| MOUSSE1, subst. fém. A.− 1. Plante poussant dans des milieux divers (terres, roches, écorces, etc.), généralement verte, formant un tapis ras et doux constitué de tiges courtes, denses et serrées. Mousse élastique, épaisse, mœlleuse; lit, nid, tapis de mousse; mur mangé, rongé par la mousse; couvert de mousse; s'allonger, s'asseoir sur la mousse. Sur les vieux troncs, la mousse vert-jaune semble avoir coulé. Une mousse sèche et couleur de vert-de-gris (...) sourd par plaques sur l'écorce grise, rayée, serrée (Goncourt, Journal,1857, p. 373).Certaine fontaine du parc ancestral, chère à mon adolescence, se prit à chanter dans ma mémoire; il y avait au bord de son bassin un banc rongé de mousses dures et brûlées (Milosz, Amour. initiation,1910, p. 50): 1. ... on descend au cloître, où le jour, tombant de très haut à cause du rocher qui le domine et l'enserre, paraît décoloré malgré le plein soleil d'après-midi. Des mousses très humides tapissent les murs et une eau constante y ruisselle. Tout s'y semble effriter d'une pourriture blanche et verte.
Gide, Feuilles de route,1896, p. 67. − [En fonction de déterm.] Vert de mousse. La lande est sèche, couleur de vieille mousse séchée (Flaub., Champs et grèves,1848, p. 361).Elle était couleur de rouille, couleur de mousse, sa houppelande, couleur d'écorce, couleur de pierre; elle avait la couleur des choses de la nature (Ramuz, Derborence,1934, p. 50): 2. ... c'est un tapis persan du xviesiècle, ayant cet adorable velouté du velours ras, et tissé dans l'harmonie des deux couleurs de vieille mousse et de vieil or qui en forment le fond et sur lequel zigzaguent, ainsi que des vols aigus d'oiseaux de mer, des arabesques bleues.
Goncourt, Journal,1894, p. 685. − Emploi adj. ou en appos. Vert mousse. Madame Valéry, exquise dans une robe empire en velours vert mousse (Gide, Journal,1902, p. 128).Agate mousse (v. agate ex. 18). Synon. agate mousseuse*. − Proverbe. Pierre* qui roule n'amasse pas mousse. 2. P. anal. a) Mousse aquatique, d'eau. Végétation qui se forme sur les eaux stagnantes. La mousse aquatique ou sphaigne des marais, composée de filaments soyeux d'un beau vert (Bern. de St-P., Harm. nat.,1814, p. 182).Un réservoir d'eau tout couvert d'une certaine petite mousse d'eau, voile vert de l'eau dormante, qui est comme fendillé et craquelé comme un vieux tableau (Goncourt, Journal,1858, p. 519). b) PHARM. Mousse de Corse. Mélange d'algues utilisé en médecine comme vermifuge. (Dict. xixeet xxes.). Mousse d'Islande. Lichen utilisé dans certaines préparations pharmaceutiques (Dict. xixeet xxes.). 3. Maladie contagieuse due à un champignon qui se développe sur la peau des poissons vivant dans de mauvaises conditions d'hygiène. La mousse, qui provient d'un champignon parasitaire, fait apparaître sur les poissons déficients ou blessés des filaments jaunâtres envahissants. Elle est particulièrement redoutable en pisciculture (Pollet1970). B.− Au plur., BOT. Classe de plantes cryptogames cellulaires de l'embranchement des Bryophytes, chlorophylliennes, pourvues de feuilles, fixées au sol par des rhizoïdes, à reproduction sexuée (spores) et parfois végétative. Des mousses promptement desséchées et conservées dans un herbier, fût-ce pendant un siècle, et remises, après ce temps, dans l'humidité à une température douce, pourront reprendre la vie et végéter de nouveau (Lamarck, Philos. zool.,t. 1, 1809, p. 405).Similitude structurale et fonctionnelle des anthéridies et celle des archégones chez les mousses et chez les fougères (Hist. gén. sc.,t. 3, vol. 1, 1961, p. 538). C.− 1. P. anal., arg. et pop. Cheveux. Plus de mousse sur le caillou, quatre cheveux frisant à plat dans le cou (Zola, Assommoir,1877, p. 725). 2. Loc. pop. Se faire de la mousse. Se faire du souci. Ben, t'en as, toi, des besoins d'te faire d'la mousse! Pourquoi qu'tu chiales comme ça, au lieu d'me dire les choses?... (Benjamin, Gaspard,1915, p. 149).La môme (...) elle est enceinte (...). Elle se fait pas de mousse, pas du tout, elle est vachement sûre que tu l'aimes (Fallet, Banl. Sud.-Est,1947, p. 380). Prononc. et Orth. : [mus]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) Fin du xies. molse « plante cryptogame dont les folioles tapissent les lieux où elle croît » (Raschi, Gl., éd. A. Darmesteter et D. S. Blondheim, t. 1, no720); 1176-81 mosse (Chrétien de Troyes, Chevalier Lion, éd. M. Roques, 4650); 1erquart du xiiies. fig. mousse (Reclus de Molliens, Charité, 122, 11 ds T.-L.); b) ca 1480 ne jamais cueillir mousse « ne jamais devenir riche » (Le Mistere du Viel Testament, éd. J. de Rothschild, t. 4, p. 403, 36382); 1611 pierre qui se remue n'accueille point de mousse « on ne s'enrichit pas en changeant souvent d'état, de pays » (Cotgr.); 1688 pierre qui roule n'amasse point de mousse (Miege); 1823 pierre qui roule n'amasse pas de mousse (Boiste); 1893 pierre qui roule n'amasse pas mousse (DG); 2. 1694 « moisissure qui vient sur la tête des vieilles carpes » (Ac.); 3. 1791 mousse aquatique (Valm.); 1810 mousse de Corse (Capuron, Nouv. dict. de méd.); 1814 mousse d'Islande (Nysten). De l'a. b. frq. mosa « mousse [plante] » (cf. m. néerl. mos, néerl. mos, all. Moos), latinisé en Gaule en mõssa (cf. mussula « petite mousse » chez Grégoire de Tours), cependant certaines formes (le judéo-fr. molse, l'a. prov. molsa (xiiies.), Prades mulso et Saugues mursa, v. FEW t. 16, p. 569a) remontent au lat. mulsa « hydromel » (dér. de mel « miel », cf. mulsum (vinum) « vin mêlé de miel » qui aura été employé métaphoriquement pour désigner la plante, si bien qu'on peut admettre que les 2 étymol. sont à l'orig. du français. Bbg. Meyer-Lübke (W.). Die Ausdrücke für Moos in Italien und Frankreich. Z. fr. Spr. Lit. 1934, t. 58, pp. 28-36. − Quem. DDL t. 12, 16, 18. |