| LÉSION, subst. fém. A. − Atteinte portée aux intérêts matériels de quelqu'un, à quelqu'un dans ses intérêts. Synon. dommage, préjudice.J'ai ajouté encore la chance d'une lésion dans ma fortune, en le publiant [un manuscrit] à mes risques et périls (Las Cases, Ste-Hélène, t. 2, 1823, p. 239).Voilà, dans une seule branche de commerce, deux cent millions de lésion pour la France, en vols ou stagnation (Fourier, Nouv. monde industr.,1830, p. 64).Le crime n'est pas seulement la lésion d'intérêts même graves, c'est une offense contre une autorité en quelque sorte transcendante (Durkheim, Division trav.,1893, p. 52). − P. anal. Atteinte à quelque chose. Synon. violation.L'émotion musicale a pour base une lésion de la loi : l'irrégularité (Mathis-Lussy, Rythme mus.1911, p. iv, note 1). − DR. Préjudice subi par l'une des parties d'un contrat, qui donne plus qu'elle ne reçoit par suite d'une erreur d'appréciation ou sous la pression des circonstances. Montrez-moi en quoi il y a lésion, où est la lésion? (Ac.1798-1878).Il est inutile de prouver qu'il y eut, dans cette prétendue vente, lésion d'outre moitié du juste prix (Le Moniteur,t. 2, 1789, p. 370).Pour juger s'il y a eu lésion, on estime les objets suivant leur valeur à l'époque du partage (Code civil,1804, art. 890, p. 161). B. − MÉD. Altération pathologique d'une cellule, d'un tissu ou d'un organe dans ses caractères anatomiques ou physiologiques, due à des causes morbides ou traumatiques. Lésion dégénérative, inflammatoire, tumorale; lésion cardiaque, pulmonaire, rénale, vasculaire. Lésion organique du cœur, du poumon. Ce coup de feu lui a fait une lésion légère aux intestins (Ac.). Il était temps qu'il tuât la pieuvre. (...) son bras droit et son torse étaient violets; plus de deux cents tumeurs s'y ébauchaient; le sang jaillissait de quelques-unes ça et là. Le remède à ces lésions, c'est l'eau salée (Hugo, Travaill. mer,1866, p. 380).Là, l'épaule du blessé fut mise à nu, et le major reconnut que la balle, déchirant les chairs, n'avait produit aucune lésion interne (Verne, Enf. cap. Grant, t. 2, 1868, p. 221): 1. − « Je crois pouvoir établir votre diagnostic », dit-il enfin. « Lésion de l'os occipital. Plaie pénétrante et profonde. La balle est restée. Elle doit être logée dans le lobe occipital droit... »
Bourget, Sens mort,1915, p. 159. − [Avec un compl. indiquant la cause] Ils déterminent alors un prurit violent (...) et des lésions de grattage du clitoris et des lèvres (Brumpt, Parasitol.,1910, p. 359). − P. métaph. et au fig. Synon. de blessure.Quelles douleurs profondes, quelles lésions du cœur, désespoirs cachés, blessures brûlantes poussent au suicide ces gens qui sont heureux? (Maupass., Contes et nouv., t. 2, Suicides, 1883, p. 823).Il se découvrait une palpitation filiale ignorée et cet arrachement nouveau, après tant d'autres, lui parut une lésion énorme (Bloy, Désesp.,1886, p. 62): 2. Moi-même je me demande souvent (...) si je ne suis pas en train, même si je dois finalement survivre, de me faire des lésions de sensibilité dont je ne guérirai plus.
Romains, Hommes bonne vol.,1938, p. 206. REM. 1. Lésionnaire, adj.,dr. Qui a un caractère de lésion. Clause lésionnaire. Les causes et les formes des échanges faits depuis quinze ans seront vérifiées pour prononcer la nullité de ceux qui sont lésionaires [sic] pour le Roi et la Nation (Recueils textes hist., Cahiers de Doléances Nancy, 1789, p. 17). 2. Lésionnel, -elle, adj.,méd. a) Caractérisé ou causé par une/des lésion(s). Au lieu de voir là coïncidence ou association fortuite, il recherche la cause de cet ensemble lésionnel et se rend compte que ces lésions (...) correspondent en réalité à l'atteinte d'une même artère cérébrale (Ce que la Fr. a apporté à la méd.,1946, p. 271).Il a été ainsi conduit à distinguer une aphasie liée à un trouble de la compréhension, dite de Wernicke, dont l'origine lésionnelle n'est plus frontale mais pariéto-temporale (Bariéty, Coury, Hist. méd.,1963, p. 672).b) Qui se rapporte aux lésions. Localisation lésionnelle. Dans l'interprétation des résultats de la psychochirurgie, il convient de distinguer psychochirurgie lésionnelle et psychochirurgie fonctionnelle (Delay, Psychol. méd.,1953, p. 200).Comme il l'a fait pour la typhoïde, avec cette nouvelle preuve de la diphtérie, cet autodidacte proclame la spécificité des maladies : spécificité étiologique, spécificité lésionnelle, spécificité clinique (Bariéty, Coury, Hist. méd.,1963p. 612). Prononc. et Orth. : [lezjɔ
̃]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1175 « dommage » senz lesïon (Benoît de Ste-Maure, Chron., 9913 ds T.-L.); spéc. dr. 1261 « préjudice porté aux intérêts de qqn » (AN J 1124, pièce 2 ds Gdf. Compl.); 2. 1314 « atteinte à une partie de l'organisme » (Chir. de H. de Mondeville, éd. A. Bos, § 1712). Empr. au lat.laesio dr. « tort, dommage » et « lésion, blessure », rare av. l'époque imp., surtout en usage à basse époque (TTL, s.v.). Fréq. abs. littér. : 261. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 333, b) 341; xxes. : a) 374, b) 416. Bbg. Dub. Dér. 1962, p. 48 (s.v. lésionnel). |