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LARMOYANT, -ANTE, part. prés. et adj.
I. − Part. prés. de larmoyer*.
II. − Adj. Qui larmoie.
A. − Qui verse des larmes causées par une émotion, qui pleure facilement ou fréquemment. Il restait silencieux, contemplant la manche de sa soutane. À la fin, il se retourna vers Georgette, qui attendait, confuse et larmoyante : − Ma chère enfant, dit gravement le curé, sèche tes yeux et rassure-toi (Theuriet, Mar. Gérard,1875, p. 203).Cora n'avait pas faim non plus, émue, larmoyante, s'essuyant un œil de temps en temps avec un coin de sa serviette (Maupass., Contes et nouv., t. 1, Hérit., 1884, p. 487).La cuisinière larmoyante, préparait « quelque chose, parce que les frères de monsieur le comte ne pouvaient pas rester sans rien prendre ». Dans le petit salon, le vieil Urbain dit : − Pour l'enterrement, je ne peux pas recevoir tout ce monde-là à Mauglaive (Druon, Gdes fam., t. 1, 1948, p. 39).
[P. méton., en parlant des yeux]
Qui laissent échapper des larmes, qui sont remplis de larmes. Il trouve quelque chose approchant cette profondeur de sentiment compliqué, dans les yeux larmoyants des chiens qu'on fouette (Baudel., Poèmes prose,1867, p. 135).En vain Bertrand l'appelait, le priait, le suppliait, attachait sur lui le regard de ses beaux yeux larmoyants (France, Pt Pierre,1918, p. 209).
PATHOL. Atteints de larmoiement. Lorsque l'hémorragie par les narines est prête à se faire, les personnes ressentent un poids sur les yeux, qui sont rouges et larmoyans (Geoffroy, Méd. prat.,1800, p. 345).Sorti de l'écurie, le cheval a perdu sa gaîté et sa vigueur; (...) les yeux sont larmoyants; la bouche est chaude et sèche (Nocard, Leclainche, Mal. microb. animaux,1896, p. 434).
Avec une nuance péj.
[En parlant d'une pers., de ses mouvements affectifs, de son comportement] Qui pleure, qui pleurniche pour peu de chose, qui affecte une émotion feinte. Non, Michel, poursuit-elle d'une voix émue, dont l'expression mélancolique et presque larmoyante contrastait singulièrement avec les accès de gaieté où je venais de la voir (Nodier, Fée Miettes,1831, p. 91).Elle ne nous rencontrait jamais sans nous embrasser, en nous adressant, d'un ton à la fois larmoyant et enjoué, les épithètes les plus tendres (Sand, Hist. vie, t. 3, 1855, p. 143).Le père Jacques n'eut pas plutôt prononcé cette phrase de pitié et de protestation que les pleurs et les jérémiades des deux concierges recommencèrent. Je n'ai jamais vu de prévenus aussi larmoyants (G. Leroux, Myst. ch. jaune,1907, p. 56):
1. Je ne la saluai qu'en passant, de cet air affligé, presque niais, qui éloigne encore davantage de l'amant qu'on a quitté : la comparaison qui se fait naturellement alors de sa triste timidité, de son air larmoyant, à la gaîté, à l'enjouement, aux vives saillies d'un rival heureux, le fait paraître aussi ridicule que haïssable. Restif de La bret., M. Nicolas,1796, p. 176.
[En parlant d'une action, d'une attitude, de traits psychol.] Qui est empreint d'émotion, qui se lamente, qui manifeste de la peine. Synon. geignard, pleurard.Voix larmoyante. Assis sur la chaise, il rédigeait une ordonnance, pendant que la vieille femme parlait avec sa volubilité larmoyante (Zola, Page amour,1878, p. 826).Après deux mois de solitude larmoyante, l'inévitable réaction afflua. Je n'avais pas en vain frôlé de si près le mariage : j'éprouvai le besoin de sortir, d'agir, de vivre (Frapié, Maternelle,1904, p. 2).Je quittai sur le champ la maison et j'allai coucher rue Cujas. Ma mère m'écrit depuis des lettres larmoyantes auxquelles je ne réponds pas (Nizan, Conspir.,1938, p. 236):
2. Ce n'était qu'un petit homme d'allure fort peu démoniaque. On comprendra du moins que je n'ai, quant à moi, reconnu en son visage que de la bonté. C'était, il est vrai, une bonté non pas larmoyante et attendrie, mais malicieuse et active. Guéhenno, Journal homme 40 ans,1934, p. 69.
P. anal.
Qui est humide, parsemé de gouttes de liquide. Le long des haies larmoyantes, grises, sales comme d'immenses chrysalides qui se débarrassent petit à petit de leurs enveloppes, elle avait marché, elle avait couru, sans voir, sans savoir, d'une longue traite jusqu'à l'épuisement (Pergaud, De Goupil,1910, p. 101).Trois hommes de corvée, essoufflés, la face larmoyante de sueur, déposent par terre des bouteillons, un bidon à pétrole, deux seaux de toile et une brochette de boules traversées par un bâton (Barbusse, Feu,1916, p. 27).
Dont la forme rappelle celle des larmes. Ailleurs, elles [les termitières] offrent l'aspect d'énormes tas de boue (...) à moins qu'elles ne fassent penser aux larmoyantes concrétions calcaires de gigantesques stalagmites (Maeterl., Vie termites,1926, p. 34).
B. − Gén. avec une nuance péj. [En parlant d'une œuvre d'art, d'une production ou d'une représentation artistique] Qui cherche à attendrir, à provoquer l'émotion. Musique larmoyante. Vous devez avoir dans vos cartons un Requiem, une messe des morts, un De profundis, quelque chose de larmoyant (Augier, Pierre de touche,1854, pp. 26-27).La première représentation théâtrale à laquelle elle assista fut donc celle même où elle joua résolûment ce rôle larmoyant et difficile (Sand, Hist. vie, t. 1, 1855, p. 204).La plume renâcle à évoquer, fût-ce par quelques traits, l'épaisseur de niaiserie, de vulgarité, d'imbécillité et de bassesse de ce film comico-larmoyant, qui était un film français (Montherl., Démon bien,1937, p. 1295).
Littér. Comédie larmoyante. Genre dramatique du dix-huitième siècle, qui cherche à créer l'attendrissement. L'idéalisme vulgaire des dramaturges qui ont succédé à Victor Hugo a cherché la vraisemblance dans une couleur locale de convention qui fait pendant au naturalisme en trompe-l'œil des pièces de mœurs dont on trouverait l'origine bien avant Scribe, dans la comédie larmoyante de Nivelle de La Chaussée (Apoll., Tirésias,1918, p. 865).
[P. méton., en parlant d'un aut., d'un artiste] Qui produit une œuvre larmoyante. C'est un compositeur larmoyant, dont le nom équivaut à un drame (Jouy, Hermite, t. 4, 1813, p. 228).
Emploi subst. masc. sing. à valeur de neutre. Et me déplaît aussi le larmoyant dans Racine; si admirables que soient alors les vers (Gide, Journal,1946, p. 304).
Prononc. et Orth. : [laʀmwajɑ ̃], fém. [-ɑ ̃:t]. Att. ds Ac. dep. 1694. Fréq. abs. littér. : 150. Bbg. Quem. DDL t. 1.