| MASQUE1, subst. masc. I. A. − Objet recouvrant et représentant parfois tout ou partie du visage, qui est porté dans diverses occasions de la vie sociale selon les peuples et les époques. Le masque surgit dès l'instant où l'homme se conçoit comme homme, quand il accède à l'état de culture. Encore faut-il préciser que cette culture n'est pas celle des sociétés historiques (Encyclop. univ.t. 101970, p.588). 1. En partic. a) Objet, représentant généralement un visage ou une gueule animale, souvent grotesque, que l'on porte sur la face pour se déguiser. Masque de carnaval, de carton; masque, domino et déguisement; mettre, enlever, lever, ôter son masque. Un joli masque verni sur le visage, un masque à moustache blonde frisée que coiffait une perruque à boucles (Maupass.,Contes et nouv.,t. 2, Masque, 1889, p.1160).Les carnavals de quartier (...) apparaissent par-ci par-là (...) la parade des enfants... masques, maquillages et dragons (Libération,22 juin 1981, p.33, col. a).V. adapté ex. 1. ♦ Demi-masque; masque à domino (vieilli). Masque recouvrant la partie supérieure du visage. Ces demi-masques blancs, qui consistent en des nez gigantesques, sont fort drôles (Baudel.,Salon,1846, p.143). b) Pièce d'étoffe recouvrant la totalité ou la partie supérieure du visage que l'on porte pour se dissimuler (portée, autrefois, par les femmes pour se protéger du soleil, du froid, etc.). Synon. loup.Masque (de velours) noir. Les religieuses portaient d'habitude, selon la mode mondaine, des gants et des masques (Sainte-Beuve,Port-Royal,t. 1, 1840, p.88).Le carton contenait un domino et un masque de satin noir (Sand,Elle et lui,1859, p.294). c) Objet représentant un visage ou une gueule animale, qui symbolise un affect, un comportement ou un rôle, porté par les acteurs de théâtre dans diverses cultures. Masque antique, grec, tragique, comique; masque d'arlequin; masque japonais. Les anciens (...) grandissaient l'acteur par le cothurne, grossissaient sa voix par le masque (Vigny,Journal poète,1840, p.1130). d) Objet représentant, généralement de manière symbolique, un visage ou une gueule animale, revêtant une valeur sacrée et porté ou exhibé dans l'accomplissement de cérémonies religieuses dans diverses sociétés extra-européennes. Masque eskimo, indien, nègre, océanien. Nous avons trouvé dans le procédé de dédoublement, non seulement la représentation graphique du masque, mais l'expression fonctionnelle d'un type précis de civilisation. Toutes les cultures à masques ne pratiquent pas le dédoublement (Lévi-Strauss,Anthropol. struct.,1958, p.291). − Loc., vieilli. En masque, sous le masque. Synon. masqué.[Courir] les filles en masque (Mussetds Le Temps,1831, p.65).On me croira parti. Je viendrai sous le masque (Rostand,Cyrano,1898, iii, 2, p.118). 2. P. anal., littér. Ce qui recouvre le visage. Adéodat, débarbouillé et dans ses beaux habits, me plut moins qu'avec son bonnet noir et son masque de suie (A. France,Pt Pierre,1918, p.133).L'odeur des menthes sauvages en ce fond humide (...) vous entrait par le nez à la force de 80 kilomètres à l'heure et ce masque de parfums (...) s'appliquait sur ta face (Claudel,Ours et lune,1919, 1, p.590). − En partic., péj. Maquillage (trop) abondant sur un visage. Masque de fard. Des filles plâtrées, dont la bouche saigne dans un masque de céruse (Bourget,Essais psychol.,1883, p.7). − P. anal. Le matou noir à masque blanc qui s'appelait «Colette» (Colette,Sido,1929, p.67). 3. P. méton., vieilli. Synon. de mascarade.L'opéra serait suivi d'un bal, avec des jeux, des loteries, des masques, des danses aux flambeaux, et autres inventions galantes (Bourges,Crépusc. dieux,1884, p.4). − HIST. DU SPECTACLE. ,,Spectacle particulier au xviies. anglais et combinant allégorie, féerie, danse et musique`` (Giteau 1970). Au début du XVIIes., le masque devint si populaire que certains de ses éléments furent adoptés dans le drame scénique des théâtres publics, telle La Tempête de Shakespeare (Mus.1976). B. − 1. Modelé, traits (expressifs) du visage. a) Le visage considéré du point de vue de sa morphologie ou de son apparence. Masque épais, étroit, large, lourd, régulier, glabre, poli, vieilli. Chez elle, le masque s'empâtait déjà, les traits gros, soufflés d'une mauvaise graisse (Zola,Bonh. dames,1883, p.452): 1. Dans ce masque d'un ovale si pur, où la régularité des traits mettait une sorte de solennité (surtout quand la fatigue et la tristesse l'assombrissaient comme ce soir), le sourire avait bien gardé son rayonnement de jadis...
Martin du G.,Thib.,Été 14, 1936, p.211. − P. ext. Synon. de face, visage.Brusquement, elle fut hors de la foule, la face dans ses mains rouges, tout le masque ensanglanté (Van der Meersch,Invas. 14,1935, p.268). ♦ PEINT., SCULPT. Le bourreau, le crâne éclairé, le masque dans l'ombre (...) fait ressortir, par l'énergie de son coloris (...) la pâleur de la victime [dans le Martyre de sainte Agnès, du Dominiquin] (Taine,Voy. Ital.,t. 2, 1866, p.203).La ressemblance qu'il doit obtenir [l'artiste] est celle de l'âme; (...) c'est celle-là que le sculpteur ou le peintre doit aller chercher à travers le masque (Rodin,Art,1911, p.163). b) Le visage considéré du point de vue de son expressivité, de ce qu'il exprime de la personnalité de quelqu'un. Avoir un masque contracté, immobile, énergique, hautain. Son masque change d'expression, s'aggrave; il évite de relever les yeux (Martin du G.,J. Barois,1913, p.231).Il marcha vers la maison de Gilbert, celle de leur père, le masque raidi pour ne pas trahir son émotion (Arland,Ordre,1929, p.492). − THÉÂTRE. Caractère de la physionomie (d'un acteur). Cet acteur a un bon masque, le masque mobile, un masque comique (Littré). ♦ [Précédé de l'art. partitif] Avec du masque et de la voix et un instinct premier, elle ressuscita [Rachel] quelques éclats du tonnerre tragique (Veuillot,Odeurs de Paris,1866, p.274). 2. P. méton. a) Expression caractéristique d'un état physique ou émotionnel, en tant qu'il se marque dans les traits du visage qu'il fige. ♦ [Constr. avec un compl. prép. de spécifiant cet état] Masque d'angoisse, de douleur, de fatigue, de stupeur. Sa petite et habituelle grimace de bienveillance fut remplacée par le masque éternel de la plainte et de la mélancolie (Balzac,Annette,t. 4, 1824, p.216).Elle ne disait pas un mot, la face seulement convulsée en un masque d'indicible terreur (Zola,Bête hum.,1890, p.228): 2. ... cette passion avait mis sur son visage un masque de sanglot qui m'avait à jamais depuis des lustres épouvantée et dégoûtée (...). Mais il ne dessine plus un masque tordu et grotesque; c'est le visage d'une enfant qui s'endort, vaincue par la fatigue, sur un gros chagrin.
Drieu La Roch.,Rêv. bourg.,1937, p.335. ♦ [Constr. avec un adj. spécifiant cet état ou décrivant son effet sur le visage] Masque douloureux, violent, terrible. La tête se releva, le masque hargneux et superbe en était tombé (Sartre,Mort ds âme,1949, p.138).Ses sourires (...) transformaient son masque sévère en un visage de chair (Beauvoir,Mém. j. fille,1958, p.221): 3. On me disait aussi que j'avais trois visages, comme la triple Hécate: un pour les enfants, un pour mes sympathies, un pour le monde, et que leurs trois expressions ne se ressemblaient pas du tout. Le dernier visage surtout, masque froid, réservé, avec un léger pli entre les sourcils et à l'angle de la bouche, paraît un bouclier qui voudrait être impénétrable. Le second visage est confiant et affectueux.
Amiel,Journal,1866, p.253. ♦ Absol. Les dix mille et une expressions du visage prises à l'état de masques, pourront être étiquetées et cataloguées, en vue de participer directement et symboliquement à ce langage concret de la scène (Artaud,Théâtre et son double,1938, p.112).En partic. Expression d'un visage qui se fige, qui est sans vie, sans chaleur. Une larme coula le long de son nez (...) trahissant par sa vie sourde (...) ce masque aussi inhumain, aussi mort que tout à l'heure (Malraux,Cond. hum.,1933, p.329).Une sorte de masque apparut sur le visage des deux Chandelier; leurs traits tombèrent, leurs regards s'éteignirent. Comme suffoqués, ils ne disaient rien (Montherl.,Célibataires,1934, p.883). − En partic. Expression et apparence du visage, caractéristique d'un état physiologique ou pathologique. Masque de l'épileptique. Les yeux du prévenu brillaient (...) malgré le masque de moribond qui la veille avait fait croire au directeur de la Force à la nécessité d'appeler le médecin (Balzac,Splend. et mis., 1846, p.360).Antoine (...) observait le masque cachectique de son père: l'effort mental détendait les muscles de la mâchoire (Martin du G.,Thib.,Consult., 1928, p.1061). ♦ Synon. méd. de faciès.Masque amibiasique, biliaire, paralytique (Méd. Biol.t. 21971).Masque (de grossesse). Pigmentation brune du teint, passagère, surtout au front, pouvant apparaître à partir du troisième mois de la grossesse. Avoir le masque. Une autre variété de pigmentation circonscrite est le (...) masque de grossesse (Quillet Méd.1965, p.301). b) Expression du visage caractéristique d'un personnage, d'un type de personnage ou de personnalité. Un personnage de haute stature (...) dont les traits énergiques évoquaient le masque de Bonaparte jeune (Martin du G.,Thib.,Été 14, 1936, p.337).Le masque de l'anxieux est l'antithèse du masque du sourire (Mounier,Traité caract.,1946, p.233): 4. ... il semblait (...) qu'il eût suffi au sang japonais de sa mère d'adoucir le masque d'abbé ascétique du vieux Gisors − masque dont une robe de chambre en poil de chameau, cette nuit, accentuait le caractère − pour en faire le visage de samouraï de son fils.
Malraux,Cond. hum.,1933, p.208. 3. a) Moulage exécuté sur une empreinte en creux prise sur le visage d'une personne vivante ou morte. Masque mortuaire, funéraire. Aux murs nus étaient accrochés un masque de Pascal, un masque de Beethoven (Maurois,Climats,1928, p.24).Les Romains ont été les premiers à réaliser de façon régulière le moulage, en cire, d'un masque sur le visage du défunt (Pell.1972). b) Figure humaine, peinte ou sculptée, servant d'ornement. Synon. partiel mascaron.Des commères assises en rond près de la fontaine jaillie d'un masque de pierre (Adam,Enf. Aust.,1902, p.261).Cette maison (...) datait du dix-septième siècle et au-dessus des fenêtres il y avait des masques de femmes sculptés (Rivière,Corresp.[avec Alain-Fournier], 1906, p.188). c) P. méton. ,,Ciselet gravé en creux ou en relief, dont beaucoup d'ouvriers se servent pour former des figures en relief ou en creux sur les métaux`` (Jossier 1881). 4. Littér., au fig. Traits (d'un visage) sous lesquels apparaît ou est représentée une entité abstraite. Sa grande figure de marbre, sereine au milieu de l'orgie, m'apparaissait comme le masque inflexible du destin (About,Roi mont.,1857, p.122).Il ne trouve devant lui qu'une forme vide. C'est un visage glacé, le masque de la mort, que lui présente l'Afrique (Psichari,Voy. centur.,1914, p.27). 5. THÉÂTRE, CHANT. Ensemble composé du pavillon pharyngo-buccal et des cavités nasales intervenant comme résonateur dans la production de la voix. Chanter, parler dans le masque. Si Mérya avait mis un peu plus sa voix dans le masque − (...) «hin, hin, hin» comme ça − le couac n'aurait pas eu lieu (Colette,Seconde,1929, p.203).Toutes ces vibrations [des cordes vocales] se renforcent: (...) dans des cavités dites de résonance, le «masque» (Wicart,Chanteur,t. 1, 1931, p.165). C. − P. métaph. ou au fig. 1. a) Attitude, comportement feint, affecté par quelqu'un. Revêtir un/le masque de qqc.; se cacher sous un/le masque de qqc.; arracher, lever, mettre le masque de/à qqn; faire tomber le masque de qqn; lever, ôter, poser, quitter son/le masque de qqc. ♦ [Constr. avec un compl. prép. de ou un adj. spécifiant ce qui est affecté] Masque de politesse; masque mondain, professionnel, social; masque d'ami, de courtisan. [Les] ennemis de la liberté couverts d'un masque civique (Marat,Pamphlets,À ses concitoyens élect., 1792, p.325).Elle [la bourgeoisie] fit la républicaine pour amener 1848, prenant pendant seize ans le masque tricolore de la charte et durant dix-huit ans le masque rouge de la réforme (Vigny,Mém. inéd.,1863, p.64).L'ambitieux prend (...) le masque public du désintéressement, le tyran affecte la bienveillance (Mounier,Traité caract.,1946, p.599).V. bénin ex. 4 et affectueux ex. 11: 5. ... il était un homme de sensibilité rentrée, très tendre sous le masque de l'égoïsme et du cynisme. Il appartenait à cette race de poseurs et d'hommes faisant les forts...
Goncourt,Journal,1869, p.501. ♦ Absol. La mort arrache le masque qu'on a porté toute la vie, et le véritable visage apparaît (Dumas père, Monte-Cristo,t.1, 1846, p.510).Son cynisme [de Byron] ne parut plus à Shelley qu'un masque élégant pour sa bestialité (Maurois,Ariel,1923, p.254): 6. «N'employez jamais je.» Le je du visage même de l'art de Wilde tenait du masque, tenait au masque. Mais jamais il n'a voulu dire par là: soyez «objectif». Toujours il s'arrangeait de manière que le lecteur averti pût soulever le masque et entrevoir, sous le masque, le vrai visage (...). Cette hypocrisie artiste lui a été comme imposée par le sentiment, qu'il avait très vif, des convenances...
Gide,Journal,1927, p.847, 848. En partic. Jeter, lever le masque.
α) Se faire connaître en tant que tel. Elles se découvrent, jettent le masque (Green,Journal,1941, p.88).
β) Ne plus dissimuler ses projets. Lorsque tout fut prêt pour l'exécution de l'horrible projet, les conjurés levèrent le masque (Marat,Pamphlets,Dénonc. Necker, 1790, p.80).Les Allemands vont jeter le masque en raison de leurs succès, (...) Vichy va passer à la collaboration ouverte (De Gaulle,Mém. guerre,1954, p.388). − En partic., vieilli. Nom choisi par quelqu'un pour dissimuler son identité, l'identité de quelqu'un. Synon. pseudonyme.Je prends Beyle en 1814 (...). Il n'avait pas encore songé à son masque de Stendhal (Sainte-Beuve,Caus. lundi,1851-62, p.308). ♦ Sous le masque (vieilli). De façon anonyme ou sous un nom d'emprunt. Madame Gay, sous le masque et par une lettre insérée dans un journal, prit parti; elle brisa une lance (Sainte-Beuve,Caus. lundi,1851-62p.67). b) Apparence trompeuse donnée à quelque chose ou que prend quelque chose. Déguiser qqc. du masque de qqc., sous le masque de qqc.; qqc. se cache, se déguise sous le masque de qqc., prend le masque de qqc. ♦ [Constr. avec un compl. prép. de ou un adj. spécifiant (la nature de) l'apparence] Couvrir ses vices du masque de la vertu. L'instinct révolutionnaire se glissait, sans le savoir, sous ce masque d'antiquité (Quinet,All. et Ital.,1836, p.71): 7. ... les vérités morales vont (...) nous laisser voir, magré le masque rigoureusement dogmatique qu'elles affectent durant le temps de leur règne, leur caractère éphémère et leur rôle secondaire de moyens pour procurer des fins très différentes des buts vers lesquelles elles ordonnent de tendre.
Gaultier,Bovarysme,1902, p.289. ♦ Absol. Ennemi de la tyrannie, de quelque côté qu'elle vienne, et quelque masque qu'elle emprunte, il [Platon] la combat dans une démocratie effrénée aussi énergiquement que dans une oligarchie insolente (Cousin,Hist. gén. philos.,1861, p.145).Les mythes sont à la religion ce que la poésie est à la vérité, des masques ridicules posés sur la passion de vivre (Camus,Noces,1938, p.83). 2. [Gén. en fonction d'attribut; constr. avec un compl. prép. de désignant ce qui est caché] Ce qui cache, dissimule quelque chose dans une apparence trompeuse. Ce mot [hypocrisie] (...) doit s'entendre du masque de toutes les vertus (Jouy,Hermite,t. 1, 1811, p.34).La fidélité à l'esprit n'est que le masque de la fidélité à la bourgeoisie, de l'infidélité aux hommes (Nizan,Chiens garde,1932, p.233).V. aujourd'hui ex. 16. D. − 1. [Désigne une chose qui s'applique sur tout ou partie du visage avec diverses fonctions] a) MÉD., TECHNOL. ♦ Masque d'escrime, d'apiculteur, de soudure. Objet constitué d'un treillis ou d'une plaque métallique servant à protéger le visage. Ils avaient le fleuret au poing; leurs masques aux mailles pressées leur faisaient de terrifiants visages (Courteline,Ronds-de-cuir,1893, 5etabl., iii, p.198). ♦ Masque (de protection). Objet appliqué sur le nez et la bouche, généralement en papier ou en tissu, servant à filtrer l'air expiré ou inspiré. Masque antiseptique. Le personnel sanitaire continuait de respirer sous des masques de gaze désinfectée (Camus,Peste,1947, p.1411).Contre les poussières, le masque utilisé est en général un treillis métallique doublé d'une couche filtrante (ouate, papier-filtre, mousseline, éponge) (Lar. Méd.t. 21973). ♦ Masque (de plongée). Objet placé devant les yeux et le nez permettant de voir sous l'eau. On nous appris à agiter les palmes, à vider le masque, à l'enlever, à respirer avec le tuba la tête dans l'eau et les yeux ouverts (Ét. et sports sous-marins,1978, no40, p.59). ♦ Masque à gaz. Appareil comportant un dispositif étanche fixé sur le visage et qui permet de filtrer l'air inspiré ou de respirer en circuit fermé dans une atmosphère toxique (en particulier, chargée de gaz de combat). Des soldats étalaient à terre leurs effets, leurs armes, des sacs, des masques à gaz, des paquets de pansements (Van der Meersch,Invas. 14,1935, p.423). ♦ Masque (anesthésique, à oxygène). Appareil comportant un dispositif en caoutchouc s'adaptant sur la bouche et le nez et permettant d'inhaler des gaz anesthésiques ou de l'oxygène. J'ordonnai à l'anesthésieur (...) de remettre le masque sur la bouche du blessé dont le gémissement annonçait le prochain réveil (Bourget,Sens mort,1915, p.104).La respiration, je la prends dans ce masque. Un tube en caoutchouc me relie à l'avion (Saint-Exup.,Pilote guerre,1942, p.278). b) COSMÉTOL. Préparation qu'on applique sur le visage (et le cou) dans les soins esthétiques de l'épiderme. Masque antirides, facial; masque de beauté. [Je ne vais jamais dans un salon de beauté] pour me faire tripoter le visage. Les masques ne m'ont jamais réussi (Elle,9 mars 1981, p.102, col. a). 2. [Désigne des choses servant à recouvrir, à protéger qqc., qqn] On remplit après coup les intervalles entre les piliers au moyen de masques en maçonnerie destinés à mettre le terrain à l'abri de l'air (Bricka,Cours ch. de fer,t. 1, 1894, 215).Le défaut d'étanchéité des massifs d'enrochements nécessite l'établissement sur leur parement amont [des barrages] d'un masque étanche constitué, presque toujours, par de grandes dalles minces en béton armé (Thaller,Houille blanche,1952, p.45). a) ARMÉE, FORTIF. Écran naturel ou artificiel protégeant et dissimulant un corps de défense, une pièce d'artillerie et ses servants. Les pièces au-dessus du calibre de 10 centimètres sont défendues par des masques de 76 millimètres d'épaisseur (Croneau,Constr. nav. guerre,t. 2, 1892, p.92).Il faut (...) se cacher, se défiler, utiliser les masques (...) les angles-morts aux vues et surtout les angles-morts aux coups (Paloque,Artill.,1909, p.107). b) MAR. Voile protégeant du vent, du soleil... On installe (...) un Masque, lorsque le vent vient de terre, et qu'il y existe des maladies épidémiques (Bonn.-Paris1859). 3. [Désigne ce qui soustrait qqc. à la perception] a)
ŒNOLOGIE Dépôt adhérant aux flancs d'une bouteille (de vin de Champagne). [La lie] (...) fait des masques (Hamp,Champagne,1909, p.157). b) ACOUST. ,,Tout son qui, superposé à un son perçu, a pour effet de relever le seuil d'audition pour ce dernier`` (Pir. 1964). L'effet de masque peut être mesuré en décibels par le rapport entre le seuil de masque et le seuil absolu (Ling.1972). 4. [Désigne ce qui soustrait qqc. à l'action de qqn] a) TECHNOL. Élément de protection, soit mécanique, soit chimique, destiné à délimiter certaines zones dans une opération de masquage. Technique de retouche photographique au moyen de masques pour améliorer la fidélité de reproduction des clichés (Lar. encyclop.). − PHOT. ,,Image photographique transparente qu'on superpose à une autre image pour en corriger ou en améliorer les contrastes, les densités ou les teintes`` (Phot. 1979). V. masquage ex. de G. Martin. b) INFORMAT. ,,Mot machine permettant de retenir ou de rejeter tout ou partie des mots traités`` (Guilh. 1969). c) ZOOL. Labium extensible transformé en organe de capture, qui cache au repos les pièces buccales, chez la larve de libellule (d'apr. Séguy 1967). [Les libellules] ne se nourrissant que de proies vivantes qu'elles capturent grâce à un organe unique parmi les Insectes, appelé «le masque» (Zool.,t. 2, 1963, p.626 [Encyclop. de la Pléiade]). II. − [Désigne une pers.; correspond à I A B et C supra] A. − Personne masquée et/ou déguisée. Des masques en domino, épars, isolés ou groupés, traversent çà et là la terrasse (Hugo,Hernani,1830, v, 1, p.124).Les masques essayent de se lever le masque les uns aux autres (Apoll.,Casanova,1918, ii, p.990). ♦ HIST. Le Masque de fer. [Désigne un mystérieux prisonnier d'État au xviies., contraint de porter un masque de velours noir et de métal] V. fer B 1 b ε ex. de Clemenceau. ♦ Beau masque (vieilli). [Formule d'adresse pour interpeller une personne masquée] Don Garcie, au domino noir: Beau masque!... Le masque se retourne. Il recule (Hugo,Hernani,1830p.129).Je vous/te connais, beau masque. [S'emploie pour signifier à une personne masquée qu'on la reconnaît et, au fig., pour signifier qu'on connaît les intentions de qqn] Pontbichet, s'approchant de lui d'un air fin. Ah! je te connais beau masque! (Labiche,J. homme pressé,1848, i, 7, p.362). B. − P. anal., rare, péj. 1. Vieilli. Personne au visage très laid. [Les] douces horreurs [de la petite vérole] qui n'auront d'autre effet que de changer pour quelques jours un bel enfant en un vilain masque (J. de Maistre, Corresp.,1793, p.52). 2. Personne qui a un comportement hypocrite ou un comportement affecté, manquant de naturel. Pêle-mêle, devant ses yeux, des masques s'agitaient: Pontillac sardonique, Servin douloureux, MllePeyrolles... (Estaunié,Vie secrète,1908, p.304).Des patriotes, ça (...) des masques, des faux-jetons (Arnoux,Algorithme,1948, p.276). Prononc. et Orth.: [mask]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. 1514 «faux visage qu'on met pour se déguiser» (Arrest contre les masques, 27 avril ds M. Félibien, Hist. de la ville de Paris, t. 4, p.630: faux visages appellez en commun langage masques); 2. 1542 «personne qui porte un masque» (Rabelais, Pantagruel, éd. V. L. Saulnier, p.109, var.); 3. 1599 «pièce d'étoffe dissimulant une partie du visage» (H. Hornkens, Rec. de dict. fr., esp. et lat.); 4. 1535 au fig. fém. «fausse apparence» (Calvin, Instit. de la religion chrétienne, Epistre au Roy, éd. J.-D. Benoît, t. 1, p.42); spéc. 1598 lever le masque devant le bal (Ph. de Marnix, Differens de la religion, t. 1, IV, 7 ds Hug.); av. 1615 lever le masque (E. Pasquier, Les Recherches de la France, p.461 ds IGLF). B. 1. 1540 «tête sculptée employée comme motif d'ornementation» (Comptes des bastimens du Roy ds Havard); 1547 (N. du Fail, Propos rustiques, éd. J. Assézat, p.78: masques de cheminee); 2. 1718 «reproduction du visage obtenue par moulage» (Ac.); 3. 1831 désigne le visage lui-même, son expression (Balzac, Peau chagr., p.193); 4. 1836 «aspect particulier que prend parfois le visage des femmes à la fin de la grossesse» (A. Goupil, in Dict. de la conversation, XXXI, 187, s.v. grossesse ds Quem. DDL t. 8). C. 1. 1597 masque d'apiculteur (Ch. Estienne, J. Liébault, L'Agriculture et maison rustique, p.389); 2. 1839 «casque en toile métallique dont on se couvre la tête pour faire de l'escrime» (Stendhal, Chartreuse, p.226); 3. 1864 «appareil couvrant la bouche et le nez et permettant l'aspiration d'un anesthésique» (Jamain, Manuel de petite chirurgie, 756 ds Quem. DDL t.8); 4. 1894 «appareil en toile métallique dont les ouvriers de certains corps de métier se couvrent le visage pour se protéger» (A. Layet, in J. Rochard, Encyclop. d'hygiène, VI, 330, ibid.); 1916 milit. masque contre les gaz asphyxiants (Bordeaux, Fort de Vaux, p.93). D. 1845 mar. «abri sur une côte; abri en planches protégeant les navires en construction contre le soleil et la pluie» (Besch.). Empr. à l'ital. maschera «faux visage» (dep. 1348-53, Boccace ds Batt.), d'orig. préromane. Le rad. préroman *maska «noir» est à l'orig. de deux groupes de mots: a) un type masca signifiant «masque» en lat. tard., mais surtout «sorcière» ou «spectre, démon» représenté en lat. médiév. (dep. 643, Lois de Rotharis ds Nierm.; cf. 680 en Angleterre, chez l'évêque Adhelm), en Italie (Pise, Piémont et Sicile), en gallo-roman (sous la forme du composé talamasca, att. dès le lat. médiév.) et en a. prov. (v. masque2), les notions de «noir» et de «sorcier, démon» étant étroitement associées dans l'imagination populaire; b) un type élargi *maskara, très répandu dans les domaines ibéro-roman (cat. mascara «tache noire, salissure», également vivant en aragonais, navarrais, valencien et à Majorque; port. mascarra «tache» etc.), ital. (maschera «masque» s'expliquant par le fait que les plus anciens déguisements consistaient simplement à se noircir le visage et parfois le corps) et gallo-roman (v. mâchurer1; cf. appellatifs et toponymes). Voir J.Hubschmid ds Actas do IX Congr. Intern. de ling. rom., I, Boletim de Filol. t.18, pp.37-55 et FEW t. 6, 1, pp.429-441. Fréq. abs. littér.: 2258. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 2436, b) 3969; xxes.: a) 3025, b) 3 573. Bbg. Hope 1971, p.209. _ Mack. t.2 1939, pp.118-119. _ Quem. DDL t. 9. _ Renson (J.). Les Dénominations du visage en fr. contemp. Paris, 1962, pp.433-435. _ Sculpt. 1978, pp.523-524. _ Tracc. 1907, p.155. _ Wind 1928, p.88. |