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LENTEUR, subst. fém.
A. − [Correspond à lent A]
1. Manque de rapidité d'une personne, d'un animal à effectuer une action, un mouvement. Lenteur de l'escargot. Avec l'air d'une mourante et l'apparente lenteur d'une tortue, elle vint à bout de sa tâche plus vite et mieux que moi (Sand, Hist. vie, t. 3, 1855, p. 201):
1. Nous attendions un souper frugal que nous avions commandé, et l'on s'impatientait de la lenteur de l'hôte lorsqu'il entra avec l'air d'un empressement respectueux, une serviette sur l'épaule comme un maître d'hôtel, et nous dit que le souper était servi. Sénac de Meilhan, Émigré,1797, p. 1612.
Progresser, marcher, se mouvoir avec lenteur; lenteur du débit, des pas, de la parole, de la voix. Il parlait avec une lenteur cherchante, raffinée, paresseuse (Malègue, Augustin, t. 2, 1933, p. 135).À la lenteur de ses mouvements, il était clair que l'homme était blessé (Malraux, Espoir,1937, p. 478).Sa taille élevée, sa corpulence, la lenteur de son élocution, tout semblait devoir donner à cette semonce une certaine solennité (Duhamel, Combat,1939, p. 169).
2. Manque de rapidité à réagir, de vivacité intellectuelle. Il arrive enfin que la lenteur exprime, notamment aux approches de la puberté, un refus d'avancer dans la vie, d'accepter la maturation et l'avenir (Mounier, Traité caract.,1946, p. 284).
Agir, exécuter, obéir avec lenteur; lenteur de compréhension. J'ai fait en mathématiques mes preuves de stupidité, ou du moins de lenteur d'esprit (Michelet, Journal,1820, p. 104):
2. On trouve souvent dans les armées des hommes que la lenteur de leur esprit fait juger médiocres et qui deviennent de très grands chefs par la seule force de leur ténacité. Maurois, Dialog. commandement,1924, p. 111.
3. P. anal. [À propos d'institutions sociales, humaines] Lenteur de la justice, de la machine administrative, de la procédure. L'injure des puissants, l'outrage de l'orgueil, les lenteurs de la loi (Dumas père, Hamlet,1848, III, 4, p. 210).
B. − [Correspond à lent B]
1. [À propos d'un processus] Manque de rapidité à se manifester. Lenteur d'une action, d'un progrès; lenteur d'une drogue. Nous sommes (...) peu frappés des changements et des altérations qui s'opèrent avec lenteur, soit en nous, soit dans les êtres avec qui nous cheminons (Maine de Biran, Influence habit.,1803, p. 94):
3. La plupart du temps, les novices, à leur première initiation, se plaignent de la lenteur des effets. Ils les attendent avec anxiété, et comme cela ne va pas assez vite à leur gré, ils font des fanfaronnades d'incrédulité qui réjouissent beaucoup ceux qui connaissent les choses et la manière dont le hachish se gouverne. Baudel., Paradis artif.,1860, p. 335.
En partic. [À propos d'un mobile] Allure peu rapide. Ces petits chemin de fer algériens bien connus pour leur lenteur (Tharaud, Fête arabe,1912, p. 95).Compter les platanes et les stations, en m'exaspérant de la lenteur du tacot qui s'arrêtait tous les cinq cents mètres (Vercel, Cap. Conan,1934, p. 217).
2. Littér. [À propos du temps, d'une unité ou d'une période de temps] Qui est peu rapide dans le temps ou perçu comme tel. Ne pouvant raccrocher ma pensée qu'à des souvenirs ou qu'à des espoirs, à peine m'apercevais-je de la lenteur du temps, de la longueur des heures (Gide, Porte étr.,1909, p. 552).
C. − P. méton., au plur.
1. Actes, mouvements qui manquent de rapidité. Jacqueline monta (...) pour prendre un châle. Elle ne redescendait point. Christophe, pestant contre les éternelles lenteurs des femmes, rentra pour la chercher (Rolland, J.-Chr., Amies, 1910, p. 1187).
2. Au fig. Retards apportés à faire quelque chose. Synon. tergiversations, hésitations.Les lenteurs de la Justice. Il avait (...) mis au point dans le dernier détail, avec des lenteurs auxquelles le condamnait son manque initial de compétence, un projet de chemin de fer sur rail unique (Romains, Hommes bonne vol.,1932, p. 82).Les lenteurs de la machine administrative nazie (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 271).
En partic. Les lenteurs d'un récit :
4. L'hiver est pareil à l'absence L'hiver a des cristaux chanteurs Où le vin gelé perd tout sens Où la romance a des lenteurs Et la musique qui m'étreint Sonne sonne sonne les heures... Aragon, Crève-cœur,1941, p. 25.
Prononc. et Orth. : [lɑ ̃tœ:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1355 « (d'une personne) manque de rapidité dans l'action » (Bers., Tit. Liv., BN 20312 ter fol. 37 vods Gdf. Compl.); 1671 lenteur d'esprit (Pomey); 2. 1674 (d'une chose) manque de rapidité dans l'accomplissement » (Racine, Iphigénie, V, 6); 1679 plur. « retard dans l'accomplissement d'une chose » (E. Fléchier, Oraison funèbre de M. de Lamoignon, éd. Paris, 1808, p. 119 : Combien de fois a-t'il essayé de bannir du palais ces lenteurs affectées... afin de faire durer des procès par les lois mêmes qu'on a faites pour les finir?). Dér. de lent*; suff. -eur1*; le lat. lentor signifie « flexibilité, souplesse; viscosité » (d'où l'empr. m. fr. lenteur « mollesse, viscosité » xvies. ds Hug.). Fréq. abs. littér. : 1 504. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 803, b) 1 952; xxes. : a) 2 176, b) 2 501.