| LACÉRER, verbe trans. A. − DR. ANC. Déchirer (un écrit, un livre) par autorité de justice. Les bulles furent lacérées publiquement devant le roi, en grand et public conseil (Barante, Hist. ducs Bourg., t. 3, 1821-24, p. 54): 1. À Paris, dans la cour du Palais, au pied du grand escalier, l'exécuteur de la Haute Justice lacérait et brûlait son livre « selon le cérémonial accoutumé ».
Guéhenno, Jean-Jacques,1952, p. 104. − [P. ext.] La parade d'exécution où son épée [de Dreyfus] fut brisée, ses galons lacérés, où il fut proclamé traître (Clemenceau, Vers réparation,1899, p. 420). B. − Déchirer, mettre en lambeaux. Lacérer des affiches. Des personnes mordues dont les vêtements n'avaient pas été visiblement troués ou lacérés par les crocs de l'animal (Pasteurds Travaux,1886, p. 404).Les griffes d'un chat qui lacéraient l'écorce d'un arbre (Colette, Mais. Cl.,1922, p. 129): 2. ... il lacéra et jeta au feu tous ses livres, et, s'armant d'une hache appendue en trophée, il mit en pièces, l'un après l'autre, les meubles qui garnissaient son logis.
Borel, Champavert,1833, p. 230. ♦ Emploi abs. Et il [un rapace] déchire, il lacère, il dévore avec une joie silencieuse et implacable (Pesquidoux, Chez nous,1923, p. 173). ♦ Emploi pronom. réfl. Nous chantons à table la prière des morts, nous nous lacérons avec des couteaux et nous buvons le sang de nos bras (Flaub., Tentation,1849, p. 271). − Au fig. Déchirer, meurtrir. Il convoquait chaque souvenir pour en faire la raison de son courage. Ils montaient en lui en le lacérant (Montherl., Songe,1922, p. 164): 3. Tant de fois lacéré,
Cœur en lambeau,
Tant de fois éclairé,
Lampe et flambeau.
Péguy, Quatrains,1914, p. 549. REM. 1. Lacérable, adj.,rare. Qui peut ou doit être lacéré. (Ds Littré, Lar. Lang. fr.). 2. Lacérateur, subst. masc.,rare. Personne qui lacère. « Idiot! » glapit Elzélina en faisant vivement face au lacérateur (Arnoux, Roi,1956, p. 42). 3. Lacéré, -ée, part. passé et adj.,bot. Qui présente des divisions irrégulières semblables à des déchirures. Feuilles lacérées. (Ds Littré, DG, Lar. Lang. fr.). Prononc. et Orth. : [laseʀe]. Ac. 1694, 1718 lacerer, ensuite -é-. Étymol. et Hist. Ca 1355 fig. part. passé L'estat distrait et laceré (Bersuire, Tite-Live, Richel. 20312 ter, fo48 rods Gdf.); 1509 inf. lacerer un corps chetif (O. de St Gelays, Eneide, fo113 rods Gdf. Compl.). Empr. au lat.lacerare « mettre en morceaux, déchirer, dévaster, gaspiller ». Fréq. abs. littér. : 51. Fréq. rel. littér. : 43. Bbg. Gohin 1903, p. 345. |