| MOSAÏQUE1, subst. fém. A. − Assemblage fait de petits cubes ou de fragments multicolores de divers matériaux (pierre, marbre, émail, verre, métal, bois, etc.) formant un motif décoratif qui pare le revêtement d'un sol, d'un mur, d'un plafond ou la surface d'un objet. Table, vase en mosaïque; mosaïque murale, de pavement. Rastignac arriva rue Saint-Lazare, dans une de ces maisons légères, à colonnes minces, à portiques mesquins, qui constituent le joli à Paris, une véritable maison de banquier, pleine de recherches coûteuses, de stucs, de paliers d'escalier en mosaïque de marbre (Balzac,Goriot,1835, p.160).C'était un beau monument [la fonda del Caballero à Tolède], quelque ancien hôtel sans doute, avec une cour intérieure dallée de marbres de couleur formant mosaïque (Gautier,Tra los montes,1843, p.140).La salle de jeu ou fumoir avec (...) l'immense table en marbre ou en mosaïque émaillée, (...) cette salle de jeu me fit l'effet d'une véritable chambre magique (Proust,Sodome,1922, p.688): 1. l'étranger: Tout ce que je me rappelle, du palais d'Agamemnon, c'est une mosaïque. On me posait dans un losange de tigres quand j'étais méchant, et dans un hexagone de fleurs quand j'étais sage. Et je me rappelle le chemin qui me menait rampant de l'un à l'autre... On passait par des oiseaux.
Giraudoux,Électre,1937, I, 1, p.13. − P. méton. L'oeuvre artistique qui procède de ce type d'assemblage. Sur des portes de monastères on représentait, par la sculpture, la peinture ou la mosaïque, quelque sujet qui pût indiquer à quel ordre appartenaient les religieux (Lenoir,Archit. monast.,1852, p.75): 2. Dominique (...) disait que la peinture, avec ses couleurs périssables, ne doit être regardée que comme un dessin, que la véritable peinture pour l'éternité, c'est la mosaïque.
Stendhal,Hist. peint. Ital.,t.1, 1817, p.155. − P. anal. ou au fig. Ensemble formé d'éléments nombreux et disparates. Tout ne vous invite-t-il pas à faire de votre âme une mosaïque de sensations compliquées? (Bourget,Essais psychol.,1883, p.49).Les grandes prairies, les clochers, les arbres, la mosaïque des champs labourés, la coupure droite et argentée d'un canal où glissaient lentement d'autres voiles (...) tout m'arrivait à la fois, aux yeu., aux oreilles et à l'esprit (Hugo,Fr. et Belg.,1885, p.127).L'Allemagne était alors une mosaïque de principautés et de villes libres (Bainville,Hist. Fr.,t.1, 1924, p.155). B. − P. anal. 1. PHYTOPATHOL. ,,Maladie causée aux feuilles des plantes cultivées (tabac, tomate, haricot, canne à sucre) par un virus filtrant qui se manifeste par des taches jaunes`` (Fén. 1970): 3. Or, n'est-ce pas là justement, dira-t-on, le cas des «virus» invisibles qui produisent un grand nombre de maladies, animales ou végétales: rage, petite vérole, varicelle, encéphalite, fièvre aphteuse, maladie des chiens, mosaïque du tabac, etc.
J. Rostand, Genèse vie,1943, p.188. 2. ÉLECTRON. Électrode recouverte d'un certain nombre de corpuscules photo-électriques indépendants (d'apr. Électron 1959). 3. GÉNÉT. Anomalie affectant la distribution chromosomique et portant souvent sur les chromosomes sexuels (d'apr. Méd. Psychanal. 1971). − P. méton. Individu présentant cette anomalie: 4. La présence dans un organisme d'un chromosome Y et les conséquences métaboliques qui y sont liées − notamment en ce qui concerne androgènes, hormones sexuelles mâles − facilitent de manière indéniable la réalisation de certaines performances sportives. C'est pourquoi il serait inégal de laisser concourir côte à côte «mosaïques» et sujets «normaux». On retrouverait au reste la même injustice renversée si l'on obligeait les «mosaïques» à concourir avec les hommes.
Le Monde,14 févr. 1981, p.24. 4. PHOT. AÉRIENNE. ,,Assemblage de photographies aériennes à axe vertical non redressées, juxtaposées de façon que le raccord des détails soit assuré au mieux`` (Topogr. 1980). 5. RELIURE. ,,Technique consistant à utiliser des cuirs de couleurs diverses pour la reliure des livres`` (Brun 1968). REM. Mosaïculture, subst. fém.,hortic. ,,Type de décoration des corbeilles formant des dessins à l'aide de plantes basses de coloris variés`` (Agric. 1977). Prononc. et Orth.: [mɔzaik]. Ac. 1694: -saique; dep. 1718: -saïque. Étymol. et Hist. 1. 1498 faict de musayque «orné d'un plaquage de petits cubes de bois ou d'ivoire» (doc. 18 sept., Bl.-Mant., 49, Richel. ds Gdf.); fin xves. «assemblage de petits cubes multicolores de marbre, pierre ou terre cuite, formant un dessin» (Commynes, Mém., VII, 18, éd. J. Calmette, t.3, p.111: la chappelle Saint-Marc [...] toute faicte de musaïque en touts endroitz); 1529 mosaïque (G. Tory, Champfleury, fo23 ro); 2. av. 1801 au fig. «ensemble composé d'éléments disparates», ici, dans le domaine littér. (Rivarol, conversation notée par Chênedollé ds Rivarol, Paris 1923, p.378); 3. 1925 bot. mosaïque du tabac (Ferré ds Nouv. Traité Méd. fasc.4, p.112). Empr. à l'ital. mosaico, anc. musaico (att. au sens 1 dep. 1308-48, G. Villani ds Batt.), empr. au lat. médiév. musaicum (opus) «mosaïque» (ixes., à Ravenne ds Blaise Latin. Med. Aev.), altération, par confusion de suff., du lat. d'époque impériale mūsivum (opus), empr. au gr. μ
ο
υ
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ν «qui se rapporte aux muses» parce que ce mode de décoration fut d'abord utilisé dans les grottes dédiées aux muses; cf. a. fr. (or) museu, musique, directement issus du lat.; v. FEW t.6, 3, pp.266b-267a. Bbg. Dauzat Ling. fr. 1946, p.39. _ Hope 1971, p.44, 149. |