| LÂCHE, adj. A. − 1. [En parlant d'un inanimé] Qui n'est pas tendu, qui n'est pas serré. Synon. détendu; anton. serré.Ressort, ceinture, nœud, vêtement lâche. Deux sacs de faux cuir (...) les courroies lâches pendent le long des pieds de la chaise (Genevoix, Raboliot,1925, p. 233).On parvint à lier d'une corde un peu lâche chaque jambe de derrière à la jambe de devant; le cheval, à chaque fois qu'il ruait, était jeté rudement à genoux (Alain, Propos,1929, p. 878): 1. Assez lâche sur les hanches, la jupe à la mode du moment se rattrapait vers les genoux, au bas d'un empiècement à boutons roses descendant de la taille au milieu, par devant.
Aragon, Beaux quart.,1936, p. 411. − En partic. a) Écriture lâche. ,,Écriture dont les caractères sont mal formés et trop espacés`` (Ac. 1935). b) Tissu lâche. ,,Toile, drap, étoffe dont la trame n'est pas assez battue ou la chaîne assez serrée`` (Ac. 1935). c) MÉDECINE ♦ Fibre, tissu lâche. Un tissu cellulaire, plus ou moins serré ou lâche, plus ou moins rempli de graisse (Cuvier, Anat. comp., t. 4, 1805, p. 69).Le tissu de la peau peut éprouver tous les degrés de resserrement, ou de dilatation : il est tantôt plein de ton et de vie, tantôt lâche et languissant (Cabanis, Rapp. phys. et mor., t. 2, 1808, p. 418). ♦ Ventre lâche. ,,Ventre trop libre`` (Ac. 1935). d) PHONÉT. Phonème lâche. ,,Phonème dont l'articulation s'accompagne d'une décharge d'énergie expiratoire plus faible, donc d'une tension musculaire moins forte`` (Ling. 1972; ds Lar. Lang. fr., Lexis 1975). Synon. relâché; anton. phonème tendu. 2. Au fig., domaine artist. Qui manque de concision, de rigueur, de netteté. Style lâche. La composition du Moïse sauvé est languissante, le vers lâche et prosaïque, le style plein d'antithèses et de mauvais goût (Chateaubr., Génie, t. 1, 1803, p. 296).Un intolérable mélange de styles, qui va de la prose la plus lâche au poème régulier, de la fluidité effrénée à la netteté parfaite (Béguin, Âme romant.,1939, p. 273): 2. ... en effet, les artistes avilis s'étaient agenouillés, et ils mangeaient, ardemment, de baisers les pieds fétides des hauts maquignons et des bas satrapes dont les aumônes les faisaient vivre! C'était, en peinture, un déluge de niaiseries molles; en littérature, une intempérance de style plat et d'idées lâches...
Huysmans, À rebours,1884, p. 292. B. − [En parlant d'une pers.] 1. Qui manque de vigueur, d'énergie (physique ou morale). Synon. mou, flasque.L'homme est lâche dans la pose horizontale, dans le sommeil, dans le rêve, dans l'éveil, dans les pensées du matin (Goncourt, Journal,1863, p. 1246).Seuls les êtres de nature faible et lâche s'abandonnent à la douleur et (...) celle-ci dure peu quand nous ne nous y complaisons pas secrètement (Maurois, Ariel,1923, p. 252). ♦ Lâche à + subst.Le père ayant essayé d'en garder un [des bessons] toute la journée avec lui, tandis que l'autre restait avec la mère, tous les deux furent si tristes, si pâles et si lâches au travail, qu'on les crut malades (Sand, Pte Fad.,1849, p. 17). − Emploi subst. ,,C'est un grand lâche, c'est un homme très mou, très paresseux`` (Ac. 1935). 2. Qui manque de courage. Synon. couard, craintif, peureux, froussard (fam.).La guerre se déchaîne quand un peuple dégénère et s'avilit, mais elle dévore les derniers justes, les derniers courageux, et sauve les plus lâches (Giraudoux, Électre,1937, I, 3, p. 41).Un chef a quelquefois le devoir d'être lâche. Mais à condition qu'il éprouve sa fermeté, à l'occasion (Camus, Justes,1950, III, p. 349). − Emploi subst. L'existentialiste, lorsqu'il décrit un lâche, dit que ce lâche est responsable de sa lâcheté (Sartre, Existent.,1946, p. 59). 3. Qui abuse de sa force ou de sa supériorité en maltraitant indignement de plus faibles que lui. La foule lâche et bête, qui résume par le cri de mort aux juifs! son respect de la liberté de conscience (Clemenceau, Iniquité,1899, p. 260). C. − [En parlant d'un inanimé abstr.] Qui porte la marque de la lâcheté. Lâche attentat; procédé lâche. Judas, froidement, hypocritement, avec un lâche calcul, livre son maître au supplice (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 231).Je vous accuserais d'être le complice du plus lâche des crimes (G. Leroux, Parfum,1908, p. 119).Le lâche égoïsme et la bassesse de ceux qui profitaient de la révolte des autres pour se pousser auprès des maîtres (Rolland, J.-Chr., Buisson ard., 1911, p. 1291). Prononc. et Orth. : [lɑ:ʃ]. Ac. 1694, 1718 lasche, ensuite lâche. Étymol. et Hist. A. 1. Ca 1135 « qui manque de courage, poltron » (Couronnement de Louis, 2248 ds T.-L.); 2. ca 1200 « peu viril, faible » (1reContinuation de Perceval, éd. W. Roach, ms. T, 10710 : lasque cuer); 3. ca 1230 « impunément cruel avec les faibles » (Chevalier aux deux épées, 12074 ds T.-L.). B. 1. début xiiies. [ms.] « peu serré (d'une épée attachée à la ceinture) » (Chr. de Troyes, Perceval, éd. A. Hilka, 1184, var. T); 1263-70 chevauchier a lasche regne (Rutebeuf, Renart le Bestourné, 5, éd. E. Faral et J. Bastin, I, p. 532); 2. 1676, 22 mars style lâche (Sévigné, Lettres, éd. R. Duchêne, t. 2, p. 257). Déverbal de lâcher*. Fréq. abs. littér. : 2 597. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 2 597, b) 4 437; xxes. : a) 4 855, b) 3 177. Bbg. Brüch 1913, p. 80. - Grundt (L.-O.). Ét. sur l'adj. invarié en fr. Bergen-Oslo-Tromsø, 1972, pp. 294-295, 304-305. - Quem. DDL t. 10. |