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INDISTINCT, -INCTE, adj.
A. − Qu'il est impossible de distinguer, qui est confondu ou se confond avec d'autres êtres ou d'autres choses. Il poussait près de la mer une plante qui portait sur ses fleurs des papillons toujours posés. Les papillons étaient indistincts des pétales, la fleur en paraissait ailée (Gide, Voy. Urien,1893, p. 30).Il est déjà quatre heures. La brume tombe vite. On devient indistincts les uns aux autres (Barbusse, Feu,1916, p. 181):
... elle retourna brusquement la tête, et entrevit une forme humaine dans le brouillard; cette indistincte vision lui suffit, elle chancela un moment sous le poids de la terreur dont elle fut accablée, car elle ne douta plus alors qu'elle n'eût été escortée par l'inconnu depuis le premier pas qu'elle avait fait hors de chez elle... Balzac, Épis. Terr.,1830, p. 430.
− [En parlant d'un son, d'un bruit] Injure, parole, protestation indistincte; marmottement, mot, murmure indistinct; beuglement sourd et indistinct. On n'entendait que des voix confuses et indistinctes (Ac.) Un son sortit de sa bouche, un son indistinct, un murmure plaintif (Maupass., Contes et nouv., t. 2, Peur, 1882, p. 803).Toute la nuit, à partir de dix heures, la lointaine canonnade a fait trembler le sol dans un indistinct grondement continu (Gide, Journal,1943, p. 230).Les voix indistinctes s'emmêlaient, faisaient à mes oreilles le bruit même, indéfiniment repris et défait, de la marée (Gracq, Syrtes,1951, p. 106).
♦ Emploi subst. masc. sing. à valeur de neutre. La conversation baissa de timbre, atteignit l'indistinct, ne fut plus qu'un murmure de stupeur, de crainte et de pressentiment (Malègue, Augustin, t. 1, 1933, p. 111).
B. − Au fig. [En parlant d'un inanimé abstr.]
1. Qui n'est pas nettement défini; confus, vague. Bonheur, désir, malheur, sentiment indistinct; ambition, notion indistincte. Elle ne pouvait s'empêcher de tressaillir, frappée par de sinistres pensées, mais indistinctes comme l'est un pressentiment de malheur (Balzac, Langeais,1834, p. 290).Ivre d'amour, de pitié, d'un indistinct mélange d'enthousiasme, d'abnégation, de vertu, j'en appelais à Dieu de toutes mes forces (Gide, Porte étr.,1909, p. 504).
2. Qui n'est pas nettement séparé, différent d'autre chose. Par le détail des rites qui la constituent, cette longue fête (...) est (...) indistincte de l'Intichiuma ordinaire des Warramunga (Durkheim, Formes élém. vie relig.,1912, p. 539).L'activité intellectuelle est, à la fois, distincte et indistincte du flot mouvant de nos autres états de conscience. Elle est un mode d'être de nous-mêmes, et change avec nous (Carrel, L'Homme,1935, p. 148).
3. Qui ne fait pas de distinction, de différence. Il était de notoriété que la grâce de son accueil était indistincte pour tous (Villiers de L'I.-A., Contes cruels,1883, p. 261).
REM.
Indistinguable, adj.,synon. Var. indistingable. Les perceptions (...) se trouvent ensemble dans une même âme en même temps, enveloppant une multitude véritablement infinie de petits sentiments indistinguables (Cournot, Fond. connaiss.,1851, p. 586).C'est la ville aisée, aux rues sans âme, sans commerce, aux rues indistingables, blanches, pareilles, toujours recommencées (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 191).
Prononc. et Orth. : [ε ̃distε ̃(:kt)], fém. [-ε ̃:kt]. Masc. de forme [-distε ̃:k] ds Fér. Crit. t. 2 1787, Gattel 1841. Martinet-Walter 1973 : [-distε ̃]/[-distε ̃:kt] (11/5). Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. [Cf. le dér. indistinctement 1495] 1549 (Est.); 1606 (Nicot); 1680 idée indistincte (Rich.); av. 1788 vision indistincte (Buffon, Hist. nat., homme, Œuvr., t. IV, p. 467 ds Littré). Empr. au lat.indistinctus « qui n'est pas distingué, indistinct; confus, obscur ». Fréq. abs. littér. : 415. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 149, b) 531; xxes. : a) 791, b) 876.