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LIÈVRE, subst. masc.
A. −
1. Petit animal au poil fauve, aux longues oreilles qui, grâce à de longues et puissantes pattes postérieures, est un excellent coureur. Fém. la hase. Tout éblouis encore (...) d'avoir vu les étangs glacés, les taillis où les lièvres détalent (Alain-Fournier, Meaulnes,1913, p. 37).Panturle est au bois des Vincents. Il a posé des collets à lièvres (Giono, Regain,1930, 1repart., 2, p. 53):
1. Un bond roux jaillit du trèfle. Vers le lièvre qui détalait, vers sa queue blanche, la mire du fusil, point noir, dansa devant l'œil anxieux de viser juste. Adam, Enf. Aust.,1902, p. 248.
[Avec une spécification géogr.] Lièvre arctique, d'Amérique, du désert.
Lièvre blanc. Synon. lièvre variable, lièvre des neiges, des Alpes.Lièvre de taille plus petite que le lièvre commun dont le pelage devient complètement blanc au commencement de l'hiver. Car il y a des marmottes, il y a même des renards à ces hauteurs, parfois il y a le lièvre des neiges qui est blanc (Ramuz, Gde peur mont.,1926, p. 101).
Plais. Lièvre de gouttière. Chat (Delesalle, Dict. arg.-fr. et fr.-arg., 1896, p. 164).
ZOOL. Mammifère herbivore de la famille des Léporidés (d'apr. Zool., t. 4, 1974, pp. 1034-1035 [Encyclop. de la Pléiade]).
SYNT. Lièvre farouche, insaisissable, peureux; le lièvre bondit, déboule; chasser, dénicher, lever un lièvre.
Rem. Le genre fém. est attesté dans qq. textes région. Parce que chez nous, on chasse la lièvre, comme on dit, à trois ou quatre (Pourrat, Gaspard, 1922, p. 88). Le fusil sur l'épaule, aux aguets de « la lièvre » qui fuit ou de la palombe qui se pose (Pesquidoux, Livre raison, 1932, p. 132).
2. Locutions
a) Gentilhomme* à lièvre (vieilli).
b) Adj./verbe + comme un lièvre
Peureux, craintif comme un lièvre. Un tel menteur, noir, chétif, peureux comme un lièvre et maraudeur en plus (Guèvremont, Survenant,1945, p. 259).
Courir, détaler, filer comme un lièvre. Courir, détaler, filer à toute vitesse. Vous auriez vu tous ces sales moricauds filer comme des lièvres, dès que nous paraissions (Zola, Débâcle,1892, p. 17).
c) [En parlant du comportement d'une pers. ou de l'un de ses attributs] De lièvre.Qui possède certaines caractéristiques, certaines des qualités que l'on prête au lièvre.
Bec*-de-lièvre.
Patte de lièvre. Favori. Rasé de frais, deux pattes de lièvre encadraient ses joues rondes (France, Pt Pierre,1918, p. 175).
Mémoire, cervelle de lièvre. Mémoire, intelligence déficiente. (Dict. xix et xxes.).
Plais. [P. allus. à cette expr.] :
2. Oh! Lièvres Vous n'allez tout de même pas laisser pleurer un Professeur Allons faites un petit effort Lièvres souvenez-vous Descendez-vous du singe Ou bien du kangourou... Prévert, Paroles,1946, p. 53.
Sommeil de lièvre. Sommeil très léger interrompu au moindre bruit. (Dict. xixeet xxes.).
Vie de lièvre. Vie tourmentée, malmenée. 21 décembre travaillé. Quel temps! Vie de lièvre! Et mon père! (Constant, Journaux,1811, p. 368).
d) [P. allus. à des vers ou à des thèmes tirés de fables de La Fontaine]
[P. allus. à la fable Le lièvre et la tortue] C'est ainsi que l'instinct tortue dépasse la science lièvre (Alain, Propos,1908, p. 41).
[P. allus. à la fable Le lièvre et les grenouilles] V. gîte A 2.
e) HÉRALD. Dessin figurant un lièvre dans diverses attitudes. Lièvre en forme, en gîte. C'étaient des armes parlantes un champ de sinople avec un mètre d'or mis en bande, accosté de deux lièvres courants d'argent (Sandeau, Sacs,1851, p. 2).
3. P. méton.
a) Chair de l'animal. Terrine de lièvre. Elle prenait sur le bout d'un couteau à large lame des tranches de veau piqué et de pâté de lièvre (Zola, Ventre Paris,1873, p. 673).Sur le fourneau, un civet de lièvre chantait dans la casserole (France, Pt Pierre,1918, p. 127).
b) Fourrure de l'animal. Un foulard autour du cou, une toque de lièvre sur ses cheveux blancs (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 395).
4. Loc. fig.
a) Vieilli. Bailler le lièvre par l'oreille à qqn. Payer quelqu'un de paroles, de promesses illusoires. Ce héros ne trompait pas. Il ne nous baillait pas le lièvre par l'oreille (Courier, Pamphlets pol., Réponses aux anon., 1822, p. 150).
b) C'est là que gît le lièvre. C'est là que se trouve le nœud de l'affaire, le fond du problème. Cette vertu fondamentale. Voilà, sans doute, où gît le lièvre (Duhamel, Journal Salav.,1927, p. 18).
c) Chasser, courir, poursuivre deux, plusieurs lièvres (à la fois). Poursuivre deux, plusieurs buts en même temps. On ne court pas deux lièvres. On ne peut guère servir en même temps Proudhon et Victor Hugo (Hugo, Corresp.,1866, p. 519):
3. ... les chefs donnaient l'exemple de l'anarchie, où l'on voyait une politique incohérente poursuivant dix lièvres à la fois, et les lâchant tous l'un après l'autre... Rolland, J.-Chr., Foire, 1908, p. 763.
d) Chasser, courir le même lièvre. Poursuivre le même but, être engagé dans la même affaire que quelqu'un. Ampère et lui [M. de Sacy] ne se rencontraient que peu; ils ne chassaient pas, comme on dit, le même lièvre (Sainte-Beuve, Nouv. lundis, t. 13, 1868, p. 237).
e) Lever un lièvre. Mettre au jour une question gênante et dissimulée. Au juste, vous levez le lièvre, monsieur l'observateur. J'aime aussi à mettre les choses noir sur blanc (Gracq, Syrtes,1951, p. 101).
f) Trouver le lièvre au gîte. Surprendre quelqu'un à l'improviste. (Dict. xixeet xxes.).
g) [P. allus. au proverbe Un lièvre va toujours mourir au gîte] V. gîte A 2.
B. − P. anal.
1. Individu, objet ayant certaines des qualités du lièvre.
a) [La vitesse] Lièvre mécanique, électrique. Dispositif imitant un lièvre destiné à entraîner les lévriers dans une course. Jusqu'au modeste pré de village où le lièvre électrique est remplacé par une peau de lapin tirée à la ficelle (Morand, Londres,1933, p. 142).P. anal. ,,Dans les courses de demi-fond, coureur se plaçant en tête pour assurer un train rapide et permettre à d'autres coureurs de faire un bon temps`` (Amsler 1971). En demi-fond, pas de bon chrono sans lièvre (Amsler 1971).
b) [La couardise] De fameux lièvres qu'on nous a donnés là! S'ils se sont cavalés ainsi, quand il n'y avait personne, hein? (Zola, Débâcle,1892, p. 43).Il [Jean-Jacques] fut lièvre ce jour-là, et s'enfuit par où il put (Alain, Propos,1925, p. 646).
2. Animal qui ressemble au lièvre.
a) [Chez les Mammifères]
Lièvre de Patagonie. Synon. sav. agouti.
Lièvre sauteur. Mammifère de la famille des Pédétidés vivant au Sud et à l'Est de l'Afrique (d'apr. Zool., t. 4, 1974, pp. 1004-1005 [Encyclop. de la Pléiade]).
b) [Dans d'autres classes d'animaux]
Lièvre de mer
[À cause de sa ressemblance avec un lièvre couché et des tentacules creusés comme les oreilles des Mammifères] Grand mollusque sans coquille. Synon. sav. aplysie.Un mollusque hideux qu'on appelle « lièvre de mer » (Flaub., Corresp.,1875, p. 266).
Poisson. Synon. sav. blennie.Blennie (...) appelée aussi chasseur, lièvre, bovecca (Coupin, Animaux de nos pays,1909, p. 130).
[P. allus. à la fable de La Fontaine Les oreilles du lièvre] Lièvre cornu. Animal mythique. Le Mirag, lièvre cornu habitant des îles de la mer (Flaub., Tentation,1856, p. 599).
REM.
Liévreux, -euse, adj. hapax.Qui manifeste l'agilité, la fébrilité d'un lièvre. Le liévreux et fiévreux rédacteur en chef (Barb. d'Aurev., Mémor. 2,1838, p. 243).
Prononc. et Orth. : [ljε:vʀ ̥]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1100 (Roland, éd. J. Bédier, 1780 : Pur un sul levre vait tute jur cornant); 1155 (Wace, Brut, 4738 ds T.-L. : Quant vient en guerre e en estur, Si semble lievre de pöur); ca 1176 (Chrétien de Troyes, Cligès, éd. A. Micha, 4500 : Malvés et coarz come lievres); 1316 (Geoffroy, Chron. métr., 692 ds T.-L. : ... a Mons em Pevre [Mons-en-Pevele] Où Flamenz füirent com lievre). 2. fig. a) ca 1200 (Poème moral, 338, ibid. : Cant il seit [li malz mïes] un riche home malement agrevet : « Or me vat bien », fait il, « un gras lievre ai trovet ». b) 1465 (G. Chastellain, Chron., éd. Kervyn de Lettenhove, t. 5, p. 276, 22 : vecy où git le lievre et le droit difficile du neud); 1663, 15 déc. lever un lièvre « être le premier à soulever une affaire » (Chapelain, Lettres, éd. Ph. Tamizey de Larroque, t. 2, p. 340 b). Du lat. lepus, leporis « lièvre ». Fréq. abs. littér. : 824. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 016, b) 865; xxes. : a) 1 590, b) 1 216. Bbg. Dauzat Ling. fr. 1946, p. 51. - Lenoble-Pinson (M.). Le Lang. de la chasse. Bruxelles, 1977, p. 18, 20, 32, 150, 179-210, 332. - Quem. DDL t. 19.