| * Dans l'article "MÂCHER1,, verbe trans." MÂCHER1, verbe trans. A. − 1. [L'obj. désigne une substance comestible] Réduire en parcelles très petites, écraser avec les dents. Il faisait manger le petit, essayait de manger lui-même, coupait la viande, la mâchait et l'avalait avec effort, comme si sa gorge eût été paralysée (Maupass., Contes et nouv., t. 2, M. Parent, 1886, p.601). ♦ Emploi abs.: 1. Je m'émerveillais, en effet, qu'on pût observer aussi scrupuleusement le code de la parfaite tenue à table, tout en faisant disparaître, à cette cadence, des morceaux d'un tel calibre! Un homme qui dîne seul et a faim, tombe presque toujours dans son assiette; il mâche, broie, ronge, travaille des joues, du menton, de la gorge. De Scève mangeait de haut, sans hâte, sans effort, mais il en était à sa troisième tranche...
Vercel, Cap. Conan, 1934, p. 40. ♦ Emploi pronom. à sens passif. La viande ainsi coupée à un aspect plus agréable, se goûte mieux, et se mâche plus facilement (Brillat-Sav., Physiol. goût, 1825, p. 69). − Loc. verb., vieilli ou littér. Mâcher à vide ♦ Reproduire les mouvements de la mastication sans rien avoir sous la dent. Le sourd claquement de ses dents qui s'entre-choquaient comme celles d'un tigre qui mâche à vide (Sue, Atar-Gull, 1831, p. 35).La tête étonnamment simiesque de Girardin, qui broie sa nourriture avec les mouvements mélancoliques des mandibules de singes, qui mâchent à vide (Goncourt, Journal, 1878, p. 1215). ♦ Au fig. N'avoir rien de précis, de concret à utiliser. On le disait capable de tout. N'est-ce pas ce que la calomnie dit d'un homme quand elle mâche à vide et n'a point de pâture sous les dents? (Balzac,
Œuvres div., t. 3, 1839, p. 242): 2. En parlant d'un ordre qui existait, en le citant par son nom (...) l'abbé Givresin fournissait à Durtal une substantielle pâture pour la manie raisonneuse de son verbiage; il le mettait en mesure de ne plus mâcher (...) à vide.
Huysmans,Cathédr.,1898, p. 230. 2. Au fig. a) Expliquer dans le détail de façon à faciliter à quelqu'un la compréhension et l'assimilation de quelque chose; préparer minutieusement à quelqu'un ce qu'il doit faire. Mâcher la besogne, le travail. Je l'attends donc, et, en attendant, je lui mâche et lui résume ce qu'il faut qu'elle commence à comprendre, à voir et à sentir (Sand, Corresp., 1861, p. 290).Quand on est cinquante ou soixante, un commandant c'est une bonne chose. Mais ces trois types, je ne vois pas pourquoi ils auraient besoin qu'on leur mâche le morceau (Giono, Bonh. fou, 1957, p. 369). b) Mâcher ses mots, ses paroles (ou un terme appartenant au même paradigme) − Vieilli ou littér. [À la forme affirmative] Prononcer de façon peu distincte. Nana se vengea des ennuis qu'on lui causait, en mâchant de sourds jurons contre les hommes (Zola, Nana, 1880, p. 1136). − [À la forme négative] Ne pas mâcher ses mots, son opinion (ou un terme du même paradigme). S'exprimer de façon claire et sans ménagement. Ils fourbent pour le plaisir de fourber, et, comme on dit, pour s'entretenir la main. Voilà mon opinion, je ne la mâche pas (Balzac, Pts bourg., 1850, p. 64).Les autres camarades ne me l'ont pas mâché: dès qu'on me voit, on est édifié sur mon tempérament, on sent combien je suis femme et que «j'ai passé par tous les chemins» (Frapié, Maternelle, 1904, p.191).Le vieux ne mâchait pas les mots, crachant son mépris, éclaboussant cette passion d'une volée de boue (Moselly, Terres lorr.,1907, p. 264). B. − [L'obj. désigne une substance gén. non comestible] Réduire en poudre ou en pâte en mordillant avec les dents et/ou en humectant de salive. Synon. mastiquer.Gomme* à mâcher; mâcher un chewing-gum, une chique. Il frissonna, rouvrit les yeux, et regarda fixement devant lui, en mâchant rageusement sa gomme, avant de poursuivre (Martin du G., Thib., Épil., 1940, p. 827): 3. Leurs voisins blancs estimaient fort les racines d'angéliques qu'ils mâchaient contre les troubles d'estomac, et un savant de la fin du
xviiiesiècle attribua à certains des remèdes indigènes de fortes vertus cathartiques.
Lowie, Anthropol. cult., trad. par E. Métraux, 1936, p. 363. − Emploi abs. Les peuples jaunes ont coutume de mâcher pour se rafraîchir la bouche (Flaub., Tentation, 1849, p. 389). C. − 1. Mordiller, saisir entre les dents à plusieurs reprises. Synon. mâchonner.Celui qui (...) prend la taille de la femme de chambre devant la maîtresse de la maison, mâchant son cure-dents, riant à ses propres bons mots et débitant des ordures (Flaub., 1reÉduc. sent., 1845, p. 110).Le capitaine Gillmann continua, mâchant le bout de sa pipe de bruyère (Mille, Barnavaux, 1908, p. 176).Il leur répondait, avec méthode, en mâchant son éternel bout de cigare (Martin du G., Thib., Été 14, 1936, p. 249). − [Le suj. désigne un animal de selle] Que la mule rétive et la cavale Mâchent comme gingembre leurs mors (Moréas, Pèlerin pass., 1891, p. 105). 2. Au fig., littér. [Souvent à propos de qqc. de désagréable] Penser sans cesse à quelque chose. Synon. remâcher, ruminer.Mâcher sa douleur, son humiliation. Mâche cette idée dans ta ronde tête administrative, et moi j'exécuterai (Lamart., Corresp., 1830, p. 31).Je passe mes journées à mâcher je ne sais quelles rancunes (Arland, Ordre, 1929, p.376).Sur ce dernier point non plus, Jos-Mari, qui commençait à mâcher et à remâcher ses idées, n'était pas d'accord avec Andreas (Peyré, Matterhorn, 1939, p. 118). REM.1. Mâche, subst. fém.Avoir de la mâche, loc. verb. [Le suj. désigne un vin] Être riche en tanin. C'est la teneur en tanin d'un vin qui détermine l'emploi de certains termes chers aux oenophiles, tels que de la mâche, âpre, astringent (DrG. Debuigne, Nouv. Larousse des vins,Paris, Larousse, 1979, p. 282). 2. Mâché, adj. masc.Papier* mâché. Prononc. et Orth.: [mɑ
ʃe], [-a-], (il) mâche [mɑ:ʃ], [-a-]. Ac. 1694, 1718 mascher; dep. 1740 mâcher. Étymol. et Hist. A. 1. a) Ca 1185 (Marie de France, Purgatoire St Patrice, 413 ds T.-L.: E cele denz que vus avez, Qu'unkes vïande ne mascha); 1552 (Est. s.v. mando-mansum: mansum in os inferre. Luy bailler tout masché); 1580 (Montaigne, Essais, II, X, éd. A. Thibaudet et M. Rat, p. 397: Ces historiens nous gastent tout: ils veulent nous mascher les morceaux); b) 1773 «triturer une substance molle dans sa bouche sans l'avaler» fig. des organes de papier mâché (Voltaire, Lettre à d'Argental, 19 avr. ds Corresp., éd. Th. Besterman, t. 39, p. 391); 2. fin xiiies. [ms. Bibl. nat. fr. 837] fig. ne le querre maschier «ne pas chercher à dissimuler, dire franchement» (De la fole et de la sage ds Jubinal, Nouv. recueil de fabliaux, t. 2, p. 79); 3. fig. a) xiiies. «se pénétrer d'une chose au point de la faire sienne, de l'acquérir» maskier sens «se pénétrer de sagesse» (Chans. et dits artésiens, éd. A. Jeanroy et H. Guy, XV, 36); b) ca 1350 «se pénétrer d'une chose, la méditer» (Gilles Li Muisis, II, 192 ds T.-L.). B.1306 «mordre un objet placé entre les dents» maschier le fraing (Guillaume Guiart, Royaux lignages, I, 1014 ds T.-L.). Du b. lat. masticare «mâcher»; ce verbe (= gr. μ
α
σ
ι
α
́
ω) se substitua en ce sens au début du ives. aux verbes ant. mandere et manducare (celui-ci issu du 1erpar l'intermédiaire du dér. manducus, proprement «le bâfreur», nom d'un bouffon d'atellanes portant un masque aux énormes mâchoires remuant à grand bruit) quand, mandere n'ayant laissé aucune trace dans les lang. rom., manducare fut utilisé pour exprimer la notion de «manger», v. manger. DÉR. 1. Mâchement, subst. masc.Action de mâcher. (Dict. xixeet xxes.). Pathol. Synon. de mâchonnement (Dict. xixeet xxes.). − [mɑ
ʃmɑ
̃], [maʃ-]. − 1resattest. 1538 (Est., s.v. commanduco-commanducatus: le maschement entre les dents), 1867 pathol. (Littré); de mâcher1, suff. -(e)ment1* 2. Mâcheur, -euse, subst.[Correspond à B supra] Mâcheur de qqc. Personne qui a l'habitude de mâcher quelque chose. Sobriquets de racleurs de cuir et de mâcheurs de cachous (Claudel, Soulier, 1929, 3ejournée, 2, p. 779).Mâcheurs de gomme en bras de chemise (Morand, New-York, 1930, p. 71).Au fig., littér. Personne qui prononce, qui dit (quelque chose). Où sont-ils, (...) Tous ces moines, ces vils mâcheurs de patenôtres, Gorgés par tes aïeux de tant de biens pourtant? (Leconte de Lisle, Poèmes trag., 1886, p. 136).− [mɑ
ʃoe:ʀ], [ma-], fém. [-ø:z]. − 1reattest. a) 1562 adj. [muscles] mascheurs (Paré,
Œuvres, éd. J. Fr. Malgaigne, I, 8, t. 1, p. 123b), b) 1611 subst. «celui qui mâche, celui qui mange» (Cotgr.), 1690 (Fur.: Qui disne bien); de mâcher1, suff. -eur2*. BBG. −Dub. Dér. 1962, p. 31 (s.v. mâchement). |