| JOINDRE, verbe trans. I. − Mettre ensemble, mettre avec, réunir. A. − Vx. [Le compl. d'obj. dir. désigne une chose ou un ensemble de choses] Être contigu à. Vers l'est, le regard butait contre la barrière de cimes et de croupes qui joignait les Wahiti-Ranges, cette grande chaîne (Verne, Enf. cap. Grant, t. 3, 1868, p. 153).Le Dragon, sa femme, son beau-père, s'installeraient dans le moulin qui joignait le petit château, près de Brioude (Pourrat, Gaspard,1931, p. 54). B. − [Le compl. d'obj. dir. désigne deux ou plusieurs choses] 1. Placer des choses de telle façon qu'elles se touchent, qu'elles soient en contact. Joindre des pièces, des planches; joindre bout à bout. Le cadet (...) Employoit tout son art, toutes ses facultés, À joindre, à soutenir par les quatre côtés Un fragile château de cartes (Florian, Fables,1792, p. 56).À mesure que l'armée se développait, les capitaines, en haletant, couraient de droite et de gauche pour communiquer des ordres, faire joindre les files et maintenir les intervalles (Flaub., Salammbô, t. 1, 1863, p. 106): 1. La longue étoffe chamarrée était entre nous, pliée dans le sens de sa longueur, et ne formait déjà plus qu'une bande étroite dont chacun de nous tenait une extrémité. Nous nous rapprochâmes; il restait à joindre ensemble les deux bouts du châle.
Fromentin, Dominique,1863, p. 268. ♦ Emploi abs. L'esprit (...) découvre sans le moindre effort que le petit verbe être ne possède aucune vertu particulière, que sa fonction n'est que de joindre (Valéry, Variété IV,1938, p. 228). − Au fig. Sacrée grippe! Je me sens de mieux en mieux, et... pas capable de joindre deux idées ensemble... Ça colle au cerveau comme un caramel au palais (Bernanos, Crime,1935, p. 838). ♦ Loc. Joindre les deux bouts (v. bout I C 1). − Emploi pronom. ♦ La Moselle et le Rhin se joignent en silence C'est l'Europe qui prie nuit et jour à Coblence (Apoll., Alcools,1913, p. 152).Le front contre la vitre, il vit les ombres des tilleuls s'allonger, se joindre, remplir le gazon de nuit (Saint-Exup., Courr. Sud,1928, p. 67). ♦ Les deux aiguilles de la pendule étaient près de se joindre sur l'émail de la douzième heure (Sandeau, Mllede La Seiglière,1848, p. 171).Il s'est levé un peu de vent, très doux. Assez pour gêner le puzzle. Les morceaux se joignent pourtant (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 329). − Emploi intrans. Se toucher sans laisser d'intervalle. Planches qui joignent bien. Ces maisons ont pour parquet de petits bambous qui ne joignent point, et qui font assez ressembler ces cabanes à des cages d'oiseau (Voy. La Pérouse,t. 2, 1797, p. 336).Les verrous (...) avaient été tirés, et les battants ne joignaient que par leur poids; donc la fille de Pétamounoph s'était envolée par là (Gautier, Rom. momie,1858, p. 255). ♦ [P. méton.] Fenêtre qui joint mal. La porte joignait mal, et Gilbert dut y fixer, l'hiver, des bourrelets de papier (Arland, Ordre,1929, p. 121): 2. ... je gardais fermés le plus longtemps possible les grands rideaux violets (...). Mais comme, malgré les épingles avec lesquelles, pour que le jour ne passât pas, Françoise les attachait (...), malgré les couvertures, le dessus de table en cretonne rouge, les étoffes prises ici ou là qu'elle y ajustait, elle n'arrivait pas à les faire joindre exactement, l'obscurité n'était pas complète...
Proust, J. filles en fleurs,1918, p. 953. 2. En partic. [Le compl. d'obj. dir. désigne deux parties symétriques du corps hum.] Rapprocher. Joindre les genoux, les mâchoires. Sa bouche d'enfant qui se gonflait comme une fraise mûre lorsqu'elle joignait les lèvres (Martin du G., Thib., Été 14, 1936, p. 25).Seule comptait la terrible inquiétude qui la suppliciait depuis une semaine. Elle joignit les doigts et soupira douloureusement (Green, Journal,1939, p. 249). ♦ Emploi pronom. réciproque. Félicien se sentit pâlir; l'impression lui vint (...) de deux bras qui se joignaient, languissants, autour de son cou (Villiers de L'I.-A., Contes cruels,1883, p. 314). − Joindre les mains. Approcher les mains l'une de l'autre de manière que les paumes soient en contact et que les doigts se touchent dans leur longueur ou se croisent et se referment sur les phalanges. Valentine joignait les mains comme si elle eût été en prière (Dumas père, Monte-Cristo, t. 2, 1846, p. 231).Elle joignit les mains de ravissement (Zola, Nana,1880, p. 1236). ♦ Emploi pronom. réciproque [Le suj. évoque une seule pers.] On imagine la lampe et les papiers sur la table, les mains lâchant la plume d'oie pour se joindre (Green, Journal,1943, p. 38).[Le suj. évoque deux pers.] Veux-tu que nous nous serrions la main? Cette fois, c'est moi qui te le demande. D'un même geste, ils arrachèrent leurs gants et leurs mains se joignirent (Green, Moïra,1950, p. 245). − Joindre les pieds. Approcher les pieds l'un de l'autre de manière qu'ils se touchent dans leur longueur. (Dict. xixeet xxes.). ♦ Loc. Sauter à pieds joints (v. joint adj. II A 2). − Joindre les talons. Approcher les pieds l'un de l'autre de manière que les talons se touchent, la pointe des pieds tournée en dehors. Des soldats s'arrêtent brusquement, joignent les talons et saluent un officier qui passe (Larbaud, Barnabooth,1913, p. 332). 3. Assembler des choses de telle façon qu'elles soient maintenues ensemble. Joindre des pièces de bois avec de la colle, des chevilles; joindre des bandes de tissu par une couture; joindre des tôles par des rivets; joindre solidement. Mon doigt sur mon manteau lui dévoile à l'instant La couture invisible et qui va serpentant, Pour joindre à mon étoffe une pourpre étrangère (Chénier, Épîtres,1794, p. 205): 3. Peut-être une dalle habilement dissimulée, et dont la poudre répandue sur le sol empêche de voir le joint, recouvre-t-elle une descente qui mène (...) à la salle funèbre. − Vous avez raison (...); ces damnés Égyptiens joignent les pierres comme les charnières d'une trappe anglaise : cherchons encore.
Gautier, Rom. momie,1858, p. 170. − P. anal. Leclerc avait d'abord écrit Virgile; mais, sur l'observation qui lui fut faite, il écrivit Delille au-dessous, et joignit les deux noms par une même accolade (Jouy, Hermite, t. 3, 1813, p. 267). ♦ Emploi pronom. à sens passif. Le directeur attend. Tous ses plis du cou se joignent pour ne former qu'un bourrelet unique, un épais rond de cuir, où siège, de guingois, sa tête (Renard, Poil Carotte,1894, p. 141). − En partic., emploi pronom. réciproque. [En parlant de deux animaux ou de deux pers.] S'accoupler. Il ne saurait y avoir de passion suivie entre deux êtres qui se joignent sans s'être jamais vus, et, dans un moment vont se séparer pour ne plus se reconnaître (Laclos, Éduc. femmes,1803, p. 441): 4. Mais tous les livres ne valant pas une observation personnelle, ils entraient dans les cours et demandaient aux laboureurs s'ils avaient vu des taureaux se joindre à des juments, les cochons rechercher les vaches, et les mâles des perdrix commettre entre eux des turpitudes.
Flaub., Bouvard, t. 1, 1880, p. 81. − Au fig. [Le compl. d'obj. dir. désigne deux ou plusieurs pers.] Unir par un lien moral. Joindre deux personnes par les liens du mariage. ♦ Emploi pronom. réciproque. Ces deux familles se sont jointes par plusieurs alliances (Ac.1835-1935) : 5. ...le docteur Blanche me parlait − avec un certain émoi, devant cette loi de nature féroce − du courant électrique qui pousse les gens des familles où il y a des aliénés à se réunir, à se joindre, à se marier; et sans me nommer les gens, il me citait des multitudes de cas venus à sa connaissance comme médecin aliéniste.
Goncourt, Journal,1892, p. 271. 4. Joindre deux choses, joindre qqc. à qqc. Faire communiquer, relier. Le canal du Languedoc joint la mer Méditerranée à l'océan Atlantique (DG). Un corridor capitonné. Hermétiquement fermé, ne laissant filtrer, ni odeur, ni bruit, dans chacune des deux pièces qu'il servait à joindre (Huysmans, À rebours,1884, p. 26).Un petit mur qui joignait le hangar au portail et dont la crête arrondie permettait de se mettre commodément à cheval (Alain-Fournier, Meaulnes,1913, p. 128): 6. Limite du roc et de la mer, la ville, édifiée sur l'une, accrochée à l'autre, est un croissant dans lequel cette rue, coupée perpendiculairement par toutes les rampes qui joignent le quai au pic, dessine en creux une grande palme.
Malraux, Conquér.,1928, p. 31. − Emploi pronom. réfl. Cette rivière va se joindre à telle autre en tel endroit (Ac.1835-1935). − Au fig. Les parties qui joignent certains dialogues me paraissent un peu ternes. Mais peut-être vaut-il mieux qu'elles ne viennent pas trop en avant (Gide, Journal,1924, p. 790). C. − P. ext. 1. [Le compl. d'obj. dir. désigne deux ou plusieurs choses] Mettre ensemble, réunir des choses d'une égale importance pour former un tout. Il a joint ces deux jardins (Ac.1835-1935). − Au fig. Joindre des bonnes volontés. Ils résolurent de joindre leurs forces, de joindre leurs armes (Ac.). Au moment où nous devrions tous joindre nos efforts pour assurer à la France le bénéfice moral de cette guerre (Montherl., Exil,1929, II, 4, p. 60): 7. Mon bon Villiers, Une lettre entre nous deux est une mélodie banale que nous laissons aller au hasard (...). Je crois, du reste, que nous avons ce talent de ne savoir joindre deux mots que quand nous écrivons un poème...
Mallarmé, Corresp.,1865, p. 192. − DR. Joindre deux instances, deux causes. Les juger en même temps (cf. jonction I A). (Dict. xixeet xxes.). Joindre un incident à l'instance principale (Littré). Joindre le profit du défaut. ,,Joindre la cause du défaillant à celle des défendeurs présents, pour statuer sur le tout ensemble`` (DG). 2. Joindre à a) [Le compl. d'obj. dir. et le compl. d'obj. indir. désignent deux choses] Ajouter une chose à une autre, l'une apportant un complément à l'autre. On pourra joindre à chacun de ces exemplaires, non pas un fac simile, mais quelques lignes de l'écriture véritable de Napoléon, dont j'ai une certaine quantité en mes mains (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 836).Je joins à ma lettre un mandat sur la maison Des Grassins de huit mille francs à votre ordre, et payable en or (Balzac, E. Grandet,1834, p. 242): 8. Si jamais les Bourbons remontent sur le trône, je ne leur demanderai, en récompense de ma fidélité, que de me rendre assez riche pour joindre à mon héritage la lisière des bois qui l'environnent : l'ambition m'est venue; je voudrais accroître ma promenade de quelques arpents...
Chateaubr., Mém., t. 1, 1848, p. 14. SYNT. Joindre un jardin à sa maison, une province à un pays; joindre une pièce à un dossier, une table des matières à un ouvrage; joindre une prime à un salaire, des intérêts au capital. ♦ Emploi pronom. à sens passif. À ces symptômes essentiels se joignent d'autres troubles spasmodiques : aérophagie, oppression et suffocation respiratoires, colique (Mounier, Traité caract.,1946, p. 233). − GRAMM., vx. Joindre à, avec.[Le compl. d'obj. dir. et le compl. d'obj. indir. désignent deux mots] Placer l'un à côté de l'autre en unissant par un rapport syntaxique. Joindre un mot à un autre, avec un autre. On joint quelquefois ce verbe, ou ce verbe se joint quelquefois au pronom personnel, avec le pronom personnel (Ac.1835, 1878). b) Au fig. Joindre son témoignage, ses prières à celui, celles de qqn; joindre l'utile à l'agréable. La magie vient de la parole; il faut joindre naturellement à la parole les gestes et les mouvements du visage, qui contribuent à la rendre expressive (Alain, Propos,1913, p. 158).J'ai tenu à vous envoyer toutes mes congratulations auxquelles je joins, mon cher confrère, l'expression de mes sentiments les plus distingués (Proust, J. filles en fleurs,1918, p. 912).J'ai tenu à vous transmettre la requête moi-même, car il m'est ainsi possible d'y joindre un conseil (Bernanos, Joie,1929, p. 694): 9. ... ses convictions d'ailleurs s'accordaient toujours avec ses intérêts. Il eût été incapable de trouver des torts à celui qu'il aimait. C'est par là qu'il arrivait à joindre l'agrément de relations douteuses à la satisfaction de s'élever contre les mauvaises fréquentations.
Barrès, Jard. Bérén.,1891, p. 149. ♦ Emploi pronom. à sens passif. À ces premières difficultés vint se joindre une difficulté plus grave encore (Ac.1835-1935). − [En parlant de caractères intellectuels, moraux ou physiques] Unir en soi, allier. Joindre la force à la beauté. Mûri par une longue expérience, il joignait à une prudence rare, cette fermeté de caractère qui est le partage d'une ame forte (Voy. La Pérouse,t. 1, 1797, p. xlix).Auguste Comte eut le privilège de joindre à une science éprouvée une culture profonde (Alain, Propos,1922, p. 379).J'étais catholique et protestant, je joignais l'esprit critique à l'esprit de soumission (Sartre, Mots,1964, p. 81): 10. Comme il faisait des visites assez régulières au Louvre, à Carnavalet, à Cluny, il joignait à son habileté manuelle et à sa connaissance des procédés, qui étaient grandes, une érudition étendue...
Romains, Hommes bonne vol.,1932, p. 291. Rem. On relève d'autres constr. : joindre la prudence et la valeur, à la valeur, avec la valeur (Ac. 1835-1935). ♦ Emploi pronom. à sens passif. Jamais à la beauté ne se joignit un charme aussi irrésistible que celui qu'on éprouvoit en regardant Suzette (Fiévée, Dot Suzette,1798, p. 44).À la pudeur exquise que respirait tout son extérieur se joignait un air triste, résigné, discret (Renan, Souv. enfance,1883, p. 33). − Joins, joignez, qu'on joigne (à ça, à cela) + subst./que + prop.La seigneurie déclarait ne devoir au peuple qu'une chose, le pain à bon marché. Joignez à cela le carnaval de cinq mois, et Juvénal pourra dire : panem et circenses (Hugo, Rhin,1842, p. 467).Joins à ça que mes maux de dents me reprennent de plus belle (Flaub., Corresp.,1843, p. 143).Joignez qu'en dépit de sa gaieté naturelle M. de Maupassant (...) affecte une morosité, une misanthropie qui communique à plusieurs de ses récits une saveur âpre à l'excès (Lemaitre, Contemp.,1885, p. 295): 11. Qu'on joigne à cela notre isolement du reste de l'univers, les privations physiques, les mauvais procédés moraux, il en résultera qu'assurément les prisons d'Europe sont beaucoup préférables à la liberté de Sainte-Hélène.
Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 453. c) Se joindre à.[Le suj. et le pron. réfl. désignent une pers.; le compl. d'obj. indir. désigne une pers. ou un ensemble de pers.] S'associer, s'unir à. Se joindre à un parti, à une équipe. Ce corps d'armée est allé se joindre à tel autre (Ac.1835-1935).Le procureur du roi refusa obstinément de se joindre à la partie plaignante (Barante, Hist. ducs Bourg., t. 3, 1821-24, p. 88).Comme on coupait la rue Neuve-des-petits-Champs, Robineau accourut se joindre au cortège, très pâle, l'air vieilli (Zola, Bonh. dames,1883, p. 742).Mon cher Honoré, Hélène et les enfants se joignent à moi pour t'envoyer, ainsi qu'à ta famille, nos sentiments d'affection (Aymé, Jument,1933, p. 95): 12. ... Herbaud (...) partait le lendemain rejoindre sa femme à Bagnoles-de-l'Orne; à son retour, dans une dizaine de jours, il préparerait l'oral du concours avec Sartre et Nizan qui m'invitaient cordialement à me joindre à eux.
Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 330. ♦ [En parlant d'animaux] Il est arrivé (...) que des apiculteurs, pour diverses raisons, ont empêché la reine de se joindre à l'essaim en la retenant dans la ruche (Maeterl., Vie abeilles,1901, p. 78). − [P. méton., ] [le compl. d'obj. indir. désigne une activité exercée par des pers.] Participer, prendre part à. Se joindre à un débat, à une discussion. Une conversation sur les mérites comparatifs des maisons closes parisiennes s'ensuivit sans que je prisse la peine de m'y joindre (Céline, Voyage,1932, p. 268): 13. Après avoir parlé avec circonspection des affaires du temps, ces messieurs s'attaquèrent de plaisanteries (...); on dit quelques bons contes, on chanta; je m'y joignis par quelques couplets inédits...
Brillat-Sav., Physiol. goût,1825, p. 378. II. − Atteindre, rejoindre. A. − [Le compl. d'obj. dir. désigne une ou plusieurs pers.] 1. Vx. Joindre qqn.Se rendre auprès de quelqu'un, le retrouver. Si ce projet ne vous convient pas, je suis toujours décidée à vous aller joindre dans le mois de février (Staël, Lettres L. de Narbonne,1792, p. 21).Le hasard l'a conduit à Francfort où je l'ai rencontré; il part pour Dusseldorf, pour y joindre sa mère (Sénac de Meilhan, Émigré,1797, p. 1682). 2. Parvenir à rattraper, atteindre. Quoiqu'il fût parti avant moi, je le joignis bientôt (Ac.1835-1935).J'allais voir votre ami tantôt. J'étais encore À vingt pas de chez lui... quand je le vois de loin, Qui sort. Je veux le joindre. Il va tourner le coin De la rue... Et je cours (Rostand, Cyrano,1898, V, 3, p. 209): 14. Éperdue, elle courut vers le lit pour se cacher sous les rideaux. La retraite était dangereuse. Il l'y suivit. Mais comme il voulait la joindre et qu'il se hâtait, son sabre, détaché trop vite, tomba sur le parquet avec un bruit retentissant.
Maupass., Contes et nouv., t. 2, Mal d'André, 1883, p. 384. ♦ Emploi pronom. réciproque : 15. Ah!... Madame Vigneron, viens que je te glisse un mot à l'oreille. (MmeVigneron se lève, ils se joignent [it. ds le texte] sur le devant de la scène.) Alors, c'est bien convenu, c'est décidé, nous donnons notre fille à ce freluquet?
Becque, Corbeaux,1882, I, 1, p. 58. − Lang. milit. ♦ Vx. Rejoindre. Joindre son corps, son unité. Au retour de mon voyage je joignis l'armée des princes, et j'appris pendant la campagne qu'un oncle et un de mes cousins (...) avaient été massacrés (Sénac de Meilhan, Émigré,1797, p. 1597).Mon fils sortant de l'École royale de Saumur pour aller joindre son régiment à Sedan est arrivé à Paris le 8 avril et reparti le 8 mai (Maine de Biran, Journal,1820, p. 271).P. anal. [En parlant de certains animaux qui vivent en compagnie] :
16. ... lorsque au temps du rut les solitaires abandonnent leurs gîtes ou « bauges » pour poursuivre les laies, leur humeur croît encore en brutalité. Ils joignent les compagnies que leur odeur décèle ou leur piétinement, ils choisissent une femelle, et la détournent d'un coup de boutoir du troupeau.
Pesquidoux, Chez nous,1923, p. 3. ♦ Effectuer une liaison avec. L'escadre de tel chef a joint l'armée navale (Ac. 1835, 1878) : 17. ... le roi va se rendre à Compiègne où l'on prépare les appartements pour le recevoir; de Compiègne à Toul ou à Metz, la route peut se faire incognito; qui l'empêchera d'aller joindre l'armée autrichienne et les troupes de ligne qui lui sont restées fidèles?
Marat, Pamphlets, C'en est fait de nous, 1790, p. 207. 3. Entrer en relation avec. Joindre qqn par téléphone. J'ai pu joindre mon ami Scheurer-Kestner que je n'avais pas vu depuis plusieurs mois, et qui jamais ne m'avait parlé de Dreyfus (Clemenceau, Iniquité,1899, p. 6).Je veux (...) joindre Roger Cornaz (on ne répondait pas aujourd'hui de chez lui au téléphone; j'espère bien qu'il est à Paris) (Du Bos, Journal,1925, p. 261): 18. ... la veille, elle avait trouvé chez elle une seconde dépêche de Jérôme : Médecin déclare Noémie perdue. Ne puis rester seul. Vous supplie venir. Si possible apportez argent. Elle n'avait pu joindre Daniel avant le train du soir. Mais elle lui avait laissé un mot, pour l'avertir qu'elle partait...
Martin du G., Thib., Belle sais., 1923, p. 933. B. − [Le compl. d'obj. dir. désigne un endroit] Parvenir à. Le paysage roux, l'homme qui monte son petit sentier pour joindre sa petite maison, qui jette une petite fumée derrière le grand paysage (Michelet, Journal,1845, p. 625).Nous avions à remonter le Nil durant quarante-six kilomètres pour joindre sur la rive gauche le village de Bedreschin (Barrès, Cahiers, t. 6, 1907, p. 176).Ils se félicitaient de joindre le lieu du rendez-vous à l'heure exacte (Romains, Copains,1913, p. 157). Prononc. et Orth. : [ʒwε
̃:dʀ
̥]. Conjug. : (il) joint [ʒwε
̃], (il) joignait [ʒwaɳ
ε], (il) joignit [ʒwaɳi], (il) joindra [ʒwε
̃dʀa], (il) joindrait [ʒwε
̃dʀ
ε], (qu'il) joigne [ʒwaɳ], (qu'il) joignît [ʒwaɳi], joignant [ʒwaɳ
ɑ
̃], joint [ʒwε
̃], fém. [-ε
̃:t]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. « réunir » 1. a) « rapprocher deux éléments de manière à ce qu'ils se touchent » ca 1100 attitude de prière (Roland, éd. J. Bédier, 2015 : Cuntre le ciel ambesdous ses mains juintes); id. cérémonial de l'hommage (ibid., 223 : Qu'il devendrat jointes ses mains tis hom); ca 1170 salt joinz piez (Marie de France, Lais, Equitan, 295, éd. J. Rychner, p. 42); b) ca 1135 joindre [aucune rien a aucune rien] « faire qu'une chose en touche une autre, lui soit contiguë » (Couronnement de Louis, 77 ds T.-L.); xives. géogr. « relier, faire communiquer » (Cons. de Boèce, ms. Montpellier H 43, fol. 15 c ds Gdf. Compl.); 1580 (Montaigne, Essais, L. I, XXXI, éd. A. Thibaudet et M. Rat, p. 201); c) ca 1135 part. passé fém. subst. « articulation (d'un membre) » (Couronnement de Louis, 596 ds T.-L.); 1176-81 joindre a « (d'une chose) être lié, relié, toucher à » (Chrétien de Troyes, Charrette, éd. W. Fœrster, 1177 : La ou l'espaule au col li joint); spéc. fin xiies. cont. géogr. empl. absol. (Mainet, III, 49 ds T.-L. : un mont agu, où joignent quatre vaus); ca 1213 part. prés. adj. « tout proche » (Faits des Romains, éd. L.-F. Flutre, 398, 10); 1277 joignant prép. « tout près de » (doc. ds Gdf. Compl.); 1283 adv. (Philippe de Beaumanoir, Beauvaisis, éd. A. Salmon, § 708); 2. ca 1160 « relier, réunir, assujettir en joignant » (Eneas, 7652 ds T.-L.); spéc. a) 1160-74 « assujettir au joug, atteler (deux bœufs) » (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, III, 11138); 1328 part. passé subst. « joug » (Dit des Outils de l'Hôtel, éd. G. Raynaud, 122, var. ms. B); b) les joings de la pierre (doc. ds Gdf. Compl.); 3. fig. a) 1176-81 pronom. « tenir, être attaché à, se serrer contre » (Chrétien de Troyes, Lion, éd. M. Roques, 2646); 1erquart xiiies. « lier, attacher, unir à (un sentiment, une inclination) » (Reclus de Molliens, Carité, 35, 11 ds T.-L. : a pitié joins); 1269-78 (Jean de Meun, Rose, éd. F. Lecoy, 4557 : Ainsinc leur queurs ensanble joingnent); b) 1606 dr. deux proces joincts ensemble (Nicot); 4. a) ca 1200 « dire en outre, ajouter (dans le discours) » (Dialogues de S. Grégoire, 45, 18 ds T.-L.); b) 1678 « associer, ajouter (une chose à une autre) » (Patru, 1erplaidoyer ds Rich. 1680 : Il joignit le Généralat à la Vice Roiauté); 5. xives. pronom. « s'accoupler (d'oiseaux) » (Moamin et Ghatrif, I, 7, 2 ds T.-L.); 6. mil. xves. id. « s'associer, se réunir (avec quelqu'un) » (Jean Chartier, Chron. de Ch. VII, CCXVIII ds Gdf. Compl.); fin xves. (Philippe de Commynes, Mém., éd. J. Calmette, t. 3, p. 238). B. « atteindre » ca 1100 intrans. « se rencontrer (avec une intention hostile), s'affronter (au combat) » (Roland, éd. citée, 923); 1174-77 pronom. « aller à la rencontre de, aborder » (Renart, éd. M. Roques, 5918). Du lat. class. jungere « lier, unir, assembler, attacher », spéc. « atteler; réunir ensemble (des terres) [au passif « être contigu à »]; faire, former, construire en joignant », fig. « attacher, lier d'un lien moral, associer une chose à une autre; réunir (deux qualités); lier les mots dans une phrase » [« ajouter (en parlant) » étant rendu par subjungere]. Fréq. abs. littér. : 3 414. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 7 988, b) 3 834; xxes. : a) 3 406, b) 3 594. |