| MONT, subst. masc. GÉOGR. et GÉOL. I. − [Non suivi de nom propre] A. − Au sing. Importante élévation naturelle de terrain au-dessus du sol environnant et dont la surface coïncide totalement ou approximativement avec une voûte anticlinale. Descendre, escalader, gravir le mont; le mont se dresse, se profile; cime, flanc, sommet, versant du mont; mont boisé, élevé. Une abbaye se montroit au haut d'un mont; au pied de ce mont, dans une anse caillouteuse, apparoissoient les toits rouges de la petite ville de Santa-Crux (Chateaubr., Essai Révol., t.2, 1797, p.382).Les chevaux franchissant le mont et le val (Colette, Dialog. bêtes, 1905, p.84): 1. Des villages d'en bas, les cloches montèrent. De l'un d'abord, nid blotti dans un creux, au pied de la montagne, avec ses toits de chaumes bariolés, noirs et blonds, revêtus de mousse épaisse, comme du velours. Puis, d'un autre, invisible, sur l'autre versant du mont.
Rolland, J.-Chr., Buisson ard., 1911, p.1416. Rem. Les ex. rendent compte de la différence que Dupré 1972 établit entre montagne et mont, ce dernier désignant une «masse individuelle rocheuse qui apparaît détachée, isolée et s'apercevant d'un seul coup d'œil». Mais mont, le plus souvent n'est que le synon. de montagne. − Vx. ,,Nom donné par les riverains du lac Léman à des pentes sous-lacustres que l'on rencontre à une certaine distance des rives et où l'on cesse de pouvoir distinguer le fond du lac par la transparence des eaux`` (Littré). ♦ P. métaph. Juvénal, noir, rongé par la muse, est un lieu Autant qu'un homme, un mont de haine, et s'accoutume À la colère ainsi que Vésuve au bitume (Hugo, Quatre-vents esprit, 1881, p.226). B. − Au plur., poét. et littér. Hauteur. De sa lèvre renflée il approche à l'instant Une corne qu'un buffle a brisée en luttant; Il y souffle le vent de sa bruyante haleine, Que l'écho fait vibrer sur les monts et la plaine (Lamart., Chute, 1838, p.892): 2. Vent des monts aux bruyantes ailes,
Voisin des astres radieux,
Pousse, au fond des noires chapelles,
Ton air libre où meurent les dieux!
Bouilhet, Dern. chans., 1869, p.207. − En partic. [Pour désigner des massifs importants servant de frontières naturelles (Alpes, Pyrénées)] Il ne voulut jamais aller à Rome (...), d'ailleurs est-il nécessaire de passer les monts pour étudier les maîtres? (Gautier, Guide Louvre, 1872, p.165). − P. anal. Élévation plus ou moins importante de matière ou de matériaux dont l'accumulation fait penser à une montagne. Nous n'avons plus les navires à plaques d'or, les longs navires bleus dont la proue coupait les monts de glace, quand nous cherchions, sur l'océan, les génies cachés qui bramaient dans les tempêtes (Flaub., Tentation, 1856, p.621): 3. Je traversais les grandes dunes au sud de Ouargla (...) et je sentais se glisser dans mes os la peur (...) en face du cadavre aimé, dans ce trou incendié par le soleil entre quatre monts de sable...
Maupass., Contes et nouv., t.2, Peur, 1882, p.799. − Au fig. Les Bénédictins de Solesmes ont édité aussi les Révélations de sainte Mechtilde, son livre sur la grâce spéciale (...) − Que je vous montre des guides savamment jalonnés pour l'âme qui s'échappe d'elle-même et veut tenter l'ascension des monts éternels (Huysmans, En route, t.2, 1895, p.281). − Loc. adv. Par monts et par vaux. En toutes sortes d'endroits. Synon. par voie(s) et par chemin(s)*.On se hache, on se harponne, On court par monts et par vaux (Hugo, Chans. rues et bois, 1865, p.235): 4. Elle est toujours par monts et par vaux; le garde champêtre l'a surprise dans les blés entre les bras de Gaspar et le baisant sur la bouche.
A. France, Île ping., 1908, p.364. Rem. Cette loc. exprime la notion de mouvement à la fois sur le plan vertical et sur le plan horizontal grâce aux verbes aller, être, voyager qui l'accompagnent. C. − (Avoir, promettre) des monts d'or (vx). (Avoir, promettre) des avantages considérables. [Les artistes] négligent alors leurs commandes (...) puis ils se plaignent de la dureté des temps, tandis que, s'ils s'étaient appliqués, ils auraient des monts d'or (Balzac, Cous. Bette, 1846, p.65).(Conter, dire, promettre) monts et merveilles. (Conter, dire, promettre) toutes sortes de choses extraordinaires et plus ou moins accessibles. Son chef-d'oeuvre serait une Lucrèce dont on dit monts et merveilles (Mérimée, Lettres ctessede Montijo, t.1, 1843, p.62).Elle était suivie, tous les soirs, par un homme déjà âgé qui lui promettait monts et merveilles, et un jeune homme qui (...) lui demandait doucement pardon quand son bras effleurait le sien (Huysmans, Marthe, 1876, p.26). II. − [Accompagné ou suivi d'un nom propre ou d'un déterm.] A. − Montagne désignée par un nom propre. Mont-Blanc, Mont-Cenis, Mont-Sinaï, Mont Saint Bernard, les moines du Mont Athos. J'ai visité le Mont Saint-Michel que je ne connaissais pas (Maupass., Contes et nouv., t.2, Horla, 1886, p.1101). B. − Montagne désignée par une quelconque détermination. Les Monts d'Arrée, d'Auvergne, du Cantal; le Mont des Géants; le Grand Mont; le Petit Mont. ♦ Double Mont, Mont sacré. Le Parnasse. (Ds Ac., Littré). ♦ Vx. Mont pagnote*. C. − P. anal., spéc. 1. ANAT. Mont de Vénus. ,,Large saillie médiane située au niveau de la symphyse pubienne, en avant de la vulve`` (Man.-Man. Méd. 1977). Une fillette (...) vint au monde avec le mont de Vénus couvert de poils, comme une fille de 14 ans (Apert dsNouv. Traité Méd.fasc.8 1925, p.400): 5. ... le panneau caché est le tableau peint par Courbet pour Khalil-bey, un ventre de femme au noir et proéminent mont de Vénus, sur l'entre-bâillement d'un con rose (...) ce ventre, c'est beau comme la chair d'un Corrège.
Goncourt, Journal, 1889, p.996. 2. CHIROM. Petite éminence charnue située au-dessous de chaque doigt de la main. Mont de Jupiter, de Mars, de Mercure, de Saturne. Les mains présentaient à ses yeux une physionomie aussi frappante que le visage (...). Il en adorait les doigts fuselés (...) la paume (...) traversée de lignes élégantes (...) et s'élevant à la base des doigts en petits monts harmonieux (A. France, Lys rouge, 1894, p.152): 6. Quand Marthe arriva chez elle, Titine, vautrée sur un divan, se faisait inspecter la main par sa bonne, qui lui expliquait en un charabia d'Auvergne la désastreuse influence de la ligne de Saturne et s'étonnait qu'une femme de si peu de moeurs n'eût pas plus de grilles sur le mont de Vénus.
Huysmans, Marthe, 1876, p.103. 3. GASTR. Mont-blanc*. REM. 1. Mont-d'or, subst. masc.Fromage de haute réputation, fabriqué dans la région lyonnaise à partir du lait de chèvres nourries à l'étable. Mais c'était surtout sur la table que les fromages s'empilaient (...). Alors, commençaient les puanteurs; les mont-d'or, jaune clair, puant une odeur douceâtre (Zola,Ventre Paris,1873, p.827). 2. Montille, subst. fém.,vx., région. ,,Nom donné, dans les Bouches du Rhône, aux petites dunes et aux herbages grossiers qui occupent les parties purement sablonneuses de la Camargue`` (Littré Suppl. 1877). L'horizon dessine un cercle parfait dont je forme le centre, et où nulle élévation (...) nulle montille même, comme on dit, ne borne ma vue (Arnoux, Rhône, 1944, p.376). Prononc. et Orth.: [mɔ
̃]. Homon. mon. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) Fin du xes. «élévation, hauteur» (Passion, éd. D'A. S. Avalle, 323); b) fin du xes. dans des expr. géogr. (ibid., 18: mont Olivet); 2. a) 1176 en un mont «en un tas» (Chrétien de Troyes, Cligès, éd. A. Micha, 3458); b) 1180-90 «grande quantité» (Alexandre de Paris, Alexandre, I, 650 in Elliott Monographs, 37, p.15: les mons de deniers); c) 1690 des monts d'or «des avantages considérables» (Fur.: Il m'a fait esperer des monts d'or); 3. ca 1245 et mont et val (Philippe Mousket, Chron., 22119 ds T.-L.); xiiies. par mons, par vaus (Trois dits, éd. G. Raynaud, III, 20, ibid.); 1611 par monts et par vaux (Cotgr.); 4. 1564 chirom. (Ronsard, Nouv. poesies ds
Œuvres compl., éd. P. Laumonier, t.12, p.185); 5. 1640 mont de Venus (Oudin Curiositez). Du lat. montem, acc. de mons «montagne». Fréq. abs. littér.: 3100. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 6573, b) 6168; xxes.: a) 3088, b) 2412. Bbg. Dauzat Ling. fr. 1946, p.6, 14. |