Quem. DDL t.6, 16, 25. _Spitzer (L.). Z. fr. Spr. Lit. 1917, t.44, p.221 (s.v. négro-).