| * Dans l'article "LAPIN, -INE,, subst." LAPIN, -INE, subst. A. − Mammifère rongeur très prolifique qui vit à l'état sauvage (lapin de garenne) ou dont on fait l'élevage (lapin de choux ou de clapier) pour la consommation de sa chair et diverses utilisations de sa peau. Lapin domestique. On n'entend que le trotte-menu du lapin dans les feuilles (Goncourt, Journal,1864, p. 92).Les fèves à cueillir, le séneçon et l'herbe de lait à arracher pour les lapins (Pourrat, Gaspard,1930, p. 15): 1. Je repris mon fusil, je déclarai de nouveau la guerre aux lapins, et, avant la fin de l'automne, j'étais si bien guéri de ma passion pour ma voisine, que je plaidai contre elle pour un droit de garenne.
Jouy, Hermite, t. 4, 1813, p. 178. 2. À côté de l'usine s'étalait la ferme, avec une basse-cour modèle et une grange immense où mon cousin Robert s'amusait à l'élevage d'une race particulière de lapins...
Gide, Si le grain,1924, p. 415. − Expressions ♦ Courir comme un lapin (fam.). Courir à toute vitesse ou s'enfuir à toutes jambes. Il tenait la ficelle des « urbaines », il a couru comme un lapin après les fiacres et les bagages, aussi longtemps qu'il a pu (Céline, Mort à crédit,1936, p. 66). ♦ Ne pas valoir un pet de lapin (pop.). Ne pas valoir grand chose. Et puis aussi, pour ce qui est des choses de la maison, ces femmes-là, d'ailleurs, c'est toujours comme ça − elle vaut pas un pet de lapin (Giono, Regain,1930, p. 210). ♦ Sentir le lapin (pop.). ,,Dégager de mauvaises odeurs corporelles`` (Rey-Chantr. Expr. 1979). − P. anal. ♦ Le coup du lapin (pop.). Coup mortel porté sur les vertèbres cervicales comme l'on fait pour tuer un lapin. On peut bien boire le coup de l'étrier, avant de recevoir le coup du lapin (Vallès, J. Vingtras, Insurgé, 1885, p. 341).Faire le coup du lapin. Attaquer par derrière, par traîtrise. (Ds Rey-Chantr. Expr. 1979). ♦ Pattes de lapin (vx). Favoris courts : 3. ... celui-là et M. François, son père, étaient les gloires bouffonnes de Dijon et le buste de l'un de ces deux grotesques, avec une physionomie d'huissier et des pattes de lapin, le long des joues, se dressait sur un socle, dans l'une des salles.
Huysmans, Oblat, t. 1, 1903, p. 292. ♦ Cage à lapins. Local exigu et de peu de confort : 4. Et pour la roulotte, non, merci. Coucher à cinq dans une cage à lapins, crever de faim les trois quarts du temps, n'avoir que des haillons sur le dos et tendre la main pour demander l'aumône, non et non.
Aymé, Cléramb.,1950, IV, 1, p. 192. B. − P. méton. 1. Chair comestible du lapin. Civet, pâté de lapin; lapin à la moutarde, en gibelotte. Ça explique pourquoi ils bouchent leur fenêtre, quand ils mangent un lapin. N'est-ce pas? On serait en droit de leur dire : « Puisque vous mangez un lapin, vous pouvez bien donner cent sous à votre mère ». Oh! ils ont du vice!... (Zola, Assommoir,1877, p. 564). ♦ Lapin de gouttière. Chat, par allusion aux civets de chat. (Ds Rey-Chantr. Expr. 1979). 2. Fourrure de peu de prix faite avec la peau du lapin. Ayant entr'ouvert son manteau tragiquement doublé d'antiques peaux de lapin, elle découvrit un petit livre écorné (France, Hist. comique,1903, p. 65). C. − [À propos d'un être humain] ♦ Un fameux, un vrai lapin. Homme brave, actif, résolu. Dépêchez-vous! Lagardy ne donnera qu'une seule représentation (...). C'est, à ce qu'on assure, un fameux lapin! Il roule sur l'or! il mène avec lui trois maîtresses et son cuisinier! (Flaub., MmeBovary, t. 2, 1857, p. 62). ♦ Un vieux lapin (pop. et vieilli). Un homme rusé, aux mille tours. Connais-tu la mère Chopin? Son mari qu'est un vieux lapin, Me disait en buvant la goutte, J'veux qu'le diable m'mette en déroute (J. A. Gardy, Jérôme Buteux et le père Chopin aux barricades, 3, 1830, (Gauthier et Vezard) ds Quem. DDL t. 19). ♦ Un chaud lapin (pop. et fam.). Un homme qui est porté sur les plaisirs sexuels. V. chaud B 2 c. ♦ Une mère lapine, une bonne lapine, une lapine. Femme prolifique. Elle tenait de la mère lapine primée aux comices agricoles et de l'idole hindoue (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 84). ♦ [En termes d'affection] Mon lapin, mon petit lapin. Margot avait éclaté en sanglots. Il lui cria : − Ne pleure pas, mon petit lapin (...). Laisse-moi faire (Courteline, Conv. Alceste, Margot, 1888, p. 78): 5. Devant tout le monde, ils [les maris] prodiguent à la façon romaine (columbella) à leurs femmes des surnoms pris au règne animal, et ils les appellent : − ma poule, − ma chatte, − mon rat, − mon petit lapin...
Balzac, Ptes mis.,1846, p. 144. ♦ Pop., vx. Voyageur qui montait en surcharge dans les voitures publiques. En lapin, voyager en lapin. Voyager en s'asseyant à côté du cocher. Les généraux? Nous n'avons pas de fonctionnaires plus soumis. Demandez à Clemenceau : il les fait monter en lapin, oui, à côté du cocher, en lapin sur son fiacre (Barrès, Déracinés,1897, p. 312). ♦ Arg. et vx. Lapin ferré ou simplement lapin. Cheval. Ceci sera pour toi, brave grenadier! s'écria le major en lui présentant une rivière de diamants, si tu veux me suivre et te battre comme un enragé. Les Russes sont à dix minutes de marche; ils ont des chevaux; nous allons marcher sur leur première batterie et ramener deux lapins (Balzac, Adieu,1830, p. 30). ♦ Expr. fam. Poser un lapin à qqn. Ne pas être au rendez-vous convenu : 6. − Vous vous rendez compte, lui expliqua le relieur, qu'il n'est pas question une seconde que vous me posiez un lapin. Vous vous dites qu'une fois sorti d'ici... oui... mais supposez que ce soir vous manquiez au rendez-vous. Hein? et que je veuille absolument vous retrouver?
Romains, Hommes bonne vol.,1932, p. 91. Rem. Dans la docum. l'emploi du mot en appos. avec valeur adj. est attesté : Voyez-moi triste dans ces mois de juillet, août et septembre, car ce ne peut pas être autrement. Mais vous devinerez quelle immense affection lapine et non canine, il y a sous cette tristesse (Balzac, Lettres Étr., t. 2, 1844, p. 390). REM. Lapinisme, subst. masc.Fécondité excessive comparable à celle du lapin. (Dict. xxes.). Prononc. et Orth. : [lapε
̃], fém. [-in]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. Ca 1450 « petit mammifère rongeur très prolifique » (Myst. Vieil Testament, éd. J. de Rothschild, 12202); spéc. loc. a) 1611 mémoire de lapin (Cotgr.); b) 1809 courir comme un lapin (P. Leclair, Médit. hussard, p. 125); c) 1850 le coup du lapin « coup derrière la nuque » (Dumas père, Chasse au chastre, II, 4, p. 216); 2. 1649 lapine (Scarron, Virgile travesti, III, 128b ds Richardson : Nos femelles vagabondes Autant que lapines fécondes). B. P. métaph. 1. 1718 brave comme un lapin (d'un homme bien habillé) (Le Roux, p. 292); 2. 1790 « homme gaillard » (Restif de La Bretonne, Le Palais-Royal d'apr. R. Dagneaud, Les él. pop. ds le lexique de la Comédie humaine d'H. de Balzac, p. 95); spéc. arg. milit. 1809 (P. Leclair, op. cit., VIII : Moi dans un hôpital! [...] Ils sont bons là, les lapins [les camarades hussards] Je ne suis pas malade); 3. a) 1858 (L. Larchey, Les excentricités du lang. fr. ds Revue anecdotique, t. 7, p. 566 : Dans l'argot du collège, on appelle aussi lapins des libertins en herbe); b) 1928 chaud lapin (M. Stéphane, Ceux du trimard, p. 204). C. 1. 1783 « voyageur pris en surnombre dans les voitures publiques » (d'apr. Esn.); 1876 « voyageur non sonné au compteur et dont le conducteur empoche les six sous » (ibid.); d'où prob. 2. 1878-79 faire cadeau d'un lapin (à une fille) « ne pas payer ses faveurs » (Gill, La Petite lune, no13, p. 3); 1881 poser un lapin « id. » (Rigaud, Dict. arg. mod., p. 308); 1888 id. (A. Daudet, Immortel, p. 46 : lui [d'Athis] n'attend que le décret de l'Officiel pour filer à l'anglaise et, après quinze ans d'un bonheur sans mélange, poser à la duchesse un de ces lapins!). Issu de lapereau* par changement de suff.; a remplacé connin*, qui se prêtait, dès le xiies., à des jeux de mots obscènes (Bl.-W.1-5). La création de l'expr. chaud lapin (B 3 b) a été favorisée par chaud de la pince, attesté dans le même sens dep. 1866, Delvau : v. G. Roques ds Mél. Baldinger, p. 588. Fréq. abs. littér. : 1232. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 991, b) 2015; xxes. : a) 2126, b) 2033. DÉR. Lapiner, verbe intrans.[Le suj. désigne une lapine] Mettre bas. (Dict. xixeet xxes.). − [lapine], (elle) lapine [lapin]. − 1resattest. a) 1732 lapinner « mettre bas » (en parlant de la lapine) (L. Liger, Nouvelle maison rustique, éd. 1736, t. 1, p. 784), b) 1907 arg. « accroître démesurément sa famille » (France); de lapine (lapin*), dés. -er. BBG. − Brüch (J.). Zwei ligurische Wörter... Z. für vergleichende Sprachforschung. 1914, t. 46, pp. 351-373. - Dauzat (A.). Notes étymol. Fr. mod. 1950, t. 18, pp. 1-3; 1951, t. 19, p. 28. - Hubschmied (J.). Bezeichnungen für « Kaninchen », « Höhle », « Steinplatte ». In : [Mélanges Jud (J.)]. Genève-Zürich, 1943, pp. 246-280. - Lenoble-Pinson (M.). Le Lang. de la chasse. Bruxelles, 1977, p. 21, 32, 150, 211, 224. - Quem. DDL t. 10, 13, 17, 19. - Roques (M.). Romania. 1943, t. 67, pp. 532-533. |