| LAMPION, subst. masc. A. − Petit récipient de terre, de fer blanc ou de verre épais dans lequel on mettait du suif ou de l'huile avec une mèche pour éclairer ou pour faire des illuminations. Cordon de lampions; allumer, éteindre les lampions; les lampions clignotent. Une espèce de lampion (...) dont la mèche nageait dans une graisse fétide, illuminait les parois lustrées de cet affreux séjour [le cachot] (Dumas père, Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 95): 1. Par moments, on aurait pu croire à quelque fête géante, à un monument cyclopéen illuminé, avec ses escaliers, ses rampes, ses fenêtres, ses frontons, ses terrasses, son monde de pierre dont les lignes de lampions traceraient en traits phosphorescents l'étrange et énorme architecture.
Zola, Page amour,1878, p. 973. ♦ Vieilli. ,,Vase de verre qu'on suspend au milieu des lampes d'église, entre le panache et le culot`` (Ac. 1798-1878, Littré). − P. anal. Cylindre, boule de papier de couleur translucide et plissé contenant une bougie allumée, utilisé en décorations fixes ou transporté par la foule lors des fêtes populaires. Jardins illuminés par des lampions. J'ai le cœur triste comme un lampion forain (Laforgue, Poés.,1887, p. 131).Il restait près de la porte, sous les lampions de papier rouge qui décoraient l'orchestre (Moselly, Terres lorr.,1907, p. 220).Un bataillon de jeunes hommes, en rangs serrés, brandissant des lampions, suivait la fanfare, au pas cadencé (Martin du G., Thib., Été 14, 1936, p. 170). − Des lampions! Air, polka des lampions ♦ [Lors des émeutes de 1827, des manifestations au xixes.] Cri de la foule pour obliger les occupants des appartements à se joindre aux manifestants en illuminant. Puis tous se mirent à chanter : « Des lampions! des lampions! » Plusieurs fenêtres ne s'éclairaient pas; des cailloux furent lancés dans leurs carreaux (Flaub., Éduc. sent., t. 2, 1869, p. 150). ♦ P. ext. Crier, scander un mot sur l'air des lampions. Un autre tambourinait plus fort contre la porte, sur la cadence des lampions, en criant : « La patronne! la patronne! » (Dorgelès, Croix bois,1919, p. 248).V. air3ex. 4. B. − [P. anal. de forme] Chapeau en lampion, et absol., lampion. Chapeau tricorne porté par des militaires, des cavaliers. Un La Rochelandier en casaque (...), avec un chapeau en lampion sur la tête (Sandeau, Sacs,1851, p. 14).Ensuite caracola un essaim de gentilshommes en frac bleu, coiffés du lampion à cocarde blanche (Adam, Enfant Aust.,1902, p. 167). − Fam. Chapeau de gala des écuyers de l'École d'Application de la Cavalerie de Saumur : 2. L'École [d'Équitation] entra, en bottes à l'écuyère, culotte de peau, habit brun à boutons d'or; coiffés du lampion gansé d'or, gantés de blanc, les cavaliers avaient à la main la cravache...
Morand, Fin de s.,1957, p. 25. C. − Arg. et pop. Synon. lampe (v. ce mot I A 3), estomac, gorge.Se mettre (qqc.) dans le lampion; s'en envoyer plein le lampion. Au bord de la lanc' quine, pictait un' colombuch[e], Qui s'en foutait plein le lampion (Marcus, Quinze fables,1947, p. 11). Prononc. et Orth. : [lɑ
̃pjɔ
̃]. Att. ds Ac. dep. 1718. Étymol. et Hist. 1. 1510 « lanterne de bateau » (Compte des dépenses faites pour la mise en état et le ravitaillement de quatre galères, par Pierre de Rollot, ms B 2551, Arch. Bouches-du-Rhône, fo166 ds J. Fennis, La Stolonomie, Amsterdam, 1978, p. 373); 2. 1750 « lanterne vénitienne » (Voltaire, Corresp., éd. Th. Besterman, t. 18, lettre 3610, p. 112); 3. 1826 « chapeau à trois cornes » ([Balzac], Petit dict. critique et anecdotique des enseignes de Paris, pp. 79-80 ds Quem. DDL t. 16). Empr. à l'ital.lampione « grosse lanterne » (xviies. ds Batt.), dér., à l'aide du suff. augm. -(i)one, de lampa « lampe », lui-même empr. au fr. lampe*. Fréq. abs. littér. : 162. Bbg. Chautard. Vie étrange arg. 1931, p. 448. - Hope 1971, p. 204. - Quem. DDL t. 2. |