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INGLORIEUX, -EUSE, adj.
A. − Littér. Qui ne donne, ne procure pas de gloire; sans gloire. Combat inglorieux; servitude, victoire inglorieuse. Trop heureux de cacher dans un asile sûr, Mes jours inglorieux et mon destin obscur (Delille, Trois règnes nature,1808, p. 123).La race choisie et délivrée s'avance du rivage vers Chanaan à travers l'inhabité désert; elle ne prend pas le chemin le plus court de peur qu'en entrant chez les Chananéens alarmés, la guerre ne l'effraie (...) et que la crainte ne la fasse retourner en Égypte, préférant une vie inglorieuse dans la servitude (Chateaubr., Paradis perdu,1836, p. 463):
... je tombe dans cette eau stygienne épaisse et noire comme encre, verdie de plantes visqueuses, fourmillante de grenouilles et de crapauds et je m'y enfonce en la vase jusque par-dessus la tête, mort inglorieuse, tombeau fétide, fin du tout misérable et sans profit aucun, car je n'aurai navré nul ennemi. Gautier, Fracasse,1863, p. 411.
[P. méton., en parlant d'un lieu] Où se sont déroulés des événements sans gloire. Rambouillet, retraite inglorieuse où s'éclipsa ce qu'il y eut de plus grand, en race et en homme; lieu fatal où mourut François Ier; où Henri III, échappé des barricades, coucha tout botté en passant; où Louis XVI a laissé son ombre! (Chateaubr., Mém., t. 2, 1848, p. 634).
B. − [En parlant d'une pers.] Qui n'a pas (acquis) de gloire. Il a existé bien des génies beaucoup plus grands que Milton, qui sont restés volontairement « muets et inglorieux » (Baudel., Nouv. Hist. extr., trad. d'E. Poe, 1857, p. 499).La distribution des prix arrive. J'y assiste obscur et inglorieux! (Vallès, J. Vingtras, Enf., 1879, p. 330).
REM.
Inglorieusement, adv.D'une manière inglorieuse. Assumer inglorieusement une besogne, perdre inglorieusement la vie. Le ministre de la guerre, sans scrupules, a profité des scrupules des autres, pour les faire frapper inglorieusement par derrière (Clemenceau, Iniquité,1899, p. 134).M. Caumont, le visage bourgeonné, étalait trois mentons sur le devant de sa tunique qui, ne pouvant pas se boutonner, s'ouvrait inglorieusement sur le ventre (France, Pt Pierre,1918, p. 83).
Prononc. : [ε ̃glɔ ʀjø], fém. [-ø:z]. Étymol. et Hist. 1. xives. « qui n'a aucune gloire » (Grandes Chroniques de France, éd. J. Viard, t. 8, p. 195, cf. Gdf.), rare av. le xviiies.; 1781 (Mercier, Le Philosophe du Port au blé ds Mercier Néol.); 2. 1832 « qui ne procure aucune gloire » (Raymond). Empr. une 1 refois au lat. ingloriosus « sans gloire ». À la fin du xviiies., prob. dér. de glorieux*; préf. in-1*; cf. aussi l'angl. inglorious (depuis le xvies. aux sens 1 et 2 ds NED), cité par S. Mercier, loc. cit. et les ex. de Chateaubr. (Paradis perdu, 1836, p. 55, 181, 197, 463) et de Baudel. (Nouv. Hist. extr., 1857, p. 499) dans des trad. d'ouvrages anglais. Bbg. Jourjon (A.). Rem. lexicogr. R. Philol. fr. 1917-18, t. 30, pp. 139-140 (s.v. inglorieusement). - Quem. DDL t. 18.